« La culture, ça se partage ». L’audiovisuel public au cœur d’une mutualisation des pratiques du journalisme culturel
Résumé
Notre objectif est d’analyser la manière dont l’audiovisuel public français repense l’information culturelle au sein d’un monde audiovisuel numérique en mutation. Ces reconfigurations, tout à la fois organisationnelles et techniques, interrogent l’évolution des pratiques professionnelles du journalisme culturel. Plus spécifiquement, nous prendrons le cas de Culture Prime, un dispositif pensé comme un « média 100 % vidéo » fournissant des contenus culturels sur les réseaux socio-numériques, lancé le 23 novembre 2018, par l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel public. Cet article entend dès lors questionner les coopérations envisagées entre France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel, France Médias Monde, Arte, TV5 Monde, ainsi que les enjeux politiques et institutionnels inhérents.
Mots clés
Culture Prime, France Télévisions, audiovisuel public, journalisme culturel, information culturelle.
In English
Title
« La culture, ça se partage ». public broadcasting at the heart of a mutualization of cultural journalism practices
Abstract
Our goal is to appreciate how French public broadcasting is rethinking cultural information within the digital audiovisual world mutating. These reconfigurations, both organizational and technological, invite us to question the evolution of professional practices of cultural journalism. More specifically, we will take the case of Culture Prime, a platform designed as a ‘100% video media’ providing cultural content on social and digital networks, launched on November 23, 2018, by all actors of the public audiovisual sector. This research, therefore, aims to examine the collaborations envisioned between France Télévisions with Radio France, the National Audiovisual Institute, France Médias Monde, Arte, TV5 Monde, as well as the inherent political and institutional issues.
Keywords
Culture Prime, France Télévisions, broadcasting public, cultural journalism, cultural information.
En Español
Título
« La culture, ça se partage ». la radiodifusión pública en el centro de una mutualización de prácticas periodísticas culturales
Resumen
Nuestro objetivo es apreciar cómo radiodifusión pública francesa está replanteando la información cultural en el mundo audiovisual digital mutando. Estas reconfiguraciones, tanto organizativas como tecnológicas, nos invitan a cuestionar la evolución de las prácticas profesionales del periodismo cultural. Más específicamente, tomaremos el caso de Culture Prime, una plataforma concebida como un ‘medio 100 % en video’ que ofrece contenido cultural en las redes sociales y digitales, lanzada el 23 de noviembre de 2018 por todos los actores del sector audiovisual público. Esta investigación tiene como objetivo examinar las colaboraciones previstas entre France Télévisions con Radio France, el Instituto Nacional de Audiovisual, France Médias Monde, Arte, TV5 Monde, así como los problemas políticos e institucionales inherentes.
Palabras clave
Culture Prime, France Télévisions, radiodifusión pública, periodismo cultural, información cultural.
Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :
Alexis Lucie, « « La culture, ça se partage ». L’audiovisuel public au cœur d’une mutualisation des pratiques du journalisme culturel », Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°24/3, 2024, p.49 à 65, consulté le samedi 21 décembre 2024, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2024/dossier/03-la-culture-ca-se-partage-laudiovisuel-public-au-coeur-dune-mutualisation-des-pratiques-du-journalisme-culturel/
Introduction
Si le passage de la presse vers la presse en ligne a été particulièrement étudié (entre autres, Charon, 2015 ; Lyubareva, Marty, 2022 ; Mercier et Pignard-Cheynel, 2014), l’adjonction et la complémentarité des médias audiovisuels avec les médias en ligne offrent un terrain tout à fait stimulant pour l’observation des institutions « en mouvement ». Cette étude s’inscrit dans une réflexion sur les mutations organisationnelles et sur les stratégies éditoriales liées à ce mouvement vers la communication numérique des médias traditionnels. Par ailleurs, le service public audiovisuel français présente des spécificités à mettre en avant, au regard d’autres grands modèles comme celui de la BBC (Alexis 2018 ; Lafon, 2013 ; Leveneur-Martel, 2013, Regourd, 2008). Emmanuel Derieux précise qu’ « [à] la notion de « service public » sont attachés les principes de neutralité, d’égalité, de continuité, de qualité. S’agissant du « service public » de l’audiovisuel, il était traditionnellement plus ou moins explicitement fait mention de missions telles que celles d’informer, d’éduquer, de cultiver et de distraire. De telles exigences de « service public » sont admises tant par le droit français que par le droit européen. Introduisant quelque confusion entre « secteur public » et « service public », l’article 5 de la loi du 29 juillet 1982 posait que le secteur public a « pour mission de servir l’intérêt général : en assurant l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information ; en répondant aux besoins contemporains en matière d’éducation, de distraction et de culture » et que « cette mission doit être assurée dans le respect des principes de pluralisme et d’égalité entre les cultures, les croyances, les courants de pensée et d’opinion » » (2015).
Notre objectif est d’analyser la manière dont les entités de l’audiovisuel public français repensent l’information culturelle au sein d’un monde audiovisuel numérique en mutation ; ces reconfigurations, tout à la fois organisationnelles et techniques, invitent à interroger l’évolution des pratiques professionnelles du journalisme culturel. Nous observerons spécifiquement le cas de Culture Prime, un dispositif pensé comme un « média 100 % vidéo » fournissant des contenus culturels pour les réseaux socio-numériques, lancé le 23 novembre 2018 par l’ensemble des acteurs. Cet article entend interroger les coopérations envisagées entre France Télévisions, Radio France, l’Institut national de l’audiovisuel (INA), France Médias Monde, Arte, TV5 Monde ; les enjeux politiques et institutionnels inhérents ainsi que les mutations liées à la production de contenus culturels [1]. Culture Prime s’inscrit donc dans une histoire de l’audiovisuel numérique et participe du déplacement des antennes linéaires vers le web.
Nous nous appuyons sur une série d’entretiens semi-directifs réalisés entre octobre 2019 et juin 2020 avec différents professionnels impliqués dans ce projet. Issus des six entités de l’audiovisuel public, ils ont des statuts divers (responsable éditorial, délégué au numérique, directeur d’un pôle web ou vidéo, directeur de la communication, délégué au développement des programmes, responsable marketing ou encore community manager) au sein de leur institution respective (fig. 1). Interroger une diversité de profils était un souhait dès le début de l’enquête afin de comprendre précisément l’organisation collective à l’œuvre pour la production de vidéos.
Ces personnes ressources permettent la compréhension du contexte de naissance du dispositif, les imaginaires liés à la dimension politique qu’il porte, et éclairent l’organisation des médias et le renouvellement des formes audiovisuelles sur un média lié à un réseau socio-numérique. Cette enquête se focalise exclusivement sur les résultats relatifs au fonctionnement de Culture Prime jusqu’en juin 2020. Jusque-là, le réseau social principalement préféré par les acteurs était Facebook, il est complété désormais par Instagram, Twitter, YouTube et TikTok. Les entretiens ont débuté au lancement de la 2e saison et la plupart ont été menés entre octobre et novembre 2019 (fig. 1). Ils donnent ainsi la possibilité d’entendre le récit de la première année d’existence du média telle qu’elle a été vécue par celles et ceux qui le façonnent, ils permettent en outre d’aborder les réflexions et la mise en œuvre des choix opérés par les entités participantes pour cette 2e saison. Seuls deux entretiens (avec la Responsable des réseaux socio-numériques et communauté web à la Direction de la communication chez Arte et le Chef de produit Partenariats Réseaux Sociaux à la Direction du numérique à France Culture) ont été réalisés début 2020, respectivement en février et en juin. Si notre démarche inclut pleinement l’observation des formes médiatiques élaborées par les acteurs, l’analyse des propriétés sémiotiques et du contenu de celles-ci n’est pas abordée dans le cadre de cet article.
Nous verrons d’abord qu’au sein de ce « réseau de coopération » de l’audiovisuel public en ligne se rejoue l’imaginaire collaboratif du numérique. Ensuite, nous analyserons l’enjeu de faire culture commune autour de la forme brève audiovisuelle.
Un « réseau de coopération » de l’audiovisuel public en ligne
À l’origine de Culture Prime
Au début de cette enquête, à l’automne 2019, ce que l’on appelle « tournant numérique » pour caractériser le mouvement des médias audiovisuels prend effet dans un contexte de reconfiguration générale du service public audiovisuel impliquant des changements, techniques et éditoriaux qui touchent tout à la fois à la production, à la distribution et à la consommation. En effet, en septembre 2017, étaient notamment annoncées de nouvelles mesures économiques. Dans cette perspective, un projet de restructuration engageait, conjointement mais séparément, un comité interministériel et les médias publics à une réflexion autour de nouveaux projets numériques communs permettant la mutualisation de contenus. Dans le même temps, des échanges ont eu lieu entre différentes entités de l’audiovisuel public, notamment autour d’un projet de création d’une « plateforme culturelle » numérique commune, ce qui a donné naissance à Culture Prime.
Ce projet donne l’occasion d’aborder la mutualisation des services de l’audiovisuel public. Ce n’est cependant pas le premier qui les réunit. Deux ans auparavant, en 2016, la création d’une offre d’information en continu, France Info, rassemblait déjà France Télévisions, Radio France, l’INA et France Médias Monde. Le Directeur de la communication et des relations institutionnelles de France Médias Monde expliquait la genèse de ce premier portail commun : « On est 4 partenaires autour de France Info. France Info, c’est un projet qui est un peu lancé […] par Delphine Ernotte à sa nomination à France Télévisions. Elle embarque tous les partenaires avec elle. On construit le projet ensemble. […] Il n’est absolument pas question à cette époque de holding ». Finalement, c’est bien selon lui « l’envie de coopérer, de faire des choses ensemble » qui va primer. Le jour du lancement de France Info, les présidents des quatre groupes se réunissent et évoquent alors le fait de construire la suite : c’est l’investissement de la thématique culturelle qui ressort. Selon les acteurs, ce qui a longtemps été nommé une « plateforme culturelle pour l’audiovisuel publique » ne répond donc pas à une directive ministérielle mais « s’inscri[rai]t finalement dans les efforts de coopération entre les sociétés de l’audiovisuel public, de façon normale et naturelle […] sans feuille de route » (Idem).
Malgré des trajectoires financières en baisse pour les quatre médias, le directeur de la Culture à France Télévisions, la directrice de France Culture, le directeur de la communication et des relations institutionnelles à France Médias Monde et la directrice déléguée à la diffusion à l’INA, décident de se retrouver régulièrement durant pratiquement un an pour réfléchir aux contours du projet qui pâtit tout de même de la contrainte économique : « On sait qu’on n’a pas de moyens, qu’on va devoir redéployer, qu’on ne va pas pouvoir recruter. Est-ce qu’on reformate ? Est-ce qu’on crée des nouveaux contenus ? » (Ibid). Ils aboutissent à « une offre réseaux sociaux, de vidéos mobiles » et donc l’investissement d’un espace de communication existant, alors que les volontés de départ étaient « une plateforme, un site ». Les équipes opérationnelles prennent le relai pour penser les contenus. Il ne s’agit pas de rédactions dédiées, l’ensemble des collaborateurs de Culture Prime est occupé par d’autres activités et est contraint de limiter les activités d’enquête hors du terrain. Le rédacteur en chef de TV5 Monde parle même d’un « vrai miracle du projet Culture Prime, cela a été de faire appel, de solliciter des gens du service public sans allouer de moyens financiers supplémentaires. Et malgré tout, en arrivant à faire quelque chose. Sauf erreur, aucun des acteurs de Culture Prime n’a les moyens de partir en reportage par exemple. […] Culture Prime est né dans des interstices de liberté. Le bon vouloir des uns et des autres ».
À ce stade, l’audiovisuel public se dote donc d’un outil avant même d’avoir trouvé une forme d’organisation pour l’alimenter. Comment les professionnels, chargés de l’aspect opérationnel, se le sont-ils approprié ?
Un réagencement des services
À plusieurs niveaux, ce projet a un statut, plus ou moins explicite et affiché, de « laboratoire » conféré à ces services, qui demande à être explicité pour apprécier la portée de cette expérimentation sur l’organisation et la mise en mouvement des collectifs impliqués dans chacune des entités. Ces dernières se sont engagées à tenir un cahier des charges relatives aux productions : 5 vidéos par semaine pour France Télévisions et Radio France, et 2 pour les autres. Afin de remplir ce contrat, un réagencement des services au sein de chaque média a dû être mis en place. En termes quantitatifs, entre septembre 2019 et mai 2020, sont produites pour Culture Prime en moyenne 42 vidéos par mois et près de 10 vidéos par semaine. France Télévisions comptabilise 152 vidéos et Radio France 147 vidéos sur 508 au total sur la période (fig. 2).
S’agissant de France Télévisions, la responsable éditoriale numérique à la Direction de la culture évoque une difficulté d’organisation car aucun budget n’a été alloué : « Ça veut dire, rester à équipe égale, […] réorganiser la production. C’est à chaque maison de s’organiser ». À l’époque, cette direction était quasi exclusivement dédiée au projet et l’équipe mise en place répondait à une hétérogénéité de profils pour satisfaire les publics imaginés par l’équipe : « J’ai constitué une équipe où la plus jeune a 24 ans, et le plus âgé a 45 ans. On est 6. On va avoir une personne qui est passionnée par l’art, une qui n’était pas du tout culture mais qui était plus divertissement ». À TV5 Monde, seul un journaliste est investi sur Culture Prime. Il était rédacteur en chef du service web, travaille pour les magazines. On lui « [a] demandé de jeter un œil [sur Culture Prime] » : « j’y croyais modestement ». À Arte, l’enjeu a été de faire avec des équipes constantes, déjà présentes, sans budget supplémentaire au sein de l’équipe dédiée au numérique spécifiquement. Est décrite une coopération très serrée entre la direction de la communication, et notamment l’équipe dédiée aux réseaux socio-numériques, et la direction du développement numérique (2 personnes principalement) qui a une équipe également « réseaux sociaux, mais très édito’ » (notamment un ancien journaliste). Au final, d’un côté, une personne, qui maîtrise à la fois l’édition sur le web et la production numérique et qui travaille avec des pigistes, auteurs, journalistes, monteurs qui vont produire le contenu ; de l’autre, l’équipe de community managers travaille sur le planning de diffusion. À France Culture, on compte un motion designer et trois jeunes journalistes, provenant de médias comme Konbini, mobilisés sur l’ensemble des projets nécessitant des vidéos pour le web et supervisés par la responsable du Pôle vidéo. Le délégué au numérique déclare être parti de zéro : « C’était l’aiguillon qui stratégiquement me manquait pour monter un pôle vidéo […] qui travaille du coup à 80 % sur Culture Prime ». À l’Ina, la direction du numérique possédait une cellule de production vidéo pour France Info qui travaille en plus sur les vidéos de Culture Prime nécessitant juste un rhabillage de contenus produits pour le premier. Enfin, à France Médias Monde, il y a un coordinateur mais aucune personne n’a été recrutée, « l’idée, c’était justement d’avoir quelqu’un qui soit assez transversal [qui coordonne et produit] » (Rédacteur en chef). Il « essaye de détourner ici et là un peu de moyens […] parmi toutes les vidéos que produit le service [de la direction des environnements numériques] » ou de réaliser des compléments lors des tournages d’émissions.
Nous observons dès lors une diversité de compétences professionnelles attribuées aux personnes impliquées dans Culture Prime. Les métiers traditionnels du journalisme côtoient des métiers émergents au sein des rédactions, comme les community managers ou motion designer. Dans les imaginaires liés au numérique, subsiste l’idée d’un décloisonnement des pratiques et d’un effacement des hiérarchies pour préférer celle de collaborations plus horizontales. Dès lors, comment s’organisent ces professionnels ?
Un projet commun pensé sans rédaction en chef
Dans un contexte de réforme de l’audiovisuel public, sommé de trouver une nouvelle organisation de travail, l’ensemble des entités se réunit chaque lundi pour travailler sur le rythme de publication, les bons angles journalistiques, mais aussi mettre en commun et discuter des propositions de sujets. La traditionnelle « conférence de rédaction » qui porte le nom de « comité éditorial », « réunion éditoriale » ou « comité de rédaction » selon les interrogés, voit ainsi sa terminologie journalistique être effacée par certains au profit de la catégorie large d’« éditorial ». Le fonctionnement a cela de particulier que ces décisions opèrent sans rédaction en chef [2]. Cela nécessite de fait que chaque professionnel fasse preuve de souplesse devant ce fonctionnement peu classique dans le milieu du journalisme qui vient « réinventer la rédaction » (Charon, 2013, p. 236). Si certains trouvent en cela un aménagement tout à fait approprié, – par exemple le Rédacteur en chef à TV5 Monde déclare : « C’est pour ça que c’est bien, c’est très simple […]. Parce que je ne tolérerai pas qu’une personne puisse dire : »Ça, c’est bien, ça ce n’est pas bien » » –, la responsable du Pôle vidéo de France Culture avoue que « ce qui est vraiment étrange dans Culture Prime, c’est que personne n’a le leadership […]. Du coup, c’est l’opinion majoritaire qui tranche. C’est une espèce de consensus bizarre parfois. Enfin, les décisions se prennent par défaut un peu aussi ». Cela révèle une difficulté à partager une même culture professionnelle. Cette mise à plat de la hiérarchie parait donc, dans les faits, beaucoup moins effective. Il y a ce qui est nommé « la gouvernance » passant tous les six mois de France Télévisions à Radio France, incarnée par les community managers de chacune de ces deux institutions qui prennent successivement en charge la programmation de l’ensemble des contenus, gouvernance qui témoigne finalement d’une autre difficulté à faire ensemble. D’ailleurs, le Délégué au numérique de France Culture conçoit que cela renforce leur poids : « On n’échappe pas au phénomène de lead naturel, plus ou moins rationnel. De fait le poids naturel dans l’offre de France Télé et de France Culture font que nos voix pèsent plus ». Nous pouvons émettre l’hypothèse selon laquelle cette régulation décisionnelle par la majorité pourrait entrainer une sorte de standardisation des contenus culturels produits.
Ce fonctionnement met en tension différentes manière de vivre cette organisation, notamment pour les professionnels de France Culture et de France Télévisions. La responsable éditoriale numérique à la Direction de la culture de France Télévisions évoque une difficulté d’organisation pour le community manager : « C’est lui qui gère, qui coordonne, c’est un vrai chantier. On se dit qu’il ne faut pas plus de trois posts par jour quand on est sur une offre vidéo, sinon on noie un peu ». Du côté de la responsable du Pôle vidéo de France Culture, le constat est plus radical, cela produirait un effet de mollesse : « Moi, je suis pour avoir une offre forte, il faut avoir une ligne forte, et du coup il faut quelqu’un qui tranche ». L’avis n’est pas exactement partagé au sein du média puisque le Délégué au développement des programmes « ne pense pas qu’il faut qu’une entité… enfin, [qu’] un média prenne l’ascendant sur les autres, sinon ça veut dire qu’il se l’approprie ».
Face à ces dynamiques de changement, les professionnels sont incités à s’adapter à une nouvelle manière de travailler collectivement pour faire vivre un média commun. Au final, se déploie un « réseau de coopération » (Bullich, 2020) qui structurent les interactions entre les individus. Il est donc question d’« entreprises [qui] s’inscrivent au centre de réseaux de co-opération, composés d’acteurs multiples aux statuts hétérogènes mais qui concourent tous, à des degrés divers, à l’activité « cardinale » qu’elles mettent en place » (p. 44). Les logiques organisationnelles de ce collectif viennent ici favoriser une porosité entre les différents types de métiers qui s’y côtoient. Même si des « résistances » entre ce qui est discuté et approuvé aux rencontres du lundi, et ce qui n’est parfois « pas suivi par les community managers des différentes entités » sont perceptibles : « [o]n assiste à un phénomène, parfois de divorce entre ce qui est plébiscité et ce qui est montré. C’est assez étonnant » (Rédacteur en chef à TV5 Monde). Ce terme de « divorce » matérialise des obstacles liés aux cultures professionnelles multiples qui se rencontrent. Ce mythe de l’absence de dirigeant rencontre le « phénomène collaboratif » qui peut « tend[re] cependant à constituer une boîte noire ». Ainsi que l’expliquent E. Gardère, J.-L. Bouillon et C. Loneux, « [l]e collaboratif paraît en outre fondé sur des logiques empruntant largement à l’auto-organisation (Imhoff, Silva, 2019), à des relations centrées sur l’échange don – contre don, l’entraide, le partage de ressources matérielles et intellectuelles. Les processus de décision et d’action seraient fondés sur la construction de collectifs non déterminés préalablement et où les rapports de pouvoir et les rapports hiérarchiques semblent largement absents » (2019, p. 10). L’ensemble des corps de métier ne semble pas s’exprimer au même niveau, ce constat paraît relever davantage de la régulation entre les individus que d’une impossibilité créative empêchée par le dispositif.
Cependant, cet effet de coopération lié à une modalité de travail collectif s’incarne tout de même dans une stratégie éditoriale : fondée sur une logique de « cross-post », la page Facebook de Culture Prime est envisagée comme un « média vitrine » selon les termes de l’interlocutrice de France Culture et comme « une page transit » par celle de France Télévisions. La page Facebook France.tv arts a été créée spécifiquement pour la mise en place de Culture Prime, le groupe n’en possédant pas avant cela. La responsable éditoriale numérique de la Direction de la culture à France Télévisions explique : « On a convenu que Culture Prime serait un label et pas une offre native. Donc finalement tous les contenus sont postés en natif chez les partenaires, et sont repris sur Culture Prime. C’est une page de « cross-post ». C’est dans la convention, donc on doit tous publier sur nos environnements à nous ». Théoriquement, les community managers relaient en effet les posts publiés sur les pages des réseaux socio-numériques des médias. Finalement, c’est une manière de « distribuer différemment un même contenu », synthétise la responsable du Pôle vidéo à France Culture. Il y a donc une rationalisation de la production de chacune des entités pour son propre compte et le contenu diffusé sur Culture Prime n’est pas nécessairement inédit. Souvent, il est rhabillé avec les codes visuels du média. Dans les faits, « chacun reste maître de « cross-poster » ou pas la vidéo [des autres], en fonction de sa ligne, et c’est évident » (Délégué au numérique de France Culture). Cela n’est pas sans générer des tensions, due à l’impression que les uns jouent le jeu de partager la culture des autres, quand ces autres ne le font pas forcément. Au final, il ressort qu’il n’y a pas de possibilité réelle de partager une conception de la culture et de faire ensemble mais plutôt, une façon de négocier, pour chacun, avec un dispositif, selon ses pratiques, ses moyens et ses imaginaires de la culture.
L’absence de rédaction en chef va de pair avec une organisation du travail supposée être aidée par les outils de travail collaboratif : un groupe WhatsApp pour décider de l’attribution des sujets et des angles, et une planche Trello [3] pour organiser le planning des publications. Cela relève de la promesse de la collaboration, le second outil étant notamment l’un des fers de lance du collaboratif en contexte organisationnel, mais étant ici simplement une manière de structurer des pratiques. Les travaux autour de l’imaginaire collaboratif du numérique ont montré que cela n’allait pas de soi (Flichy, 2001 ; Lallement, 2015). Malgré cette idée, assez séduisante au demeurant, d’un mélange des identités professionnelles, il n’en reste pas moins que les pratiques restent subdivisées : « Tous les community managers sont en connexion aussi. Il y a le comité éditorial, on va dire que c’est plutôt les journalistes ou les rédacteurs qui discutent des projets. Et après, il n’y a pas de sessions régulières de community managers, mais ils sont constamment en échange sur un groupe WhatsApp ou Messenger, peu importe » (directeur du Pôle web d’Arte). L’utopie des premiers temps du numérique est ainsi mobilisée par plusieurs acteurs, laissant penser à une égalisation des rapports sociaux et signifiant que « [l]a coordination des activités collectives est dissimulée derrière des dispositifs sociotechniques qui viendraient la prendre en charge » (Gardère, Bouillon et Loneux, 2019, p. 12). Il subsiste un impensé ici sur la manière dont un dispositif est imposé aux individus. Ainsi, « [l]es outils-méthodes (Hémont, Mayère 2014) constitués par les applications d’intermédiation marchande et les plates-formes collaboratives équipant le travail collectif joueraient ce rôle de fiabilisation des interactions, au même titre que les discours à vocation performative porteurs d’une « idéologie collaborative » décrivant le fonctionnement collectif spontané tel qu’il devrait être » (Idem.). Bien que les outils de travail collaboratif soient promus, la collaboration n’est pas garantie par le simple fait de travailler sur ou avec le numérique.
Enfin, B. Jacquemin invite à considérer la distinction « dans le domaine de la mutualisation des connaissances, entre les démarches de coopération et de collaboration. La coopération recouvre un cheminement collectif dans lequel chaque contributeur effectue une tâche individuelle qui constitue ultérieurement un élément d’un tout coordonné et planifié a priori, chaque élément venant s’adapter aux autres dans le plan initial. La collaboration est moins organisée, plus souple et plus spontanée dans la mesure où aucun plan précis ne préexiste et où chaque contributeur agit indistinctement sur n’importe quels éléments qui composeront le tout final (Morrison et Liu-Sheng, 1992 ; Chawner et Lewis, 2006). Dans la coopération, chaque acteur apporte individuellement sa propre pierre pour composer un tout organisé ; dans la collaboration, chacun travaille avec les autres sur de mêmes pierres de manière négociée et consensuelle » (2010, p. 119). Dans un contexte visant à transformer l’organisation du travail, les acteurs confèrent au dispositif une capacité à produire ce réagencement mais des limites sont constatées. Au final, il semblerait que les comités du lundi représentent des points d’ajustement et de fonctionnement permettant à chaque entité de travailler ensuite de manière plus isolée, et il s’agit surtout, pour Culture Prime, de nécessités de réorganisations internes à chaque service. Plus que du côté de la collaboration, les professionnels seraient plutôt engagés du côté de la coopération, voire de la mutualisation. Et finalement, il convient de se demander si la mutualisation qui, à l’évidence, ne situe pas tant du côté des pratiques professionnelles caractérisant l’organisation de ce projet, le serait davantage du côté des contenus. C’est ainsi les aspects éditoriaux, et notamment les représentations de la culture qui circulent via la forme brève audiovisuelle, auxquels nous allons désormais nous attacher.
Faire culture commune autour de la forme brève audiovisuelle
Des représentations diversifiées de la culture qui se conjuguent
Cette réorganisation des entités du service public conduit à une réflexion sur deux aspects : les représentations de l’information culturelle du service audiovisuel public et les stratégies éditoriales pour la transmettre.
S’intéresser aux représentations de la culture dans les discours de communication présentant Culture Prime, en l’occurrence trois bandes-annonces datant du lancement en novembre 2018, donne la possibilité de caractériser la « promesse » informationnelle formulée par ce média (Jost, 1997). Quelle culture est envisagée comme caractérisant cette coopération entre les différents acteurs de l’audiovisuel public ? Sur un ton décalé, les trois teasers mettent en scène des œuvres reconnues institutionnellement, partagées ici en plusieurs morceaux (un disque de La Traviata découpé comme une pizza, le livre du Rouge et le noir tronçonné à la scie électrique, une œuvre de Banksy passée dans un destructeur de documents) et qui illustrent le slogan « La culture, ça se partage » et répondent à l’une des missions historiques du service public audiovisuel : s’adresser au plus grand nombre. L’ambition de Culture Prime est de jouer avec les codes narratifs des réseaux socio-numériques en portant « une exigence éditoriale […] et c’est ça l’ambition partagée » (délégué au numérique de France Culture).
À la fin de la première saison, deux enjeux ont cristallisé les discussions autour des représentations de l’information culturelle de Culture Prime, témoignant d’une divergence de points de vue entre plusieurs médias malgré « un respect réciproque ». D’abord, la promotion des antennes linéaires en se servant de contenus existants par ailleurs. Pour France Culture, la prescription d’un programme ou d’un événement culturel n’est pas censé être la ligne de conduite, préférant donner à réfléchir et à comprendre l’actualité par le prisme de la culture : « [A]u départ, l’actualité culturelle est pour nous une accroche mais ne doit pas être le sujet » (rédacteur en chef de France Médias Monde). France Télévisions ou Arte sont parfois adeptes de « [L]a ré-éditorialisation de leurs docs en thème […] parfois, ce sont de super histoires, des archives incroyables et des super images. Mais du coup, il n’y a pas la question du point de vue, de l’angle, et puis du rapport au monde en fait, de qu’est-ce qu’on transmet du monde d’aujourd’hui à des gens ». L’équipe étant rattachée à la Direction de la Culture de la télévision publique a certaines missions liées à la fois à faire vivre Culture Prime et à promouvoir des émissions culturelles sur le web. Elle dispose donc d’une matière audiovisuelle liée à « l’information fraîche ». La personne ressource explique clairement ces différences de vision : « Le challenge est que nos maisons ont toutes des lignes édito’ un peu différentes et des contraintes… Nous, on a quand même des programmes culturels à France Télé, où sans faire la promo, mais c’était quand même pas mal de faire un peu de « reboutiquage » et trouver un angle ».
Deuxièmement, Culture Prime est appréhendé par les professionnels comme un « lieu de cross-post », comme le « pot commun de toutes les vidéos postées d’abord sur les pages » de chaque média, selon les termes de la responsable du Pôle vidéo de France Culture dont l’envie est « de faire de Culture Prime un vrai média » et de « ne plus apparaître comme un agrégat de sujets ». Réunir six médias, c’est finalement prendre le risque de cumuler six visions de la culture différentes. Le directeur de la communication et des relations institutionnelles de France Médias Monde explique que « chacun, dans cette offre finalement, apporte une spécificité éditoriale, puisqu’on se rend bien compte que chacun a quand même une signature très propre ».
Cette accumulation de sujets conduit à des conceptions de la culture qui s’additionnent et qui donnent toute « la richesse [du projet] dans la diversité » (directeur du Pôle web d’Arte), mais des visions qui sont fonction des lignes éditoriales de chaque média : les archives pour l’INA, l’information internationale pour France Médias Monde, la francophonie pour TV5 Monde, la culture franco-allemande et européenne pour Arte, une culture populaire pour France Télévisions, et une culture ouverte aux sciences humaines et sociales comme l’histoire et la sociologie pour France Culture. Le rédacteur en chef de TV5 Monde évoque une « collaboration » sans réelle « communion » : « [c]hacun des médias participants… collabore à une plateforme. Et chacun de ces médias à une ligne éditoriale qui n’est pas nécessairement en communion avec celle des autres ». Non seulement ces visions différentes de la culture peuvent produire une ligne éditoriale peu cohérente, mais aussi des manières opposées d’envisager ce média. Les deux grands groupes que sont France Télévisions et Radio France cristallisent à eux seuls ces écarts de conception. Les professionnels de France Télévisions revendiquent vouloir « se servir un peu de la culture populaire pour parler de sujets un peu plus sérieux ». Et d’ajouter « [a]lors que France Culture, en fait, ils ont un bassin d’auditeurs qui est très, très culture, qui est très cultivés ». Finalement, notre interlocutrice à France Culture considère que « c’est une vraie notion de service public de parler des sciences dans un lieu culturel. L’histoire, l’archéologie, la géographie. Pour nous, la culture à France Culture, c’est vraiment tout ça quoi. Et ce n’est pas que la création ». L’hybridité des statuts des uns et des autres nécessite dialogue, adaptation, et a un effet sur les contenus produits et la vision de la culture à défendre. Cela ne se fait pas sans quelques tensions et forme de « pression » due à « l’image qu’ils trimballent à France Culture » : « J’ai l’impression qu’on est un peu assimilé à des contenus peut-être un petit peu plus lourds, moins fun, plus intello’. Ce n’est pas forcément facile de défendre l’idée d’un rapport journalistique à la culture. Parce que toutes les équipes sont constituées de gens avec des profils assez différents. Il y en a qui viennent de la comm’, des gens qui viennent plutôt du marketing numérique ou du numérique, ou des rédactions. Il y a une diversité de profils. Et du coup, je trouve que ça a une incidence sur la façon dont on considère déjà le projet Culture Prime, la place de la culture, et puis le rapport qu’on entretient avec le savoir et la transmission » (Idem.). De façon paradoxale, le Délégué au numérique du média déclare : « On se fertilise les uns les autres, parce qu’on ne part pas du même point. Il est clair que nous, France Culture, on a les deux pieds dans les savoirs au sens strict du terme. Et d’un point de vue, d’écriture média, on doit désapprendre parfois certains de nos réflexes un peu élitistes. […] France Télé hérite d’une culture qui est un peu l’inverse, qui est la culture de la télé, où ça fait bien longtemps que […] c’est très difficile de construire des audiences massives en télévision en culture […] donc il y a des réflexes au contraire d’aller vers le mainstream ».
Dans la manière d’envisager la dimension culturelle, une réflexion quant à la ligne éditoriale et aux contenus informationnels, à la fin de la première saison, s’engage alors entre toutes les parties prenantes. Dans ces écarts, se négocient également des identités professionnelles qui ne sont pas nécessairement bien gérées par le projet : il faut à la fois rester soi-même comme énonciateur et fusionner dans un projet commun.
Une réponse par la mise en place de formats audiovisuels communs
Cette offre, autour de l’actualité culturelle, entend s’adresser aux jeunes et offrir un accès élargi à la culture. Elle lie anciens médias (la radio et les télévisions publiques, et l’INA) et nouveaux médias (les médias sociaux) et permet de prendre en compte les nouvelles formes brèves et audiovisuelles connectées mobilisées ici : les contenus sont sous-titrés, destinés à pouvoir être consommés « en mobilité » sur un téléphone portable et adoptent donc les modalités des objets en vogue circulant sur les réseaux socio-numériques (Aubert, 2022 ; Périneau, 2013). Ainsi, avec ce projet, l’audiovisuel public, en tenant des positions face aux productions de Brut, de Loopsider, de Konbini ou encore d’AJ+, et des « plateformes numériques » (Bullich et Schmitt, 2019), entend occuper le terrain numérique et ouvrir ainsi la voie aux mutations à venir.
Les comités éditoriaux de la fin de l’année 2019 ont suscité une réflexion concernant la création de formats – compris comme un ensemble de propriétés formelles et éditoriales – pour la saison 2 de Culture Prime. L’objectif était de définir une ligne éditoriale commune et reconnaissable pour ces diverses entités du service public audiovisuel, tout en leur permettant de mettre en avant leurs spécificités. Cela a conduit à la conception de sept formats, désignés par les professionnels tantôt comme des « collections », tantôt comme des « modèles » et qui ont servi de base pour structurer le contenu des vidéos ensuite. Le rédacteur en chef de France Médias Monde témoigne du fait que la dénomination de ces nouvelles formes médiatiques fait débat : « On a toujours un peu de mal à se mettre d’accord sur le bon terme. « Formats » apparaissant un peu technique, on va dire. Et « collections » étant sans doute un terme plus éditorial ». Sept déclinaisons sont alors décidées : 1/ Artiviste (qui évoque un artiste ou une personnalité inspirante qui a changé ou qui veut changer le monde par la pratique de sa discipline), 2/ 10 infos insolites (souvent méconnues sur un événement ou une personnalité), 3/ Tuto, 4/ Dévoile (qui présente de nouveaux talents, phénomènes ou lieux culturels à découvrir), 5/ 3, 2, 1 (« des pépites et des moments d’émotion compréhensibles sans contexte » – il s’agit principalement d’archives audiovisuelles sélectionnées par l’Ina qui sont proposées sans être introduites –, 6/ À l’origine de et 7/ Débattez-vous ! Ces formats médiatiques, qui « jouent sur un ressort différent : la surprise, l’émotion, l’apprentissage » (responsable du Pôle vidéo de France Culture), incarnent ainsi la réorganisation à laquelle sont confrontées ces six entités distinctes et témoignent du quotidien de cette rédaction composite qui travaille autour de l’idée de faire culture commune.
Ces collections ne visent pas tant à influencer le contenu de l’information culturelle qu’à structurer la forme de la présentation, l’enveloppe. Notre interlocuteur à TV5 Monde explique précisément qu’il s’agit de « formats qui vont rentrer dans ce nouvel habillage ». Il s’agit de développer des formes à l’intérieur desquelles les lignes éditoriales vont pouvoir s’exprimer. À Arte, le directeur du Pôle web explique qu’il s’agit d’« aller piocher chacun dans cette galerie ou bibliothèque de formats pour proposer des angles spécifiques à chaque média, d’avoir finalement une liste définie de modules qui permet de créer des rendez-vous ». Finalement, ce qui appartient au culturel devient un format : dans la difficulté de faire culture commune (malgré le slogan), on fait formats communs, et c’est le format qui donne une légitimité de statut culturel à chaque contenu.
L’ensemble des professionnels n’est pas convaincu par ces formats. La responsable des réseaux sociaux et communautés web à la Direction de la Communication chez Arte déclare : « Je ne suis pas pour parce qu’éditorialement parlant […], je me pose la question […] de la réception des sujets. Je serai curieuse de voir dans six mois si on interroge les gens, s’ils voient la différence d’un sujet par rapport à un autre. […] Je pense que c’est une bonne idée. Mais je me demande vraiment ». La confrontation de diverses représentations de la culture, comblée par la création de ces formats, est, dans les faits, plus ou moins investie par les uns et les autres. En effet, en dépit de ce changement, on constate une persistance des divergences de points de vue sur ce que doit recouvrir l’information culturelle. Notre interlocutrice de France Culture explique d’ailleurs qu’« il y a une friction quand même assez importante entre France Culture et France Télé sur le format « 10 infos insolites ». Nous, on n’adhère pas parce qu’on trouve qu’il n’y a pas d’angle, de propos, de point de vue avec toutes ces questions thématiques. Il n’y a pas de hiérarchisation. […] Nous on veut défendre plutôt l’actualité vue par la culture, dans une démarche de transmission des savoirs, un pas de côté vis-à-vis du hard news. […] Je trouve qu’on devrait tous aller plus loin dans un rapport journalistique à l’actualité dans un prisme culturel ». Ces contraintes éditoriales continuent de refléter les visions différentes de la culture, et plus largement, de la conception des métiers autour du journalisme.
Dès lors, c’est la liberté éditoriale qui peut donner le sentiment d’être remise en cause avec ces collections. « Le problème c’est que tous les acteurs du projet – et j’en fais partie – sont très soucieux de leur liberté. C’est bien de faire des formats. Mais il ne faut pas que nous soyons les maçons de notre prison. […] [Ç]a devient effectivement important d’homogénéiser, de faire en sorte que les sujets soient mieux repérés et repérables, sur la toile. Pour autant, faut-il tout lisser ? C’est une vraie question. Je ne crois pas » (rédacteur en chef TV5 Monde). La crainte ici est celle d’une standardisation des formats. Le terme « lissage » pourrait être interprété comme plus spécifique, mettant l’accent sur le processus consistant à rendre le contenu plus uniforme, alors même qu’être « journaliste, c’est être libre aussi » (Idem). Ainsi, les journalistes d’hier sont pris dans de nouvelles pratiques qui viennent bousculer le mythe de l’indépendance rédactionnelle.
Les évolutions organisationnelles jouent un rôle crucial dans la définition de la nature matérielle du support, qui se manifeste à travers diverses formes médiatiques (Jeanneret, Souchier, 2005 ; Soulez, Kitsopanidou, 2015). Les entretiens ont clarifié la manière dont les acteurs envisagent les expressions sémiotiques pour les formats courts de Culture Prime, en tenant compte des mutations qui touchent les professions journalistiques. Les questions organisationnelles autour des modalités de coopération entre les différentes entités médiatiques éclairent alors les questions éditoriales d’un rapport à l’actualité culturelle. En d’autres termes, une analyse des conditions de production permet de mettre en évidence la manière dont ces réorganisations influencent les écritures et formats de l’information. Les logiques et effets induits par cette stratégie institutionnelle consistant à réunir les entités de l’audiovisuel public, centrées ici sur l’observation des pratiques professionnelles, invitent à réfléchir plus largement sur les propriétés des objets médiatiques et de leur valorisation. Un travail reste à poursuivre plus spécifiquement autour des collections. Il s’agira d’abord d’illustrer et de comparer les formats prédéfinis au stade précédent afin de comprendre si cela a été une réponse productive à la crise de production et de distribution. Dès lors, nous verrons s’ils peuvent et s’ils suffisent à terme à participer à la constitution d’une ligne éditoriale commune aux différentes cultures professionnelles.
Des pratiques journalistiques anciennes sous l’effet de métiers nouveaux
Au moins deux facteurs viennent perturber les pratiques des journalistes traditionnels. Tout d’abord, parfois, la dimension éditoriale est abordée à la fois par des journalistes (comme à France Culture par exemple), mais également par des professionnels issus de l’éditorial (comme à France Télévisions) ou de la communication (comme à Arte). Le délégué au développement des programmes de France Culture constate tout de même « qu’il n’y a pas beaucoup de journalistes autour de la table » même si certains viennent également de l’édition. Autrement dit, les journalistes en question se confrontent à d’autres, plus jeunes, qui « ont la culture des réseaux sociaux [et] des images » et qui n’appréhendent pas les sujets de la même manière. Nous l’avons écrit, Culture Prime n’est pas un média de prescription culturelle. Or « [c]’est difficile à faire parce que ça veut dire imaginer des sujets éditorialisés pour chacun. Et que tout le monde […] n’est pas journaliste ». Il met en avant une compétence qui relève d’un métier. Cela corrobore avec la diversité des profils impliqués puisque les contenus sont mis en ligne et valorisés par des community managers, ils sont éditorialisés par des motion designer. Se joue une reconfiguration des pratiques journalistiques où les uns négocient avec les identités des autres, mais où la production du contenu informationnel doit faire avec, et même nécessite, l’apport de l’ensemble de ces compétences. Les professionnels sont conviés à s’y ajuster. Ainsi, les journalistes interrogés évoquent les adaptations dont ils doivent faire preuve lorsqu’ils viennent de la télévision linéaire ou de la radio, et qu’ils travaillent étroitement avec des community mangagers par exemple qui apportent leur expertise en termes de création de vidéos et de présence sur les réseaux socio-numériques, d’autres abordent les modalités des coopérations quand certains viennent de l’éditorial, et d’autres de la communication et du marketing. Cela renvoie au « journalisme actuel […] marqué et conditionné par un contexte de montée en technologie de ses environnements de création et de diffusion, et de recherches de données sur les usages produits dans la fréquentation d’un média. Il devient dès lors, et très souvent, une sorte de « commodité » dans un système médiatique profondément transformé par les industries culturelles du numérique » (Jeanne-Perrier, 2019, p. 99). Finalement, le projet Culture Prime est envisagé comme un passage obligé pour les médias qui se doivent d’investir des « formats et des méthodes de travail » (directeur de la communication et des relations institutionnelles de France Médias Monde), en faisant des compromis et des actes de négociations pour le faire vivre et s’adapter au journalisme actuel.
Enfin, la confrontation des identités professionnelles se manifeste s’agissant de la valorisation des contenus en ligne. « Je ne suis pas le N+1 du community manager de TV5 Monde. Il est responsable et directeur du service numérique. Je ne peux pas lui dire : « L’information prime. Je te demande de passer ça ». Je ne peux pas. Non, non, c’est… c’est 2 familles à part » (rédacteur en chef). Il en est de même concernant les sujets choisis qui peuvent créer une divergence de points de vue : « Aujourd’hui, une interview de Gainsbourg ou d’un chanteur jamaïcain ou une écrivaine, peu importe, est-ce que le sujet est intéressant ? Est-ce qu’il va impacter ? Moi qui ai passé la cinquantaine, je crois aussi que parfois, et c’est vice-versa, que je m’adresse à des gens, les community managers qui ont 25-30 ans, pour qui il paraît que c’est important, mais ils ne voient pas bien quoi. Et eux-mêmes pourraient me proposer des choses […]. Parfois dans une fracture, parfois dans une complémentarité de connaissances. Il y a un socle commun qui est quand même la curiosité ». Le journaliste met l’accent sur l’expérience et le recul, et perçoit les community managers, généralement plus jeunes, comme pouvant accorder plus d’importance à des critères tels que la pertinence pour leur public ou ce qui serait « viral ». Il évoque une « culture du chiffre » qui « aujourd’hui assaille tous les community managers » et qui « suspecte ». Pourtant, la responsable des réseaux sociaux et communautés web à la Direction de la Communication chez Arte déclare : « Aujourd’hui pour moi, avec mon parcours, avec mon expérience, la course aux fans elle est terminée depuis très longtemps. On est plus là-dedans. Mais c’est toujours chouette d’avoir des beaux chiffres parce qu’évidemment quand vous lancez une page aujourd’hui sur Facebook on sait très bien qu’elle va avoir beaucoup beaucoup de difficulté à être vue, il va falloir pas mal de moyens ».
Malgré tout, Culture Prime emprunte aux « vieux » médias et la prégnance du modèle linéaire, de la télévision notamment, est toujours effective. L’idée de programmation est, au regard de la régularité des posts, maintenue dans cet environnement numérique. Si le web permet une flexibilité, « une régularité de publication qui n’est pas figée », le directeur du Pôle web d’Arte déclare que « les rendez-vous, ça existait depuis quand même très, très longtemps, depuis que les médias sont médias. De publier chaque semaine un programme à telle et telle heure, finalement c’est une fidélisation que tous les médias recherchent ». Le maintien de logiques linéaires et une reprise d’un format télévisuel sur le web apparaissent également dans différents espaces de communication mobilisés et inventés, notamment par France Télévisions qui a des prises de parole uniques pour Culture Prime, et cela est dû en très grande partie à l’investissement et aux aspirations de l’équipe et de la responsable éditoriale numérique de la direction de la culture. Elle a par exemple animé une « émission numérique » en direct, Accès Live, depuis le festival d’Avignon, lors d’un spectacle du Lac des Cygnes à l’Opéra Bastille ou encore à l’Urban Art Fair durant une saison. Nous avançons dès lors l’hypothèse que les territoires du numérique restent, pour France Télévisions, une solution pour maintenir sa « mission culturelle », enjeu historique, qui est de moins en moins exploitée sur l’antenne linéaire (Alexis, 2019).
Conclusion
Au final, cet article visait à apprécier la portée de ce projet numérique de l’audiovisuel public au regard des mutations institutionnelles liées à l’ensemble du secteur et des reconfigurations au sein des équipes de chacune des entités. Il entendait ainsi porter un regard à la fois sur les stratégies de l’audiovisuel public, les conditions de production et de diffusion des contenus délinéarisés en éclairant le cadre institutionnel (en termes de politiques publiques et d’agencement administratif) au sein duquel elles s’inscrivent. L’enquête auprès des acteurs a permis de mettre au jour les négociations, voire les dissensions, entre eux et les différentes cultures médiatiques à l’œuvre dans ce projet de coopération complexe. Les réorganisations nécessaires à la mise en production de Culture Prime cristallisent des différences entre des cultures médiatiques, mais aussi la traditionnelle tension entre journalisme, communication et autres nouveaux métiers, ainsi que la prégnance du modèle linéaire, notamment de la télévision. Une réflexion en cours autour des contenus et de leur valorisation, particulièrement sur les réseaux socio-numériques, devra être consolidée.
Ce projet s’inscrit dans un contexte où l’on attribue au numérique une capacité à transformer les manières de faire et les méthodes de travail. Il résulte principalement d’une reconduction des structures organisationnelles, des pratiques et même des imaginaires de la culture. Les travaux sur les dispositifs numériques révèlent que la collaboration en entreprise oscille souvent entre ajustements et résistances. Ici, le principe auto-régulateur du dispositif semble atteindre ses limites car, finalement, des modes de « gouvernance » (alternativement entre France Culture et France Télévisions) s’imposent et des pratiques tendent parfois à se perpétuer de manière plus individuelle que collective. En dehors des réunions éditoriales, il semble qu’il y ait peu de coopération entre tous, les uns et les autres paraissant travailler au sein de leur équipe interne. Tout en soulignant les résistances des acteurs, nous entendons la nécessité dans laquelle ils sont de faire commun. Nous les situons finalement à mi-chemin, entre une coopération qui prend au moins des formes minimales, et une véritable volonté de s’ajuster à ces nouvelles modalités de travail.
La seconde saison de Culture Prime a été un succès : en février 2019, on comptait 240.000 abonnés sur la page Facebook [4], un nombre qui avait presque doublé du fait des périodes de confinement (au 13 juillet 2020, la page comptait 419.000 abonnés). En fin de compte, on peut se demander où réside l’intérêt de ces partenaires à collaborer, surtout face au risque de la « fusion des antennes », alors même que les projets de réforme de l’audiovisuel public reviennent périodiquement sur le devant de la scène politique. Les individus impliqués dans Culture Prime ne vivent pas nécessairement ce rapprochement comme une collaboration possible entre les médias, mais perçoivent plutôt que le projet « a[it] été pensé comme une synergie […] sur le numérique, pour travailler ensemble, il y a différentes façons de le faire. Il y a à travers des questions d’infrastructures, des questions techniques, d’un point de vue édito’, peut-être des projets à imaginer ensemble » (directeur du Pôle web d’Arte). Pour le délégué au numérique de France Culture, « la question d’imaginer des coopérations éditoriales au sein du service public se reposent. Et souvent les thèmes qui sont abordés, ce sont la proximité, la jeunesse et la culture […] parce que ce sont des chantiers extrêmement importants pour le service public ». Si la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, déclarait préférer des « coopérations par projet » [5] entre les différentes entités à la création d’une holding de médias publics rassemblant France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’Ina, en février 2024, la nouvelle ministre, Rachida Dati, soutient, quant à elle, la proposition de loi sénatoriale, portée par Laurent Lafon, président de la commission de la Culture, de l’Éducation, de la Communication et du Sport du Sénat [6]. Culture Prime participe de ces tentatives qui réunissent des individus issus de diverses cultures professionnelles et de divers médias, et qui participent à penser la culture de service public.
Notes
[1] Nous avons déjà publié les résultats d’une ethnographie en ligne autour de la participation des publics sur la page Facebook de Culture Prime (Alexis, 2020). Nous n’aborderons donc pas ici cet aspect complémentaire de l’étude.
[2] On retrouve néanmoins une forme de hiérarchie porté par un comité de pilotage (les quatre dirigeants du départ) qui valident les changements et décisions éditoriales (comme les modifications de format que nous évoquerons ci-après).
[3] Trello est un outil visuel en ligne de gestion de projet qui permet d’organiser le travail collaboratif et le suivi des tâches.
[4] « Succès de #Culture Prime », communiqué de presse du 03/02/2019.
[5] URL : https://www.publicsenat.fr/actualites/culture/audiovisuel-public-que-contient-le-texte-adopte-par-le-senat Consulté le 04/04/2024.
[6] URL : https://www.publicsenat.fr/actualites/politique/reforme-de-laudiovisuel-public-les-planetes-sont-alignees-pour-une-adoption-du-texte-se-felicite-laurent-lafon Consulté le 11/05/2024.
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Auteure
Lucie Alexis
Lucie Alexis est maîtresse de conférences à l’Université Grenoble Alpes au sein du GRESEC et chercheuse associée au CARISM. Ses recherches portent principalement sur les mutations de la télévision, l’évolution des formats audiovisuels (formes brèves, podcasts, extension de la télé-réalité sur les médias sociaux, etc.) et la mobilisation des archives audiovisuelles dans les productions numériques.
lucie.alexis@univ-grenoble-alpes.fr