-

Le partage de savoirs et savoir-faire « sans gluten » sur Internet

13 Sep, 2020

Résumé

À partir d’une typologie descriptive de sites web français et allemands, portant sur les régimes sans gluten, l’article se propose d’analyser leurs contenus et leur agencement. Le recours à une pluralité de sources de savoirs et de savoir-faire (via des articles de vulgarisation, des récits d’expériences personnelles et des discours visant la promotion d’aliments et d’initiatives) apparaît comme une caractéristique essentielle de leur mode de communication. Par le biais de dispositifs argumentatifs et didactiques, c’est-à-dire en montrant « comment faire » et en expliquant « pourquoi faire », les bloggeurs et bloggeuses participent à la construction d’une culture et d’un mode de vie spécifique et peuvent être vu·e·s comme des « passeurs et passeuses de pratiques ».

Mots clés

Internet, alimentation, dispositif, médiation, pratiques.

In English

Title

Sharing « gluten-free » knowledge and know-how on the Internet

Abstract

Based on a descriptive typology of French and German websites devoted to the topic of gluten-free diets, we will analyze their contents and « assemblage ». The use of a plurality of sources of knowledge and know-how (through popularization articles, personal experience stories and discourses promoting food and initiatives) appears to be an essential feature of their mode of communication. Through argumentative and didactic devices, i.e. by showing how and explaining why, bloggers participate in the construction of a specific culture and lifestyle and can be seen as « passeurs » of practices.

Keywords

Internet, food, apparatus, mediation, practices

En Español

Título

Compartir conocimientos y savoir-faire « sin gluten » en Internet

Resumen

A partir de una tipología descriptiva de sitios web franceses y alemanes, sobre la alimentación sin gluten, se analizarán sus contenidos y agenciamientos. El uso de una pluralidad de formas de conocimientos y de savoir-faire (A través de la divulgación de artículos, historias de experiencias personales y discursos de promoción de alimentos e iniciativas) parece ser una característica esencial de su modo de comunicación. A través de dispositivos argumentativos y didácticos, o sea, mostrando cómo hacerlo y explicando por qué, les blogueres participan en la construcción de una cultura y un modo de vida específico y pueden ser consideradas como « traficantes de prácticas ».

Palabras clave

Internet, alimentación, dispositivo, mediación, prácticas

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Wolff Virginie, « Le partage de savoirs et savoir-faire « sans gluten » sur Internet », Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°21/3, , p.43 à 57, consulté le jeudi 25 avril 2024, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2020/supplement-a/03-le-partage-de-savoirs-et-savoir-faire-sans-gluten-sur-internet/

Introduction

« sansgluten.fr[1] est un media en ligne, dont la mission est de libérer le quotidien des intolérants… au gluten bien sûr ! » (Extrait de la page de présentation d’un blog)

Comment un site Internet pourrait-il prétendre « libérer le quotidien » d’un groupe de personnes ? Quelles informations sont-elles partagées pour guider les « intolérants au gluten » vers un quotidien « libéré » ? Quels sont les objectifs qui sous-tendent le projet de l’équipe de rédaction du blog cité en exergue ?

Cet article propose d’explorer les sites web dont l’une des thématiques principales est le régime sans gluten, afin de mieux saisir comment les idées autour de ces pratiques alimentaires se diffusent. Les représentations, les imaginaires et le quotidien de personnes qui évitent de consommer du gluten en France et en Allemagne font l’objet d’une thèse en sociologie amorcée en 2016. Pour comprendre comment des savoirs deviennent ou non légitimes et appréhender la « trivialité » (Jeanneret, 1999), soit la circulation sociale des différentes formes de savoirs, nous avons démultiplié les lieux et les échelles d’observation (entretiens avec des personnes qui ne consomment pas de gluten en région parisienne et dans le Grand Est en France, dans les régions de Berlin et du Brandebourg en Allemagne ; observations de sites Internet ; analyse des publications médiatiques et scientifiques). Certains aspects du mode alimentaire, comme l’importance de la consommation de pain et des produits à base de blé dans les deux pays, la montée des préoccupations éthiques et environnementales, la considération des effets sur la santé et la diffusion de pratiques alimentaires plurielles (comme le véganisme) – provoquant parfois des conflits avec les défenseurs d’un modèle qui serait vu comme « traditionnel » –, permettent d’envisager une histoire croisée (Werner & Zimmermann, 2004) de l’alimentation sans gluten et des controverses scientifiques et médiatiques qu’elle suscite de part et d’autre du Rhin. Les expériences des personnes concernées, en particulier leurs facilités ou difficultés à s’engager dans le régime en fonction de contextes spécifiques (disponibilité des produits, accès à l’information, soutien des professionnels de santé et d’associations) constituent le point d’entrée de cette histoire croisée. Lors d’entretiens menés avec quarante-deux personnes qui évitent de manger des aliments contenant du gluten, il est apparu que ces dernières faisaient souvent ce choix à la suite de signes d’inconfort corporel (digestifs ou extra-digestifs) et/ou à la suite d’un diagnostic médical (maladie cœliaque). Ce régime leur aurait permis de réduire, voire de faire disparaître leurs symptômes ou signes cliniques. Cette conversion alimentaire a souvent été accompagnée de recherches d’informations sur Internet : sites, blogs et autres médias sociaux ont joué un rôle notable dans leur parcours et leur quotidien.
Les évolutions dans le temps de la saisie du mot-clé « gluten » par les internautes sur Google sont comparables en France et en Allemagne. L’intérêt pour cette recherche a triplé en Allemagne entre janvier 2011 et mars 2015, tandis qu’il a été multiplié par cinq en France à cette période-là. En Allemagne, le niveau s’est relativement stabilisé depuis 2015, avec des baisses ponctuelles, tandis qu’en France le niveau a baissé jusqu’en 2018, pour se stabiliser ensuite, avec des baisses saisonnières. Néanmoins, l’intérêt pour la recherche de résultats sur Internet à partir du terme « gluten » est sensiblement plus élevée en France, et ce depuis 2004.

Figure 1. Graphique de l’évolution de l’intérêt pour la recherche du mot-clé « gluten » sur Google
Source : Virginie Wolff à partir des données de Google trends

Nous envisageons Internet comme un lieu d’expression et de communication qui permet la circulation d’idées, d’informations et de savoirs. Le concept de médiation (Davallon, 2003) est préféré à celui de transmission : loin d’être un simple transfert de connaissances d’une personne à une autre, les blogs permettent le plus souvent des interactions et la construction de savoirs partagés dans des espaces communs de communication. Les forums, la fonctionnalité « commentaires », la possibilité d’échanger via mail, sont des éléments qui forment un dispositif de médiation singulier. Les sites spécialisés dans le « sans gluten » peuvent être saisis comme des espaces dans lesquels des personnes partagent et échangent leurs expériences et connaissances, promouvant une « écologie des savoirs » (de Sousa Santos, 2011) et ouvrant la voie à d’autres façons de penser et de « faire » l’alimentation. L’imaginaire participatif du Web 2.0, mais aussi celui du consommateur impliqué dans la coproduction (Dujarier, 2008) sont prégnants. Nous proposons de considérer les blogs et sites Internet étudiés comme des dispositifs qui cristallisent un ensemble de relations sociales et matérielles, ou plus encore, comme des assemblages d’éléments hétérogènes (discursifs et non discursifs) qui ont pour objectif d’orienter des gestes, comportements, opinions et discours (Foucault, 1994 ; Agamben, 2009). Le partage de savoirs et savoir-faire en lien avec le « sans gluten » s’inscrit dans un ensemble de discours normatifs. Internet est alors aussi pensé comme un espace médiatique au sein duquel se confrontent des idées et s’établissent des relations de pouvoir. L’analyse de sites « sans gluten » permet de mettre en exergue les relations de pouvoir-savoir (Foucault, 2015) qui se déploient à travers l’alimentation, entre des groupes et leurs représentations de ce que serait un mode de vie souhaitable. Il s’agit alors de voir comment ces dispositifs fonctionnent, ou comment, à travers la diffusion de recettes, de conseils de consommation, mais aussi la vulgarisation scientifique et le récit d’expériences personnelles, ces personnes tentent de participer à l’émergence de nouvelles pratiques alimentaires et de styles de vie.

L’objectif de cet article est de caractériser et décrire les sites qui s’intéressent à l’alimentation sans gluten. Si le partage de « manières de faire » la cuisine, l’entraide et la coopération, apparaissent comme des dimensions caractérisant le blogging culinaire (Chapoutot, 2006), et que la figure de l’influenceuse, ou du « prescripteur » de pratiques de consommation dans l’univers de la cuisine (Naulin, 2014 ; 2017) est souvent mise en lumière, notre démarche vise à mettre en évidence que, dans le cas du sans gluten, la prescription est plus subtile et qu’il conviendrait de trouver un raisonnement idoine pour caractériser ce processus de médiation de pratiques.

Étudier la manière dont les supports sont utilisés et explorer l’ensemble des productions verbales, l’infographie, l’iconographie, le webdesign (Pignier, Drouillat, 2004), les vidéos, les éléments sonores, les « affordances » (Bardini, 1996) ainsi que les formes d’interactions, permettra de voir comment les bloggeurs et bloggeuses œuvrent pour parvenir à légitimer leurs connaissances et expériences et à se faire reconnaître comme de nouvelles figures d’autorité ou d’entrepreneurs de morale au sens de Becker (1985). Nous appellerons « passeurs ou passeuses de pratiques », dans la continuité de la réflexion de Caune (1999), ces personnes ou groupes (association, entreprise, groupe), qui, par leur statut, position ou exposition médiatique, partagent des savoirs et savoir-faire. Alors que de nombreuses formes d’autorité sont remises en cause dans le domaine de l’alimentation (défiance des institutions gouvernementales, des experts, des producteurs et de la grande distribution), nous interrogerons les spécificités de ces personnes pour être entendu·e·s et perçu·e·s comme légitimes.

La méthodologie de l’enquête

Vingt-cinq blogs et sites Internet, ainsi que les comptes Facebook, Instagram et Pinterest associés ont été analysés depuis février 2017. La moitié d’entre eux ont été cités lors des entretiens, les autres ont été trouvés grâce à des moteurs de recherche. Les données ont été traitées manuellement, à l’aide de la grille d’observation présentée en annexe et d’un codage inductif. Le corpus est composé de dix blogs français et de dix blogs allemands, des versions française et allemande d’un blog créé par une grande marque de produits sans gluten, ainsi que des sites Internet de l’Association Française Des Intolérants Au Gluten (Afdiag), de l’association allemande de la maladie cœliaque (DZG, Deutsche Zöliakie Gesellschaft) et de l’association européenne (AOECS, Association of European Coeliac Societies).

L’analyse a porté à la fois sur la présentation de soi des émetteurs et émettrices (trajectoires, expériences, savoirs et savoir-faire), leur rapport avec leurs lectrices et lecteurs, et les contenus publiés. L’un des objectifs a été de comprendre l’usage de ces outils de communication pour partager des normes et des valeurs et initier des espaces de socialisation. En parallèle, des entretiens ont été menés avec huit bloggeuses pour appréhender leurs parcours de vie et pratiques quotidiennes.

Nous esquisserons dans un premier temps une typologie descriptive inductive (Demazière, 2014) des sites spécialisés dans le sans gluten, afin d’organiser les matériaux empiriques récoltés. Nous verrons que quatre types d’acteurs et actrices semblent agir dans ce champ : les associations de malades cœliaques, les bloggeurs et bloggeuses passionné·e·s, celles et ceux devenu·e·s « pro » ou « presque pros » et celles et ceux lié·e·s à des marques de produits sans gluten. Dans un second temps, nous nous intéresserons aux contenus, en tentant de montrer comment les différentes thématiques sont articulées. Les savoirs et savoir-faire mobilisés sont issus de domaines divers et proviennent d’une pluralité de sources (travaux scientifiques et de vulgarisation, récits d’expériences personnelles) : nous mettrons l’accent sur le fait que les informations partagées dépassent le cadre de l’alimentation.

Un essai de typologie des sites web « sans gluten »

À partir d’exemples concrets de supports qui nous sont apparus significatifs et représentatifs, nous avons élaboré dans un premier temps une typologie de sites web « sans gluten ».

Type 1. Les sites des associations

Le premier type de sites rencontrés est celui d’associations de malades cœliaques. La DZG et l’Afdiag ont été créées par des bénévoles en 1974 et 1978. Elles sont essentiellement financées par les cotisations des membres, des dons et les revenus liés à la gestion des certifications « sans gluten » (le label avec l’épi de blé barré).

Les sites des associations sont statiques et uniformes : un texte noir ou gris, dans une police classique (times) sur un fond gris, avec quelques images et un menu — en orange dans le cas de la DZG – qui permettent aux internautes de se repérer. Des espaces réservés aux « professionnels de santé », à la « restauration », aux « membres » et aux « industriels » discriminent les internautes dans le cas de l’Afdiag.  Des documents sont téléchargeables en format PDF par les membres de l’association, tandis que des rubriques plus généralistes sont accessibles à tout public : « Association », « Intolérance au gluten » (informations sur la maladie cœliaque et la dermatite herpétiforme), « Vie pratique » (remboursements de produits diététiques, gestion des voyages et des enfants concernés), « Diététique » (recettes et informations sur le logo), « Colloques/Formations », « Communication » (dossiers de presse), « Rejoignez-nous », « Lexique ».

Dans le cas de l’Afdiag, aucune information sur les salarié·e·s, ni sur la répartition des tâches n’est donnée, seuls les noms des membres du bureau du comité (six femmes et un homme) sont mentionnés, alors que la présidente apparaît sur des vidéos. L’association met l’accent sur son rôle de médiatrice entre les « malades cœliaques » (et parfois les « sensibles au gluten non cœliaques »), leurs familles et des professionnels de santé reconnus et légitimes. L’association insiste sur le fait d’être épaulée par un « Comité Médical » (composé de gastro-entérologues, pédiatres, nutritionnistes, diététicien·ne·s, etc.), de travailler en collaboration avec un Groupe d’Étude et de Recherche sur la Maladie Cœliaque (GERMC) et sur son engagement sur le long terme. Aucune interaction avec les internautes n’est visible ni possible sur le site. Les réseaux sociaux (Facebook et Twitter) permettent des échanges et la diffusion d’informations ponctuelles. Une newsletter par mail et par courrier papier est envoyée aux membres de l’association. Le site est mis à jour de façon sporadique. L’énoncé est détaché de la personne de l’énonciateur (Cardon, 2006), sauf pour la rubrique des recettes « de Martine » ; l’énonciation est impersonnelle, l’objectif est de diffuser des informations factuelles et de promouvoir les évènements organisés par l’association (colloques, rencontres avec des professionnels ou ateliers de cuisine).

Type 2. Les blogs de passionné·e·s

Plus proches des blogs « extimes », les blogs des « passionné·e·s » (Cardon, 2010) qui suivent le régime sans gluten « intègrent […] le caractère central de l’interactivité, des réactions des internautes dans le contenu des sites » (Rouquette, 2008, §11), néanmoins, les commentaires ne sont pas toujours visibles et sont « modérés ». Les blogs sont souvent conçus à partir de modèles (type WordPress), de façon à ce que la mise en forme soit facilitée. Les énonciateurs et énonciatrices font « montre de capacités et de compétences spécifiques » (Cardon & Delaunay-Téterel, 2006, p. 48), essentiellement en lien avec l’alimentation et la santé. Leur expérience du régime, la création de recettes, mais aussi le plaisir de communiquer autour de leur mode de vie les amènent à diffuser des conseils. Les discours sont plutôt didactiques, expliquant « comment faire » au quotidien pour adopter un mode de vie sans gluten.

Une Allemande de trente ans se présente par exemple sur son blog en racontant qu’elle a été diagnostiquée cœliaque à l’âge de 13 ans. Elle souligne son expérience de vie sans gluten qui a entraîné un changement dans sa façon de cuisiner, mais aussi dans sa façon de vivre. Elle raconte qu’elle vit glutenfrei, « sans gluten », depuis quinze ans et insiste sur le fait qu’elle évite toute trace de gluten. Par ailleurs, elle mentionne son engagement professionnel dans le domaine scientifique, valorisant ainsi ses compétences et sa façon de procéder sur son blog : « Il est important que tout soit bien documenté. Personnellement, je travaille dans le domaine scientifique et mon blog est donc censé permettre l’expérimentation et de franchir de nouvelles frontières, mais toujours sur une base solide, 100% sans gluten. Par conséquent, je développe moi-même toutes les recettes (sauf indication contraire) et je ne vous les présente que si elles me convainquent vraiment » (trad. par l’autrice). L’énoncé s’adresse directement aux lecteurs et lectrices (utilisation des premières et deuxièmes personnes). L’énonciatrice partage ce qu’elle pense des recettes ou des restaurants qu’elle a « testés » pour son public. L’une des lectrices commente : « […] Je peux toujours me servir de tes recettes et de tes idées […] Ce que j’aime particulièrement, c’est ta manière gentille et simple, qui m’enchante toujours énormément. […] J’attends avec impatience ta réponse et éventuellement tes conseils » (trad. par l’autrice). Ce commentaire nous permet d’aborder la dimension persuasive des discours : l’image que les bloggeuses transmettent d’elles-mêmes – dans la façon de rédiger les billets en s’adressant directement à leur lectorat ou dans la manière de se prendre en photo dans un restaurant en souriant par exemple – joue un rôle primordial pour fidéliser les internautes et pouvoir les convaincre.

Une autre bloggeuse allemande, « voyageuse », a conçu et diffusé une fiche d’évaluation des lieux « sans gluten » qu’elle visite, pour être crédible en justifiant la pertinence et l’indépendance de son évaluation : « Ce que j’observe pour faire mes évaluations : quel est le premier contact avec les employés ? Le mot « maladie cœliaque » est-il compris ? […] Quelle est la précision de l’étiquetage des allergènes dans le menu ? […] Comment se passe la communication avec le personnel au sujet de mon intolérance ? Est-ce que je me sens en sécurité ? Quelle est l’ambiance/le service à cet endroit ? » (trad. par l’autrice).

Type 3. Les blogs des « pros » et des « presque pros »

Les blogs des « pros » et « presque pros », ou « pro-ams », seraient ceux des « amateurs qui travaillent selon les normes de professionnels » (Leadbeater & Miller, 2004, p. 12 ; trad. par l’autrice). Dans la continuité du type précédent, l’objectif serait d’aider, voire de guider les internautes dans leur quotidien sans gluten, mais avec une aspiration à la professionnalisation.

Un blog français, créé en septembre 2015 par une femme de trente-deux ans, est, par exemple, présenté comme un média géré par une équipe de journalistes. La fondatrice (responsable éditorial, marketing et commercial ; diplômée de Sciences Po et d’une école de commerce) est sensible au gluten, non diagnostiquée cœliaque. Pour elle, l’activité de blogging s’apparente davantage à une activité professionnelle : la production du blog est organisée suivant un modèle entrepreneurial, avec différents pôles d’activités (la direction, la rédaction, le community management, la technique). Des stagiaires, le plus souvent formé·e·s au journalisme, parfois freelances, écrivent les « posts ». Une vingtaine d’ancien·ne·s stagiaires, dont trois hommes, sont présenté·e·s succinctement : une photographie et un lien vers leur blog personnel permet de les identifier et de savoir s’ils ou elles sont « sensibles au gluten » ou non. Le site web est dynamique, constitué d’éléments mouvants, avec une charte graphique et un design travaillé. Ce blog est relativement intuitif et propose un menu principal sous forme de questions, comme : « Quoi de neuf ? », « Où manger sans gluten ? » « C’est grave docteur ? ». Cette dernière rubrique attire le regard et emmène les internautes vers des articles élaborés. L’accent est mis sur le professionnalisme dans la transmission d’informations et la compétence des personnes qui publient les articles. Le blog est présenté comme un « medium » au sens premier du terme, c’est-à-dire un intermédiaire qui ouvrirait des débats entre des personnes qui s’expriment dans la sphère publique sur le « sans gluten », relayant des informations entre des professionnels (notamment sous la forme d’entretiens avec des médecins, scientifiques, naturopathes ou restaurateurs) et les internautes. Par ailleurs, le blog promeut des initiatives (lancement de marques, de restaurants), la vulgarisation de recherches scientifiques, tout en générant une « communauté d’entraide » en ligne. Les échanges sont permis par le truchement d’un espace de commentaires et des liens vers les réseaux sociaux (actualisés tous les jours).

Type 4. Les blogs de marques de produits sans gluten

Le quatrième type de sites est celui de marques de produits sans gluten. Nous présenterons un blog[2] créé par la marque de produits sans gluten la plus répandue, une entreprise autrichienne, créée en 1981, qui compte plus de 1200 employés dans neuf pays. La marque met l’accent sur l’innovation pour des besoins diététiques spécifiques. Au travers des rubriques « Acheter », « Échanger », « Découvrir », « Développer », le blog – décliné en plusieurs versions en fonction de la langue et du pays – propose des recettes et articles « pour vivre gluten free ».

Les articles sont rédigés par des bloggeuses partenaires (professionnelles ou non). Se différenciant des blogs marchands traditionnels, le site ressemble à une plateforme collaborative, puisque la marque ne publie pas d’article, mais fait appel à des bloggeuses ayant déjà un lectorat. Le site deviendrait ainsi une passerelle pour aller vers les blogs partenaires, entraînant un brouillage des frontières entre les sites de commerçants (avec des objectifs lucratifs) et ceux de passionné·e·s, dont l’activité de loisir serait marchandisée, afin que les entreprises bénéficient non seulement de la notoriété et de la proximité des bloggeuses avec leur lectorat, mais aussi d’une main d’œuvre quasi-gratuite. Ce type de blog illustre une nouvelle forme de l’économie contemporaine : le « digital labor » (Cardon & Casilli, 2015), cette fois-ci volontaire et consenti. Le blog est très dynamique, notamment grâce à des vidéos présentant des bloggeuses qui font des recettes. Un espace pour les membres du club (gratuit) donne accès aux forums et à plus de recettes.

Quatre types de passeurs et passeuses de pratiques « sans gluten »

Finalement, quatre types d’acteurs et d’actrices semblent apparaître dans la blogosphère « sans gluten » : des associations composées de bénévoles et de salarié·e·s, qui mettent l’accent sur le lien avec la sphère biomédicale ; des passionné·e·s, qui publient davantage de contenus autour de leurs savoir-faire et expériences personnelles ; des webmasters qui ont recours à des « journalistes » professionnel·le·s ou apprenti·e·s pour partager des informations et témoignages qui dépassent le cadre de l’alimentation ; des entreprises qui vendent des produits sans gluten. Un portrait idéal-typique peut être dressé : comme pour les blogs culinaires français étudiés par Naulin (2017), il s’agit principalement de bloggeuses, même s’il existe quelques exceptions masculines[3]. Celles-ci sont généralement sensibles au gluten ou cœliaques, ont entre 25 et 50 ans et détiennent des diplômes relativement élevés. Peu d’entre elles vivent de cette activité. D’autres dispositifs se conjuguent à ceux diffusés sur Internet, comme l’organisation d’évènements, de conférences ou d’ateliers de cuisine, qui permettent à certain·e·s de se rémunérer. Les médias sociaux ne sont pas un espace autonome, au contraire, ils permettent de développer des pratiques de sociabilité en ligne et en dehors. La confiance créée sur le long terme au moyen du site leur permet d’acquérir une certaine notoriété réutilisée pour organiser des évènements en lien avec des entreprises, des restaurants ou des professionnels de la santé, comme dans le cas de la Semaine du sans gluten ou du Salon des Allergies Alimentaires et des Produits Sans.

En apportant des expériences et compétences acquises hors du travail – à domicile ou en dehors, dans la sphère marchande ou non marchande –, les bloggeuses participent au processus d’estompement des frontières entre le travail et le loisir, mais aussi entre le travail salarié et le partenariat commercial. Cette hybridation, cette double casquette de la « personne ordinaire », ayant des compétences spécifiques, leur permettrait de nouer des liens de confiance avec des lecteurs et lectrices. Les positions interstitielles que peuvent occuper des bloggeuses qui souhaitent vivre de leur activité, mais qui n’y parviennent pas toujours, ainsi que celles des community managers (Galibert, 2014) – des « gestionnaires de communauté » – amènent à repenser la figure de l’« amateur » (Flichy, 2010), mais aussi du médiateur. Ces personnes semblent faire autorité avant tout parce qu’elles sont concernées elles-mêmes : elles sont « passées par là » et elles se sont informées, voire formées (dans le domaine de l’alimentation ou de la santé par exemple).

Comme nous allons le voir dans cette seconde partie, les « passeuses de pratiques », en plus de leur activité de médiation, tendent à constituer des communautés de pratiques, en proposant des outils pour donner des « capacités d’agir » à leur lecteurs et lectrices.

 


Figure 2. Typologie descriptive-inductive des blogs et sites sans gluten analysés

Partager des expériences personnelles et des savoirs

Dans cette deuxième partie nous explorerons les manières dont des savoirs, pratiques et discours sont agencés. Si l’objectif le plus visible des sites étudiés est le partage de pratiques culinaires sans gluten, les articles publiés ne traitent pas seulement de l’alimentation. Dans les contenus, d’autres domaines de la vie quotidienne sont évoqués, de façon à diffuser des imaginaires de ce que serait la « bonne santé » et la « vie bonne ». La combinaison ou l’« agencement » (Deleuze & Guattari, 1980) de contenus et d’expressions hétérogènes, soit de discours expérientiels, de vulgarisation scientifique et de communication marketing, est envisagé ici comme un moyen pour tenter de légitimer à la fois le régime sans gluten et le statut de passeuses de pratiques des bloggeuses.

Par l’entremise des blogs sans gluten, se créé et se perpétue une pratique culturelle : les recettes sont destinées à être reproduites, mais aussi à être commentées et transformées. Les bloggeuses apparaissent comme des initiatrices d’un espace de socialisation qui se co-construit avec les internautes, notamment par les interactions via les commentaires et les réponses aux commentaires ou via la publication d’articles spécifiques à la suite de demandes de lecteurs ou de lectrices.

Le recours à une pluralité de sources de savoirs et la diffusion d’informations issues de différents domaines (monde gastronomique, sphère marchande, univers de la santé, entre autres) apparaissent comme des caractéristiques essentielles de leur mode de communication et a fortiori, de mode « captation du public » (Cochoy, 2004). En proposant à la fois des rubriques « recettes de cuisine », « actus scientifiques » et « lifestyle », les bloggeuses construisent des discours descriptifs, explicatifs, didactiques et argumentatifs en lien avec l’alimentation, le corps, la santé, l’environnement, mais aussi le mode de vie de façon plus large, en abordant par exemple les voyages. Les bloggeuses partagent des pratiques et promeuvent des normes et valeurs ; elles apparaissent comme des médiatrices culturelles. Les articles de vulgarisation scientifique qui accompagnent les recettes révèlent une incitation forte à améliorer ses compétences culinaires, mais aussi à développer ses connaissances dans différents domaines (santé, bien-être, sciences, écologie). Connaître par soi-même et faire soi-même deviennent des leitmotivs. La vie sans gluten est associée à l’idée d’émancipation individuelle et d’autonomie et l’acte de prescription devient ainsi plus difficile à déceler en tant que tel, en s’apparentant davantage à de « l’accompagnement ». Dans les lignes suivantes, nous mettrons en lumière la manière dont la « vie sans gluten » est promue ainsi que les modalités de justifications du rôle de « passeuse ».

Faire autorité grâce à son expérience et valoriser le régime

Les bloggeuses se présentent avant tout comme des personnes qui ont vécu et expérimenté la vie sans gluten : les savoirs et savoir-faire qu’elles ont accumulés à ce sujet est au fondement des conseils et arguments en faveur du régime qu’elles diffusent. Trois arguments sont récurrents : tout en permettant de produire un corps « sain », le régime serait approprié à la vie contemporaine et favoriserait la performance, il serait une opportunité de « découvrir » et permettrait de s’émanciper par le plaisir.

« Des repas rapides et sains »

Destinés à être une source d’inspiration culinaire, les blogs permettent de partager des recettes présentées comme réalisables au quotidien, de façon à suggérer que le régime est accessible et non contraignant. Si Naulin (2014) indiquait déjà que les blogs alimentaires étaient plus centrés sur la cuisine domestique quotidienne, dans les blogs analysés ici, l’accent est souvent mis sur l’aspect « pratique » des recettes, en minimisant l’effort requis. Publier des recettes « faciles et rapides », permet de démontrer que le régime sans gluten est compatible avec un emploi du temps chargé, tandis qu’écrire sur la gestion du régime quand on a des enfants permet de montrer qu’une vie de famille est possible.

Ces discours s’accompagnent, en outre, d’une rhétorique de la performance : les recettes sans gluten permettraient d’être efficace tout au long de la journée et le régime participerait à la fabrication de corps plus « productifs ». Dans un article présentant la recette d’un « smoothie », on peut lire par exemple : « Dès le matin, vous apportez à votre corps d’importantes vitamines, grâce auxquelles il peut bien attaquer la journée » (trad. par l’autrice).

Par ailleurs, les bloggeuses soutiennent que le régime ne doit pas être perçu comme une contrainte, mais comme une opportunité pour se tourner vers une cuisine plus « appétissante », illustrée par des photos colorées, avec des mises en scène esthétisées de plats ; tout en usant de l’argument d’une alimentation « naturelle » (sublimée par des images exposant des tables en bois brute, des fruits et légumes crus, des plantes) et « saine » : « Repas rapide, sain et sans gluten : pain et œuf poché » (trad. par l’autrice).

Une opportunité de découvrir

L’objectif des articles est de rendre le régime attirant : « Le petit déjeuner sans gluten peut être si excitant et varié » (trad. par l’autrice). L’accent est souvent mis sur la découverte : « Ici […] vous trouverez tout sur le mode de vie sans gluten avec de nombreuses découvertes, des conseils, des recettes et des récits d’expériences. Mon objectif n’est pas l’éviction en soi, mais la découverte des nombreuses possibilités sans gluten que la vie nous offre » (trad. par l’autrice).

La découverte, la curiosité et la créativité sont mises en avant. Manger sans gluten est présenté comme une opportunité pour connaître une autre façon de s’alimenter, mais aussi une autre façon de vivre. Les articles s’adressent généralement aux personnes qui mangent déjà sans gluten, il s’agit notamment de les aider à conserver ce régime, notamment au début de son adoption, en les convaincant et en en montrant les bons côtés : « [le site] voit d’un autre œil la contrainte. Manger différemment permet de décupler l’imagination, stimuler la créativité… la contrainte devient, n’ayons pas peur du mot, géniale ! ».

De la même façon, des aliments souvent peu connus en France et en Allemagne sont utilisés dans les recettes, comme le sorgho ou le fonio, valorisant en creux, dans un mouvement d’exotisme culinaire (Régnier, 2004), des cultures d’ailleurs ou des cultures vues comme ancestrales. On peut ainsi lire à propos du millet : « Cultivées depuis plus de 10 000 ans en Afrique et en Asie ces petites graines se cuisinent telles quelles, en de flocons ou en farine ! ».

Vers un mode de vie libéré et hédoniste ?

La bannière du blog marchand affiche « Heureux sans gluten ». L’objectif est toujours de convaincre des bienfaits du régime en renversant la contrainte de la restriction en quelque chose de positif, en montrant qu’il s’agit d’un mode de vie enviable.

La thématique du plaisir est récurrente : elle se déploie dans l’expression de la créativité culinaire, désignée comme essentielle quand on suit un régime « restrictif ». Le régime sans gluten est aussi rendu désirable par le bien-être auquel il permettrait d’accéder, non seulement en préservant des inconforts corporels, mais aussi en favorisant la découverte de nouveaux plaisirs. Les billets donnent à voir une tentative de dépasser la tension classique entre santé et hédonisme : le plaisir deviendrait nécessaire pour la santé, comme dans le cas de l’obésité (Dupuy, 2014).

De la même façon, une analyse du champ lexical des blogs semi-professionnels nous permet de comprendre la manière dont les autrices tentent de donner des outils présentés comme indispensables pour permettre aux personnes de « s’émanciper ». À ce propos, des articles sur des sujets très variés sont publiés. Une référence est faite au « monde » du sans gluten, qui ne concerne pas que la cuisine, mais bien une façon de vivre : les rubriques comme « lifestyle » suggèrent que la conversion au régime implique davantage qu’un simple changement de recettes. Nous pouvons citer des titres d’articles très divers, tels que : « les meilleurs contenants pour emporter de la nourriture avec soi (et un coup d’œil dans mon sac à lunch) », « Des vacances sans gluten : Je fais ma valise et j’emporte avec moi…. ». Ces supports mettent en avant et partagent des savoirs pratiques, issus des expériences personnelles des autrices. Ces dernières mobilisent alors la figure du « guide », en se positionnant comme celles qui auraient vécu des expériences avant les autres et qui souhaitent les partager. Des articles didactiques sont par exemple intitulés : « Comment j’ai soigné mes cheveux naturellement » (un article issu d’une rubrique « santé au naturel »), ou encore « L’invité sans gluten – un guide pour les amis et les personnes concernées ».

La thématique des sorties et des voyages est très présente : quelques blogs se consacrent à partager des lieux où il est possible de manger sans gluten, y compris lorsque l’on voyage en « sac à dos ». Des restaurants et boulangeries qui ont séduit les bloggeuses sont présentés et commentés. Les critiques négatives sont très rares. Ces billets ont pour objectif de renverser le stigmate de la personne qui suit un régime sans gluten et qui serait isolée, c’est-à-dire qui ne pourrait pour cette raison pleinement prendre part à la vie en société.

La médiation d’« actus scientifiques » et de connaissances diverses

Parallèlement aux conseils pratiques pour la vie quotidienne, les blogs et sites proposent des informations diverses dans des rubriques « Actus scientifiques », « Savoirs », « Développement personnel », etc. Les registres employés varient en fonction des articles et blogs, entre un ton sans prétention et un ton plus affirmé : d’une « réflexion autour des troubles alimentaires – l’anorexie », à « où en est la recherche sur la sensibilité au gluten ? ».Lors d’entretiens, trois bloggeuses nous ont confié que ces rubriques avaient beaucoup de succès auprès des internautes et qu’elles souhaitaient les développer.

Les associations diffusent des informations scientifiques et biomédicales. Néanmoins, les documents téléchargeables – réservés aux adhérent·e·s et traitant quasi exclusivement de la maladie cœliaque –, sont souvent jargonneux et difficilement compréhensibles pour un public non averti. Les blogs « pros » ou « presque pros », privilégient au contraire des articles accessibles à tout public, soit sous la forme d’entretiens avec des professionnel·le·s, soit sous celle d’article de vulgarisation. Le recours à la parole de professionnel·le·s – présentée comme légitime, avec la mise en avant des titres (professeur·e·s, docteur·e·s) – témoigne  aussi du fait que les bloggeuses sont en contact avec les personnes qui « savent » et que cette proximité leur permet de transmettre les « bonnes » informations. Contrairement aux associations, ces blogs agencent des discours de personnes issues du monde biomédical (gastro-entérologue), des recherches expérimentales (de l’INSERM par exemple) et ceux de naturopathes ou d’auteurs et autrices qui ont partagé leurs expériences dans un ouvrage.

Ces connaissances sont parfois aussi celles des bloggeuses elles-mêmes qui, conjointement à leur formation (l’une d’entre elles est professeure de biologie par exemple), se sont informées (lecture d’articles scientifiques ou de livres spécialisés) et parfois formées. En sélectionnant les sujets qu’elles et ils considèrent comme pertinents, c’est-à-dire en thématisant des sujets comme celui du « microbiote », ces passeuses et passeurs de pratiques contribuent aussi à créer de nouveaux objets d’attention.

Conclusion

L’analyse des sites et blogs sans gluten montre en quoi Internet peut apparaître comme un lieu de diffusion d’idéaux et être utilisé comme une « boîte à outils » pour mettre en pratique des modes de vie spécifiques. La pluralité des types d’informations et de savoirs qui y circulent vise à répondre à des personnes en recherche de repères. Les bloggeuses sont des médiatrices qui, à partir de leurs expériences personnelles, se présentent comme des guides. Nous les avons caractérisées comme des « passeuses de pratiques » qui partagent leur « mode d’emploi de la vie quotidienne ».

Ensuite, si ces dispositifs en ligne permettent bien la circulation gratuite des informations, l’analyse des publications témoigne de la pluralité et complexité des compétences nécessaires et de la porosité des frontières, entre le professionnel et l’amateur, le privé et le public (Cardon, 2010). Ainsi, ce travail met également en lumière une hybridation des profils des acteurs et actrices présents sur la toile : leurs expériences personnelles, mais aussi leurs compétences dans la médiation, légitiment leur rôle de passeur et passeuse de pratiques, tandis que leur non-rémunération et la mise en avant de leur position de « personne ordinaire » permettent une proximité et une relation de confiance avec les lecteurs et lectrices qui s’identifient à leurs récits. Néanmoins, la tendance à la marchandisation de l’activité doit être soulignée : la notoriété des bloggeuses et bloggeurs est ainsi parfois mobilisée par des marques. Cela nous amène à réfléchir aux nouveaux moyens mis en place par les entreprises pour capter leurs clients. Il ne s’agirait plus seulement de faire de la publicité pour un produit, mais de développer tout un univers et de valoriser un mode de vie spécifique.

Références bibliographiques

Agamben, Giorgio ; Kishik, David ; Pedatella, Stefan (2009), What is an apparatus? And Other Essays, Stanford : Stanford University Press (collection «Meridian, Crossing Aesthetics»).

Bardini, Thierry (1996), « Changement et réseaux socio-techniques : de l’inscription à l’affordance », Réseaux, vol.14, n°76, p.125-155.

Becker, Howard (1985), Outsiders. Études de sociologie de la déviance, Paris : Métailié

Cardon, Dominique (2010), La démocratie Internet. Promesses et limites, Paris : Seuil (collection « La république des idées »).

Cardon, Dominique ; Casilli, Antonio (2015), Qu’est-ce que le Digital Labor ? Bry-sur-Marne : INA (collection « Études et controverses »).

Casilli, Antonio (2010), Les Liaisons Numériques. Vers une nouvelle sociabilité ? Paris : Seuil (collection « La couleur des idées »).

Caune, Jean (1999), Pour une éthique de la médiation, le sens des pratiques culturelles, Grenoble : Presse Universitaire de Grenoble.

Cochoy, Franck (2004), La captation des publics. C’est pour mieux te séduire, mon client…, Toulouse : Presses Universitaires du Mirail.

Davallon, Jean (2003), « La médiation : la communication en procès ? », Médiation et information, n°19.

Deleuze, Gilles ; Guattari, Félix (1980), Mille plateaux : capitalisme et schizophrénie, T.2, Paris : Éditions de minuit.

Demazière, Didier (2013), « Typologie et description », Sociologie, vol.4, n°3, consulté le 04 février 2019, http://journals.openedition.org/sociologie/1956.

Dujarier, Anne-Marie (2008), Le travail du consommateur. De Mac Do à E-bay : comment nous coproduisons ce que nous achetons, Paris : La Découverte.

Dupuy, Anne (2014), « Thématisation du plaisir alimentaire et visées utilitaristes », Sociologie et sociétés, vol.46, n°2, p.253-275.

Flichy, Patrice, (2010), Le sacre de l’amateur. Sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique, Paris : Le Seuil.‪

Foucault, Michel (1994), « Le jeu de Michel Foucault », in Dits et écrits, tome 3 (1976-1979), Paris : Gallimard.

Foucault, Michel (2001), Dits et écrits, tome 2, Paris : Gallimard, p.160-174, Leçon du 7 janvier 1976.

Foucault, Michel (2015), Surveiller et punir (p.261-613), in Œuvres T.2, Paris : Gallimard.

Galibert, Olivier (2014), « Approche communicationnelle et organisationnelle des enjeux du Community Management », Communication et organisation, n°46, p.265-278, consulté le 15 octobre 2019, http://journals.openedition.org/communicationorganisation/4814.

Jeanneret, Yves (2000), « La trivialité comme évidence et comme problème. À propos de la querelle des impostures », Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°01/1, consulté le 15 octobre 2019, https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2000/varia/05-la-trivialite-comme-evidence-et-comme-probleme-a-propos-de-la-querelle-des-impostures.

Leadbeater, Charles ; Miller, Paul (2004), The Pro-Am Revolution: How Enthusiasts are Changing Our Society and Economy, London: Demos.

Naulin, Sidonie (2014), « La blogosphère culinaire. Cartographie d’un espace d’évaluation amateur », Réseaux, n°183, p.31-62.

Naulin, Sidonie (2017), Des mots à la bouche. Le journalisme gastronomique en France, Rennes/Tours : Presses Universitaires de Rennes/Presses Universitaires François Rabelais.

Pignier, Nicole ; Drouillat, Benoît (2004), Penser le webdesign. Modèles sémiotiques pour les projets multimédias, Paris : L’Harmattan.

Régnier, Faustine (2004), L’exotisme culinaire : essai sur les saveurs de l’Autre, Paris : Presses universitaires de France.

Rouquette, Sébastien (2008), « Les blogs « extimes » : analyse sociologique de l’interactivité des blogs », tic&société, vol.2, n°1, consulté le 30 septembre 2019, http://journals.openedition.org/ticetsociete/412.

Sousa Santos, Boaventura de (2011), « Épistémologies du Sud », Études rurales, n°187, consulté le 14 mai 2019, http://journals.openedition.org/etudesrurales/9351.

 

Annexe

Nom du blog, adresse  
Pays  
Date de création du blog  
Fréquence de publication ou de republication  
Changements importants ? (archives)  
   
Profil du ou des émetteurs/émettrices (bloggeurs, bloggeuses, entreprises, associations) :  
–        Age, genre  
–        Cœliaque, sensible non diagnostiqué·e, autre ?  
–        À titre professionnel ? Rémunéré ? Pour le loisir ?  
–        Seul·e / en équipe ?  
–        Lien avec des entreprises ? des marques ?  
–        Formations / compétences ?  
–        Autre activité associée ? (organisation d’évènements ? édition de livres)  
   
Récepteurs et réceptrices / publics cibles ?  
Interactions possibles ? (commentaires)  
Liens vers réseaux sociaux (Facebook, Instagram, …)  
Liens vers autre blogs, sites ?  
   
Sujets des articles  
   
Objectifs des discours (persuasif, explicatifs, didactiques ?)  
Procédés rhétoriques : appels aux sentiments, ironie, valorisation – dévalorisation ?  
Indices de subjectivité ? Qui parle, au nom de qui ? De qui/ de quoi on parle ?  
   
Promotion de produits ?  
–        Quels types de produits ?  
–        Marques  
–        Comment le produit est-il présenté ?  
   
Comment parle-t-on du gluten ?  
Comment parle-t-on du régime sans gluten ?  
Comment parle-t-on de l’alimentation ?  
Comment parle-t-on de la santé ?  
   
Textes :  
–        Lexiques  
–        Qualités rédactionnelles  
–        Longueur  
Images :  
–        Type d’images  
–        Qualité des images  
–        Importance des images dans l’ensemble
Éléments graphiques, ergonomie  
Stratégie de communication (représentation mimétique, démonstrative ; présentation figurative ; évocation mythique, symbolique ; implication dépaysante, exploratoire)  
   
Vidéos  
Musiques  

Auteur

Virginie Wolff

.: Doctorante en sociologie à l’Université de Strasbourg, rattachée à l’UMR 7367 Dynamiques Européennes, CNRS, Virginie Wolff conduit une thèse sur le parcours des personnes évitant la consommation de gluten. Elle porte un regard critique sur les glissements normatifs liés à l’alimentation, à la santé et au corps, tout en s’intéressant aux conflictualités générées par ceux-ci.
vi.wolff@live.fr