Confiance et pratiques informationnelles d’accès à la science ouverte en SHS
Résumé
Prenant en compte l’étude des usages des quatre plateformes d’OpenEdition, cet article considère que les publics des savoirs ouverts développent des pratiques informationnelles en lien avec leur cursus universitaire. L’objectif est de mieux prendre en compte la façon dont des liens se constituent entre les pratiques ordinaires d’accès aux publications scientifiques et la confiance décidée dans leurs pratiques informationnelles. L’étude qualitative présente un accès par des plateformes commerciales, une lecture sélective et des relais en interne ou par la conversation qui ne tiennent pas compte des métriques des articles scientifiques dans les choix de lecture.
Mots clés
Pratiques informationnelles, science ouverte, confiance, métriques alternatives
In English
Title
Trust and information practices in access to open science
Abstract
Based on the study of the four OpenEdition platforms uses, this article reports that open knowledge audiences develop information practices in line with their university curricula. The aim is to gain a better understanding of how links exist between ordinary practices of accessing scientific publications and decided confidence in one’s information practices. The qualitative study reports that access via commercial platforms, selective reading and internal relays or conversation do not take into account the metrics of scientific articles in the selection process.
Keywords
information practices, open science, trust, altmetrics
En Español
Título
Confianza y prácticas informativas en el acceso a la ciencia abierta
Resumen
A partir del estudio de los cuatro usos de las plataformas OpenEdition, este artículo informa de que las audiencias del conocimiento abierto desarrollan prácticas informativas en consonancia con sus planes de estudios universitarios. El objetivo es comprender mejor cómo existen vínculos entre las prácticas ordinarias de acceso a las publicaciones científicas y la confianza decidida en las propias prácticas informativas. El estudio cualitativo informa de que el acceso a través de plataformas comerciales, la lectura selectiva y las difusiones internas o la conversación no tienen en cuenta las métricas de los artículos científicos en el proceso de selección.
Palabras clave
Prácticas de información, ciencia abierta, confianza, altmetrics
Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :
Le Bechec Mariannig, « Confiance et pratiques informationnelles d’accès à la science ouverte en SHS », n°, 2025, p. à , consulté le samedi 31 mai 2025, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2025/varia/confiance-et-pratiques-informationnelles-dacces-a-la-science-ouverte-en-shs/
Introduction
Depuis plus de 20 ans (2002), les communautés scientifiques se sont mobilisées pour l’ouverture des publications scientifiques en libre accès, qualifiée aussi de savoir ouvert (Suber, 2016 : 23-44). Dans le même temps, les données de citation liées à la publication scientifique ont fait l’objet de critiques sur leur caractère prédictif et évaluatif comme le facteur d’impact des revues (Archambault et al, 2009). Avec la circulation des publications académiques sur des plateformes dites commerciales (Plantin et al., 2016), une des pistes d’amélioration serait alors de rendre compte des vues, des mentions, des partages et des téléchargements sur le web social (Priem et al., 2010) définissant des métriques dites alternatives. Celles-ci témoigneraient d’autres formes de citation et d’impact social des publications. Elles sont développées parallèlement à la plateformisation du web (Helmond, 2015) et aux métriques marketing d’engagement. Mais à leur tour, elles suscitent des critiques sur leur validité et leur fiabilité (Haustein, 2016). En effet les métriques alternatives s’appuient sur des tiers, les plateformes commerciales. Il est toujours possible de s’interroger sur leur finalité commerciale et leur effet « boite noire ». Pourtant, les études bibliométriques tendent à démontrer un potentiel impact prédictif de la citation d’un article scientifique selon que l’article ait été mentionné sur Twitter (Eysenbach, 2011, Önder et al, 2023, Hare et al., 2024), sur les blogs (Shema et al., 2014), sur Facebook (Ringelhan et al., 2015) ou plusieurs médias sociaux (Thelwall et al., 2013). Il serait donc aisé d’en déduire que les traces d’usages sur les plateformes commerciales deviennent le sésame prédictif de la citation par les pairs d’une publication scientifique. Mais au-delà des traces d’usages sur les plateformes commerciales comment décrire plus finement les pratiques informationnelles liées aux publications scientifiques hors du contexte de citation académique (Olivesi, 2007) ? Comment interroger le profil des usagers des plateformes qui mobilisent les plateformes commerciales ou éditoriales pour accéder aux publications scientifiques (Dacos, Bester, 2012 ; Costas et al., 2020) ? Que font ces usagers des publications auxquelles ils accèdent ? Ces publications sont-elles données à lire à d’autres personnes, conduisent-elles à la production de nouveaux écrits ? De nombreux travaux s’attachent aux pratiques informationnelles notamment des étudiants et des enseignants (Aillerie et al., 2020). Notre analyse porte plus largement sur les pratiques de lecture et d’écriture (Dendani et al., 2022) de publics professionnels en lien ou non au domaine de la recherche (comme les consultants). La question est d’autant plus importante que le débat public se focalise sur la « confiance » (Luhmann, 2001) de la société envers la science alors que les notions de fausse information et science ouverte se retrouvent associées (Koerber, 2021).
Luhmann (2001) le souligne : « La confiance assurée dans le système et la confiance décidée dans les partenaires sont des attitudes différentes vis-à-vis des alternatives qui se présentent, mais peuvent s’influencer mutuellement. » Nous supposons que l’acquisition et la production de savoirs ne sont pas liées à un outil d’accès spécifique mais à la confiance dans des pratiques informationnelles mobilisées dans le cadre professionnel. La réception des savoirs ouverts n’est pas une pratique individuelle et s’inscrit au travers d’une continuité dans des réseaux d’échanges interpersonnels (Katz, Lazarsfeld, 2008, 1955), notamment via des outils numériques de communication professionnelle. Aussi étudierons-nous les pratiques informationnelles (Chaudiron, Ihadjadene, 2010) en mettant en regard les pratiques d’écriture des chercheurs et d’usage des lecteurs via les quatre plateformes de l’infrastructure de recherche en sciences humaines et sociales, Open Edition (la plateforme de carnets de recherche, hypotheses.org ; la plateforme de livres, books.openedition.org ; la plateforme de revues, journals.openedition.org et le calendrier multilingue des événements académiques, calenda.org).
Nous analysons ici les pratiques informationnelles et conversationnelles de chercheurs et de citoyens dans les processus communicationnels de légitimation des publications scientifiques à partir de 35 entretiens semi-directifs. Ces 35 entretiens offrent la possibilité d’explorer des pistes d’interprétation. Nous discutons ainsi trois points : l’évaluation de l’utilité sociale des publications ouvertes par les pratiques ; la confiance des lecteurs dans leurs pratiques informationnelles et la confiance dans leur pratique de légitimation des savoirs ouverts.
L’évaluation de l’utilité sociale des publications ouvertes par les pratiques informationnelles
Les modèles explicatifs des usages des savoirs ouverts
Le processus éditorial de la publication scientifique est équipé d’indicateurs quantifiés, au sens de Desrosières (2014), comme le facteur d’impact de la revue. Ces métriques de citation, des « autorités calculées » (Broudoux, Ihadjadene, 2021), placent les membres de la communauté scientifique dans une « confiance assurée » (Luhmann, 2001), notamment lors de leur recherche d’information, leur recherche de lieu de publication ou lors de processus d’évaluation. Pourtant dès 2011, les chercheurs mobilisés autour de l’accès ouvert mettent en avant que le libre accès rend possible de sortir du public cible (Davis, 2011 : 2133), par des réseaux informels dont les métriques alternatives pourraient rendre compte. Pour expliquer ces réseaux informels, des modèles explicatifs vont se focaliser sur le contenu et vont mobiliser la notion, pour les biens culturels, de la longue traîne (Chris Anderson, 2012), ou la notion en bibliométrie de sleeping beauties (Van Raan, 2004), c’est-à-dire la résurgence de publications après des années de sommeil. D’autres modèles explicatifs mobilisés se centrent sur l’individu capable de publier un article après en avoir lu en libre accès, ce lecteur inattendu plébiscité par Phil Bourne et publié dans sa revue Plos Computational Biology (Smith, 2011). En France, les modèles interrogent des pratiques conversationnelles d’accès à la publication scientifique, avec la conversation silencieuse (Dacos, Mounier, 2010) d’un lectorat fidèle à une revue ou à un blog scientifique.
Les modèles explicatifs commerciaux des usages des savoirs ouverts
Une question de recherche est de connaître ou de calculer la fiabilité des métriques alternatives, et leur capacité à prédire l’utilité sociale d’un article et son impact (Thelwall et al., 2013). Mais les données collectées sont de faible qualité et peu fiables en raison de l’hétérogénéité des traces d’usages (pas définies selon un cadre conceptuel commun), une absence de qualité des données (précision, cohérence et reproductibilité) et une dépendance à tiers pour les plateformes commerciales comme Twitter et Facebook ou des agrégateurs de données comme Crossref (Haustein, 2016).
Dans la figure 1., les métriques accolées à l’article se décomposent en trois catégories : les métriques d’usage, les métriques de citation et les métriques alternatives. Les métriques d’usage correspondent au volume de téléchargements et de vues. Des plateformes, comme celle éditée par Sage Publishing une entreprise américaine, ne différencient pas ces deux actions, or elles ne sont pas équivalentes en termes d’usage et d’appropriation des contenus. Les métriques de citations, dépendent d’autres tiers comme Crossref (Lammey, 2015) et le Web of Science.
Depuis 2000, Crossref, organisation à but non lucratif, regroupe environ 5000 éditeurs scientifiques à l’échelle internationale. Crossref accompagne la gestion des DOI (Digital Object Identifier) liés à des contenus web, dont les publications scientifiques. Le Web of Science (WoS) quant à lui, fournit un accès à des bases de données bibliographiques et à des données de citation 1. La présentation des métriques de citation de l’article sur une page web de revue repose donc sur des indices fournis par deux tiers Crossref et Web of Science mais rien n’indique si l’usage des DOI comptabilisé par Crossref est également comptabilisé par le Web of Science.
Les métriques alternatives se situent dans notre exemple sur les pages web des revues en dessous des métriques d’usage et de citation (figure 1). Elles sont représentées sous la forme d’un « beignet coloré » dont chaque couleur représente une plateforme où l’article est cité. La mention Altmetric 210 ne fournit pas d’éléments d’explication sur ce score. Il convient de cliquer sur ce « beignet coloré » pour accéder à des informations complémentaires. Le code couleur est le suivant par exemple : jaune pour les blogs ; bleu foncé pour Facebook, bleu clair pour Twitter et rouge pour Mendeley. Chacun des tiers est quantifié, soit Twitter (292), Mendeley (254) et Facebook (1) (figure 1). Les métriques alternatives sont affichées pour « Découvrir l’impact de cet article à travers le nombre de fois qu’il a été lu et les Résultats Altmetrics » 2.
Les métriques alternatives sont définies en 2010 dans un manifeste (Priem et al., 2010). Pour autant, celles présentes sur les sites web d’éditeurs scientifiques via altmetric.com n’y correspondent pas. Il faut consulter le site altmetric.com pour comprendre quelles sont les sources utilisées pour évaluer l’impact de l’article. La solution de l’entreprise Digital Science illustre le fait que les métriques alternatives peuvent faire l’objet de dérives commerciales (Bar-Ilan et al. 2012). Le plus insidieux dans leur mobilisation sur les sites web des revues scientifiques est leur opacité.
La première définition des métriques alternatives est complétée en 2016, par le travail d’un groupe du National information standards organization (NISO) qui normalise les termes, les sources et les méthodes de calculs. Un consensus n’apparait pas établi à ce jour, notamment sur les sources des métriques alternatives.

Figure 1 Capture d’écran métriques d’un article scientifique (11/2020)
Sur les dépendances et le manque de fiabilité, par exemple sur Facebook, seules les mentions sur les pages publiques sont comptabilisées, et non le trafic généré. Ainsi la mention Facebook est de 1 alors même que le trafic entrant dominant à partir de cette plateforme ressort dans de nombreuses observations du web. Il faut donc comprendre qu’outre les questions éthiques que soulèvent ces métriques, des questions méthodologiques et épistémologiques se lient à cette définition de la diffusion de la science et de sa quantification par des indicateurs peu fiables. Facebook, par exemple, n’autorise pas à suivre la circulation des contenus sur sa plateforme et inscrit ses propres métadonnées (Millette et al., 2020).
Les pratiques informationnelles mobilisées dans l’accès au savoir ouvert
Les métriques alternatives jouent-elles un rôle d’attracteur pour les lecteurs comme peut l’être, chez des scientifiques, le facteur d’impact d’une revue ? Les articles scientifiques, tout comme les livres, demeurent des biens d’expérience (Bomsel, 2007) dont la valeur ne peut se définir qu’une fois lus ou parcourus.
La communication scientifique numérique et ouverte dépasse le cadre de la « confiance assurée et décidée » (Luhmann, 2001) conditionnées par des indicateurs communément admis dans la communauté scientifique, comme le facteur d’impact. Elle interroge sur les risques encourus pour la crédibilité de la science vis-à-vis d’une appropriation de la production scientifique hors du périmètre classique de sa diffusion et de ses codes familiers d’interprétation. Une méfiance de la part des scientifiques se développe alors sur les mésusages possibles dans l’accès ouvert aux savoirs, les risques encourus d’une réception par des publics manquant de connaissance et d’expertise (Zhu, Purdam, 2017) alors que peu d’enquêtes s’intéressent à ce jour aux usages de lecture hors du cadre académique.
Nous faisons l’hypothèse que les pratiques informationnelles guident les pratiques d’accès au savoir ouvert. Les pratiques informationnelles englobent « la manière dont un ensemble de dispositifs, de sources formelles ou non, d’outils, de compétences cognitives sont effectivement mobilisés, par un individu ou un groupe d’individus, dans les différentes situations de production, de recherche, d’organisation, de traitement, d’usage, de partage et de communication de l’information » (Chaudiron, Ihadjadene, 2010, p. 3). Nous précisons le terme dispositifs par l’usage des plateformes commerciales et les discours rapportés en entretiens semi-directifs. « Par « pratiques informationnelles », nous entendons les usages des dispositifs de traitement de l’information, les représentations produites par les acteurs de ces usages (l’intérêt, la performance et la manière dont ils répondent ou non à des objectifs) ainsi que les discours portés sur eux ». (Alloing et Le Béchec, 2017 : 71). Les usages du savoir ouvert s’inscrivent dans des processus de communication, des relais vers d’autres publics où les plateformes commerciales sont mobilisées.
Méthodologie d’analyse des pratiques informationnelles
La méthode de recherche a été inductive. Elle se scinde en deux parties. Une première phase d’entretien exploratoire semi-directif avec 10 chercheuses et chercheurs, qualifiés de carnetiers sur hypotheses.org. La seconde phase repose sur des entretiens semi-directifs avec 25 usagers des 4 plateformes d’OpenEdition.
Pour la phase 1, des entretiens exploratoires se sont déroulés entre le 20/12/18 et le 18/04/19 auprès de 5 hommes et de 5 femmes. Il s’agit de personnes de statuts différents qui mettent à disposition des contenus scientifiques via hypotheses.org : maitresse et maitre de conférences (5) ; professeure et professeur d’université (1) ; doctorante et doctorant (2) ; ingénieure et ingénieur d’études et de recherche (1), indépendante (1). La prise de contact a été effectuée à partir de la présence observée sur hypotheses.org, Twitter et d’une liste fournie par l’équipe d’OpenEdition Lab. La durée moyenne de l’entretien est de 30 minutes.
Les premiers entretiens exploratoires ont eu pour but de comprendre les publics imaginés (Millerand, 2015), non par les concepteurs techniques de la plateforme hypotheses.org, mais par les chercheurs lors de la création de leur carnet, et les publics touchés à travers leur activité de publication. Le guide d’entretien est donc très succinct pour laisser les répondants témoigner de leur expérience, de leurs représentations et de leurs ressentis. Ces entretiens ont donné la possibilité d’affiner le guide d’entretiens de la phase 2.
La phase 2 s’est déroulée entre février et septembre 2019, avec 25 entretiens semi-directifs conduits auprès de 13 hommes et 12 femmes. Les personnes interrogées proviennent pour 68 % de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) ou de l’Éducation Nationale soit en y exerçant (32 %), soit en étant en formation (16 %) ou en étant personnel non-permanent (20 %). Les personnes ayant des activités de consultant, de formation ou de traitement de l’information représentent 32 % de l’échantillon.
La grille d’entretien (cf. annexes) se compose de 15 questions réparties en 3 parties thématisées : 1. Accès à l’information scientifique (9 questions) ; 2. rediffusion de contenus : prescription, recommandation (4 questions) ; 3. Action citoyenne (2 questions). La durée moyenne des entretiens avec les lecteurs est de 41 minutes.
Afin de qualifier les pratiques conversationnelles et informationnelles, nous mobilisons la méthode d’analyse par « théorie ancrée ». Le codage des entretiens est réalisé à l’aide de l’usage d’un CAQDAS (Computer Assisted Qualitative Data Analysis Software), RQDA 3 en reprenant l’approche de Christophe Lejeune (2019) qui consiste à qualifier la répétition des éléments et principalement des actions. Nous avons préalablement exploré les résultats à l’aide du logiciel d’analyse textuelle IRaMuTeQ. Les deux méthodes sont complémentaires puisque certaines classes textuelles viennent appuyer les codes de l’analyse par théorie ancrée.
Des pratiques informationnelles difficiles à restituer
Plus qu’une absence de réflexivité, restituer des pratiques informationnelles ne fut pas une chose aisée pour les répondants. Ainsi sur 35 contacts validés, 25 entretiens ont été réalisés. Différentes solutions de prise de contact ont été mobilisées comme le relais sur Twitter, Facebook et les newsletters d’OpenEdition, la mention d’un billet de carnet sur un compte de réseaux sociaux numérique, la mobilisation de l’HTTP referer, c’est-à-dire le lien hypertexte suivi par un visiteur d’une ressource. Finalement, afficher des messages sur des groupes privés Facebook et le bouche-à-oreille ont contribué à réaliser davantage d’entretiens. La difficulté de prise de contacts peut s’expliquer par les modalités employées. Une autre piste pourrait être celle de ne pas considérer sa pratique de lecture du savoir ouvert comme une activité régulière ou experte et de présupposer une incapacité à répondre aux questions, de pouvoir restituer un discours constructif et riche sur ses pratiques de lecture. Finalement que fait l’usager de la lecture d’un article en accès ouvert ? La lecture, conforte-t-elle un point de vue ? Donne-t-elle à réfléchir, a-t-elle donné envie de la partager ?
La confiance dans ses pratiques informationnelles d’accès aux savoirs ouverts
Comment un article scientifique obtient-il une métrique alternative de 210 ? Les données comportementales, les métadonnées, conservées par les plateformes commerciales sont peu accessibles, voire de plus en plus inaccessibles aux communautés scientifiques. L’entreprise commerciale ne fournit aucune information sur son « objectivité algorithmique » et sur le choix des données retenues. Par « objectivité algorithmique », nous entendons que les concepteurs des métriques ou des plateformes définissent les pratiques et les usagers selon le paramétrage de leurs algorithmes, qui est une forme d’objectivation selon leur modèle de représentation. Le modèle économique de ces plateformes repose sur la publicité (Boullier, 2020 ; Ertzscheid, 2020), voire sur la réactivité par les retweets (Boullier, 2020) et les affects mobilisés comme réaction par les plateformes (Pierre, Alloing, 2017), ce que les métriques alternatives n’explicitent pas. Ces analyses critiques participent à la discussion des résultats de notre enquête. Les mesures d’audience des sites web comme les métriques de citation font l’objet de critiques permanentes. Les travaux de recherche sur les métriques alternatives cherchent à mieux les comprendre tout en se focalisant quantitativement sur leur faiblesse, du fait que la complétude des données extraites des plateformes n’est pas satisfaisante (Haustein, 2016). Notre objectif est donc de sortir de l’étude du fonctionnement d’une solution commerciale pour évaluer l’impact social d’une publication et cela dans le cadre des relations science et société (Costas et al., 2020).

Figure 2: Dendrogramme de la classification appliquée aux 25 entretiens semi-directifs
Une analyse complémentaire du codage par théorie ancrée des pratiques4
Les classes issues de classification hiérarchique ascendante correspondent à notre codage manuel des actions et thèmes présents dans les entretiens et elles viennent confirmer nos étonnements dans le relevé « manuel » des thématiques. Comme pour le livre, les pratiques d’accès aux savoirs ouverts s’installent dans une dimension de communication affective (plaire ou décevoir) vis-à-vis de l’activité éditoriale. Cette communication affective mobilise des plateformes commerciales à partir desquelles sont calculées les métriques alternatives. Les plateformes commerciales sont ici présentes dans la classe 1 car elles participent à l’accès au savoir ouvert. Mais comme nous le verrons dans l’analyse suivante, l’évaluation possible de la recherche n’est pas mentionnée dans les entretiens. Les outils d’accès et de relais de l’information se lient, Twitter est un outil de veille informationnelle comme de curation. Les notions de publication, de commentaire, de suivi et de contact mettent en évidence que les actions se conjuguent dans le cadre de l’accès au savoir ouvert via les plateformes commerciales (Classe 1). Les outils numériques d’accès prédominent par rapport aux outils d’écriture, d’annotation et de curation (Classe 3). Dans la classe 4, les pratiques informationnelles sont mentionnées et illustrent le passage d’un travail académique à un travail de consultant. Nous retenons donc la présence de pratiques informationnelles issues du travail universitaire qui perdurent dans les activités de veille professionnelle. L’environnement informationnel, comprenant l’accès ouvert, semble ainsi se dessiner lors du cursus universitaire dans notre terrain.
L’absence de performativité des indicateurs quantifiés sur les pratiques
Un premier résultat de l’analyse est que 14 personnes sur les 26 lecteurs entretenus (y compris la personne participant à la rédaction d’un carnet) ne connaissent pas du tout les métriques alternatives et 5 personnes ne les connaissent pas bien. Seules 7 personnes répondent savoir ce que sont les Altmetrics, mais elles composent un public spécifique. Elles ont une qualification équivalente au doctorat et sont donc plus sensibilisées à la présence de métriques soit en tant qu’auteur soit en tant que lecteur durant leur thèse.
Les métriques dites alternatives peuvent être explorées dans la littérature scientifique comme un indicateur prédictif de l’attention portée à un article. Elles mesureraient la popularité que les publics accordent à une publication scientifique, en quantifiant (Desrosières, 2014, p.57) ses citations comme les traces d’usage (clics, partages) qu’elles génèrent sur une plateforme commerciale. Pourtant les personnes interrogées présentent une faible connaissance de cet indicateur, que ce soit le terme en lui-même comme son mode de quantification. Selon nous, le braconnage (Certeau, 2010) n’est pas réalisé par l’usager ici mais par les entreprises du web qui détournent les traces d’usage et les transforment en mesure d’impact pour les évaluations quantitatives de la recherche.
Le verbatim suivant l’illustre :
Enquêteur : est-ce que le fait d’échanger, de partager, et de lire participe à l’évaluation des chercheurs et de leurs publications ?
« (…) les chercheurs auraient intérêt à réfléchir […] Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux, il faut une image. Et qu’est-ce qui se passe ? C’est que, on voit l’image, on ne voit pas le nom de l’auteur, et il y a beaucoup de choses qui sont masquées. (…) D’ailleurs moi je suis des fois aussi gênée : si je partage un écrit que j’ai lu, qui m’intéresse, par exemple ce que je fais avec les articles publiés par les chercheurs dans The Conversation parce que c’est pratique, parce que je le vois tous les matins en ouvrant mon courrier, j’ai pas besoin d’aller chercher spécifiquement, donc c’est le flux RSS si vous voulez. (…) Quand je partage, (…) d’après ce que je comprends des likes ou autres – ce contenu. Et ça, c’est un peu une perversion des réseaux sociaux. (…) c’est un des biais. (…) »
Enquêteur : est-ce que vous connaissez les Altmetrics ?
« Pas du tout, mais ça m’intéresse, déjà le nom. » (Jeanne, professeure associée).
L’enquêtée explique connaître les principes de circulation agencés par les algorithmes des plateformes, les principes de notoriété liés à une présence sur le web mais ignore la notion des métriques alternatives. Le précédent verbatim souligne que la lectrice comprend le fonctionnement algorithmique des plateformes commerciales. Ainsi, le contenu d’un article du média The Conversation circule mieux qu’un article sans image en raison du traitement algorithmique. La question de l’étude de l’accès et de l’appropriation ne se résume pas à un accès aux données et aux métadonnées de reprises. Les mécanismes de circulation des savoirs ouverts sur les plateformes sont tout aussi importants que les propriétés sémiotiques des contenus. Mettre en place des méthodes qualitatives par entretien apporte donc une compréhension plus fine des usages et des détournements possibles des métriques alternatives.
L’usage peut sortir des cadres de l’expérience, il braconne les objectifs définis (Certeau, 2010).
« Le terme « usage » indique, dans la lignée de l’histoire culturelle, que les pratiquants de la culture doivent « faire avec » (Certeau, 2010, p.52). Faire avec des dispositifs, des discours, des normes. L’usage est donc une pratique culturelle qui doit s’accommoder des contraintes sociales et pratiques d’un monde médiatisé, mais sait aussi marquer sa propre initiative et sa propre créativité – ce qu’exprime également le terme « appropriation » (Jeanneret, 2019, p.24).
Les études de réception et des processus communicationnels deviennent nécessaires quand nous pensons aux potentiels effets « miroir grossissant » que les métriques alternatives pourraient opérer sur les articles. De plus, les Altmetrics mentionnées à proximité des titres d’articles scientifiques sont définies comme quantifiant des pratiques informationnelles. L’analyse des pratiques de lecture numérique sur OpenEdition sont plus floues, moins précises, moins engageantes que dans les restitutions des pratiques de lecture et d’écriture autour du livre (Le Béchec et al., 2018). Le temps consacré à la lecture sur les plateformes d’OpenEdition semble moindre que pour un livre (Le Béchec, 2020). Les transitivités d’une plateforme à une autre ne sont pas simples à se remémorer pour le lecteur, les souvenirs étant moins liés à l’affect ou au goût que pour la lecture d’un roman. La mise en récit des pratiques devient plus factuelle sur les finalités recherchées, plus outillée dans les accès et l’usage de l’information. L’attention aux contenus et à leurs localisations ressort moins chez les usagers qui n’exercent pas en contexte académique dans le cadre de cette enquête.
L’analyse de la réception des métriques de citations met en évidence que la confiance, qui peut être assumée par la communauté scientifique comme le facteur d’impact ou décidée, comme les métriques alternatives en ayant recours à des tiers ne sont pas prises en compte par les lecteurs interrogés. L’indicateur chiffré, le beignet coloré présent sur la figure 1, n’est pas un signe dans la relation de confiance assumée, car il n’est pas connu des lecteurs.
Ainsi les modèles de confiance des communautés scientifiques ne sont pas repris par les lecteurs. L’indicateur qui quantifie la citation n’est pas un signe d’autorité dans la reconnaissance de la qualité du contenu pour les lecteurs. Les modèles de confiance dans les processus communicationnels de légitimité des publications scientifiques par les lecteurs sont plus pragmatiques comme nous le verrons dans la partie suivante.
La confiance dans ses pratiques de légitimation des savoirs ouverts
Ainsi notre terrain d’analyse met en évidence les pratiques ordinaires d’accès au savoir ouvert, hors contexte de crise sanitaire.
« Les résurgences des pratiques « populaires » dans la modernité industrielle et scientifique indiquent les chemins que peut prendre une transformation de l’objet que nous étudions et la place d’où nous l’étudions. » (Certeau, 1990, p.44)
La légitimité d’une « culture scientifique » par compétence
Les pratiques d’accès et de légitimation des publications scientifiques s’inscrivent dans des compétences acquises lors d’un cursus universitaire. La culture scientifique devient moins un socle de connaissances que des pratiques de recherche et de traitement de l’information scientifique. La première motivation d’accès aux savoirs ouverts est l’absence de nécessité de connexion pour consulter le contenu. Ensuite, l’arrivée sur les contenus est liée à des questions de référencement par les moteurs de recherche généraliste, de recommandation algorithmique et des pratiques de recherche d’information précédemment développées lors de la rédaction de mémoire de master selon plusieurs entretiens.
Les méthodes de qualification des sources demeurent au-delà du cursus universitaire et se traduisent dans les pratiques informationnelles, notamment des consultants. Les praticiens maitrisent les pratiques de veille et de recherche par mots-clés, par abonnement à des newsletters, par flux RSS, par l’abonnement à des comptes sur les plateformes commerciales Twitter ou LinkedIn.
« (…), je me suis abonné à plusieurs newsletters sur les sujets qui m’intéressent : le marketing et la communication, par des gens qui font déjà un travail de curation, d’information et de veille. En général, c’est principalement à travers des newsletters ou des flux RSS, (…) sinon, je suis abonné aussi à des personnes que je considère référentes sur le sujet, que ce soit sur le LinkedIn ou sur Twitter. (…) » (Simon, consultant marketing)
Si la pratique de recherche d’information demeure, l’objectif diffère. La source n’est plus une référence bibliographique, elle doit être applicative dans le contexte professionnel. La question est de savoir de quelle manière les contenus scientifiques sont utilisés en contexte professionnel. Le « faire avec » (Certeau, 2010) s’associe au « faire pour », l’application doit être immédiate pour convaincre de l’intérêt du contenu auprès de ses collègues.
« Quand j’étais étudiant, il fallait tout le temps sourcer, sourcer, sourcer un maximum pour avoir un maximum de références, alors qu’aujourd’hui dans le domaine des études dans lequel je travaille, en fait, l’idée ce n’est pas forcément de renforcer notre approche méthodologique par de la recherche, même si ça pourrait donner un gage en plus, mais plutôt de voir un peu ce qui se fait, et après de pouvoir, nous en interne, développer quelque chose qui soit (…) une méthodologie qui ne sera pas copiée, qui ne sera évidemment pas plagiée, mais qui sera peut-être juste inspirée, mais de manière vraiment très très légère sur un point précis d’une méthodologie ou sur un point précis (…) je ne sais pas, de la définition d’un concept par exemple, etc. » (Simon, consultant marketing)
Le verbatim d’un praticien, consultant pour une entreprise française de marketing numérique, traduit la transformation de l’utilité de la publication scientifique dans le travail de consultant. La liste des références bibliographiques se résume à une source concordante avec une problématique opérationnelle. Dans le milieu professionnel de ce consultant, les processus communicationnels de légitimation des savoirs ouverts proviennent de la capacité à réinvestir le temps de veille auprès de ses collègues. Toutes ces pratiques de communication secondaire du savoir ouvert entre collègues ne sont pas comptabilisées dans les métriques alternatives.
La conversation, une pratique professionnelle invisible de communication du savoir ouvert
La conversation accompagne l’appropriation des contenus au sein du collectif professionnel qui partage le même objectif et le même cadre d’interprétation. La conversation n’est pas silencieuse, il ne s’agit pas de suivre une revue (Dacos, Mounier, 2010) mais de partager les contenus dans des conversations avec des collègues ou des connaissances.
« […] Il est intéressant de constater que les contenus des communications interpersonnelles tendent à s’harmoniser avec les attitudes et les opinions et à circuler entre les personnes qui ont plus ou moins la même façon de voir les choses. » (Katz et Lazarsfeld, 2008, p.92-93).
Dans l’entretien suivant, l’objectif d’accès au savoir ouvert est de renforcer une opinion. L’usager interrogé mobilise les plateformes d’OpenEdition comme toute autre plateforme afin de répondre à une demande d’information ou de trouver une réponse en parcourant des savoirs ouverts et en les communiquant sous forme écrite ou orale à son collectif professionnel.
« Parfois il ne se passe rien, et puis parfois il y a un membre de l’équipe qui va voir le titre et qui va dire : « Tiens, ça a l’air bien », et puis va aller lire l’article. Et puis ça va susciter un débat, une discussion. (…) » (Pierre, consultant-chercheur en management).
La conversation peut dépasser le cadre des activités professionnelles dans une autre situation sociale, mais la lecture n’est pas récréative. Une personne interrogée, cadre dans l’Éducation Nationale, profite de réunions hebdomadaires pour transmettre des thèmes ou aider une collègue à travailler un mémoire. La personne interrogée répond mobiliser également sa « veille scientifique », comme elle la qualifie, dans le cadre de son mandat d’élu municipal sans commenter le contenu et uniquement par recommandation de lecture.
« Ça m’arrive fréquemment. (…) comme je fais du management et que du côté de la commune où je suis élu on a des projets de nature managériale, notamment autour du numérique et de l’innovation, il est assez fréquent qu’une partie de mon activité de chercheur percute mon activité d’élu. (…) quand je tombe dans le cadre de ma veille scientifique sur des articles intéressants, je les signale (…) aux fonctionnaires avec lesquels je travaille à la ville. »
Il précise ensuite sa façon de transmettre l’information et le commentaire varie en fonction du temps dont il dispose.
« Quand je n’ai pas le temps, j’envoie l’article en disant : « Tiens, ça vaudra le coup de regarder ça, c’est intéressant. » point, voilà. Quand j’ai un peu plus de temps et que l’article est vraiment très intéressant, là il peut m’arriver d’écrire deux ou trois lignes en disant : « Le pitch de l’article c’est ça. Voilà ce que ça raconte. Voilà pourquoi c’est intéressant. Voilà pourquoi il faut creuser ça. » Il n’y a pas de règle générique. » (Pierre, consultant-chercheur en management).
Au fil des entretiens, les pratiques d’accès et de lecture, et donc de légitimation des publications scientifiques se déroulent dans un processus de co-construction entre l’horizon d’attente des lecteurs et une accroche à des éléments contenus dans la publication en accès ouvert. Ainsi le terme appropriation pourrait connoter une vision ascendante de la circulation du savoir du sachant jusqu’au lecteur. De notre point de vue, le terme appropriation ne biaise pas l’interprétation, il met en lumière que les processus de lecture et d’écriture s’appuient sur une connivence entre le lecteur, l’auteur et le contenu mis à disposition. L’appropriation souligne également que même si le savoir ouvert est transposé dans des contextes professionnels, il répond aux attentes institutionnelles en termes de création et d’innovation vis-à-vis de la science ouverte.
Un processus de légitimation dans ses pratiques professionnelles
Dans une précédente enquête sur le livre (Le Béchec et al., 2018), nous avons souligné le rôle de la conversation dans la circulation de bien d’expérience qu’est le livre. Notre analyse montre que les pratiques informationnelles et conversationnelles qualifient les pratiques invisibles d’appropriation des savoirs ouverts. L’information scientifique et la publication scientifique s’inscrivent dans les pratiques quotidiennes de consommation de l’information. La méfiance suscitée par les pratiques de consommation quotidienne de l’information en ligne doit être relativisée lorsqu’elle s’applique à la communication scientifique au regard des pratiques invisibles de lecture et d’usage hors des plateformes commerciales. La confiance des lecteurs selon la définition de Luhmann (2001) s’inscrit dans une confiance décidée. La lecture n’est pas un hasard, elle s’intègre dans des pratiques qui accordent une confiance dans le processus éditorial qui qualifie une publication de scientifique.
Les usages reposent donc sur des compétences acquises lors du parcours universitaire pour qualifier la pertinence des sources d’information scientifique et éviter les risques d’une information erronée ou inutile. L’objectif est de ne pas perdre de temps. Les usages du savoir ouvert diffèrent dans les attentes et la démarche scientifique, notamment de citation, même s’ils participent à la création de nouvelles connaissances dans d’autres contextes. L’accès et la circulation du savoir ouvert peuvent être synthétisés dans le schéma suivant. À l’accès succède une lecture sélective qui va être relayée sous des formes écrites ou orales auprès des collègues.

Figure 3. Pratiques informationnelles visibles et invisibles d’accès et de communication des savoirs ouverts
Conclusion
L’appropriation des contenus rendus accessibles devient une finalité de la part des promoteurs publics de l’ouverture du savoir ou de l’information scientifique. Aussi, comprendre les pratiques de reprises ou de détournements possibles vient pallier les déficits d’explication de métriques calculées ou de métriques alternatives promues par des entreprises commerciales qui se définissent comme capables de qualifier l’impact social de la science. Sur les risques de mésusages, notre enquête, restreinte et datant de 2019, ne présente pas de résultats validant cette réticence. Notre enquête souligne l’intérêt de prendre en compte les réseaux sociaux de réception et les personnes assurant le partage de l’information scientifique dans leur entourage. Ce n’est plus l’individu mais la conversation et le réseau d’échanges interpersonnels qui sont mobilisés comme modèle d’accès et d’usage. L’accès aux contenus repose sur la capacité des individus à se les approprier par des processus communicationnels de légitimation qui passent par des pratiques informationnelles et des compétences acquises pendant un cursus universitaire. Les pratiques informationnelles viennent légitimer et amènent les personnes interviewées à se placer dans une confiance assumée et décidée selon les travaux de Luhmann (2001). L’information extraite de ce savoir est transmise de manière complète ou parcellaire via un outil de communication numérique doublée d’une communication orale. Les usages hors contexte académique ne laissent pas de traces visibles sur les plateformes commerciales mais contribuent à l’expertise des usagers dans leur contexte professionnel. Il apparait donc nécessaire de poursuivre l’analyse de la réception de l’information scientifique dans des réseaux d’échanges professionnels.
Notes
[1] En 2024, le WoS est accessible sur abonnement en ligne via une plateforme administrée par l’entreprise Clarivate Analytics.
[2] Traduction par nos soins, les majuscules sont conservées.
[3] Huang,Ronggui (2016). RQDA: R-based Qualitative Data Analysis. R package version 0.2-8. http://rqda.r-forge.r-project.org/
[4] Lucie Loubère, post-doctorante sur le projet ASO a réalisé via le logiciel IRaMuTeQ une analyse textuelle, visualisée sous forme d’un dendrogramme rendant également compte des thématiques présentes dans les entretiens.
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Annexes
Guide d’entretien lecteur
Auteure
Mariannig Le Bechec
Mariannig Le Béchec est professeure des universités à l’Université de Lorraine et membre de l’équipe Praxis de l’UR Crem, après avoir été co-responsable de l’URFIST de Lyon (2018-2024). Ses thématiques de recherche se situent dans les domaines de la communication numérique et de la science ouverte, autour de la production et de la circulation de l’information, notamment scientifique et les pratiques numériques de conversation dans l’espace public et les territoires numériques de marques. Elle développe des méthodes mixtes et en l’analyse de réseaux tout en s’intéressant à l’éthique du numérique dans les recherches en communication.
mariannig.le-bechec@univ-lorraine.fr
Plan de l’article
Introduction
L’évaluation de l’utilité sociale des publications ouvertes par les pratiques informationnelles
La confiance dans ses pratiques informationnelles d’accès aux savoirs ouverts
La confiance dans ses pratiques de légitimation des savoirs ouverts
Conclusion
Notes
Références bibliographiques
Version PDF à paraître