L’interdiction du perchloroéthylène et l’invisibilité de l’hypersensibilité chimique : une illustration de l’espace en trois dimensions des controverses en santé-environnement
Résumé
Cet article se propose d’analyser le lien entre la trajectoire de problèmes en santé-environnement et la dynamique des « conflits épistémiques » que leurs définitions suscitent aussi bien dans les « arènes discrètes » et la « sphère publique » que dans les « champs d’expérience ». Le but est de comprendre pourquoi la publicisation des risques liés au perchloroéthylène a conduit à son interdiction, tandis que le syndrome d’hypersensibilité chimique peine à exister dans l’espace public. Concernant le perchloroéthylène, nous soulignerons que le surgissement de victimes, tout en rendant tangibles les risques sanitaires, a reconfiguré les jeux d’acteurs, précipitant ainsi la sortie du solvant. Dans le cas de l’hypersensibilité chimique multiple, l’hypothèse est que son invisibilisation tient à l’irrésolution des « disputes » entre scientifiques sur les causes de ce syndrome, mais aussi à l’existence de processus conflictuel similaire au sein des « champs d’expérience » entre les personnes hypersensibles et leur entourage.
Mots clés
Controverses épistémiques, processus de publicisation, épreuves de réalité
In English
Title
The Prohibition of Perchloroethylene and The Invisibility of Chemical Sensitivity : An illustration of The Three-Dimensional Space of Environment Health Controversies.
Abstract
The question which this paper deals with concerns the relation between the career of environmental health problems and « epistemic conflicts » that their definitions generate. The aim is to understand why the French government banned the use of perchloroethylene for dry-cleaning in 2012, while people suffering from multiple chemical sensitivity syndrome (MCS) have difficulties to draw public authorities’ attention. We show that the emergence of victims has made real health risks related to the use of perchloroethylene in laundry, but also has upset the balance of power among actors concerned by this issue. In the case of MCS, our hypothesis is that its invisibility has been resulted from an unsolved dispute between scientists, but also between MCS people and their interlocutors.
Keywords
Epistemic controversies, publicisation process, reality tests.
En Español
Título
La prohibición de percloretileno y la invisibilidad de la sensibilidad química múltiple: una ilustración del espacio en tres dimensiones de controversias en salud y medio ambient
Resumen
Este artículo se propone analizar la trayectoria de los problemas de salud y medio ambiente, así como la dinámica de las controversias epistémicas creadas por sus definiciones. El objetivo es comprender el por qué la difusión de riesgos ligados al percloroetileno ha llevado a su prohibición, mientras que el síndrome de la sensibilidad química múltiple (SQM) difícilmente existe en el espacio público. En relación al percloretileno, yo mostraré que el surgimiento de víctimas, en conjunto con la aparición de los riesgos sanitarios, ha reconfigurado la interacción de diferentes actores, precipitando así la salida del solvente. En el caso de la SQM, yo formulo la hipótesis de que su invisibilización se debe no solamente a los conflictos sin resolver entre científicos sobre las causas de este síndrome, sino también a la existencia de procesos conflictivos similares a los que se encuentran den.
Palabras clave
Controversias epistémicas, proceso de difusión, pruebas de realidad
Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :
Luneau Aymeric, , « L’interdiction du perchloroéthylène et l’invisibilité de l’hypersensibilité chimique : une illustration de l’espace en trois dimensions des controverses en santé-environnement », Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°22/4, 2021, p.45 à 62, consulté le samedi 21 décembre 2024, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2021/supplement-b/linterdiction-du-perchloroethylene-et-linvisibilite-de-lhypersensibilite-chimique-une-illustration-de-lespace-en-trois-dimensions-des-controverses-en-sante-enviro/
Introduction
Le 5 décembre 2012, la ministre française de l’Écologie interdit l’usage de « machines utilisant du perchloroéthylène situées dans des locaux contigus à des locaux occupés par des tiers », selon les termes de l’arrêté no 2345 qu’elle vient de signer. Cette interdiction est intervenue après que des « victimes » se soient mobilisées pour dénoncer les risques sanitaires liés à la contamination de leurs logements ou de leurs lieux de travail par les rejets « perchlorés » de pressings voisins. La trajectoire de ce premier « dossier » tranche avec celle du « syndrome d’hypersensibilité chimique multiple » (ci-après : la HCM). Ce syndrome, décrit au milieu des années 1980, se traduit chez les personnes qui en souffrentpar l’apparition de symptômes variés au contact de la moindre substance chimique comme l’encre d’un stylo bille (Kroll-Smith et Floyd, 2010). Les personnes hypersensibles que nous avons rencontrées lors d’entretiens me demandaient par exemple, de ne pas mettre d’habits récemment lavés pouvant contenir des résidus de lessive. Sur le plan qui nous intéresse ici des liens entre controverses et problèmes publics, la HCM a souffert jusqu’à présent d’une certaine invisibilité, particulièrement en France. Une invisibilité qu’illustre la citation suivante extraite d’un entretien réalisé au ministère de la Santé : « je n’ai pas tellement d’informations parce que moi je travaille plutôt sur la question des ondes électromagnétiques. Le sujet de l’hypersensibilité chimique multiple c’est vrai qu’on s’en est peut-être moins saisi. » Comment peut-on expliquer cette différence de traitement entre les victimes du perchloroéthylène (ci-après : PCE), qui ont vu leur revendication concernant l’interdiction du solvant aboutir, et la difficile existence dans l’espace public des « chimico-sensibles » ?
Pour répondre à cette question, nous nous appuierons sur l’analyse de corpus de textes construits au cours de nos recherches doctorales (Luneau, 2015) entre 2011 et 2014. Les corpus de textes ont été analysés avec le logiciel Prospéro qui propose plusieurs fonctionnalités pour suivre des répertoires d’arguments (Chateauraynaud, 2003). Le but était de reconstruire la trajectoire des dossiers en repérant les bifurcations, les moments marquants, les protagonistes ainsi que l’évolution des arguments. Dans le cas du « dossier » sur le perchloroéthylène dans les pressings, le corpus est composé de 335 textes publiés en France. Pour l’hypersensibilité chimique multiple, nous analysons deux corpus de textes. Le premier est anglophone. Il est constitué de 747 textes, répartis sur 27 ans. Les textes sont essentiellement issus de la presse canadienne et américaine. Le second corpus est composé de 211 textes francophones, répartis sur 20 ans. L’analyse de corpus a été enrichie par trente entretiens semi-directifs réalisés avec des figures centrales des dossiers. Enfin, les données sur les publications scientifiques (figure 2) concernant le syndrome d’hypersensibilité chimique multiple ont été recueillies à partir de trois bases : « Web of Science », « Scopus » et « Istex ». Les formules de recherche utilisées dans chacune de ces bases sont indiquées dans le tableau 1.
Notre hypothèse est qu’il est nécessaire d’analyser les interactions entre les « arènes discrètes » de la régulation des risques d’une part et la « sphère publique » et ce que nous appelons les « champs d’expérience » d’autre part pour comprendre la trajectoire d’un problème. Bien qu’ils ne forment pas un ensemble homogène sur le plan théorique, les travaux en sciences sociales sur la production de l’ignorance ont en commun de centrer l’analyse sur les « arènes discrètes » des sciences et des politiques. Claude Gilbert et Emmanuel Henry (2012, p. 52-53) postulent que les raisons de l’émergence d’un problème dans l’espace public sont à rechercher dans les luttes de pouvoirs que se livrent les acteur·trices ayant accès aux lieux de fabrication de l’action publique. Dans Chemical Consequences, Scott Frickel (2004) expose que les alertes lancées dans les années 1960-1970 sur les risques liés à la présence de substances mutagènes dans l’environnement s’expliquent par la mobilisation de « scientifiques activistes » pour légitimer la toxicologie génétique naissante, mais aussi par la diminution des financements de recherche qui a conduit les toxicologues à recourir aux agents chimiques, moins coûteux que les agents physiques comme les rayons X privilégiés jusqu’alors dans les expérimentations sur la mutagénicité. Laura Barbier (2021) met en évidence, de son côté, que l’impossibilité de conclure la controverse sur le lien entre les rejets de l’usine de retraitement des déchets nucléaires de La Hague (France, Normandie) et les excès de cas de leucémie infantile dans les communes alentour tient au fait que les groupes d’experts mobilisés se sont placés avant tout dans le cadre des discussions propres à leurs communautés scientifiques de référence en s’appuyant sur des modèles toxicologiques et épidémiologiques standards. Ils connaissaient pourtant l’inadéquation de ces modèles au problème posé par les populations locales. François Dedieu et Jean-Noël Jouzel (2015) situent quant à eux les processus d’invisibilisation des risques liés à l’exposition aux pesticides des travailleurs agricoles dans les routines organisationnelles des institutions chargées de la régulation de ses risques.
Il ressort toutefois de la littérature que la publicisation d’un problème ne se réduit pas aux processus à travers lesquels un problème est pris en charge par une puissance d’action publique (Joseph Gusfield, 2012, p. 115). Depuis l’article de Malcolm Spector et John Kitsuse (2012 [1970], p. 89-90), la notion de publicisation a d’abord été associée au processus à travers lequel un problème devient visible grâce à l’action de individus capables de mobiliser l’opinion et de subsumer leurs causes sous la bonne grammaire publique. À propos des controverses sur le développement et la mise à disposition des traitements contre le sida, Nicolas Dodier (2005, p. 21-22) souligne que certaines revendications des malades et de leurs porte-paroles ont été prises en compte car ils.elles ont su fonder leur argumentation sur des « biens en soi » – la santé, la non-stigmatisation, l’accomplissement de soi – dont la valeur n’est plus à justifier. La notion de publicisation renvoie aussi au processus par le biais duquel des personnes en viennent à se constituer en « public » (Dewey, 2010, p. 108) autour d’une situation vécue collectivement comme problématique (Cefaï, 2019, p. 36). Dans l’article « La dimension sensible des problèmes publics » (2012), Stéphane Tonnelat expose que le bayou s’est transformé en problème public après l’ouragan Katrina au sens où il est devenu un objet de « concernement » pour les habitant·es d’un quartier défavorisé de La Nouvelle-Orléans. Sans nécessairement revendiquer une approche pragmatique, de nombreux travaux sur les conflits sanitaires et environnementaux ont également mis en évidence l’importance du travail d’enquêtes effectué par des riverain·es, des victimes ou des travailleurs·ses dans l’émergence de problèmes publics relatifs aux effets sur la santé d’un ensemble de pollution (Akrich, Barthe et Rémy, 2010).
Pour notre part, nous montrons que les trajectoires des deux cas présentés au début sont liées à la façon dont les dynamiques sociales propres à ces trois espaces – arènes discrètes, sphères publiques et champs d’expérience – ont interagi entre elles au fil du processus de définition et des « conflits épistémiques » qu’ils ont suscités. L’expression « conflit épistémique » rend compte du fait que les désaccords sur la définition d’un problème ne se limitent pas aux controverses scientifiques. Celles-ci apparaissent aussi entre les membres d’une famille, des collègues de travail ou les habitant·es d’un quartier. Par ailleurs, nous utilisons le terme de « conflit », bien que « controverse » soit préférable, pour éviter de confondre avec les « types d’échanges polémiques » proposés par Marcelo Dascal (1998) et que nous mobiliserons pour décrire les formes prises par les désaccords. Le philosophe israélien parle d’abord de « discussion » lorsqu’il existe un consensus sur la définition du problème et sur les procédures à mettre en œuvre pour résoudre le désaccord. Lorsqu’un tel consensus n’existe pas, la « discussion » devient une « controverse ». Il ne s’agit plus alors de convaincre l’autre que la proposition que l’on défend est la seule qui soit juste, mais de le persuader qu’elle est la plus raisonnable. Toutefois, si l’échange d’arguments ne suffit pas à résorber le dissensus, on entre dans un régime de « dispute » entre des positions incommensurables. Dans ce cas, la seule issue possible est, selon Dascal, l’abandon de l’une ou de toutes les parties. Tandis que le basculement dans l’une de ces trois formes dépend des cadrages adoptés par les acteur·trices et des appuis dont ils disposent pour les rendre tangibles, il a des effets en retour sur la constitution d’une attention collective.
Que ce soit pour la HCM ou des risques liés à l’utilisation du perchloroéthylène dans les pressings, nous verrons que leur médiatisation (sphère publique) tient au déplacement des « conflits épistémiques » en dehors des lieux de l’évaluation et de la gestion des risques (arènes discrètes) induits par le surgissement des victimes. Ces « conflits épistémiques » ont en revanche pris des formes différentes. Dans le cas du perchloroethylène, qui est l’objet de la première partie, nous nous situons dans un régime de discussion. L’expérience des victimes a coïncidé avec le cadrage en termes d’« usage contrôlé » adopté par les pouvoirs publics. En rendant tangible l’incapacité des gérants de pressings à maîtriser les rejets de solvants, le surgissement des victimes a pour effet de redéfinir les jeux d’acteurs au détriment des représentant·es des pressings. Dans le cas de l’hypersensibilité chimique multiple, la controverse scientifique s’est transformée en une dispute et demeure « irrésolue ». Après avoir exposé brièvement les raisons de cette irrésolution, nous montrerons, dans la seconde partie de l’article, que cette irrésolution a contribué à l’invisibilisation de la HCM en altérant non seulement l’intérêt des communautés scientifiques pour le syndrome, mais en rendant également plus difficile la constitution d’un « public » autour de l’hypersensibilité.
L’interdiction du perchloroéthylène dans les pressings
Le perchloroéthylène (ci-après : PCE), ou tétrachloroéthylène, est un solvant chloré dérivé de l’éthylène dont la formule chimique est C2Cl4. Ses propriétés dégraissantes en ont fait un solvant efficace utilisé dans les pressings pour le « nettoyage à sec », mais aussi pour laver les pièces manufacturées dans l’industrie comme substitut du trichloréthylène.
Diplomatie d’influence et diplomatie économique
La prise en charge par les pouvoirs publics français des risques sanitaires liés à l’utilisation du PCE dans les pressings débute au tournant des années 2000, lorsque l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) est chargé de réaliser une revue de la littérature sur les risques sanitaires relatifs au nettoyage à sec préalablement à la création en 2002 de l’arrêté no 2345 concernant l’utilisation de solvants pour le nettoyage à sec et le traitement des textiles (Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, 2002). L’étude met en évidence un risque fréquent de contamination des logements par les vapeurs de PCE émanant des pressings. En complément de cette première étude, l’Ineris a réalisé elle-même trois campagnes de mesure chez des particuliers résidant au-dessus de pressing en 2002 (Délery, 2002), 2005 et 2007 (Chiappini et Délery, 2008 ; Délery, Chiappini et Cicolella, 2008). Les auteur·trices ont constaté des « niveaux de risques préoccupants » pour les effets non cancérigènes (effets rénaux et neurologiques) et « non négligeables » pour les effets cancérigènes (Chiappini et Délery, 2008, p. 40) lorsque les pressings ne sont pas en conformité avec l’arrêté no 2345. L’utilisation du PCE dans les pressings devient un problème d’« usage contrôlé » (Jouzel, 2019) : le risque ne provient pas du produit lui-même mais du fait que les gérants·es de pressing n’adoptent pas les techniques de captation des effluves de solvant prescrites par les pouvoirs publics. Ce cadrage est bien compris par le Conseil fédéral de l’entretien du textile (CFET) qui écrit à ses adhérents que « le perchlo existera encore dans 10 ans si, et seulement si, nous sommes en mesure de maîtriser et de réduire ces émissions et de le prouver tant aux pouvoirs publics qu’à nos clients » (Conseil fédéral de l’entretien du textile, 2008a). Il transparaît par ailleurs dans le choix du ministère de l’Écologie d’une gestion réglementaire classique des risques (Borraz et Gilbert, 2008). À la suite des rapports de l’Ineris, le ministère a d’abord organisé en 2008 une opération de contrôle auprès de 275 pressings. Puis, considérant que 189 des établissements contrôlés ont reçu un arrêté préfectoral de mise en demeure (Secrétariat d’État à l’Écologie, 2008), le ministère de l’Écologie a procédé en 2009 à un renforcement des contraintes imposées par l’arrêté no 2345 (Santi, 2009).
Le cadrage en termes d’ « usage contrôlé » est conforté par un avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP) qui « recommande qu’à l’avenir aucun nouveau pressing ne soit installé au voisinage immédiat de logements, sauf à recourir à des techniques et dispositifs garantissant contre toute contamination des locaux » (2010b). Cet avis répondait à une saisine du ministère de la Santé adressé au HCSP en 2008 (Haut conseil de la santé publique, 2010a), après une alerte de l’unité « Air et mesure » du Laboratoire central de la Préfecture de police de Paris (LCPP). Les membres de cette unité, chargée de traiter les plaintes liées aux nuisances environnementales, avaient constaté une augmentation des signalements à l’encontre de pressings entre 2005 et 2008 ainsi que de fortes concentrations de PCE dans les logements inspectés (Goupil et al., 2012). Il est intéressant de noter que l’avis du HCSP, rendu le 16 juin 2010, n’a pas été pris en compte dans la deuxième version de l’arrêté no 2345, publiée en 2009. Ce décalage des agendas indique qu’en 2009 le ministère de l’Écologie reste le principal « propriétaire » du problème. Un autre indice de cette configuration asymétrique est apporté par la cheffe de l’unité « Air et mesure ». Alors que je lui demandais s’il y avait eu des échanges avec l’équipe de l’Ineris, elle nous confia : « je connais les gens qui travaillent à l’Ineris, mais chacun a sa feuille de route. Eux, ils dépendent du ministère de l’Écologie. Sauf que le ministère nous a longtemps ignorés. » Une configuration que le surgissement de victimes va modifier.
Épreuves de réalité et reconfigurations des jeux d’acteur
En plus du surgissement des victimes, en particulier la personne décédée à Nice, d’autres épreuves de réalité mettent en cause la capacité des gérant·es et employé·es de pressing à contrôler les émanations de solvant. Il apparaît tout d’abord que la non-conformité des pressings tient autant aux négligences de quelques personnes indiscipliné·es qu’aux coûts importants que les techniques de captage du perchloroéthylène représentent pour les très petites entreprises que sont la majorité des pressings en France. Par ailleurs, les mesures du Laboratoire central de la Préfecture de Paris ont mis en évidence que les dispositifs préconisés par l’arrêté de 2009 ne suffisaient pas à prévenir la contamination des logements. Non seulement la durée de vie des filtres à charbon est trop courte (Goupil et al., 2012, p. 79), mais en plus le bruit des systèmes de ventilation contraint les gérants de pressing à les arrêter pendant la nuit, alors que les vêtements nettoyés sont en train de sécher et continuent de relarguer des vapeurs de PCE (p. 78). L’Ineris reconnaît elle-même que les dispositions encadrant l’utilisation du PCE dans les pressings ne sont pas « suffisantes pour garantir des concentrations inférieures à la valeur guide long terme dans les locaux occupés par des tiers se trouvant au-dessus ou à proximité immédiate. Ainsi, la suppression de l’utilisation du perchloroéthylène […] nous paraît pouvoir être étudiée » (Chiappini, Gaucher et Larbre, 2011). Cette interdiction, réclamée par l’Advepp et le Réseau environnement santé (fondé en 2009 et présidé par Cicolella), est actée le 20 avril 2012 devant l’impossibilité « d’atteindre une situation satisfaisante sur le plan sanitaire dans une part significative des logements contigus à des pressings » (Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, 2012). La nouvelle version de l’arrêté no 2345 publiée le 9 décembre 2012 dans le Journal officiel proclame que « les machines de nettoyage à sec utilisant du perchloroéthylène ou tout autre solvant dont la tension de vapeur à 20°C est supérieure ou égale à 1900 pascal situées dans des locaux contigus à des locaux occupés par des tiers » seront définitivement interdites en 2022 (Arrêté no 2345, article 3, point 2.3.3).
Cette reconfiguration des jeux d’acteurs et des asymétries de prise sur la définition du problème est rendue particulièrement visible lors des débats sur les échéanciers.
Dans un premier temps, les organisations professionnelles avaient inscrit, dans l’arrêté, le principe que les machines fonctionnant au PCE soient remplacées après leur quinzième anniversaire à partir du 1er janvier 2014. Cela aurait eu pour conséquence qu’une machine au perchloroéthylène mise en service en 2012 pourrait être exploitée jusqu’en 2027, soit cinq ans après l’échéance prévue par l’arrêté (Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, 2012, p. 13). Lors des débats du 26 juin 2012 sur le projet d’arrêté au Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT), cette mesure est défendue par le représentant du ministère de l’Écologie : « obliger les petites entreprises à remplacer leur machine avant cet amortissement […] les conduirait à la faillite. » Néanmoins, critiquée par l’association environnementale Robins des bois qui « s’oppose au projet tel qu’il est rédigé » et par la majorité des membres présent·es à la réunion du CSPRT (Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, 2012, p. 14), la mesure est retirée de l’arrêté final.
Notre hypothèse est que cette décision est corrélative d’une reconfiguration des jeux d’acteurs liés au surgissement des victimes. Comme nous l’avons exposé, jusqu’en 2009-2010, le problème du PCE est essentiellement géré par le ministère de l’Écologie en concertation avec les représentants des pressings. En 2008, un plan d’action est par exemple élaboré « conjointement entre le ministère du Développement durable et les syndicats représentant la profession ». À partir de 2010, cette relation dyadique entre le ministère de l’Écologie et les représentants des pressings est remise en cause avec l’apparition de l’Advepp et du Réseau environnement santé. Par ailleurs, la présence du ministère de la Santé, justifiée par sa saisine adressée au HCSP, semble avoir été poussée par les associations. On lit dans un communiqué de presse (Réseau environnement santé, 2012) que les deux associations ont rencontré le directeur général de la santé qui leur a annoncé que « le principe de l’interdiction du perchlo et celui de la participation des trois associations au suivi de l’application des mesures étaient adoptés ». Elles se félicitent ensuite « du changement radical de la politique du ministère de la Santé [je souligne] qui ne défend plus l’usage contrôlé du perchlo » alors que la décision revient officiellement au ministère de l’Écologie.
Le cas de l’hypersensibilité chimique
C’est en 1987 que l’expression « multiple chemical sensitivity syndrome » est utilisée pour la première fois par Mark Cullen (1987) pour décrire un ensemble de symptômes chroniques observés sur des patient·es à la fin des années 1970 dont le seul point commun est d’avoir été en contact avec des produits chimiques. La définition proposée par Cullen (1987, p. 657), visible dans le tableau 2 ci-dessous, illustre ce que Yannick Barthe et Catherine Rémy (2010) appellent un « principe d’incertitude » : elle manifeste davantage les ignorances que les connaissances du corps médical.
De la « controverse » à la « dispute »
Durant les années 1990, on observe une augmentation du nombre de publications scientifiques sur la HCM (figure 2). Cela coïncide avec le moment où le syndrome devient un problème public en Amérique du Nord notamment. Au Canada, la création d’une commission, dite « commission Thomson » (1985), sur les hypersensibilités environnementales par le ministère de la Santé de l’Ontario a conduit au financement de recherches sur la HCM ainsi qu’à l’ouverture en 1994 d’un service dédié à la prise en charge des personnes hypersensible au Women’s College Hospital. Aux États-Unis, la recherche sur l’hypersensibilité chimique multiple a bénéficié de l’affaire des « bâtiments malsains » de l’Environmental Protection Agency (Teichman et Fine, 1989), puis de la controverse sur le « syndrome de la guerre du Golfe ». Cette controverse a opposé le Department of Defense et le Department of Veterans Affairs, qui estiment qu’il s’agit d’un syndrome de stress post-traumatique, et les collectifs d’ancien·nes combattant·es qui définissent le syndrome de la guerre du Golfe comme une forme d’hypersensibilité chimique provoquée par les substances chimiques utilisées durant la seconde guerre du Golfe (Zavestoski et al., 2002).
À travers cette opposition entre stress post-traumatique et « maladie environnementale », se retrouve la polarisation qui structure la controverse sur la HCM depuis le début. En effet, d’un côté, les « thèses environnementales » voient, dans la HCM, une réponse physiologique à une intoxication. Au sein même de ce groupe, plusieurs hypothèses explicatives sont en concurrence. Certain·es estiment que la cause est de nature immunologique (Levin et Byers, 1987). D’autres pensent qu’il faut rechercher un mécanisme biochimique (Galland, 1987). De l’autre côté, l’ensemble des « thèses psychogéniques » considèrent que la HCM est une sorte d’« effet nocebo », car aucun test habituellement utilisé par la communauté scientifique n’a pu établir de corrélation entre les symptômes et une exposition à des substances chimiques (Terr, 1987). Pour les défenseurs·ses de la thèse environnementale, cela tient au fait que les modèles toxicologiques dominants ne prennent en compte ni les « faibles doses » ni les « effets cocktails ». Tandis que les promoteur·trices de la thèse psychogénique voient dans les explications environnementales l’empreinte des théories de l’« écologie clinique » considérées comme pseudoscientifiques : « la procédure utilisée par les écologues cliniciens pour diagnostiquer les hypersensibilités chimiques multiples a été décrite en détail pour que le lecteur puisse se rendre compte de la nature subjective du test» [1] (Terr, 1987, p. 692). On retrouve finalement une forme de controverse similaire à celle que Barbier (2021) a observée concernant les cas de leucémies infantiles autour de La Hague où aux controverses tant méthodologiques que théoriques (McMullin, 1987) entre paradigmes divergents, s’ajoutent des conflits de juridiction (Abbott, 1988) visant à déterminer qui des psychiatres, des toxicologues, ou des immunologues auront autorité sur cette nouvelle pathologie.
Ce faisant la controverse scientifique s’est transformée en « dispute » entre des visions incommensurables dont la seule issue est, selon Dascal (2010), la défection d’une ou de toutes les parties. Ce changement de régime est illustré par le workshop organisé à Berlin du 21 au 23 février 1996 par l’International Programme on Chemical Safety (IPCS, 1996) et trois institutions fédérales allemandes : le ministère de la Santé, l’institut fédéral pour la protection de la santé des travailleurs et la médecine vétérinaire (BGVV), et l’agence environnementale fédérale (UBA). En plus des représentants de ces quatre institutions, le workshop a réuni 18 expert·es de la HCM, ainsi que des représentants de l’European Centre for Ecotoxicology and Toxicology of Chemicals (ECETOC) et l’International Life Science Institute (ILSI). Le workshop a produit l’effet inverse de celui recherché, à savoir établir un consensus sur la définition du syndrome et élaborer un programme de recherche commun. L’adoption de l’expression « intolérance environnementale idiopathique » (IEI), jugée plus neutre sur le plan étiologique – idiopathique signifiant « inexpliqué » – que le terme « hypersensibilité chimique multiple », conduit les tenant·es de la thèse environnementale à se désolidariser de la conférence. Elles et ils dénoncent l’emprise de l’industrie chimique sur la conférence en particulier et l’IPCS en général, mettant en avant que l’European Centre for Ecotoxicology and Toxicology of Chemicals et l’International Life Science Institute, les seules organisations non gouvernementales présentes au workshop, ont des liens étroits avec des multinationales comme le fait que BASF, Bayer ou Monsanto (Ashford et Miller, 1998, p. 282-283 ; Dayan, 1996).
Du fait de cette dispute, le processus d’enquête n’a pas abouti à la transformation des rapprochements en recoupements, chaque « camp » refusant d’entendre les arguments de l’autre. Ainsi le « consensus » sur la HCM publié en 1999 dans la revue Archives of Environmental Health (Bartha et al., 1999) reprend l’essentiel de la définition proposée par Cullen douze ans plus tôt (tableau 1), tandis que la question des mécanismes étiologiques reste ouverte (Bartha et al., 1999, p. 148). On peut alors supposer que la diminution du nombre de publications scientifiques observée à partir des années 2000 correspond à une désaffection des chercheur·ses et probablement des pouvoirs publics face à une situation perçue comme bloquée.
Les conséquences d’une intoxication intangible : entre invisibilisation et dépolitisation
L’irrésolution de la controverse scientifique devenue « dispute » a contribué à invisibiliser la HCM comme l’illustre l’extrait d’entretien mis en introduction. Cette invisibilisation est à rapprocher du fait que l’irrésolution de la controverse bloque la reconnaissance du syndrome. Dans un rapport publié en 2010 par le ministère de la santé danois sur les mesures prises par ses homologues européens concernant la HCM (Danish Health Ministry, 2010), seuls deux pays interrogés sur onze reconnaissaient ce syndrome comme une maladie : l’Allemagne et l’Autriche. Cette absence de reconnaissance complique ensuite la collection des cas, donc la mise en visibilité du problème. D’une part, la HCM reste une pathologie peu connue des médecins. D’autre part, les personnes hypersensibles sont souvent contraintes d’accepter une redéfinition de leur cas pour bénéficier des systèmes d’assurance sociale, comme en Autriche où les médecins classent la HCM dans la catégorie des troubles mentaux pour que les patients puissent bénéficier d’une pension » (Danish Health Ministry, 2010, p. 13-14).
En France, l’irrésolution de la controverse a eu des effets sur la position de la HCM dans le champ des mobilisations en santé environnement. Par exemple, l’association SOS-MCS qui milite en France pour la reconnaissance de la HCM est membre du Réseau environnement santé (RES). Toutefois, si le RES a été particulièrement actif dans le cas du perchloroéthylène en accompagnant l’Advepp dans les négociations avec les ministères, son action en ce qui concerne la HCM a été plus prudente dans le sens où elle s’est limitée jusqu’à présent à organiser des colloques sur le thème des maladies « non expliquées » potentiellement environnementales. Et même dans ces colloques la HCM tend à être invisibilisée par des problèmes publics davantage constitués comme l’électrohypersensibilité, le syndrome de fatigue chronique ou la fibromyalgie. Il est par ailleurs intéressant de noter qu’André Cicolella, le président du RES, ne parle jamais de l’hypersensibilité chimique son livre Toxique planète (Cicolella, 2013) consacré aux maladies chroniques provoquées par les substances chimiques. Jean-Noël Jouzel (2012) avait déjà mis en avant le rôle du toxicologue dans la mobilisation contre les éthers de glycol et sa capacité à « trier » les problèmes en fonction de leur degré de tangibilité. Jouzel souligne ainsi que Cicolella avait préféré mettre l’accent sur les effets reprotoxiques des éthers de glycol, qui étaient moins sujets à controverse, que sur les effets cancérigènes. On peut supposer que cette stratégie se retrouve dans les différences de traitement entre les problèmes liés au perchloroéthylène et la HCM.
Enfin, les « disputes » sur les causes de la HCM ne sont pas propres aux milieux scientifiques. En effet, les « chimico-sensibles » sont fréquemment confrontés à l’incrédulité des personnes qu’elles rencontrent, même de leur entourage. Dans un entretien, une personne hypersensible déclare : « je me sépare de mon ami qui n’en peut plus de vivre ça ! […] le MCS ne se vit pas en couple, je veux être seule pour ne plus avoir à prendre constamment sur moi et faire bonne figure » (extrait d’entretien réalisé en 2012). Ces disputes peuvent être associées à la « contrainte de vérificabilité » (Chateauraynaud, 2011, p. 161) qui pèse sur les personnes hypersensibles à l’instar de Marie qui écrit sur un forum « je ne dis plus rien, je suis assez fatiguée moralement par la maladie au quotidien alors j’ai cessé de m’épuiser à expliquer autour de moi, j’en ai trop entendu ». Comme le détaille Renaud Dulong à propos des témoins oculaires (1998), la suspension du doute à l’égard des personnes dénonçant un problème implique que celles-ci étayent, tôt ou tard, leurs affirmations par des preuves. Cette contrainte de vérificabilité est d’autant plus forte que le syndrome remet en cause un ensemble de pratiques semblant aller de soi, comme faire une lessive, se laver en utilisant du gel douche ou nettoyer le sol avec des produits issus de l’industrie chimique. Or, l’irrésolution de la controverse scientifique prive les personnes d’appuis argumentatifs qui leur permettraient de supporter cette charge de la preuve et rend plus difficile la constitution d’un « public » autour de la HCM.
Conclusion
À travers l’analyse des deux dossiers, nous avons mis en évidence que la compréhension des trajectoires empruntées par les problèmes publics en santé environnement supposait de suivre la dynamique des controverses dans les trois espaces que sont les « arènes discrètes » de l’expertise et de la gestion des risques, l’« espace public » des mobilisations et les « champs d’expériences ». Dans les deux cas, les périodes de médiatisation coïncident avec le débordement de controverses épistémiques dans l’espace public. Pour le perchloroéthylène, ce débordement est produit par le surgissement de victimes, non régulé du fait de l’absence de dispositifs de gestion des plaintes. Pour la HCM, le problème atteint le maximum de visibilité dans les années 1990 avec la controverse sur le syndrome de la guerre du Golfe aux USA. Ces événements ouvrent des espaces d’expression au sein desquels la tangibilité des problèmes va être éprouvée.
D’une certaine manière, le surgissement des victimes a rendu tangibles les risques liés à l’utilisation du PCE dans les pressings mis en avant par les services d’expertise du ministère de l’Écologie et de la Préfecture de police de Paris. Les échanges entre les différentes parties prenantes se sont ainsi maintenus dans un régime de « discussion » au sens de Dascal. Toutefois, on notera que le maintien de la « discussion » s’est effectué au prix d’une réduction importante du problème, puisque l’interdiction ne concerne que les pressings dont les machines de nettoyage à sec sont « situées dans des locaux contigus à des locaux occupés par des tiers ». Autrement dit, l’arrêté de 2012 évacue la question des risques de santé professionnels ou le problème de la contamination des milieux écologiques puisque le perchloroéthylène peut être utilisé dans des pressings situés dans des zones industrielles ou commerciales. À l’inverse, la controverse sur la HCM qui fait partie de celles qui ne trouvent pas de conclusion en raison de l’enchevêtrement des enjeux méthodologiques, théoriques et juridictionnels n’a pas encore trouvé de solution à l’instar des débats décrits par Barbier (2021). Elle s’est transformée progressivement en « dispute » entre des positions incommensurables, rendant difficile, voire impossible, l’existence d’épreuves de réalité qui rendrait tangible la HCM. Cette dispute au niveau scientifique est amplifiée par celles observée au niveau des interactions entre les personnes hypersensibles aux produits chimiques et leur entourage. L’espace d’expression ouvert dans un premier temps grâce à l’émergence de la controverse n’a pas pu être refermé sur une définition partagée du problème, favorisant une démobilisation des acteur·trices, y compris des malades qui tendent à se replier sur leur for intérieur face à une trop forte « contrainte de vérificabilité ».
Notes
[1] Citation traduite par l’auteur
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Auteur
Aymeric Luneau
Postdoctorant en sociologie, Médialab – Sciences Po Paris. Ses travaux de recherche portent sur les controverses en santé-environnement et le rôle que les « personnes ordinaires » y jouent.
aymeric.luneau@sciencespo.fr