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Net art : Autoproduction artistique et critique numérique

20 Déc, 2015

Résumé

Le travail artistique à l’ère d’Internet associe la création d’œuvres interactives à l’autoproduction de formes de communication et d’exposition alternatives visant à impliquer et fidéliser le public. Internet place en effet l’œuvre d’art au cœur d’une négociation entre artistes, informaticiens, dispositifs techniques et public enrôlé. Cet article analyse ces nouvelles figures artistiques et leurs modes relationnels dans un contexte où la mise en œuvre d’art – indissociable de la pratique amateur – est articulée à une réflexion politique et critique sur les technologies numériques. À l’intersection des sciences de la communication, de la sociologie des usages et de l’innovation artistique, l’article met en perspective les mutations du travail de création et les formes d’attachement créatif au Net art, révélatrices de nouveaux régimes médiatiques et activistes.

Mots clés

Net art, Travail artistique, Autoproduction, Médias interactifs, Communication, Sociologie de l’innovation, Anthropologie des usages numériques.

In English

Title

Net art: Autoproduction and digital art critic

Abstract

The artistic work in the era of Internet associates the creation of interactive artworks with the autoproduction of forms of communication and exhibition to involve and develop loyalty of the public. This article analyzes these new artistic figures and their relational modes in a context where the implementation of art and is inseparable of the critical media practice. At the intersection of communication sciences, sociology of uses and artistic innovation, the article puts in perspective these new forms of work and attachment in the Net art, revealing of alternatives and new media regimes.

Keywords

Net art, Artistic work, Autoproduction, Interactive media, Communication, Sociology of innovation, Anthropology of digital uses.

En Español

Título

Net art: Autoproducción artística y crítica digitales

Resumen

En la era de Internet el trabajo artístico combina la creación de obras interactivas sobre la autoproducción de formas alternativas de comunicación y exposición a para retener el público. Internet hecho en el centro de las negociaciones entre la obra de arte, técnicas informática y dispositivos de comunicación. Este artículo analiza estas nuevas figuras artísticas y modos de relación en un contexto en que la aplicación del arte – inseparable de la práctica de aficionados – se articula en una reflexión política y crítico de las tecnologías digitales. En la intersección de ciencias de la comunicación, sociología de usos y innovación artística, el artículo pone en perspectiva la creación de empleo y formas de compromiso creativo con el arte neto, revelando nuevo plan de medios y activistas.

Palabras clave

Net Art, Trabajo, Autoproducción, Interactivo Media, Comunicaciones, Sociología de la innovación, usos digitales, Antropología.

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Fourmentraux Jean-Paul, « Net art : Autoproduction artistique et critique numérique« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°16/3B, , p.57 à 68, consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2015/supplement-b/04-net-art-autoproduction-artistique-et-critique-numerique

Introduction

A quoi servent les outils numériques et qui servent-ils ? Peut-on en faire autre chose que ce pour quoi ils ont été prévus ? L’utilisateur peut-il reprendre un certain pouvoir face à des solutions techniques de plus en plus complexes et formatées dans des objectifs marchands ? Dans la perspective d’une théorie critique de la technique (Feenberg 2014), les outils numériques sont souvent perçus comme des outils de rationalisation sociale au service d’instances de domination. Sans se limiter pour autant à cette vision déterministe, la question de l’appropriation et de l’usage des technologies est aussi (et surtout) une co-construction sociale. Les technologies numériques paraissent en effet marquées par une instabilité inédite et les groupes subordonnés (les utilisateurs) peuvent manifester leur influence à l’encontre des forces hégémoniques via des tactiques de détournement, de contournement ou de rejet, etc. Le succès de certains outils et technologies est par conséquent, plus souvent qu’on ne le dit, lié à l’invention simultanée de leurs usages, au point que ce sont parfois ces derniers qui constituent la véritable innovation. Prenons pour exemple la perspective, la photographie, les plus contemporains outils vidéographiques d’enregistrement du réel et jusqu’aux tout derniers réseaux informationnels numériques : si le moteur principal de leur innovation est technologique, relevant en cela de la recherche stratégique, scientifique ou même militaire, leur (re)connaissance sociale s’origine tout autant dans le monde culturel ou dans l’univers de la création artistique. Leur succès et leur diffusion, difficiles à promouvoir, et qui la plupart du temps ne peuvent être pleinement prédéfinis ou anticipés, suppose en effet une première appropriation sociale.

L’approche proposée par Feenberg croise ici les travaux du  « prophète de l’âge électronique » et théoricien canadien Marshall McLuhan, dont l’intérêt pour la technique et les médias a été, à bien des égards, précurseur de nombreuses réflexions et créations à l’interface des arts, des sciences et des technologies. Ces deux auteurs développent en effet l’idée selon laquelle les artefacts qui réussissent sont ceux qui trouvent des appuis dans l’environnement social. Ils insistent par conséquent sur la capacité des utilisateurs à réinventer les techniques qu’ils utilisent. Cette approche trouve des points d’appuis et de développement dans différents milieux scientifiques qui accordent désormais une importance renouvelée aux techniques qui équipent et résultent des activités humaines coordonnées. L’anthropologie des réseaux, de l’action située ou de la cognition distribuée ont en effet intégré les objets techniques dans leurs schémas d’analyse des activités en proposant d’aborder plus frontalement l’articulation des faits techniques et des faits sociaux. La relation aux objets techniques ne relève plus alors uniquement de l’instrumentation ou de l’aliénation, mais peut s’opérer au contraire sur le mode de la fréquentation et du contact, voire du jeu. Ce glissement interprétatif a permis de revisiter différents domaines de la vie sociale : la fabrication des découvertes scientifiques ou des innovations industrielles, et jusqu’aux activités les plus quotidiennes équipées désormais d’une large variété d’objets techniques mis eux-mêmes à l’épreuve des relations sociales. En resituant les interactions sociales dans des lieux, des pratiques et des mondes d’objets, ces approches proposent des alternatives aux théories du déterminisme technique ou du constructivisme social. Envisagés autrement que comme de simples signes ou représentations symboliques d’enjeux culturels et sociaux qui se dérouleraient en amont ou en aval de leur manipulation, les objets techniques y équipent les échanges sociaux et participent de la dynamique de l’interaction en offrant aux acteurs des ressources et des points d’appui renouvelés.

De l’art à l’ère d’Internet

Dans ce contexte de développement des technologies et des médias contemporains, les œuvres de l’art ou les pratiques artistiques sont parfois appelées à jouer un rôle spécifique : suivant l’hypothèse développée par McLuhan, selon laquelle « l’art vu comme contre milieu ou antidote devient plus que jamais un moyen de former la perception et le jugement ». Ce dernier pariait alors sur « le pouvoir qu’ont les arts de devancer une évolution sociale et technologique future, quelquefois plus d’une génération à l’avance. L’art est un radar, une sorte de système de détection à distance, qui nous permet de détecter des phénomènes sociaux et psychologiques assez tôt pour nous y préparer (…) ». Par conséquent, si l’art est un système « d’alerte préalable », il peut devenir « extrêmement pertinent non seulement à l’étude des média, mais aussi à la création de moyens de les dominer »(1). La question du détournement croise ici la pratique artistique où l’on voit des artistes faire preuve d’inventivité dans l’usage de solutions non prévues d’outils numériques, où l’on voit aussi le rejet de solutions imposées. On peut en effet s’attendre à ce que la création artistique, du fait de son caractère expérimental et souvent pionnier, participe activement de cette co-invention des usages technologiques, jusqu’à transformer quelquefois les technologies elles-mêmes, en contribuant à en redéfinir la forme et les modalités de mise en société. Des mouvements artistiques comme l’art vidéo, l’art sociologique, l’esthétique de la communication, l’art réseau et aujourd’hui le Net art, se sont par exemple constitués autour d’une expérimentation des technologies de communication et ont donné lieu à de nombreuses installations et dispositifs artistiques qui ont largement préfiguré le développement d’Internet tel qu’on le connaît et le pratique aujourd’hui. Toutefois, si dans le domaine de l’art contemporain et du numérique la question de l’appropriation et du détournement médiatiques est devenue déterminante, sa réalisation n’en reste pas moins un défi difficile à relever.

Depuis la seconde moitié des années 1990, le Net art parodie les institutions médiatiques et les modes de diffusion et de réception de l’art contemporain, tout en questionnant les principes fondateurs d’Internet. Tirant parti de la démocratisation de l’informatique connectée, le Net art guide et préfigure ces technologies et usages médiatiques à travers la mise en abîme d’une ambivalence de la relation au réseau Internet, tantôt intime et terriblement solitaire, vécue comme un retrait du monde réel, tantôt plus collective et communautaire, à mesure que se développent de nouvelles interfaces de dialogue. Le Net art désigne désormais des créations interactives conçues par, pour et avec le réseau Internet, par opposition aux formes d’art traditionnelles transférées sur des sites-galeries et autres musées virtuels. Pour l’autoproduction artistique, l’originalité d’Internet tient à ce qu’il propose simultanément un support, un outil et un environnement créatif. Il faut entendre par support, sa dimension de vecteur de transmission, dans le sens où Internet est son propre diffuseur ; par outil, sa fonction d’instrument de production, qui donne lieu à des usages et génère de nouveaux produits artistiques ; et par environnement, enfin, le fait qu’il constitue un espace « habitable » et habité. Dans ce contexte, le travail artistique vise au moins autant la conception de dispositifs interactifs que la configuration de situations communicationnelles. Utilisant toutes les fonctionnalités d’Internet ‑ le Web (l’HTML, le ftp, le peer to peer) mais aussi les réseaux sociaux, le courriel, le chat ‑ le Net art promeut des œuvres dont les enjeux relationnels et collaboratifs ont grandement bousculé les relations entre art et société. Le site internet, la homepage, le blog, les mailing lists ou les forums de discussion constituent désormais les cadres de sociabilités renouvelées. Les développements récents du Web 2.0 ont introduit de nouvelles formes d’attachement du public : capté et fidélisé dans des dispositifs sociotechniques qui l’impliquent plus directement et qui se nourrissent de sa participation. En s’inscrivant dans cette articulation, l’œuvre du Net art se manifeste dans la conception de dispositifs interactifs, mais aussi dans la production de formes de vies en ligne, et de stratégies de communication en réseau (2). Le réseau Internet y est tout autant investi comme un atelier en ligne que comme un lieu d’exposition c’est-à-dire comme l’espace de création, de communication et de réception active de la pratique artistique.

Cet article ne vise pas la description exhaustive de ces différentes figures (Fourmentraux 2010), mais propose à la fois un bilan et une esquisse des évolutions du Net art en soulignant deux tendances principales : le hacking créatif et l’esthétique des réseaux sociaux. Tout en s’inscrivant dans la filiation du Net art, les œuvres les plus récentes en radicalisent l’esprit et la forme par une mise en tension de l’innovation technologique et des pratiques culturelles et médiatiques qui en découlent. La carrière de l’œuvre d’art y est envisagée comme un produit dynamique plutôt que comme un bien statique (Abbott 2001, Fabiani 2003), placée au cœur d’une négociation et reconfigurée par les multiples jeux d’acteurs qui s’en emparent (3). Cet article s’inscrit ainsi dans le prolongement de recherches qui se sont donné pour objet d’étude l’articulation des faits techniques et sociaux, non sur le mode de l’instrumentation ou de l’aliénation, mais sur celui de la fréquentation et du contact, voire du jeu : Souriau, 1956 ; Eco, 1965 ; Dodier, 1995 ; Latour, 2005 ; Akrich, Callon, Latour, 2006.

Hacking Créatif

Dès l’origine, le Net art questionne les spécificités  technologiques, politiques et sociales de son médium qu’est Internet. Ce n’est pas un hasard si le Net art s’est développé massivement et cela dès son apparition en Russie et dans les pays de l’ex – Europe de l’Est où Heath Bunting, artiste militant yougoslave, Oliana Lialina et Alexei Shulgin (Russie) ou Vuk Cosic (Slovénie, co-fondateur des listes de diffusion Nettime, Syndicate, 7-11 et du Ljubljana Digital Media Lab) développent leurs premiers projets dès 1996. Dans leurs œuvres, la critique des régimes non-démocratiques, l’hacktivisme, le cyberféminisme, constituent les prémisses de la création sur Internet. Leur art est en effet indissociable de la technologie et du contexte socio-politique des années 90, révélant les implications sociales du réseau, notamment des technologies de repérage et d’accès à l’information sur Internet. Un nombre grandissant d’artistes du réseau revendique une implication parasitaire. Leur forme liminaire d’action créative vise à contaminer Internet par des virus artistiques qui empruntent à la logique et aux comportements déviants des pirates de l’informatique : les hackers. Certains artistes mettent en effet en œuvre une pratique efficace de l’infection et de la contamination : leur démarche a pour objet l’incident, le bug, l’inconfort technologique et la perte des repères. Les œuvres pionnières de Jodiinterviennent par exemple sur la structure du langage HTML par altération du code et transformation des balises permettant l’agencement des sites web : tant au niveau de la mise en page que de l’intégration des composantes multimédias, du son, de l’image, de la vidéo. En opérant une intrusion à la racine même des sites, au niveau du langage et du code informatique, ces œuvres génèrent des erreurs basiques et des commandes contradictoires : l’erreur système 404 qu’elles affichent fait ici figure de leitmotiv créatif. Jodi entraîne ainsi le public dans les dédales rhizomatiques d’un jeu de piste dont il est souvent impossible de trouver l’issue, leurs interfaces de brouillage confrontant le visiteur à l’apparition constante de messages d’alerte et engendrant une perte de contrôle de l’ordinateur qui ne répond plus à aucune commande. Héritières de l’histoire du Dadaïsme et de l’Art vidéo, ces œuvres de Net art questionnent la relation proprement médiatique, ses contraintes sociales et les déterminismes structurels, visuels ou imaginaires, qu’elle promeut : le succès contemporain du Glitch art en est un éloquent témoignage relayé en France par l’artiste Systaime (a.k.a Michael Borras) qui travaille le flux internet, détourne les réseaux sociaux, remixe le web, esthétise les bugs (Glitch) et réalise des collages (Mashup) à partir des nombreuses productions amateurs de la culture populaire numérique. Institué en genre à part entière, le Glitch art désigne aujourd’hui l’esthétisation d’erreurs analogiques ou numériques, comme des artéfacts ou des bugs informatiques, par corruption du code et des données ou par manipulations d’appareils électroniques.

Détournements logiciels

Davantage centrés sur les coulisses d’Internet, d’autres créateurs du Net art ont imaginé des navigateurs et des moteurs de recherche subversifs, dont le Shredder de Mark Napier et Netomat de Maciej Winiewski sont des figures emblématiques. Ces œuvres s’approprient les données du Web par une l’altération du code HTML avant son interprétation par les logiciels de navigation. Il s’agit d’anti-moteurs de recherche qui redonnent à Internet son potentiel d’archive dynamique et modulable. Le Netomat répond par exemple aux requêtes des internautes par un afflux de textes, de sons et d’images fixes ou animées récupérées sur le Web. Il revient alors à l’utilisateur de combiner ou de recombiner ces différentes informations sans se soucier de l’arborescence du site ou de la structure de la page d’où elles sont extraites. À la frontière entre le navigateur, le moteur de recherche et l’extracteur de données, cette œuvre propose une forme active d’accès et de recouvrement des informations sur Internet. Son programme – le Netomatic Markup Language – développé en open-source est lui-même modulaire et adaptable : il peut être approprié et amélioré par ses utilisateurs ou servir de plate-forme pour d’autres applications.

Le Trace Noiser défend également un mode de production artistique fondé sur le développement en open-source d’applications et d’outils informatiques détournés de leurs usages. Ce générateur de clones informationnels croise les fonctionnalités du moteur de recherche et des outils statistiques d’indexation et de traçage des réseaux de liens sur le Net. L’œuvre génère de fausses pages personnelles et les dissémine sur le réseau pour brouiller l’identité des participants. L’internaute est invité à saisir, dans le Trace noiser, son identifiant (nom et prénom) à partir duquel sera créée sa propre page Web. Ce dispositif dessine en effet un portrait intime de l’internaute à partir du glanage et du réagencement alternatif des sources le concernant retrouvées sur le réseau. Le projet artistique exploite l’idée que toute personne active sur le Net laisse, parfois malgré elle, une quantité de traces numériques (les traces liées à l’indexation d’un nom dans des courriels, des formulaires de commande, des signatures électroniques, des déclaration d’usage de logiciels, etc.), lesquelles sont ensuite traitées et travaillées par le Trace Noizer (démultipliées et transposées dans d’autres contextes). L’application créative brouille les pistes, mêle le vrai au faux et rend, de ce fait, difficile d’apprécier cette (dés)information. Il en résulte une identité fragmentée qui place l’internaute dans l’entre deux algorithmique des traces informatiques glanées sur le Web et de celles générées par le Trace Noizer, continuellement découpées et altérées dans leur affichage et leur organisation.

Net activisme

Cette première série d’œuvres de Net art révèle les implications sociales des technologies de repérage et d’accès à l’information sur Internet. Les browsers y apparaissent comme des organes de perception au travers desquels nous voyons le Web : ils filtrent et organisent les informations dispersées sur un nombre exponentiel d’ordinateurs dans le monde. D’autres dispositifs de distorsion des contenus et des outils d’Internet adoptent une visée plus politique. L’œuvre collective Carnivore, promue au festival Ars Electronica, est une version détournée du logiciel DCS1000 employé par le FBI pour développer l’écoute électronique sur le réseau. Josh On, de Futurefarmers, propose une version anti-impérialiste des jeux vidéo ayant pour mission la guerre contre le terrorisme. Heath Bunting pervertit les communications médiatiques de grandes puissances financières. Le collectif américain RTMARK détourne les stratégies de communication de grandes sociétés de courtage privées. Le collectif français PAVU transporte et parodie la logique économique des sociétés d’audit et de conseils, dans la sphère artistique et culturelle de Internet. Ils initient des objets informationnels résultant du forage de données préexistantes prélevées sur le réseau (plining), à partir desquels sont créés une monnaie d’échange (le gnou) et un système de valorisation financière apparié à la transaction des œuvres. Enfin, le collectif européen ETOY mène de nombreuses actions au cœur de la bataille politique et économique des noms de domaines sur Internet (DNS, Dot.com), inaugurant de la sorte une guerre informationnelle sur le terrain de l’e-business et des nouvelles valeurs financières comme le NASDAQ.

À l’heure d’Internet 2.0, l’artiste Français Christophe Bruno incarne le renouveau de cette figure de l’artiste parasite en « s’attaquant » aux outils et rituels du web collaboratif. Il baptise une première série d’œuvres les « Google Hack » : des dispositifs artistiques et programmes informatiques qui détournent Google de ses fonctions utilitaires tout en en révélant les dimensions contraignantes et cachées. Selon l’artiste, Internet est devenu un outil de surveillance et de contrôle inégalé dont la dynamique économique repose sur l’analyse et la prédiction de tendances, à l’aide de logiciels de traçage de la vie privée des goûts et des identités sur la toile. Pour révéler ces déterminismes, il intitule Human Browser, le Navigateur Humain une série de performances Internet sans-fil (Wi-Fi) dans l’espace physique. Grâce à son casque audio, un comédien entend une voix de synthèse qui lit un flux textuel provenant d’Internet en temps réel. Le comédien interprète le texte qu’il entend. Ce flux textuel est capté par un programme (installé sur un portable Wi-Fi, c’est lui qui effectue le « détournement » de Google). En fonction du contexte dans lequel se trouve l’acteur, des mots-clés sont envoyés au programme (grâce à un PDA Wi-Fi) et utilisés comme input dans Google, de sorte que le flux textuel est toujours lié au contexte. Pendant la manifestation SIANA 07 (Semaine Internationale des Arts Numériques et Alternatifs), du 15 au 17 mars 2007 à Evry (France), il présente WiFi-SM. Ce dispositif invite le spectateur-acteur à partager la douleur du monde : un patch WiFi-SM, placé sur le corps du volontaire, va rechercher sur Google des mots programmés évoquant le mal, la souffrance : « meurtre », « viol », « virus » parmi 4500 sources d’information dans le monde. À chaque mot-clé rencontré, le spectateur ressent une légère décharge électrique, en sympathie avec la souffrance globale. Grâce à cette « technologie P2P (Pain to Pain) », l’artiste parodie la publicité et propose en argumentaire de vente : « faites baisser votre niveau de culpabilité ».

De nombreux artistes du Net art accompagnent aussi depuis l’origine d’Internet le mouvement du logiciel libre en créant des œuvres inspirées du modèle « copyleft » de développement à code ouvert (open source). On doit ici distinguer le mouvement du logiciel libre, Free Software Foundation, fondé par Richard Stallman, et le mouvement Open Source Initiative, initié par Eric S. Raymond qui, s’ils coïncident sur la méthodologie des logiciels, diffèrent sur l’éthique de leurs mouvements, le premier se voulant être également un mouvement social. L’Art Bit Collection de l’International Computer Consortium de Tokyo (ICC) ou le site runme.org regroupe des travaux qui explorent en cette direction les recherches du Net art : ils rassemblent principalement des expérimentations autour des langages de programmation, des environnements logiciels, des Network community, des applicatifs de visualisation des coulisses du World Wide Web, et enfin, des applications détournées de logiciels interactifs. Ces dispositifs sont davantage axés sur les applications informatiques à l’usage des internautes, appelées aussi les logiciels auteurs.

Esthétique des réseaux sociaux

Si l’emploi des technologies numériques renforce, au cœur des productions artistiques contemporaines, la prédominance du régime conceptuel et des différents registres de l’écriture artistique de l’idée, du code et du programme informatique, il promeut simultanément une réhabilitation de l’échange communicationnel. Poursuivant la logique plus ancienne du Mail art (ou de l’Art postal), les premières œuvres pour le réseau Internet ont tout d’abord promu une circulation d’e-mails artistiques. La galerie londonienne The Centre of Attention a consacré ce type d’action en invitant des artistes à produire des happenings informationnels par propagation et contamination des messageries électroniques. La lettre électronique, à mi-chemin de la performance d’artiste et de l’acte de langage, constituait une « communication d’auteur », participative et performative, dont la propagation a adopté les modes d’amplifications propres à la rumeur. Mouchette a ainsi érigé en œuvre artistique le jeu des mises en lien, l’esthétique relationnelle et le réseau où se déploie l’e-mail. À l’instar de Mouchette, de nombreux projets de Net art adoptent la forme d’un récit imagé et évolutif proche du journal personnel et intime, mais désormais éditorialisé, donné à voir et à vivre en quasi direct sur le Web. Ils déclinent en ligne les potentialités d’une archive visuelle et textuelle qu’il est possible d’afficher et d’entretenir sur le long terme, en ayant ou non recours à la participation des visiteurs. Dans ces projets, la forme de l’image-récit empruntée au régime cinématographique devient le lieu d’une action ludique et d’un environnement de communication.

L’art Post-Internet : sortir de l’écran

Aujourd’hui, le Net art tend également à se déployer hors du réseau et à s’inscrire dans des objets tangibles. La culture numérique héritée en grande partie du web et qui tire parti des habitudes et pratiques du réseau inspire aujourd’hui des créations dans le monde physique. Plusieurs artistes et collectifs d’artistes choisissent désormais de verser ou de transposer l’espace public numérique dans l’espace public de la cité. C’est le cas notamment des réalisations du collectifs d’artistes français Microtruc ainsi que des projets Dead Drops et Speed Show, portés par l’allemand Aram Bartholl et du projet Newstweek du néo-zélandais Julian Oliver, tous deux fondateurs du Free art qui investit l’espace de la rue en y déployant des œuvres en réseau, mais pourtant off line, car déconnectées d’Internet. Des signes de géolocalisation numérique, des support de stockage, des flux d’informations, des ondes communicationnelles sont alors extraites et ainsi libérées du réseau Internet, pour, tout en s’en inspirant, amplifier et raviver parfois des relations sociales, des situations de partage et de communication urbaines qui avaient pu être supplantées et quelque peu anesthésiées par l’usage massif des seuls réseaux numériques. C’est le cas aussi du projet Hype(r) Olds initié par Albertine Meunier (a.k.a Catherine Ramus) et aujourd’hui relayé par de nombreux artistes issus du Net art qui proposent dans des espaces physiques des ateliers de culture numérique à destination d’une population indemne et privée de toute culture numérique : des femmes de plus de 77 ans. C’est le cas encore, des projets portés par Anne Roquigny et par Isabelle Arvers. Le projet WJ-s d’Anne Roquigny consiste en l’organisation de sessions collectives de remix du web à destination d’amateurs qui renoncent un instant à l’isolement de la relation frontale à leur écran, en participant à des expériences de partage collectif de leurs playlists avec d’autres amateurs. Le projet Machinima porté en France par Isabelle Arvers consiste quant à lui en un atelier de réalisation et de diffusion de films d’animations produits via le détournement de moteurs de jeux vidéo en 3D. Un machinima étant en effet un film réalisé à l’intérieur d’univers virtuels en ligne ou à l’intérieur de jeux vidéo grâce à leurs moteurs graphiques.

Des œuvres à faire : autoproduction et interactivités

La spécificité du Net art et de ses évolutions récentes réside dans cette conjugaison d’une configuration technique et d’une occasion sociale ritualisée. Au-delà de la critique numérique et en liaison au travail d’autoproduction, l’implication du public constitue ici un impératif renouvelé. Elle est mise en scène dans des dispositifs informatiques qui génèrent différents modèles d’interactivité (Fourmentraux 2010). Elle fait l’objet de stratégies artistiques de fidélisation et repose sur la construction de prises pour le public. Elle engendre, enfin, divers contrats et rituels de réception propre à cette forme d’art. Par conséquent, les œuvres qui en découlent sont dialogiques, dans le sens où elles aménagent une réception négociée avec le public. Partagées entre artistes, ingénieurs et publics internautes, elles matérialisent des facteurs de contraintes autant qu’elles génèrent des appropriations, interprétations et actions créatives. Il en résulte une situation collective d’énonciation et d’opération qui n’est plus mise au service d’un résultat unique, mais se trouve encastrée dans un processus évolutif et incrémental dans lequel des acteurs multiples investissent, individuellement et collectivement, une œuvre qui reste pour partie à faire et à refaire.
En ce sens, les « dispositifs Net art » conduisent à ne plus séparer producteurs et destinataires, contraintes et ressources. Leur caractère performatif ouvre de nouveaux espaces de jeu et de négociation. Si la polysémie du concept de dispositif a abondamment nourri le Net art – de Michel Foucault à Roland Barthes, de la science des signes (sémiotique) aux nouvelles théories de l’information et de la communication – on tend aujourd’hui vers la mise en perspective du caractère actif, et surtout, sociotechnique, de tout dispositif. Michel Foucault (1975) en a souligné l’ambivalence : en insistant sur le déterminisme des dispositifs de surveillance, tel que le panoptique disciplinaire, mais qui ne valent que par l’action de leurs sujets, une action nécessaire à leurs actualisations. Selon Giorgio Agamben (2007), la ruse du dispositif est en effet qu’il fonctionne en accord avec la « subjectivation » qu’il produit lui-même, et donc avec l’accord implicite du sujet, pour lequel la « profanation » du dispositif est toujours possible. Marshall Mc Luhan (1968) ou Roland Barthes (1984) ont également souligné cette intrication du dispositif, entre cadre et action, sur le terrain de l’expérience médiatique. De ce point de vue, le concept de dispositif voisine avec d’autres notions avec lesquelles il conjugue une vision délibérément pragmatique du social et de la technique : empruntant aux concepts d’attachement, de configuration ou d’agencement et de mise en œuvre. Il s’agit alors d’éclairer l’action de ceux qui conçoivent là où se joue la médiation, non pas avec, mais dans l’environnement technique, poursuivant en cela la direction de recherche initiée par la sociologie de la médiation d’Antoine Hennion (2007).

Par-delà l’opposition traditionnelle de la grande culture et des médias de masses (Maigret, Macé, 2005), le Net art conjugue ainsi la pratique médiatique et l’expérience esthétique de nouveaux dispositifs de création : jeux vidéo, cinéma praticable, installations numériques et interactives. Mais le travail artistique à l’ère d’Internet associe également cette autoproduction d’œuvres interactives à de nouvelles formes de communication médiatique et politique. À l’écart des institutions médiatiques et des modes de diffusion et de réception de l’art contemporain, artistes et internautes amateurs ont tiré parti de la démocratisation de l’informatique connectée et ont promu des modes inédits de monstration et de propagation des œuvres. Leurs modes d’occupation du réseau, les stratégies médiatiques et les dispositifs de détournements artistiques autoproduits contribuent à l’émergence d’un monde de l’art en même temps qu’ils constituent un vecteur de défense de la diversité culturelle à l’ère d’internet. Partant, plutôt que de laisser croire aux internautes qu’ils sont artistes, ces œuvres de Net art permettent aux internautes de développer une réflexion et un regard critique sur les évolutions du réseau.

Sélection de liens et œuvres citées

ARVERS, Isabelle Machinima (machine,
animation, cinéma)
http://www.isabellearvers.com/
BARTHOLL, Aram  

http://datenform.de/

  Map

http://datenform.de/map.html

  Dead Drops

http://deaddrops.com/

BRUNO, Christophe   http://www.christophebruno.com/
  Dreamlogs http://www.iterature.com/dreamlogs
  Human Browser www.iterature.com/human-browser/fr/index.php
  WIFI SM – Feel the Global pain http://www.unbehagen.com/wifism-for-real
BUNTING, Heath   http://www.irational.org
CLOSKY, Claude   http://closky.online.fr/
DE CAYEUX, Agnès In my room www.agnesdecayeux.fr
DELIEUTRAZ, Caroline   http://delieutraz.net/
ETOY Corporation   http://www.etoy.com
FOREST, Fred   http://www.fredforest.com/
HYPE(R) OLDS   http://www.hyperolds.com/
IOD (Mathew Fuller, Colin Green et Simon Pope)   http://www.backspace.org/iod
JENNI JenniCam http://www.jennicam.org
JODI   http://www.Jodi.org
  OSS http://www.oss.Jodi.org
  Error 404 http://www.404.Jodi.org
KLINGEMANN, Mario Flickeur incubator.quasimondo.com/flash/flickeur.php
LAN Trace Noizer
Disinformation on demand
http://www.tracenoizer.org/
LAURETTE, Mathieu   http://www.laurette.net/
LEVEQUE, Julien   www.julienlevesque.net
MERRITT, Natacha Digital diaries http://www.digital-diaries.com
MEUNIER, Albertine   http://www.albertinemeunier.net
MICROTRUC (Collectif)   http://www.microtruc.net/
MOUCHETTE   http://www.mouchette.org
NAPIER, Mark Shredder http://potatoland.org/shredder/welcome.Html
Newstweek   http://newstweek.com/
OLIVER, Julian   http://julianoliver.com
ON, Josh (de FUTUREFARMERS) Anti-wargame http://www.antiwargame.org
ROQUIGNY, Anne WJ-s (Webjay surfing) http://www.wj-s.org/
RSG Rhizome http://www.rhizome.org/carnivore
RTMARK   http://www.rtmark.com
SCHMITT, Antoine   www.fdn.fr/~aschmitt/gratin//as/index.html
SPAMM Musée des arts super modernes http://www.spamm.fr/
SYSYAIME (a.k.a Michael Borras) http://www.systaime.com/
THE CENTRE OF ATTENTION   http://www.thecentreofattention.org
The YES MEN   http://www.theyesmen.org
VOOG, Anna-Clara Anacam http://www.anacam.com
WIFI SM Feel the Global pain http://www.unbehagen.com/wifism-for-real

 

Notes

(1) McLuhan M. 1968, Pour comprendre les médias. Les prolongements technologiques de l’Homme, Paris, Le Seuil, p.15-17

(2) Sur le concept de « dispositif » et son application aux arts numériques, voir : Jacquinot-Delaunay et Monnoyer, 2009 ; Agamben, 2007 ; Duguet 2002, Boissier 2004, Stanley 1998, Fourmentraux 2010.

(3) Le concept de « carrière » des œuvres est d’abord à entendre au sens des interactionnistes (Becker 1986, 1988) mais au moins autant au sens donné par l’anthropologie économique, davantage centrée sur les objets, saisis à travers leurs systèmes de qualification et de valorisation successifs (Appadurai 1986, Kopytoff 1986).

Références bibliographiques

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Auteur

Jean-Paul Fourmentraux

.: Jean-Paul Fourmentraux, sociologue et critique d’art est Professeur en Esthétique et Sociologie des arts et humanités numériques à l’université Aix-Marseille, il est membre du Laboratoire en Sciences des arts (LESA – Aix en Provence) et chercheur associé à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) au Centre Norbert Elias (UMR-CNRS 8562). Ses recherches interdisciplinaires (Sociologie, Sciences de l’art et Communication) portent sur les interfaces entre arts et sciences, cultures numériques, médias critiques et émancipation sociale.
Il est l’auteur des ouvrages Art et internet (CNRS, 2010), Artistes de laboratoire : Recherche et création à l’ère numérique (Hermann, 2011), L’œuvre commune : affaire d’art et de citoyen (Presses du réel, 2012), L’Œuvre virale : Net art et culture Hacker (La Lettre Volée, 2013) et a dirigé les ouvrages L’Ere Post-media (Hermann, 2012), Art et Science (CNRS, 2012), Identités numériques : Expressions et traçabilités (CNRS, 2015). Cf. http://www.linkedin.com/in/jeanpaulfourmentraux