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La profession journalistique après la « révolution du jasmin » sous l’emprise de la modernisation

21 Sep, 2015

Résumé

La liberté traversant les médias tunisiens le lendemain du 14 janvier 2011 a ouvert la voie à un nouvel élan réformiste du secteur médiatique. Ce processus, visant la modernisation du domaine des médias, a été considéré comme la condition sine qua non pouvant permettre au pays de réussir sa transition démocratique. Initiée et soutenue par des acteurs internationaux pourvoyeurs de fond pour un métier asservi par des années de totalitarisme, cette dynamique vise en interne à rationaliser et à standardiser la filière médiatique locale en commençant par les actes des journalistes c’est-à-dire leurs façons de faire dans la pratique quotidienne de leur métier. Ces façons sont considérées comme pas assez professionnelles dans la mesure où elles ne sont assez industrialisées. En externe, ce souffle réformateur et libérateur ambitionne d’améliorer l’environnement institutionnel et médiatique local nécessaire au bon fonctionnement du marché. Toutefois, cette dynamique s’accompagne de « moniteurs de la démocratie » souvent coupés de la réalité locale. De ce fait, cette recherche tente d’apporter des réponses à la question suivante : dans quelle mesure la volonté modernisatrice voulant acheminer le journalisme vers un modèle plus démocratique est capable d’introduire un changement profond dans une filière médiatique à la fois éclatée, désorganisée et en manque endémique de ressources financières ?

Mots clés

Tunisie, journalisme, processus démocratique, réforme, rationalisation, standardisation.

In English

Title

The profession of journalist after the « Jasmine Revolution » facing modernization

Abstract

The flow of freedom crossing Tunisian media since the day after January 14, 2011 has opened the way for a new reformist impulse in the media sector. This process, which targets the modernization of the media outlets, was considered as a sine qua non condition preventing the country from passing its democratic transition. Initiated and sustained by international actors performing as supply providers for a profession subservient by years of totalitarianism, this impetus aims internally to rationalize and standardize the local media sector starting with journalistic actions: that’s to say the manners by which this job is practiced daily. Such manners are considered as lacking professionalism insofar as they are not enough industrialized. Externally, this reforming and liberating blow intends to improve the institutional and mediated local environment which is compulsory for a healthy functioning of the market. However this impetus is accompanied by “democratic monitors” frequently detached from the local reality. Thereby, this research is an attempt to find answers for the following question: in which measures is the will to reform, aiming at putting journalism on the right way towards a more democratic model, capable of introducing a deep change in a media sector which is at the same time burst, disorganized and in an endemic deficiency of financial resources?

Keywords

Tunisia, journalism, democratic process, rationalization, standardization, reform.

En Español

Título

La profesión periodística después de la « Revolución del Jazmín » bajo la influencia de la modernización

Resumen

El aire de libertad que atraviesa los medios tunecinos desde el día después del 14 de enero de 2011 abrió el camino para un nuevo impulso reformista en el sector de los medios de comunicación. Este proceso de modernización del sector de los medios fue visto como la condición sine qua non para que el país logre una transición democrática exitosa. Iniciada y apoyada por actores internacionales financiadores de una profesión esclavizada durante años por el totalitarismo, esta dinámica modernizadora busca internamente simplificar y estandarizar la industria de medios de comunicación locales a partir de las acciones de los periodistas, esto es, afectando a sus formas de llevar a cabo la práctica diaria de su profesión. Pues estas formas no resultan en la actualidad suficientemente profesionales, puesto que no están bastante industrializadas. Externamente, ese aliento reformador y liberador tiene como objetivo mejorar los entornos institucionales y mediático locales, necesarios para el buen funcionamiento del mercado. Sin embargo, esta dinámica va acompañada por unos « observadores tutelares » de la democracia  » a menudo alejados de la realidad local. Por lo tanto, esta investigación intenta dar respuesta a la pregunta: ¿en qué medida esa voluntad reformista, que busca encaminar el periodismo hacia un modelo más democrático, es capaz de introducir un cambio profundo en una industria de los medios que está fragmentada, desorganizada y sufre una endémica falta de recursos financieros?

Palabras clave

Túnez, periodismo, proceso democrático, racionalización, estandarización, reforma.

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Elhaou Mohamed Ali, Fitouri Aida, « La profession journalistique après la « révolution du jasmin » sous l’emprise de la modernisation« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°16/1, , p.39 à 55, consulté le samedi 20 avril 2024, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2015/varia/03-profession-journalistique-apres-revolution-jasmin-lemprise-de-modernisation/

Introduction

L’ébranlement du système coercitif en Tunisie au lendemain du 14 janvier 2011, le vide juridique, institutionnel et politique qui s’en est suivi ont ouvert la voie devant différents acteurs internationaux pour inculquer dans le pays un processus de réformes de diverses natures. Une des étapes clés de ce processus consiste en la refonte des médias appelés dorénavant à se moderniser, s’améliorer et s’adapter aux impératifs de la « démocratie de marché » (Attali, 2006 : 48). Or, malgré l’enthousiasme du départ, les premiers résultats de ce processus, entamé pourtant il y a plus de quatre ans, ne sont pas suffisamment apparents sur le terrain pour être évalués ou pour en prévoir les effets à plus long terme. Une chose est sûre : ce processus produit un décalage entre, d’un coté, les acteurs internationaux qui agissent souvent en fonction d’idéaux et de calendriers bien précis et délimités dans le temps avec souvent des modèles prêt-à-penser, et de l’autre côté les acteurs locaux qui agissent selon des logiques centrées sur leurs conditions de travail ainsi que leurs propres intérêts sans saisir nécessairement la portée globale et marchande du processus de réformes. Ce décalage est de plus en plus ressenti et exprimé par les journalistes en activité et les futurs professionnels. Ces derniers se sentent bel et bien en marge de cet élan de réformes.

Sur le plan épistémologique, se focaliser sur l’étude du décalage est une manière de s’inscrire dans une démarche critique de l’économie politique de la communication. Cette approche a en effet été, comme le rappelle Armand Mattelart dans son ouvrage Diversité culturelle et mondialisation (2007), l’un des premiers cadres à partir desquels des chercheurs ont souligné le besoin de mener des politiques publiques de communication pour préserver la diversité culturelle (Farchy, 2008 : 171). En replaçant le processus d’internationalisation des médias dans des rapports de domination,  les travaux appartenant à cette école (Guaaybess, 2005 ; Ferjani, 1995, 2002 ; Garnham, 1990 ; Proulx et Vitalis, 1999) ont, dès la fin des années soixante, pointé l’existence d’un système transnational des médias et montré comment celui-ci s’articule avec l’économie capitaliste (Bouquillion et Combès, 2011). Les multinationales de la communication opérant avec une aisance à l’échelle internationale sont considérées, à ce titre, comme des agents majeurs de l’intégration des sociétés nationales dans l’économie capitaliste mondiale (Shiller, 1976 ; Mattelart, 1976).

Sans pour autant adopter une posture de cultural nationalists(1), nous nous proposons, dans cette recherche débutée en avril 2011, d’entreprendre une observation de plus près de ce décalage passé la plupart du temps à travers un déterminisme juridique (Zamit, Elhaou, 2015). Cet examen s’articule autour de deux dimensions : interne et externe qui sont à la fois indissociables et complémentaires. En effet, par leur interaction, les volets interne et externe agissent comme moteur de changement. Cette interaction étant donc essentielle pour le fonctionnement du processus de réforme. Sa prise en considération est, à ce titre, nécessaire pour comprendre et surtout mettre au jour ce que nous appelons décalage.

Sur le plan méthodologique, ce travail se fonde sur une recherche documentaire (étude de différents rapports émis par des instances locales et internationales : le rapport de l’Instance nationale pour la Réforme de l’information et de la communication (INRIC) publié en septembre 2012 et aussi les deux rapports produits par l’UNESCO en 2008 et 2012 visant à élaborer une feuille de route pour le développement des médias). Aussi, cette recherche est basée également sur une étude de corpus de presse depuis 2011. Celui-ci est constitué de différents articles parus dans les divers journaux tunisiens francophones à la fois papier et électronique. À la suite d’un tri, nous avons gardé 200 articles abordant principalement la question du développement des médias. Cette analyse nous a permis d’identifier le discours accompagnant ladite « transition démocratique des médias ». En outre, en plus de cette analyse de contenu, une enquête qualitative de terrain à été conduite. Elle a été établie entre mars 2011 et juin 2015 et elle se poursuit à l’heure où nous écrivions ces lignes. Elle interroge en effet plusieurs points : la mise en place d’un conseil de presse (CP) pour la presse papier et électronique, la question de la régulation audiovisuelle notamment par la mise en place de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA) et, in fine, la question de la formation des journalistes aussi bien à l’Institut de presse et des sciences de l’information (IPSI), seule université publique qui délivre le diplôme de journaliste dans le pays, qu’auprès du Centre africain de perfectionnement des journalistes et des communicateurs (CAPJC). Ce dernier est en effet un établissement public à caractère administratif ayant pour mission d’organiser des sessions et des séminaires de formation continue et de perfectionnement à destination des professionnels des médias et de la communication. Cette enquête se déroule par des entretiens semi-directifs avec des responsables de la sphère médiatique et qui sont concernés directement par la modernisation des médias. Aussi, elle se déploie auprès des journalistes par le biais d’entretiens collectifs parfois de façon informelle.

Ces entretiens collectifs prennent la forme de focus group ; à cette phase, nous jouons le rôle d’animateur de débat. Jusqu’à aujourd’hui, nous avons recensé l’avis d’une quarantaine de journalistes que nous avons enregistrés via un dictaphone. Nous transcrivions à cet effet leurs propos au fur et à mesure de l’avancement de notre travail sur le domaine des médias dans le pays. Pour finir, nous avons effectué de l’observation participante en assistant à différents ateliers portant sur la réforme des médias.

Il importe de signaler qu’au fil de notre enquête, nous n’avons pas encore de données fiables sur lesquelles nous pouvons bâtir une analyse rigoureuse en ce qui concerne le nombre de pigistes, le nombre de journalistes titulaires ni ce dont ils ont besoin comme formations. Aussi, nous ne sommes pas focalisés dans cet article en particulier sur les propositions de ladite société civile en matière d’accompagnement des journalistes ni ce que font les entreprises de presse de leurs salariés ; cette piste fera l’objet d’autres articles. Notre idée pour ce texte en particulier est d’examiner de façon macro ce qui se trame derrière la volonté de modernisation du travail médiatique.

Dans cette perspective, notre problématique est la suivante : dans quelle mesure l’injonction internationale, portée par des acteurs locaux aussi, à des nouvelles façons de faire dans le domaine du journalisme favorise l’émergence d’une pratique journalistique autonome au sens de Castoriadis(2) ?

Notre hypothèse est que cette injonction favorise, d’un côté, les logiques opportunistes et de l’autre, l’anarchie dans le secteur et l’anomie du journaliste lui-même. Ce dernier ne comprend plus son rôle dans la société. Plus explicitement, il est fort plausible que les anciens acteurs dans le domaine des médias résistent quant à l’inscription dans les nouvelles règles du jeu en train de se mettre en place.

Cet article se divise en deux temps. Dans un premier temps, nous abordons la concomitance de la standardisation-rationalisation de la manière de faire du journalisme. Ainsi, nous montrerons les productions discursives à l’œuvre ainsi que la stigmatisation des pratiques du passé. En ce sens, la stigmatisation du journalisme de la dictature comme n’étant pas encore au niveau et très peu professionnel est une manière de faciliter la mise en place de nouvelles règles. Dans le sillage de celles-ci, nous trouvons, à partir de 2011, l’enthousiasme (un peu terni aujourd’hui) envers le journalisme d’investigation, qui s’estompe progressivement depuis les dernières élections présidentielles d’octobre 2014.

Dans un deuxième temps de cet article, nous expliciterons comment se met peu à peu en place le processus d’importation de « modèles »(3) professionnels à l’œuvre dans des pays anciennement ancrés dans la démocratie, avec une injonction unilatérale et centralisatrice des différents acteurs les plus actifs dans l’économie-monde des médias. Ceux-ci, malgré qu’ils s’intéressent au futur démocratique du pays, agissent de façon pragmatique notamment avec les leaders actuels des médias en Tunisie sans chercher à voir leurs actes par le passé. Ces derniers appartiennent, en bonne quantité, à l’ancien régime dictatorial.

La standardisation-rationalisation de la manière de faire du journalisme

À partir de janvier 2014, la réforme de la manière de faire du journalisme fut évoquée comme la condition sine qua non de la réussite de la transition démocratique du pays. Aussitôt se mit en place une volonté de « sauver » les médias tunisiens à travers une série de recommandations concrétisées par un afflux d’actions initiées en partenariat avec ladite société civile (Ferrié, 2003 : 75) et les institutions de financement bilatérales et multilatérales. Le volume de ces actions est unique dans l’histoire de la coopération médias au profit d’un seul pays en une période aussi succincte.

L’objectif de ces actions est de former les journalistes, d’encadrer les entreprises et les institutions de presse pour plus de « transparence » et d’opérer certains changements dans la manière d’envisager l’acte médiatique(4) (Elhaou, 2015). Il s’agit ainsi d’un processus visant à transformer, en un laps de temps court, les manières de faire et d’agir des journalistes locaux pour l’obtention de conduites dites plus responsables et déontologiques. Cette propension vise également à corriger les dysfonctionnements quotidiens liés à un certain héritage bureaucratique et d’encourager des traitements réactifs de l’information avec une cadence à flux tendu dans les entreprises médiatiques, notamment publiques.

À partir de février 2011, et dans la lignée de la promotion de la régulation des médias, se mettent en place des productions discursives empruntant la métaphore des médias en tant que corps malade et dénonçant les différents « maux » dont « souffre » tout le secteur. Ces discours pointent deux pratiques essentielles considérées par les consultants engagés dans les réformes des médias comme des « goulots d’étranglement » (Note de terrain, 2013) : les manquements éthico-professionnels et l’absence de journalisme d’investigation.

Les manquements éthico-professionnels, une justification pour rationaliser en douceur

La rationalisation-standardisation de la filière médiatique se justifie, selon le diagnostic des experts engagés dans le domaine des réformes des médias, par la confusion régnante entre ce qui relève des pratiques amateures et ce qui est de l’ordre des pratiques professionnelles. Pour ce faire, les réformateurs des médias pointent l’espace médiatique local comme un milieu professionnel en manque de repères et où les procès d’intention et le règlement de comptes personnels priment sur la neutralité et l’analyse objective des faits. Ils considèrent en outre que les journalistes ont tendance à confondre liberté d’expression et liberté de parole (Ben Youssef, 2013).

« En effet dans cette conjoncture particulière, écrit Larbi Chouikha, les médias disposent certes d’une grande marge de liberté à agir et à se déployer à leur guise, et cette liberté constitue l’acquis considérable arraché à la suite des événements qui ont secoué le pays. Mais dans le même temps, ces élans de liberté se sont quelque peu freinés du fait d’un déficit éthico-professionnel chez les journalistes. Et ce déficit s’explique par la longue période d’inactivité et de marginalisation des journalistes » (Chouikha, 2013).

Dans cette même lignée, les rapports des différentes instances d’observation des médias produits depuis 2011, que nous étayons infra, considèrent cette confusion comme porteuse sur le plan des entreprises médiatiques de rédactions sans cohésion interne et sans unité éditoriale. Des entreprises qui s’organiseraient sous le dictat de la dernière minute et donc sans planification.

Sous cet angle, les entreprises médiatiques locales apparaissent comme dépourvues d’assise de journalisme libre et responsable et comme submergées par des pratiques de connivence et d’arrangement. Ces pratiques informelles seraient productrices par conséquent de rumeurs et de bruits de couloirs voire de nouveaux mythes professionnels (Le Bohec, 2000).

Dès lors, les rapports mettent le doigt sur des confusions organisationnelles. Aussi mettent-ils l’accent sur un environnement culturel caractérisé par un immobilisme généralisé. Celui-ci engendre un refus méthodique de la part des professionnels locaux d’améliorer leur façon de faire. Ces derniers seraient préoccupés davantage par leur propre notoriété que par la qualité de message produit.

Selon les « experts », il n’est donc pas fortuit que les produits médiatiques après 14 janvier 2011 œuvrent à maintes reprises à l’accentuation des controverses voire l’échange d’invectives et des insultes entre invités des plateaux de télévision en prime time. Or comment un animateur de télévision ou de radio pourrait-il faire autrement à l’heure où sa réussite est mesurée à travers des enquêtes de satisfaction, des outils de mesure d’audience et à travers le buzz ? Dans cette perspective, certains consultants préfèrent évoquer l’esprit indocile caractérisant la mentalité des journalistes locaux qui résistent au changement. Cette attitude serait ainsi un facteur ralentissant l’émergence d’une scène médiatique diversifiée.

Partant de ces différents éléments de diagnostic, un train de recommandations voit le jour dans le but de la rationalisation-standardisation du journalisme. Nous en retenons celles qui reviennent de manière récurrente :
·         pallier le management rédactionnel considéré comme défaillant ;
·         instaurer la « bonne gouvernance » (Ben Néfissa, 2003) ;
·         dissiper l’ingérence politique dans les entreprises médiatiques ;
·         mettre en place un mécanisme d’autorégulation ;
·         inciter les journalistes à élaborer une ligne éditoriale de leurs médias et à dresser une charte rédactionnelle.

Force est de constater que ces recommandations sont très peu fondées sur des études empiriques définissant les besoins objectifs des médias et des professionnels du journalisme. À titre d’exemple,  prenons la tendance actuelle qui consiste à vouloir instaurer des conférences de rédaction. D’après notre observation, les journalistes travaillent de plus en plus de manière décalée et atomisée. En effet, avec la flexibilité accrue de leur métier, en plus de la précarité qui jalonne leur quotidien, ils sont plus que jamais dans l’incapacité structurelle d’élaborer un projet journalistique commun. De ce fait, quand elle a lieu, la conférence de rédaction devient une gestion rapide du menu du lendemain voire de la semaine. De même, les formations proposées répondent peu à ce que les journalistes que nous avons interrogés souhaitent pratiquer. En témoignent les propos suivants :

« […] En l’absence manifeste de l’État dans tout ce qui a trait à la régulation des médias, ce sont les organisations non gouvernementales regroupées au sein du « groupe des partenaires techniques pour l’appui aux medias », qui décident de tout dans le secteur des médias en collaboration avec un institut de formation étatique et un centre de formation privé désignés comme partenaires locaux. En l’occurrence, les activités médias de l’ISIE(5), IPSI, CAPJC, syndicats dans le secteur des médias, associations locales, l’ancienne INRIC, la HAICA, Wataniya (la première chaîne nationale), radio nationale, divers médias sont sous la coupe d’International Media Support (IMS). Partenaire local : le CAPJC » (entretien avec un ancien responsable des médias, journaliste depuis 30 ans, préférant garder l’anonymat, avril 2015).

De surcroît, s’attardant rarement sur la source des recommandations, les acteurs de la réforme des médias s’appuient sur les constats formulés par les « spécialistes » du secteur sur les thèmes retenus à la suite de rencontres avec les responsables médiatiques. Dans plusieurs cas, ce sont bel et bien les bailleurs étrangers qui définissent et évaluent eux-mêmes les besoins locaux en retenant des « expériences similaires », des réunions en comité très réduit ou en effectuant des visites d’inspection. C’est dans cette perspective que CFI, qui met en œuvre la politique française d’aide au développement en faveur des médias du Sud pour le compte du ministère des Affaires étrangères et du Développement international, a dépêché son représentant Philippe Chauvet en Tunisie le lendemain de la fuite de Ben Ali le 14 janvier 2011 pour une mission d’évaluation menée conjointement avec l’Union européenne de radiotélévision (UER). Le but de cette mission était d’« évaluer au plus juste la nature des besoins et des priorités ». Les conclusions ont été remises à tous les opérateurs audiovisuels français concernés par les programmes de coopération. Des missions ponctuelles menées par des représentants de l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF) ou de France Télévisions avaient la même visée évaluative. Les mêmes outils ont conduit au diagnostic d’un journalisme local en manque d’investigation.

L’absence de journalisme d’investigation, levier d’un nouveau journalisme ou simple rhétorique ?

Dans la logique du constat portant sur le manque de professionnalisme et sur les supposés dérapages déontologiques des journalistes vient le diagnostic d’une filière médiatique fondée sur le plagiat, sans investigation, sans réactivité et sans agilité dans la production et la recherche d’information. Les réformateurs des médias s’accordent donc sur le fait que les journalistes locaux seraient habitués, entre autres, à se faire « dicter leurs textes ou à lire des communiqués » (Devilliers, 2012). Pour inciter les journalistes à brader ces manies, se mettent en place de nombreuses possibilités de collaboration à partir du début 2012, notamment avec le réseau Arab reporters for investigative journalism  (ARIJ). Le travail de celui-ci consiste à sensibiliser à la nécessité de faciliter la logistique administrative et matérielle en agissant au niveau des institutions médiatiques nationales. Rana Essabagh, directrice exécutive du réseau, définit le journalisme d’investigation comme : « journalisme qui travaille sur la base de documents et la recherche d’une vérité que quelqu’un s’évertue à cacher par ignorance ou volontairement […] ». Elle explique dans la foulée que « le contexte législatif, politique ainsi que la culture sociale et la mentalité arabe non initiée à l’esprit critique […] représentent des obstacles qui se mettent en travers du journalisme d’investigation dans le monde arabe » (Lahbib, 2012).

De surcroît, selon Saloua Charfi, journaliste et enseignante à l’IPSI, ces obstacles seraient de deux ordres : professionnel, lié principalement à la confusion avec d’autres genres journalistiques (enquêtes, reportages) et éthique, lié en particulier à la protection par le journaliste de ses sources d’information (Charfi, 2014). L’investigation peut être entendue dans cette perspective comme une manière de dissiper certaines manières de faire journalistiques se contentant d’exposer les faits annoncés lors de conférences de presse ou de communiqués sans les reconstruire, les vérifier, les entrecouper, les analyser ou les contextualiser. Il s’agit dès lors, de procéder à un changement de paradigme médiatique fondé sur un journalisme industrialisé. Celui-ci serait une des dynamiques de la démocratie moderne (Gellner, 1967). Cette mutation marquerait donc le passage d’un journalisme de promotion et de flatterie à un journalisme supportant l’esprit critique, et en particulier, la critique du pouvoir.

Pour noter ce changement, une campagne de communication a été lancée entre le 1er et le 15 mai 2012 par le Groupe d’observation de la Tunisie (TMG) membre du réseau mondial de l’échange international de la liberté d’expression (IFEX). Cette sensibilisation a tenté de projeter davantage les professionnels des médias dans une culture de dévoilement. La campagne s’inscrivait dans le cadre d’un vaste projet intitulé « Observation et plaidoyer pour le soutien aux défenseurs des droits de l’homme indépendants en Tunisie ». Elle a été conduite conjointement avec le blog collectif Nawaat et a été bâtie sur une croyance suivant laquelle la rupture avec la propagande conduirait ipso facto vers un nouveau genre de journalisme fondé sur la révélation des vérités cachées.

À l’issue de cette campagne, un certain nombre de formations ont été graduellement mises en place en vue de former les professionnels aux ficelles du métier de journalisme d’investigation et ce, dans le but de changer des pratiques médiatiques qualifiées de « sur place », d’ankylosées, d’immobiles voire de Sahafa jalissa (le journalisme assis).

Avec cet engouement pour le journalisme d’investigation, il a été créé à l’IPSI, pour la rentrée universitaire de 2013-2014, un master professionnel spécialisé dans ce genre journalistique qui aura cependant une courte durée de vie : il a pris fin juin 2015. La conception du parcours pédagogique et du contenu de ce master a été réalisée à la carte dans le cadre d’un « programme de soutien » entre l’institut et l’Université Albany-Suny de New York.

La modernisation du métier : une affaire de projets de courte durée

Depuis les années 1970, la Tunisie – qui ne lésine pas à réformer – acquiert progressivement la réputation de « bon élève » de la communauté internationale et des bailleurs de fonds. Cette tendance réformiste s’est toujours traduite depuis le premier président de la République tunisienne Habib Bourguiba par un engagement en apparence volontariste efficace et sans réticence. Ce volontarisme a valu au pays une appréciation positive, même si dans la réalité cette attitude est « jaugée à l’aune d’agrégats globaux », comme le note à juste titre la politologue Béatrice Hibou (Hibou, 2009).

Depuis janvier 2011, puisque le pays ne dispose pas de moyens financiers nécessaires au recyclage de ses propres institutions et en particulier celles des domaines de l’information et de la communication, l’engagement des acteurs internationaux revêt une importance sous plusieurs formes. Les formes les plus perceptibles sont les dons financiers et logistiques, les propositions de programmes pédagogiques et d’enseignement, le conseil et surtout la formation.

La formation comme nerf de la professionnalisation des journalistes

La plus grande part des projets lancés en Tunisie au lendemain du 14 janvier 2011(6)revient à l’audiovisuel français (France Télévisions, France 24, TV5 Monde, Radio France international RFI, Radio France, etc.). Ce sont principalement des projets de formation des journalistes. L’Union européenne et en particulier la Commission européenne en tant que méta-dispositif de financement est en deuxième position dans le pays via leurs délégations en Tunisie. Le financement d’une grande partie de cette commission se fait ainsi sur des programmes comme l’Instrument de stabilité (IDS), l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH) ou encore l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP). Soulignons également l’engagement de la Belgique via son Conseil supérieur de l’audiovisuel et la Délégation Wallonie-Bruxelles en Tunisie, celui de la Grande Bretagne à travers la BBC et celui de la Suisse, à travers son ambassade et par le biais du centre pour la sécurité, le développement et l’État de droit (DCAF).

En troisième place viennent les États-Unis par le biais de leur ambassade et des programmes de subvention comme the US Middle East partnership initiative (MEPI). Ces acteurs figurent parmi les bailleurs importants. En mars 2012, plus de 150 journalistes tunisiens auraient bénéficié de ces programmes selon l’ambassadeur américain qui en a fait mention à l’occasion de son allocution du 29 mars 2012 à l’Université méditerranéenne des affaires. Des dizaines d’organisations non gouvernementales internationales rejoignent également la liste des acteurs comme l’Association mondiale des radios communautaires (AMARC), International Media Support (IMS) ou encore Reporters sans frontières (RSF) présente sur le terrain depuis les années 90.

Les principaux partenaires et bénéficiaires de ces actions sont le Centre africain de perfectionnement des journalistes et communicateurs (CAPJC) : seul établissement pour la formation professionnalisante continue et qui délivre des certifications ; l’IPSI seul établissement de service public délivrant le diplôme du journalisme ; l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP) ; les institutions médiatiques. Des composantes de ladite société civile comme l’Association tunisienne pour la formation des journalistes professionnels ou le centre de Tunis pour la liberté de la presse (CTLP) participent également à ces actions. Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) est, pareillement, un acteur important sur ce terrain grâce en particulier, à l’élaboration trimestrielle d’observations sur les états des lieux, élaboration qu’il réalise par ailleurs sur les pratiques journalistiques et le degré de respect de la déontologie.

Les publics ciblés par ces différentes actions de formation sont principalement les journalistes arabophones et francophones des médias traditionnels (agence, presse écrite, radio et télévision), les journalistes des nouveaux médias (presse et médias électronique, sites Web, blogs, etc.) ; les responsables de rédaction, les managers des médias, les étudiants en journalisme, les formateurs, les enseignants, les attachés de presse, les communicateurs du secteur privé et du public, les bloggeurs.

La plupart de ces actions d’acclimatation à un journalisme plus libre et responsable se déroulent dans la capitale Tunis étant donné que la majorité des institutions et des médias publics et privés locaux y sont implantés. Seules quelques sessions ont lieu dans les régions telles que Djerba, Sousse, Kef, Kairouan, Sbeïtla (au centre de la Tunisie). Il ne s’agit pas de décentraliser ces actions mais plutôt d’aboutir à un arrangement avec les responsables des médias régionaux. En effet, ces derniers ne pouvaient supporter les absences de leurs journalistes pendant les périodes de formation. D’ailleurs, les effectifs de journalistes sont insuffisants dans les entreprises médiatiques par rapport à l’étendue du chantier intervenu consécutivement à la chute de la dictature. La solution s’imposait donc d’organiser des formations sur site dans les médias régionaux (UNESCO, 2012, p. 92).

Il arrive rarement que ces formations aient lieu à l’étranger dans la mesure où il y a une grande difficulté dans l’attribution des visas Schengen pour l’Union européenne. En décembre 2011, RFI et Radio Monte-Carlo ont accueilli pendant deux semaines « la crème des journalistes locaux » (Note de terrain, décembre 2012) au nombre de dix journalistes stagiaires dans leurs rédactions à Paris. Un mois plus tard, une dizaine de journalistes ont passé deux semaines à la rédaction de Radio Monte-Carlo. Il en a été de même en 2013 lorsque des étudiants de l’IPSI ont passé 3 semaines aux États-Unis dans le cadre d’un programme comportant un stage professionnel au sein de différentes institutions médiatiques états-uniennes. Ces actions se poursuivent. Plus récemment, en juin 2015 en l’occurrence, CFI, dans le cadre de son programme avec l’IPSI intitulée Shabab Up !, avait organisé un voyage à Marseille à destination d’une nuée de journalistes débutants en vue de leur enseigner les manières de s’impliquer dans la vie publique mais aussi en vue de les « professionnaliser » par rapport au journalisme numérique. Ce projet Shabab Up est financé par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international (MAEDI). Outre ces formations, certaines autres se font à distance, telle une formation dispensée par la BBC aux journalistes locaux au cours du mois de mars 2012 et portant sur la déontologie et les techniques de rédaction suivant les normes internationales du métier. Près de quinze journalistes appartenant aux médias audiovisuels publics et à la presse écrite y ont participé dans le but d’apprendre un rendu journalistique plus moderne et universellement reconnu.

L’exception tunisienne comme entrave à la pratique « universelle » du journalisme ?

Quel que soit le qualificatif employé pour décrire l’esprit dans lequel s’opère le processus de réforme (professionnalisation, modernisation, aide, assistance, monitoring, coopération, partenariat, transfert d’expertises, etc.) les acteurs locaux font de moins en moins mystère sur l’issue de ce processus et sur le caractère dominant du facteur externe. Du côté tunisien, les acteurs locaux les plus influents optent plutôt pour la rhétorique de l’« exception tunisienne » c’est-à-dire l’acceptation de l’ouverture dans la préservation et l’exportation de l’empreinte locale dans le monde (Wallerstein, 1997). Les termes employés comme autorégulation ou réforme de l’intérieur vont dans ce sens revendicateur d’une certaine autonomie ou plutôt d’une ouverture conditionnelle. Du coté international, les institutions emploient tour à tour les termes de soutien, d’appui ou d’accompagnement. À titre d’exemple, CFI mentionne, dans l’un de ses rapports d’activité, qu’elle se donne pour objectif d’« aider à faire vivre un débat démocratique pluraliste » (CFI, 2012, p. 12). Cet objectif s’affiche clairement dans les déclarations de David Hivet, directeur Méditerranée-Asie :

« La Tunisie fait partie de nos pays prioritaires d’intervention. En effet, les médias tunisiens y sont en pleine mutation et CFI souhaite accompagner ce dynamisme. Depuis près de deux ans, nous les soutenons dans leur transformation et développement. Nos actions et notre engagement dans le pays sont le reflet de notre mission globale auprès des pays en transition et des pays émergents,  être au service de la modernisation des médias locaux ».
Déclarations disponibles sur le site de CFI, http://www.cfi.fr/actualites/cfi-renouvelle-son-engagement-aupres-des-medias-tunisiens, (dernière consultation, 15 février 2015)

Ces déclarations s’inscrivent en effet dans la convention de formation signée entre l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF) et la Radio et Télévision Tunisiennes (RTT) le 11 avril 2011. Cette convention scelle bel et bien l’idée d’accompagnement exprimée par Alain de Pouzilhac, président directeur général de l’AEF :

« Je suis très fier que l’expertise des journalistes de RFI, MCD et France 24 nous permette d’accompagner les équipes de la Radio et de la Télévision publiques tunisiennes dans ce moment si important de l’histoire de leur pays »
http://academie.france24-mcd-rfi.com/fr/revue_de_presse.php

Dans ce même registre, mais tout en anticipant des postures réfractaires à la libéralisation de la filière médiatique tunisienne, un des formateurs de la fondation Hirondelle, une ONG suisse soutenant les médias généralistes dans des pays en situation dite de crise transitionnelle, affirme :

« […] on n’est pas là dans une attitude paternaliste mais une attitude d’appui »
Note de terrain, mars 2014.

Le dessein des partenaires étrangers, à examiner de près, est entre autres de rendre praticable la filière médiatique locale pour des éventuels investisseurs internationaux ou tout simplement faciliter la diffusion des nouveautés internationales en matière de programmation et de formats audiovisuels (Delbarre, 2001 : 115). Autrement dit, agir sur les mœurs et les valeurs locales en menant des actions sur les médias lesquels constituent désormais un pouvoir cognitif majeur. Ce schéma se matérialise sous le prétexte de la « diversité culturelle » (Pierre Mœglin, 2013) sans frontières et avec la rhétorique d’un monde devenu « village global » pour reprendre la grammaire du sociologue canadien Marshall Mc Luhan. Les entrepreneurs internationaux des médias en Tunisie tirent par ailleurs avantage du fait de pouvoir bénéficier d’un pays laboratoire. Autrement dit, un environnement où ils peuvent tester des stratégies à des coûts raisonnables pour se déployer par la suite sur des marchés similaires ou encore sous-traiter certaines productions culturelles (Trabelsi, 2008).

En ce sens, il importe de signaler que la disparité au niveau de la terminologie des uns et des autres, laisse transparaître des positionnements stratégiques et des négociations tacites. Ces mises en négociation permanentes dissimulent en réalité des tensions et des résistances latentes. Voulant en effet se soustraire à une certaine hégémonie qui se profile, les entreprises médiatiques tunisiennes, même si elles acceptent le principe de changement du secteur médiatique, n’hésitent pas à montrer des velléités de résistance quand il est question de rendre opérationnelle la réforme. À titre d’exemple, les membres de la HAICA, le principal organe de régulation du champ audiovisuel, se sont trouvés en difficulté quant à l’application des cahiers de charges relatifs au fonctionnement d’une organisation médiatique. En ce sens, lors de l’une de leurs réunions, celle du 29 septembre 2014, ces mêmes membres n’ont pas pu statuer sur le sort des médias diffusant de manière illégale après l’expiration du délai du 28 septembre 2014. En réalité, ces médias n’arrivent pas à se conformer aux normes de diffusion exigées par cette autorité de régulation, laquelle se transforme à maintes reprises en un dispositif de pouvoir.

Cet exemple montre qu’il est plausible que l’importation des standards internationaux (qui ne sont pas une entité figée) engendre la déstabilisation du secteur des médias et empêche sa mise sur pieds de manière cohérente, c’est-à-dire de façon bien assimilée par les acteurs locaux qui les appliquent. À ce titre, un journaliste tunisien avec dix ans d’expérience nous mentionne le fait que les mutations actuelles introduites par Internet dans la pratique du journalisme ne laissent pas le temps aux professionnels des médias de réfléchir sur comment se conformer aux règles internationales du respect de l’éthique du métier. La raison qu’il met en avant est le fait que :

« La normalisation à travers la transmission de nouvelles pratiques ne part pas des besoins de la filière médiatique et ne tient pas assez en considération le désir d’accomplissement des journalistes. Ceux-ci veulent que leur travail soit reconnu par la société. Aussi, ces nouvelles normes ne sont pas assez « tunisifiées ». Elles ne sont pas comprises par les praticiens locaux »
Note de terrain, février 2014.

Ce témoignage nous oriente vers la recherche et la volonté de comprendre l’idéal qui sous-tend cet élan vers plus de professionnalisation de la pratique journalistique.

Offre de professionnalisation idéalisée

L’injonction élaborée internationalement et faite aux acteurs locaux de respecter les normes professionnelles et éthiques relève d’un idéal de journalisme « teinté de teneur morale » (Zamit, 2014 : 190) pas ou peu intériorisé par les praticiens locaux. Cette idéalisation est de mise d’autant plus que manquent des études appropriées au contexte tunisien et même maghrébin de manière plus large. Elle est en effet le produit de la construction faite par des acteurs internationaux qui, comparés à leurs collègues maghrébins, possèdent, à certains égards, l’expérience et la culture de la formalisation de ce métier. Ils ont, de ce fait, pour principale préoccupation l’optimisation des manières de faire des journalistes locaux d’un point de vue instrumental tout en consolidant la même structure pyramidale de la production de l’information. Comme l’attestent nos entretiens depuis 2011, l’inculcation de nouveaux schèmes journalistiques relatifs aux cultures numériques et démocratiques (transparentes et sans connivence) sauvegarde la même structure pyramidale d’éthos journalistique dans la production de l’information. En cela et en réalité, cette inculcation est une mise à jour en douceur des vieilles conceptions ethnocentriques des théories diffusionnistes du XIXe ayant accompagné la diffusion du chemin de fer et du télégraphe. Ces théories considèrent l’information comme une denrée rare qui ne doit pas être à la portée de tous. Cette façon d’envisager la réforme des médias comme servant le marché de l’information frivole et le camouflage de l’information pertinente n’aide pas à comprendre et à prendre à bras-le-corps l’amélioration de la filière médiatique locale. Dans cette configuration, la situation du récepteur des médias dans les pays dits sous-développés n’est pas loin de l’image du primitif. Celui-ci, « est devenu le « sous-développé », écrit Armand Mattelart, et il n’a comme option que d’imiter les modèles de ses aînés. Cette conception imprègne l’usage des médias audiovisuels mis au service de la « rationalisation » des attitudes […]» (Mattelart, 2008, p. 63). Dans cette même visée, notre recherche sur le processus de réformes des médias nous conduit en outre à dire que cette vieille conception est désormais en crise et l’argument du gagnant-gagnant qu’elle met à présent en avant mobilise peu les principaux acteurs de la réforme, à savoir les journalistes eux-mêmes ainsi que le public des médias souvent appréhendé par des sondages. De ce fait, les interventions de partenariat se font de plus en plus de manière calculée et discrète. Ainsi, pour donner de la chaire à la posture « gagnant-gagnant » entre partenaires français et tunisiens, dès le 31 mai 2011, France Télévisions apporte son « expertise » aux deux chaînes publiques nationales, Wataniya 1 et Wataniya 2. Dans le programme de ce qui est qualifié comme aide, outre les cycles de formation, des visites de délégations tunisiennes à France 3 et à ses stations régionales à Marseille et à Strasbourg, mais aussi quatre palettes de matériel de tournage et de montage que la direction technique de France Télévisions a dégagé de ses stocks disponibles dans toutes les chaînes du groupe.

Dans cette même logique mettant en avant le don, l’aide, la gratuité et la solidarité, un programme de partenariat entre la chaîne BBC et les deux chaînes étatiques de télévisions tunisiennes destiné à transformer la production de ces dernières en un réel service public qui se débarrasserait progressivement du joug de la publicité et qui culturaliserait davantage ses programmes afin de se distinguer de la concurrence des chaînes privées locales. Ces dernières misent à maintes reprises, pour ne pas dire souvent, sur les produits de la culture de masse ; de manière très agressive, ou peu s’en faut. Ce programme ambitionne ainsi la formation en permanence des journalistes en se focalisant sur le renforcement de leurs « capacités rédactionnelles » et en mettant en place un code déontologique les préparant aux défis de nouvelles emprises économiques et idéologiques sur leur métier (Bouquillion, 2008). Dans ce code, il est question donc de « servir l’intérêt général », d’« indépendance », de « neutralité », d’« équité », de « précision » et surtout de travail en état de veille durant les 24 heures de la journée et au gré des événements.

Dans la foulée, les CSA français et belge contribuent, sous forme de conseils, à mettre les premières pierres d’un nouvel organisme de régulation de l’audiovisuel tunisien : ce qui allait devenir la HAICA. Elle est définie par le décret-loi 2011-116 voté en novembre 2011 et est chargée de la régulation du secteur audiovisuel. Cette instance a aussi, entre autres missions, de veiller au respect des règles professionnelles et déontologiques du secteur médiatique local. Au-delà de l’aspect juridique, son rôle de sanction et de distribution des autorisations pour les entreprises médiatiques et les professionnels, comme nous l’avons expliqué supra, est marqué concrètement par des altercations avec les acteurs de l’audiovisuel. La HAICA était d’ailleurs l’un des éléments de la feuille de route préconisée par l’UNESCO en 2008 dans son rapport portant sur les indicateurs de développement des médias dans les pays pauvres.

« Les instances de régulation, lit-on dans ce rapport, doivent être autonomes et indépendantes de toute ingérence politique ou commerciale, et leurs membres doivent être choisis à l’issue d’un processus transparent et démocratique. Leurs pouvoirs et leurs responsabilités doivent être définis par des lois, y compris des obligations légales explicites destinées à promouvoir la liberté d’expression, la diversité, l’impartialité et la libre circulation de l’information. Cette instance de régulation doit être dotée des fonds nécessaires à l’accomplissement de cette mission. Elle doit également en répondre devant l’opinion publique, normalement par la voie législative. Il doit exister la preuve que l’instance de régulation exerce ses pouvoirs et ses responsabilités, par exemple en appliquant des sanctions proportionnelles afin de protéger l’intérêt général »
UNESCO, 2008 :23.

Au-delà de cette offre idéalisée, nos observations et nos entretiens, au lieu de nous amener vers la conclusion sur l’émergence d’habitus démocratiques, nous conduisent plutôt vers la piste de la prolifération de comportements stratégiques aussi bien de la part des entrepreneurs de la formation que de la part de certains journalistes. Ces derniers adhèrent à ces offres de formation dans le cadre de stratégies de reconversion. La plupart de ceux-ci, après avoir construit une réputation dans l’infotainment ou comme flatteurs de l’ancien régime, prennent progressivement une nouvelle orientation et se spécialisent dans le show politique. Cette frange de journalistes ne tarde donc pas à s’inscrire dans la nouvelle rhétorique nationale en train de se reconstruire autour de ladite « protection des acquis de la Révolution » (Elhaou, 2012, p. 160).

De surcroît, la phraséologie autour du manque de professionnalisme et de compétences des professionnels des médias dans le pays utilisée par certains experts(7) a redonné de la liberté aux journalistes en exercice. Ceux qui avaient été fortement impliqués avec la dictature avaient donc la possibilité de se racheter et de changer de posture (Chabbeh, 2012). Ces derniers sont, de ce fait, les premiers à avoir avoué le peu de professionnalisme avec lequel ils envisageaient leur métier. Toutefois, cette confession n’était pas innocente dans la mesure où c’est une façon de s’attribuer un nouveau rôle sur l’échiquier médiatique local encore en gestation.

Conclusion

Cinq ans après son déclenchement, le processus de réforme des médias en Tunisie semble produire un hiatus avec les réalités médiatiques et professionnelles locales. En effet, les logiques et les expériences des acteurs ne sont pas les mêmes. En d’autres termes, les acteurs locaux et les professionnels du métier en particulier, peu ou pas habitués à cette expérience, agissent selon une vision micro se limitant à l’amélioration de leurs conditions de travail, de la qualité de leurs productions, à la préservation du terrain conquis en matière de liberté d’expression. Il n’en demeure pas moins que cette posture est loin de favoriser la saisie de la dimension globale du processus.

Les acteurs internationaux, en l’occurrence souvent animés par des logiques de marché et dotés d’expériences théoriques et pratiques en matière de transition démocratique (en Europe de l’Est ou en Afrique subsaharienne par exemple) et en matière d’industrialisation culturelle et médiatique, agissent selon une vision que nous pouvons qualifier de macro. Dans cette perspective, nous avons essayé de mettre au jour, à travers cette recherche entamée depuis 2011, le fait qu’il y a bel et bien télescopage entre, d’une part, des modalités de formation à un journalisme s’acclimatant, dans l’urgence, aux normes démocratiques, et d’autre part, une propension locale cherchant à élaborer un acte médiatique ad hoc. À cet effet, ce processus s’acheminant vers un journalisme œuvrant pour la démocratie, pour ambitieux qu’il soit, semble être un projet dont l’issue demeure encore incertaine.

Dans ce contexte, l’offre internationale de la réforme des médias demeure ainsi au stade d’une rhétorique modernisatrice mobilisant une nuée d’acteurs triés sur le volet et dont le dessein est l’emprise sur le secteur par le maintien d’une seule façon de faire du journalisme : one best way. À examiner de près et comme nous avons essayé de le montrer dans cet article, elle n’a pas introduit en effet un changement profond dans la filière médiatique. Ainsi, en dehors du retour de certains médias marginalisés à l’époque de Ben Ali, tels qu’Elhiwar El Tounsi (avant que ne devienne une télévision généraliste et commerciale), Al-Maouqif, Mouatinoun et Al Tariq al-Jadid et de l’élimination de l’Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE), la crise économique des médias tunisiens ne cesse de croître et les entreprises médiatiques les plus connues à l’époque de Ben Ali sont presque les mêmes après les événements de 14 janvier 2011.

En outre, les exigences internationales en faveur d’une pratique journalistique plus professionnelle, plus responsable et de qualité sont souvent incomprises voire boudées de la part de beaucoup de journalistes. Car, comme nous venons de le montrer, ces recommandations ne prennent pas suffisamment en compte les conditions du travail précaires des journalistes. En ce sens, ces recommandations sont beaucoup plus pour la promotion de la division internationale du travail médiatique que pour l’échange sui generis avec les professionnels locaux. Sous cet angle, nous avons montré que se hasarder à normer un journalisme en crise se prête de facto à la réhabilitation du mythe de Sisyphe c’est-à-dire à la mise à jour de la même organisation pyramidale avec ce qu’elle porte comme paradoxe et iniquité, d’autant plus que l’État tunisien n’a plus de politique publique pour les médias.

Notes

(1) Termes employés par le chercheur américain Ithiel de Sola Pool, le plus célèbre pourfendeur des thèses critiques de l’économie politique de la communication, pour qualifier les chercheurs dont les travaux s’inscrivent dans cette thèse.

(2) L’autonomie au sens de Castoriadis est une désintégration. Cette autonomie porte dans son sillage les premiers germes de l’émancipation. « La désintégration des rôles traditionnels exprime la poussée des individus vers l’autonomie et contient les germes d’une émancipation. […] Plus le temps passe, plus on est en droit de se demander si ce processus se traduit davantage par l’éclosion de nouveaux modes de vie que par la désorientation et l’anomie. […] le jeune individu se trouve confronté à une société dans laquelle toutes les « valeurs » et les « normes » sont à peu près remplacées par le « niveau de vie », le « bien-être », le confort et la consommation. Ni religion, ni idées « politiques », ni solidarité sociale avec une communauté locale ou de travail, avec des « camarades de classe ». S’il ne se marginalise pas (drogue, délinquance, instabilité « caractérielle »), il lui reste la voie royale de la privatisation, qu’il peut ou non enrichir d’une ou plusieurs manies personnelles. Nous vivons dans la société des lobbies et des hobbies ». (Castoriadis, 1996 : 20-21)

(3) Nous sommes bien conscients qu’il n’y a pas réellement un modèle institué et stabilisé dans les pays démocratiques comme la France, l’Allemagne, l’Angleterre ou les États-Unis. Mais par modèle nous signifions plutôt des routines organisationnelles ancrées dans la pratique du journalisme dans ces pays.

(4) Par acte médiatique nous entendons les manières de faire des journalistes avant le formatage professionnel. L’acte médiatique signifie un engagement, une déviance voire une quête de reconnaissance à travers des trajectoires individuelles, singulières et une volonté subjective de certains journalistes que nous avons interrogés de s’approprier autrement leur métier et leur rôle dans la société en dehors des recommandations et des conventions à la fois locales et internationales.

(5) L’instance supérieure indépendante pour les élections.

(6) Tableau récapitulatif des appuis au secteur médiatique tunisien menés par les bailleurs de fonds internationaux publié par le Service européen pour l’action extérieure, (en ligne, dernière consultation, janvier 2015)
http://eeas.europa.eu/delegations/tunisia/documents/projets/3list_projetsmedias_fr.pdf

(7) Présentés dans les médias comme des « spécialistes des médias » parfois même comme des politistes, ces experts sont, pour un bon nombre d’entre eux, des enseignants dans des universités, mais, à la différence de leurs homologues, ils dirigent aussi des centres de recherche communément désignés comme indépendants, répertoriés dans des bases de données internationales en tant que think tank ou encore comme organe appartenant à la « société civile ». Ils ne cherchent pas à s’identifier à la figure de l’intellectuel universaliste « démodé », ni même aux dissidents qui ont intégré la politique en Tunisie à partir de 1989. Ils se présentent comme « indépendants » et francs défenseurs de la démocratie et des droits de l’homme.

Références bibliographiques

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Auteurs

Mohamed Ali Elhaou

.: Maître-Assistant à l’Institut de presse et des sciences de l’information (IPSI) et chercheur associé au groupe d’Études et de Recherche Interdisciplinaire en Information et COmmunication (GERiiCO) à Lille. Depuis 2004, ses recherches portent sur l’industrialisation de la communication et du journalisme.

Aida Fitouri

.: Maître-Assistante à l’Institut de presse et des sciences de l’information (IPSI) – et chercheure associée à l’Institut de recherche pour le Maghreb contemporain (IRMC) à Tunis. Ses travaux de recherche portent principalement sur les différentes stratégies d’acteurs et les enjeux liés aux TIC dans les sociétés du Sud.