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Introduction au Supplément 2017 A

Article inédit, mis en ligne le 22 Mars, 2018

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Miège Bernard, « L’internationalisation de la culture, de l’information et de la communication II :
l’emprise progressive des industries de la communication sur les industries culturelles et créatives », Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°18/3A, 2017, p.5 à 10, consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2017/supplement-a/00-introduction-au-supplement-2017-a-linternationalisation-de-la-culture-de-linformation-et-de-la-communication-ii-lemprise-progressive-des-industries-de-la-communication-sur-les-indust/

Introduction

Ce supplément 2017 vient en complément du dossier publié un an plus tôt et le précise plus qu’il ne l’étend. Il est en effet consacré à l’examen des rapports entre les puissantes industries de la communication, connaissant un développement disruptif engagé depuis à peine plus de dix ans, et les industries culturelles et créatives. Celles-ci, incontestablement, ne sont pas en position de force : on leur prédit un avenir sombre, au point de devenir seulement des industries de contenu pour les premières quand on n’annonce pas comme tel ou tel publiciste américain leur fin programmée et leur remplacement par les productions des amateurs et surtout de néo-professionnels paupérisés, perspective qui a l’avantage de séduire des cercles larges, bien au-delà des technophiles numériques, mais qui ne correspond pas à ce que l’on observe actuellement çà et là, en dépit des capacités déstructurantes, voire destructrices des Big Five et de quelques NATU comme Netflix. C’est en cela qu’il est intéressant et même primordial de suivre étape par étape l’avancée de ces nouvelles majors tout en analysant avec précision ce qu’il en est des changements qui s’accomplissent dans les diverses filières et qui ne sont pas près de se stabiliser. Car si le nouveau ne fait pas table-rase du passé récent et s’incorpore/ s’incorporera à lui plus qu’il ne le remplace/ remplacera, l’innovation en cours si elle se révèle finalement comme une innovation majeure ne se donne pas à voir dans le temps présent ; ses traits essentiels n’apparaîtront qu’avec le temps, c’est-à-dire dans le temps long.

C’est pourquoi il n’est pas incohérent qu’en ouverture du supplément 2017A (qui reprend des communications présentées lors d’un Forum de chercheurs organisé par le GRESEC en novembre 2015 à l’Institut de la Communication et des Médias de l’Université Grenoble-Alpes, en coopération avec des universitaires de la China University of Communication de Beijing), on trouve une contribution de Bertrand Cabedoche consacrée à Deconstructing and reconfiguring ICTs and Social Change in the Third Millenium. A state of the African Contribution. Dans ce texte, l’auteur dresse en état argumenté des apports des travaux de recherche portant sur les développements des techniques d’information et de communication, pas seulement numériques, en Afrique au Sud du Sahara principalement ; il le fait à partir des communications présentées au Colloque de Douala d’avril 2014, et au cours d’autres manifestations auxquelles il a pris part ; ce bilan, intéressant en soi et mettant au jour des travaux souvent méconnus en Europe, a l’avantage de déconstruire des notions programmatiques telles que : société de l’information, diversité culturelle, participation démocratique, ou fracture numérique, toujours soutenues dans des instances internationales et encore influentes malgré les critiques de chercheurs dans les deux continents. Et il n’est pas loin de penser que la « contribution africaine » est décisive pour la critique sociale de ces notions ; on trouvera cependant excessive cette hypothèse tant le numérique est maintenant en Afrique comme ailleurs l’objet d’attentes … inconsidérées. Ce qu’il faut souligner par contre c’est que s’y perpétuent des travaux sur l’ancrage social des différentes techniques et leur appropriation par les différents catégories et groupes sociaux, alors que les chercheurs européens par exemple sont moins enclins à poursuivre dans cette voie, comme c’était le cas voici dix ou vingt ans.

Les Tic, pour l’essentiel maintenant numériques, ont beaucoup à voir avec le développement des biens culturels, informationnels ou créatifs, donc avec cette catégorie de biens que l’on commence à qualifier de biens symboliques, et ce à tous les stades des cycles de formation de la valeur qui les caractérisent : autrement dit durant toutes les étapes de la conception-création des produits, puis lors de leur production-édition, ensuite à l’occasion de ce que l’on désigne dorénavant comme la phase d’intermédiation (et l’on sait combien par exemple peut se révéler décisif le rôle pourtant peu visible des plateformes), et y compris à l’occasion de la consommation-réception. On peut aisément dresser un tableau des outils techniques qui à chaque stade sont utilisés, concourant à chaque fois de façon plus accentuée à l’industrialisation de biens que l’on a cru longtemps voir échapper à ce qui est au cœur de l’industrialisation marchande, à savoir la reproductibilité et la recherche effrénée de la valorisation. Ces aspects sont en général méconnus tant ils sont dissimulés et en tout cas encore peu reconnus des acteurs, à tous les stades. C’est en particulier, nous dit Philippe Bouquillion, parce que trois paradigmes industriels sont à l’œuvre, en arrière-plan de toutes les actions sociales correspondantes ; ces trois paradigmes qu’il présente et décrit, exemples à l’appui et à l’aide d’un tableau très éclairant, sont : le paradigme de la convergence, le paradigme de la collaboration et le paradigme de la création. Ils se trouvent être au principe des actions sociales qui participent de la montée de ces biens symboliques, et ils ont une dimension symbolique et politique forte (que l’on retrouve souvent explicitée dans les textes de publicistes mondialement diffusés), incorporant des conceptions de la culture et de la vie sociale que l’on peut identifier. La perspective ainsi tracée déqualifie bien des approches ou des perceptions premières, plus ou moins utopiques, des potentialités de ces outils techniques.

L’article de Juan Carlos Miguel de Bustos, à la fois documenté et synthétique, permet d’appréhender ces puissants groupes que sont devenus en à peine une décennie les 5 compagnies connues sous l’acronyme de GAFAM et parfois qualifiées de Big Five. Il les considère non plus seulement comme constituant un écosystème industriel mais désormais comme un écosystème d’affaires en raison de la multiplicité des liens d’affaires tissés entre ces compagnies en matière de matériels, de réseaux et de contenus . Trois aspects principaux ressortent de son analyse. En premier lieu, il rappelle ce qui est souvent noté, à savoir l’importance des ressources affectées à l’innovation interne, qui aurait représentée dans les dernières années, un montant équivalent à celui de la recherche non militaire de l’Etat fédéral américain. En second lieu, ces compagnies, à l’exception partielle de Google, ne sont pas spécialisées dans les contenus, mais cela pourrait/devrait changer à l’avenir ; actuellement les GAFAM et les compagnies de communication –à ne pas confondre avec les industries de la communication, car sous ce qualificatif antérieurement reconnu mais aujourd’hui … ambigu l’auteur se réfère plus précisément aux groupes dominants dans les filières culturelles et médiatiques- se livrent une concurrence sans merci sur le marché de la publicité, mais les premiers disposent d’un avantage certain dans la mesure où ils disposent dans leurs centres serveurs des data dont les seconds ont besoin pour assurer la distribution de leurs contenus. En troisième lieu, les modèles d’affaires des GAFAM sont « polarisés », autour d’une ressource nettement dominante, à savoir les revenus publicitaires, ce qui n’est pas le cas des compagnies culturelles et médiatiques, centrées autour des modèles génériques de l’édition et du flot, et de leurs déclinaisons ; pour le moment les premières en tirent des avantages incontestables, systémiques en quelque sorte. Toute la question est évidemment de savoir si ce positionnement est appelé à durer. Mais si l’on suit l’auteur on conclura provisoirement que la domination de ces nouvelles majors est loin de s’expliquer seulement par leur stratégie d’évitement de la fiscalité des Etats dans lesquels elles interviennent. Il convient d’élargir le regard et par voie de conséquence la critique qui doit leur être adressée.

Les deux articles suivants s’attachent à suivre les mutations de la filière informationnelle, et à notre sens ils sont complémentaires. Tout d’abord, Benoît Lafon montre en quoi il est nécessaire de revenir sur la définition des médias pour donner une approche raisonnée de ce qu’il faut entendre par médias sociaux. Au terme d’une discussion argumentée, reprenant et étendant des propositions faites antérieurement, il suggère d’adopter l’acronyme de ME.D.I.A.TS, cet acronyme, traduisant selon lui l’existence simultanée d’un Modèle Economique, de Discours, d’une Institution, d’Acteurs et de Techniques en Société. Et ce que les médias sociaux entraînent comme évolution avec le modèle classique des médias fondés sur la diffusion-distribution auprès d’un public indifférencié ou ciblé (que personnellement j’aurai tendance à qualifier de médias historiques) c’est la médiatisation de « communautés », mais il met en doute le caractère « communautaire » souvent proclamé de ces groupements d’intérêt conjoncturels pour le remplacer par le qualificatif de « collectifs médiatés », les usagers des médias sociaux relevant bien de la catégorie des publics ; la nouveauté des médias sociaux est fondée sur la constitution de collectifs et sur l’industrialisation des échanges. On est donc bien en présence d’un élargissement du domaine médiatique mais d’un élargissement basé sur l’industrialisation du relationnel. Cette ré-orientation le conduit, d’une part à la mise au point d’un tableau synoptique du nouveau domaine médiatique qui prend en compte les mutations engagées, d’autre part à la présentation d’une matrice intégrant les changements en cours des modèles d’exploitation, ce tableau et cette matrice donnant une représentation heuristique de son approche. Et c’est seulement en prenant en compte ces transformations, conclu-t-il, que l’on peut identifier les nouveaux enjeux sociopolitiques et socioéconomiques.

Il revient également à Adrian Staii d’envisager les mutations des médias d’information, avec une problématique voisine, mais selon des angles de vue différents. Il met l’accent d’emblée sur le fait que ces mutations sont avant tout en interdépendance avec des logiques industrielles fortes et avec les stratégies d’acteurs majeurs aux effets structurants, et qu’elles ne sont pas prioritairement l’effet de transformations culturelles globales structurées par les pratiques participatives, capables de réorganiser l’écosystème médiatique « par le bas ». Logiques d’industrialisation donc : à cet égard, l’auteur choisit de mettre l’accent sur l’une ses composantes, la technologisation et spécifiquement une des formes de celle-ci l’automatisation ; et il montre que l’automatisation est l’une des voies privilégiées à travers lesquelles les logiques industrielles des GAFAM s’imposent aux médias et contaminent leurs activités principalement par l’aval : démultiplication des points d’accès aux médias en contexte numérique, rationalisation des activités éditoriales en lien avec l’accélération du rythme de publication, recyclage et démultiplication des modalités de diffusion des contenus, etc. ; l’adoption des logiques des infomédiaires est lourde de conséquences pour les médias d’information. Il envisage ensuite les pratiques connectées d’accès à l’information d’actualité dont il prend la mesure de l’ampleur croissante ; et il constate que la plupart des usagers passe désormais par des services des intermédiaires, mais avec des différences encore importantes selon les pays. Enfin, il s’intéresse aux conséquences de la place dominante occupée par Google dans la recherche d’information et à la force de ses techniques automatiques pour filtrer l’accès, ceci pour observer que désormais les médias d’information ont admis que les rapports de force leur sont clairement défavorables en raison du risque de déférencement ; les médias producteurs d’information « sont obligés de prendre acte de la position de force de cet intermédiaire (qu’est Google mais aussi Facebook) et d’adapter leurs productions à ses contraintes » ; et ils ont même tendance eux-mêmes à renforcer leur dépendance par rapport aux infomédiaires et aux médias sociaux. C’est donc cette puissante logique industrielle qui, en renforçant l’automatisation, « est en train de réorganiser l’écosystème médiatique ». Et encore poursuit-il, le journalisme automatique et le journalisme de données restent-ils limités.

Dans l’article suivant, Bernard Miège s’intéresse à ce que recouvre l’ensemble, maintenant le plus souvent reconnu dans les documents politico-administratifs ainsi que dans des travaux universitaires, et généralement représenté dans le syntagme « industries culturelles et créatives ». Si entre les unes et les autres des analogies apparaissent dès l’abord, notamment la dimension symbolique et le recours à des artistes pour la conception des produits, il fait remarquer que des dissimilarités marquantes demeurent : les produits des industries créatives (ICREA) sont adossés à des patrimoines qu’ils reproduisent et même qu’ils étendent, étant conservés pour être échangés et revendus (ainsi dans les industries du luxe, et même de la mode) ; ce n’est qu’exceptionnellement le cas pour les produits culturels (ICULT), avec des « seconds marchés » pour collectionneurs passionnés. Quant au management de la créativité, si les phénomènes du recours à des stars (= la starisation) sont apparemment communs, il révèle des dissemblances notables ; il concerne les créateurs dans les industries créatives, et avant tout les interprètes de premier plan dans les industries culturelles. En outre, la forme entrepreneuriale est maintenant largement dominante dans les premières (ICREA), depuis les entreprises personnelles de l’artisanat d’art jusqu’aux firmes et même groupes des industries du luxe et de la mode ; la conception/création est largement internalisée (même si le travail garde des traits de la petite production artisanale) et cela s’explique par l’adossement à la maison et à la marque ; il en est différemment pour les industries culturelles (ICULT), où la phase de conception reste — principalement — externalisée (livre, musique enregistrée et cinéma), sauf dans celles qui s’organisent comme industries médiatiques (presse, radiotélévision). Ces différences sont en relation étroite avec la façon dont des industries de produits de masse telles que les ICULT ont à gérer des valeurs d’usages aléatoires avec un renouvellement permanent des modes et des genres. L’article s’achève par un essai d’approche macro-économique des deux composantes, avec le traitement de données issues d’une étude statistique émanant d’un groupement professionnel, et portant sur 27 pays européens. En dépit des limites du recours à de telles données, souligné avec insistance par l’auteur, il apparaît clairement que les ICULT historiques sont dans une position très largement dominante si l’on se réfère aux principaux indicateurs : chiffres d’affaires, personnel employé et indice de capitalisation ; les ICREA, par contre, ont du mal à émerger quantitativement, et particulièrement celles qui sont intégrées à d’autres branches industrielles : ameublement, construction, publicité, etc. La « déconstruction » des premières par les secondes dans le cadre d’une économie dite créative reste donc lointaine, sinon hypothétique.

Dans sa contribution sur les relations entre Hollywood et la Chine, Giuseppe Richeri commence par rappeler deux caractéristiques primordiales du marché du film : d’une part le passage du film en salle est (toujours) essentiel pour générer sa notoriété, d’autre part la production cinématographique est l’objet d’un régime de coûts croissants en raison de la hausse inéluctable des rémunérations des artistes et de la non croissance concomitante de la productivité du produit. Le marché intérieur américain étant depuis longtemps dans l’incapacité de procurer des revenus suffisants pour couvrir les frais de production, les producteurs de la MPAA se sont toujours tournés vers l’étranger, et notamment vers l’Europe. Actuellement en situation de stagnation du marché intérieur et même de contraction du total des entrées en salles, le marché européen s’avère insuffisant. Or le marché chinois est en pleine croissance (+ 350% de hausse des recettes de 2010 à 2015) ; non seulement les autorités chinoises sont tenues en dépit de leurs réticences et restrictions, de respecter les règles nouvelles du commerce international fixées au sein de l’OMC (et l’auteur montre comment elles ont cherché à s’en dessaisir), mais encore elles portent une attention croissante aux industries culturelles et créatives, sources d’un soft power tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Dans ce contexte cependant, l’importation des films américains comme la participation de capitaux américains à des co-productions sino-américaines (celles-ci moins contrôlées), ne vont pas sans difficultés et contingentements, en raison notamment du rôle de filtre que joue pour les films étrangers la puissante administration d’état chargée du contrôle idéologique et veillant toujours à limiter la pollution culturelle provenant des productions étrangères. Quoiqu’il en soit, malgré la complexité du jeu qui a été engagé, les enjeux sont tels que les grandes sociétés cinématographiques américaines ont besoin de pénétrer toujours plus le marché intérieur chinois pour continuer à exercer leur leadership mondial ; et on pourrait ajouter que la stratégie chinoise de s’implanter sur les marchés culturels mondiaux passe aussi par des accords avec les firmes US, notamment pour la distribution.

Enfin, à l’heure où chaque État entend développer sa politique créative, chaque collectivité, son territoire créatif, chaque entreprise, son plan créatif, Pierre Mœglin se dit frappé, voire choqué, par le flou, les imprécisions et les divergences d’interprétation autour des notions de création et créativité appliquées aux industries et économies dites « créatives ». S’agissant de ces industries, aucun consensus ne s’impose, en effet, ni dans leurs cartographies, ni même dans leurs définitions. Significatives, au contraire, sont les divergences sur ces notions, par exemple entre l’Unesco et la Cnuced, alors que ces deux organisations dépendent, l’une et l’autre, de l’Onu. Aucun accord non plus entre experts et professionnels concernés. De la confusion qui règne partout témoigne la concurrence des formules en lice comme « industries créatives », « industries culturelles et industries créatives », « industries culturelles et créatives », « industries culturelles créatives », « industries de la création culturelle et de la création artistique », « industries de contenus », « industries du copyright », etc.

Simple question de temps, avant que les théories ne s’affermissent et que les terminologies ne finissent par s’accorder ? L’hypothèse de l’auteur est qu’il n’y a pas lieu d’imputer la cacophonie à une inconsistance conceptuelle provisoire. Plus exactement, ce serait une erreur d’y voir la conséquence d’une instabilité appelée à se résorber dès qu’une formulation se serait imposée. En réalité, ces hésitations et oscillations reflètent, pour lui, des clivages et antagonismes autrement profonds, qui mettent aux prises des intérêts contradictoires. Les dissonances discursives sont le reflet de confrontations entre visées socio-économiques contradictoires et leurs idéologies respectives. Ces confrontations seraient elles-mêmes liées aux crises et mutations des modes de production dominants. Non pas dans la perspective de leur dépassement, comme cela est trop fréquemment dit, mais plutôt dans celle de leur approfondissement, à la faveur de la conversion du capitalisme mondialisé à des schémas de formation et de répartition de la richesse intégrant et privilégiant la valeur-création. Ce qui conduit Pierre Mœglin à alerter le lecteur sur plusieurs fausses évidences qui reviennent de manière récurrente dans les débats actuels. La première fait appel au couple liberté / originalité, clé de voûte de la modélisation australienne des industries créatives, elle-même régulièrement reprise ailleurs. La deuxième fausse évidence repose sur le couple création / propriété, à l’origine de l’une des modélisations britanniques en matière d’industries créatives, laquelle préconise l’adoption par les secteurs de la culture et de la création du régime de propriété intellectuelle en usage dans les industries « ordinaires ». Et la troisième fausse évidence fait appel, non plus à des secteurs (comme les deux précédentes), mais à des attitudes : celles d’individus que rapprocheraient les uns des autres leur goût pour l’innovation en soi et leur volonté de pratiquer la disruption, en deçà et indépendamment de toute réalisation concrète. Héritière du diffusionnisme de l’immédiat après-guerre, cette modélisation préside aux thématiques de la « classe créative » et du « territoire créatif » ; et il est flagrant qu’elle n’a pas plus d’efficacité que les deux modélisations précédentes.

Auteur

Bernard Miège

.: Bernard Miège est professeur émérite de sciences de l’information – communication à l’Université Grenoble Alpes où il participe aux recherches du laboratoire Gresec. Entre autres travaux il s’intéresse aux industries culturelles et créatives.

.: Bernard Miège is emeritus professor of information and communication sciences at University Grenoble Alpes where he participates in the researches of the Gresec group. Among other works he is interested in cultural and creative industries.