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Et si le centre de la Terre n’était pas rouge ? De la représentation fantasmée à l’épreuve scientifique : le cinéma d’Haroun Tazieff

8 Juil, 2015

Résumé

À partir d’une analyse du film documentaire du volcanologue Haroun Tazieff « Les rendez-vous du diable » (1959), l’article montre comment la représentation du centre de La Terre permet de préciser l’importance de l’imaginaire du scientifique mais aussi les horizons d’attente des spectateurs engagés dans les récits de l’aventure scientifique.

Mots clés

Cinéma documentaire, communication scientifique, théories de la réception.

In English

Title

And if the center of the Earth was not red?
When fantastic representation meets the scientific method: the cinema of Haroun Tazieff

Abstract

Through its analysis of the 1959 documentary film « The Devil’s Blast » by volcanologist Haroun Tazieff, this article shows how Tarzeiff’s representation of the Earth’s core reveals both the importance of the imagination to scientific representation as well as the kinds of expectations viewers have when watching a tale of scientific venture.

Keywords

Documentary film, scientific communication, reception theory

En Español

Título

¿Y si el centro de la tierra no fuera rojo?
De la representación fantaseada a la prueba científica: el cine d’Haroun Tazieff

Resumen

Through its analysis of the 1959 documentary film « The Devil’s Blast » by volcanologist Haroun Tazieff, this article shows how Tarzeiff’s representation of the Earth’s core reveals both the importance of the imagination to scientific representation as well as the kinds of expectations viewers have when watching a tale of scientific venture.

Palabras clave

Cine documental, comunicación científica, teorías de la recepción.

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Sorel Vincent, « Et si le centre de la Terre n’était pas rouge ? De la représentation fantasmée à l’épreuve scientifique : le cinéma d’Haroun Tazieff« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°16/3A, , p.103 à 114, consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2015/supplement-a/09-et-si-le-centre-de-la-terre-netait-pas-rouge-de-la-representation-fantasmee-a-lepreuve-scientifique-le-cinema-dharoun-tazieff/

Introduction

Cet article a pour cadre la communication scientifique, plus précisément dans le cas du documentaire. Des chercheurs comme Haroun Tazieff, en se saisissant des moyens du cinéma, ont réalisé des films qui ont marqué leur époque. Certains de ces cinéastes ont bouleversé les conventions du cinéma, leurs approches phénoménologiques les ont parfois conduits à montrer les choses différemment. Mais l’usage de la caméra leur a-t-il permis d’observer ces réalités autrement ? Interroger ces pratiques permet de questionner la vulgarisation, le rapport du public à la science, le rôle et le travail du scientifique.

Haroun Tazieff a réalisé des documentaires scientifiques et des films destinés au grand public. Nous savons que Tazieff prenait très précisément en compte les « horizons d’attente » des spectateurs(1), mais qu’en est-il de ses objectifs scientifiques relatifs à sa pratique du cinéma ?

À travers cet exemple de vulgarisation scientifique et l’étude de la démarche cinématographique, on peut problématiser les relations entre approche scientifique et approche spectacularisante. Pour certains auteurs, le médiateur est souvent présenté comme un personnage ambigu (Jacobi, Schiele, 1999, p. 279), réaliser des films et rencontrer le succès serait-il douteux ? Dans le cas de Tazieff, la confrontation plus fine des deux postures, celle du cinéaste et celle du scientifique, nous permet d’envisager l’hypothèse que ces réalisations de films grand public lui ont permis d’atteindre ses objectifs scientifiques, ou du moins certains d’entre eux.

Cette recherche a été développée dans le cadre d’un projet pluridisciplinaire entre chercheurs en Sciences de la terre et en Sciences de l’information et de la communication autour des questions de vulnérabilité et d’incertitude dans les représentations médiatiques des catastrophes(2). Nous nous appuyons sur une approche sémio-pragmatique, telle que l’a définie Roger Odin, à travers la réception du film Les rendez-vous du diable (1959) par un sismologue, Christophe Voisin, chercheur à l’OSUG (Observatoire des sciences de l’univers de Grenoble). Le point de départ de notre analyse est la double expérience de spectateur de Christophe Voisin : celle qu’il fait en tant que scientifique mais aussi celle dans laquelle il se situe comme simple spectateur avec sa relation affective. Le cinéma de Tazieff a eu un succès public important et les films ont suscité des vocations de scientifiques bien qu’ils véhiculaient des images fausses de la connaissance sismologique en elle-même et des réalités du travail scientifique. Nous prendrons comme exemple la représentation du centre de La Terre que propose Tazieff  au début du film Les rendez-vous du diable : un graphique animé représente la Terre comme une coquille vide remplie d’un magma liquide, rougeoyant et inquiétant. À partir de cet exemple, nous décrirons un ensemble d’éléments rhétoriques et de représentations symboliques, puisés à la fois dans les images et le commentaire du film qui dans un rapport entre le verbal et le visuel participent à la construction de cet ensemble imaginaire. Puis, avec Christophe Voisin, nous avons cherché dans d’autres films du cinéaste comment cette représentation du centre de la Terre évolue dans le temps pour nous rendre compte que cette image fantasmée perdure dans les productions du volcanologue, même lorsque la théorie de la tectonique des plaques sera connue puis validée par la communauté scientifique.

Nous avons rapproché ce premier film (Les rendez-vous du diable), destiné au grand public avec celui que Tazieff a réalisé la même année, en 1959, pour l’Observatoire royal de Belgique, Exploration du volcan Nyiaragongo. L’étude de ces deux approches filmiques qui ne s’adressent pas aux mêmes publics, nous permet de contextualiser les moyens de l’observation scientifique à cette époque et de mieux comprendre les intentions de Tazieff. Dans un mouvement parallèle, nous avons aussi contextualisé le film dans l’histoire du documentaire.
Tout d’abord, nous observerons de quelle manière le cinéaste cherche à intéresser et émouvoir le spectateur. À cet effet, nous détaillerons comment Tazieff raconte plutôt l’aventure scientifique que la science. Ensuite, nous nous intéresserons à la spectacularisation comme réponse à des objectifs scientifiques. À travers l’analyse des images et du commentaire du film, il conviendra d’identifier ce qui répond aux « horizons d’attente » des spectateurs. Enfin, le questionnement portera sur la mise en scène cinématographique du corps du scientifique, sur son rôle dans l’observation scientifique et l’expertise. En conclusion, nous aborderons le rôle d’expert médiatique que Tazieff a acquis au fil du temps en ce qui concerne la question du risque naturel.

Comment intéresser le spectateur ? L’aventure scientifique plutôt que la science

Haroun Tazieff (1914 -1998) obtint un diplôme d’ingénieur géologue en 1944. À partir de 1948, il est géologue au service Géologique du Congo Belge. Il découvre par hasard les phénomènes de l’éruption volcanique qui l’ont fasciné et c’est au même moment qu’il commence à filmer. Sur les conseils de Paul-Emile Victor, il a ensuite réalisé des films pour financer ses voyages qui étaient indispensables au travail d’observation. Les films lui ont permis à la fois de voyager, de réaliser des observations de terrain et de développer son expertise. Il devient responsable de recherche puis directeur de recherche au CNRS en 1972(3). De l’expérience initiatrice, la contemplation de volcans en éruption, à la science, il s’est tourné vers la vulgarisation puis vers la vie politique.

Haroun Tazieff a d’abord été compagnon du commandant Cousteau à bord du Calypso. Cousteau a reçu la palme d’or au festival de Cannes pour Le monde du silence et l’Oscar du meilleur film documentaire en 1957. Les rendez-vous du diable dont le tournage a eu lieu en 1957 et 1958 n’est pas un film scientifique, mais un film d’explorateur avec lequel le volcanologue a la ferme ambition d’avoir du succès. Le récit du film met en scène Tazieff partant dans un voyage autour du monde à la rencontre des volcans. Or, il ne part pas avec d’autres scientifiques, mais avec un peintre naturaliste ! Le commentaire justifie ce choix : « Parce que jusque-là, la nature est plutôt un complice qu’un adversaire. » Tazieff n’envisage pas la nature dans un rapport de force ou de domination. Le commentaire l’énonce clairement dans un postulat de départ : « Nous ne nous intéresserons qu’aux paysages ». La préoccupation est donc celle du rêve positiviste : « la science produit un tableau qui est une copie de la nature. » (Caune, 2013, p. 179). Le cinéaste fait une totale abstraction de l’expédition scientifique qu’il ne montre absolument pas et qui pourtant a eu lieu. Un autre film, Exploration du volcan Nyiaragongo réalisé la même année par le volcanologue dans le cadre de l’Observatoire royal de Belgique, décrit les expériences, nomme les scientifiques et montre les instruments. Les rendez-vous du diable est un récit d’aventure humaine et ne comporte pas de données chiffrées. Les volcans représentent un ailleurs et un inconnu : plus que la mesure des phénomènes, il s’agit plutôt d’entretenir ce mystère à travers le commentaire du film que de le résoudre. « Nous nous sommes approchés le plus près possible de cette montagne de terreur. Même au siècle de l’atome, ce déclenchement de force dépasse le langage des chiffres. » « L’appel de l’aventure permet le plus souvent de couvrir les voix de la raison. » Le film est un récit d’aventure humaine qui relate des exploits sportifs plutôt que des péripéties scientifiques.

La spectacularisation pour répondre à des objectifs scientifiques ?

Alors que l’essentiel du commentaire du film n’est pas dit par le cinéaste mais par un narrateur qui parle de lui à la troisième personne, au début du film nous pouvons entendre pendant quelques minutes la voix de « Tazieff scientifique » qui présente une animation graphique représentant une écorce terrestre flottant sur un magma fluide et rouge. C’est alors que Christophe Voisin proposa d’appuyer notre réflexion à partir de ce graphique qui ne correspond pas à la réalité physique de la planète. Si une couche de magma se trouve bien sous le manteau terrestre, le centre de la Terre est principalement constitué par une roche, l’Olivine. Le centre de la Terre n’est pas rouge : il a une dominante verte avec une forte présente de fer(4). Alors que les moyens techniques n’existaient pas pour aller voir de quoi est fait le centre de la Terre, les scientifiques comme les écrivains, n’avaient que leur imaginaire pour moyen d’exploration ainsi que des lectures. Jules Verne ne s’était pas trompé quand il a écrit son roman Voyage au centre de la terre en 1864 : le centre de la Terre est solide. Or le graphique de Tazieff figure plutôt la théorie du magma liquide central établie par Alfred Wegener en 1912. Mais alors qu’une émission télévisée où il intervient, nous démontre qu’Haroun Tazieff avait déjà des contradicteurs sur cette théorie du magma central en 1960 qui évoquent l’existence d’un noyau dur (notamment dans l’émission Faire face, « Pourquoi la Terre tremble-t-elle ? » d’Igor Barrère et Etienne Lalou diffusée en 1960 par la RTF), il continuera jusqu’au milieu des années 1970 à véhiculer cette image inquiétante.

En présentant le centre de la Terre comme un danger potentiel, il implique fortement le spectateur. Cette conscience de la question du spectateur et de son imaginaire l’a conduit à mettre en scène son propre corps. Sa vulnérabilité face aux risques naturels s’adresse à la conscience corporelle du spectateur pour émouvoir le public et atteindre son objectif : convaincre les pouvoirs publics de développer des moyens pour l’observation scientifique. Avec le pouvoir du cinéma, le scientifique instrumentalise nos peurs pour créer de l’émotion. Il ne cherche pas dans ce film à rendre compte des réalités d’une expédition scientifique mais à créer de l’émotion en mettant en scène le destin individuel d’un scientifique jouant sur des peurs collectives. Il ne fait pas appel à la logique ou à la compréhension. Il joue de son impact auprès de la population mais pour développer les moyens essentiels à l’observation indispensable à la volcanologie.

Cette volonté de frapper les imaginations a certainement eu un effet plus important qu’un discours scientifique. Jean Caune constate que la « rationalité du discours scientifique étendu à l’ensemble des savoirs sur le monde a relégué le mythe et les récits poétiques dans l’irrationnel et a conduit à considérer les productions de l’art comme simple divertissement, supplément d’âme ou création de l’esprit n’ayant rien à voir avec la connaissance » (Caune, 2013, p.21). Gaston Bachelard a constaté que « le savant est un homme pourvu des deux comportements» (Bachelard, 1965, p. 104-105) à partir du moment où il veut expliquer ce qu’il fait, il adopte un autre langage, plus partagé. Baudoin Jurdant fait remarquer que le monde de la science et le monde de la vie quotidienne sont radicalement séparés comme le sont le langage de la science et celui que doit utiliser le chercheur qui vulgarise pour accéder à l’universalité (Jurdant, 2009). De plus, une approche universelle ne permet pas de distinguer le scientifique du profane : dans ce film comme dans tous travaux de vulgarisation qui doivent être accessibles par tous, il y a omission des contenus scientifiques au profit des récits mythiques. Dès le XIIe siècle, des auteurs se sont emparés de la question scientifique dans une approche littéraire et la vulgarisation est apparue au milieu du XIX° (Jacobi, 1999, p. 242). Tazieff s’inscrit dans cette tradition d’intermédiaires entre la société et la science et comme l’ont démontré les travaux de Baudouin Jurdant, les points d’appui d’une médiation et d’une ré-humanisation du rapport à la science sont très souvent l’autobiographie et la science-fiction(5).

Le fantasme, le symbole, l’image peuvent-ils être au service de la science ?

Nous nous appuyons maintenant sur les recherches de Daniel Jacobi afin d’analyser les formes de rhétorique utilisées pour décrire les deux théories qui entourent la conception du graphique d’Haroun Tazieff, celle de la dérive des continents (1912) et celle de la tectonique des plaques (1968). En effet, les écrits sont destinés à transmettre au lecteur des images et les textes de vulgarisation utilisent des « images-mots » pour donner à comprendre les phénomènes. Jacobi ainsi relève des métaphores, des comparaisons et des analogies avec la navigation ou la cuisine : « gâteau », « morceau de croûte craquelée  comme une coquille d’œuf dur » ou « confiture magmatique » (Jacobi, 1999, p. 245). Dès les débuts de la vulgarisation, l’illustration a été associée au texte et dans cette partie, nous nous intéressons à des éléments de commentaire pour analyser la rhétorique du film.

Le film est un voyage, un tour du monde : « Le chemin de nos rendez-vous avec le diable » dit le commentaire. Son titre fait directement référence à l’enfer. Tazieff se sert de l’imaginaire collectif pour nous émouvoir en mobilisant nos peurs les plus profondes : « Nous arrivions au bord du cratère, tout semblait calme et pourtant… une seconde plus tard, c’était la fin du monde. » L’omniprésence de la mort nous est sans cesse rappelée : « Personne avant nous n’avait vu ce merveilleux spectacle, personne, sauf ceux qui en sont morts ». Le centre de la Terre est perçu comme un danger en faisant référence à un imaginaire commun : l’enfer. Les péripéties sont physiques, elles ne sont pas scientifiques, les références sont religieuses ou sataniques. Le diable, c’est le centre de la Terre. Les volcans en sont les manifestations terrestres. Le symbole est l’éruption qui nous met en lien direct avec le danger et le fantasme de l’enfer. Tazieff nous parle de la vulnérabilité des hommes face aux évènements naturels. Le cinéaste nous fait vivre l’expérience cathartique de la catastrophe en la rendant originelle et « universelle ». Les indications trop précises, mesures, noms, repères spatio-temporels, sont enlevées. La passion et les dangers sont les ressorts dramaturgiques du film : « Les colères de la Terre restent hors de notre portée, les dragons des premiers âges défient la science (…/…). On peut endiguer les océans, domestiquer la foudre, on ne peut rien contre cela. On peut se taire et trembler. » La construction dramatique, dans une reconstruction évidente va vers plus d’éruption, vers une catastrophe, vers une apocalypse de fin du monde. Il se sert de nos peurs les plus profondes soudant les spectateurs dans une même terreur. « Les fictions apocalyptiques nous rassurent sur notre capacité à faire lien et à prendre place dans un vaste ensemble collectif. Si nous tremblons devant les mêmes peurs, si nous applaudissons les mêmes dénouements heureux, c’est bien parce que nous appartenons à la même communauté, transcendant les clivages de toutes sortes. » (Févry, 2012, p. 30).

La structure du film de Tazieff se rapproche ainsi des films « catastrophe », de leur part de révélation dans notre désir de faire front ensemble. Cette approche s’inscrit dans une tradition présente dès les origines de la vulgarisation scientifique. Camille Flammarion décrivait la fin du monde dans le premier numéro de Je sais tout du 15 février 1905 et toute représentation futuriste est constitutive d’une dialectique entre l’espoir et la crainte. (Jacobi, 1999, p. 242).

L’observation participante comme nouvelle approche documentaire

Tazieff s’est retrouvé un peu par hasard dans le cadre de ses missions face au spectacle fascinant de l’éruption volcanique et a été encouragé à écrire pour décrire ce qui l’avait tant émerveillé. Son premier livre, Cratères en feu, (Tazieff, 1951) est paru avant qu’il ne réalise des films. En écrivant, il s’est posé la question de la manière dont il pourrait retranscrire cela au moyen des mots. Dès 1948, en même temps que le début de sa carrière scientifique, il commença à filmer l’éruption du Kituro au Congo. Tout en filmant, Haroun Tazieff n’abandonne pas une approche littéraire que l’on retrouvera dans ses films. « Mais, comment donner au lecteur l’idée de ce que représente l’intimité grandiose d’un volcan en gésine ? Comment utiliser ici la litote qu’autrement j’affectionne ? Il y faudrait le génie d’un très grand poète. C’est pourquoi d’ailleurs dès le premier contact […], je me suis rabattu sur la facilité offerte par la cinématographie en couleurs » (Tazieff, 1951, p. 129). L’image est d’abord originelle et vécue. Elle répond au « sentiment de première fois » liée à l’enfance que connaissent bien les cinéastes pour susciter l’attention auprès des spectateurs. Tazieff évoque la spectacularisation en rappelant le caractère grandiose des phénomènes, mais il a un surtout un objectif poétique. Il s’inscrit dans un réalisme esthétique comme le faisaient Murnau, Ford ou Rossellini. Il s’agit de « travelogue » (film de voyage) mais aussi de passion. Ces films racontent le devenir de personnages agissant librement dans un milieu déterminant au sens de contraignant. Il y a du drame et de l’émerveillement mais aussi des dilemmes moraux qui laissent à penser que rien n’est facile.

Dés 1948, « Il se lança dans l’étude « sur le vif » de la phénoménologie des éruptions et de leur prévision (…) » mentionne la page Wikipédia le concernant (consultée le 19 octobre 2013). L’intérêt d’observer « sur le vif » dans le cadre de son observation scientifique, l’amènera à faire ce que l’on appellera quelques années plus tard du « cinéma direct » en même temps que les cinéastes les plus novateurs. Approcher le feu jusqu’à toucher le danger est une approche sensible (ne serait-ce qu’à la chaleur) qui représente une belle intuition de cinéma comme le releva Jean-Luc Godard en 1959 dans les Cahiers du cinéma à propos de Les rendez-vous du diable : «  A 6 mètres, on ne sent rien, A quatre mètres, on a chaud. À deux mètres, on brûle. » (Godard, 1959). La prise de risque et le sentiment de présent dans la prise de vues fascinèrent les cinéastes les plus novateurs de son époque. Pendant que Godard ou Chris Marker cherchaient à filmer « sur le vif » les phénomènes d’une société en changement dans les rues de Paris dans A bout de souffle ou Le joli mai, Tazieff le fait au sommet des endroits les plus inaccessibles. Jusque-là les volcans étaient filmés très à distance même si des cinéastes comme Jean Epstein, Roberto Rossellini et Vittorio De Seta ont cherché à s’approcher, Tazieff nous plonge au cœur de l’éruption (ce qu’avait déjà fait Méliès inspiré par Jules Verne mais dans un décor). Son écriture ne se limite pas à l’observation documentaire et à la modernité qu’elle représente avec le sentiment de direct.

En même temps, il est évident que Tazieff, dans l’approche littéraire du film, est tourné vers le passé : il évoque Jules Verne, Mermoz, Buffalo Bill et parle de l’enfance, le film met en scène l’aventure, certains espaces nous font penser aux westerns. Il y a aussi une référence évidente à l’œuvre d’Henri Michaux sur le voyage (notamment Un barbare en Asie publié en 1933). Le film pourrait se passer « nulle part » et « n’importe quand » mais toujours au présent et dans un sentiment de « vivant » créé par l’immédiateté de la prise de vue. Dans une forme qui est un équilibre entre un texte « littéraire », et le ton du commentaire, des sons directs éprouvants, jamais entendus à l’époque : ce sont des prises directes, des bruits telluriques qui expriment la profondeur et la fureur, même si ce n’est pas la première fois que l’on entend une éruption dans un film (Vittorio De Seta avait filmé l’éruption du Stromboli en 1954 avec un magnétophone à bande portatif). Le film convoque à la fois la peur pour l’avenir et les origines de la peur en faisant appel aux croyances les plus anciennes : « Voici donc par quoi a commencé l’aventure humaine. La pâte fabuleuse dont est fait notre monde. Au cœur de ces remous, nous étions hypnotisés par l’admiration et par la peur car c’est ici que nous avons vraiment su ce qu’était la peur, la vraie, celle qui vient des tréfonds du corps et du fond des âges. La terreur élémentaire, absolue qui saisit l’âme placée en face du surnaturel. Il nous fallait faire des efforts immenses pour nous souvenir que nous étions des êtres formés par la science et la raison. Pour ne pas céder à la panique primitive du plus vieux des mythes, celui du dragon vomissant les flammes infernales et dont rien ne peut apaiser les fureurs. » « Leur tragédie peut aussi être la nôtre. » En nous montrant Pompeï et les corps pétrifiés, les peurs, la mort, sont là pour nous émouvoir en reliant le passé au présent, à notre présent de spectateur.

Cinéma et vulgarisation se retrouvent dans la mise en scène du corps du scientifique

En ne considérant que Les rendez-vous du diable, nous pourrions penser que les scientifiques en 1959 n’avaient pas d’autres moyens que leurs corps. Tazieff met en scène son propre corps face à l’immensité du phénomène et aux forces naturelles qui sont à l’œuvre. L’émotion joue sur la perception de la vulnérabilité des hommes en évoquant l’immensité, l’incommensurable : « Jamais nous n’avions vu de lave couler à cette vitesse, jamais nous n’avions été aussi loin de l’échelle humaine. » L’image récurrente, parfois christique, est celle de la silhouette d’un homme sur un fond d’éruption volcanique. « Cette silhouette minuscule qui court sur la crête, c’est un homme, c’est Tazieff. » Tazieff cherche à incorporer le spectateur non seulement en filmant au plus près de la lave au risque de se brûler mais aussi en se filmant (avec une deuxième caméra) en filmeur : un héros apparaît à l’image et la réalité n’est pas seulement retranscrite dans une préoccupation naturaliste, elle devient récit. Il filme aussi la caméra : la technique apparaît. L’acte de filmer est inscrit à l’intérieur du film, et le cinéaste s’en sert pour créer une tension. Nous regardons ces images avec une autre intensité en suivant les péripéties de celui qui prend des risques pour nous donner à voir de nouvelles images. Avant Tazieff, nous pouvons évoquer trois films qui appartiennent à trois registres différents du cinéma et mettent en scène un filmeur face au danger : en 1917, les explorateurs Martin et Osa Johnson ont filmé le moment où ils accostent sur une île peuplée d’ « anthropophages », le cinéma burlesque avec Buster Keaton dans The Cameraman (1928) ou le film d’essai avec L’homme à la caméra de Dziga Vertov (1929). Avec le couple Johnson, l’expédition elle-même est filmée. Caméras et fusils sont braqués dans un même mouvement vers les hommes ou les bêtes sauvages qu’ils venaient provoquer pour filmer le danger de leur mise en scène. Afin de séduire la standardiste de l’agence de presse, Buster Keaton est prêt à prendre tous les risques pour qu’elle le remarque. Dans la mise en scène de Vertov, le filmeur n’est plus, comme dans le célèbre film Lumière, sur le quai de la gare. Avec L’arrivée du train en gare de la Ciotat, les premiers spectateurs sont surpris par l’effet de réalité du train qui se dirige sur eux. Dans L’homme à la caméra, le filmeur se trouve au milieu des rails et le train se dirige vers la caméra : il s’enfuit au dernier moment.

Dans Les rendez-vous du diable, une séquence montre Haroun Tazieff filmant sous une pluie de pierres volcaniques avec un simple casque sur la tête. Il n’y a bien sûr aucun intérêt scientifique pour Tazieff à se mettre en danger autre que celui de « fabriquer » cette image du filmeur qui prend des risques. Le corps du filmeur constitue le lien avec le spectateur dans le film, il est le spectateur dans le champ. Le cinéaste reste sous les pierres pour continuer à filmer sinon le film s’arrêterait en pleine intensité et le spectateur ne veut pas que le film s’arrête avant la fin (avant une fin construite pour pouvoir sortir du film, un happy end). « Vie et mort, mort et vie de l’image filmique : telle est l’histoire, la seule histoire, peut-être, que racontent toutes les apocalypses portées à l’écran. Elles narrent la fin du cinémonde. » (Szendy, 2012, p.61). Les filmeurs en danger prennent du plaisir  dans un jeu avec la mort, la leur, mais aussi celle de l’image qui sans ce frôlement pourrait nous apparaître sans intensité.

Non seulement le corps de Tazieff est inscrit à l’image, mais il continue d’apparaître lorsqu’il s’efface pour laisser place à l’éruption en portant lui-même la caméra. Tazieff utilisait une caméra Bell & Howel 16mm conçue dans les années 1940 pour les reporters de guerre. Elle permettait à l’opérateur de tourner sans pied l’appareil à la main et appuyé sur son front. Autonome, très mobile, c’est une caméra à ressort qui ne permet que des plans de 30 secondes.  Ce qui veut dire que toutes les 30 secondes, l’opérateur se replace. Le découpage rendu obligatoire par les contraintes du matériel construit la présence d’un témoin à l’image. Le corps du filmeur est inscrit dans le mouvement de la caméra et dans une relation que le cinéaste entretient avec ce qu’il montre. Le corps affirme la présence de l’auteur et il est à  fois l’universalité (tout le monde a un corps) et l’intimité la plus forte à partir de celle que chacun entretient avec son propre corps.

Dans le cinéma documentaire, l’inscription du corps deviendra une approche affirmée du film d’auteur à partir des années 1960 mais déjà avec Tazieff, le corps sensible du scientifique permet à la fois de percevoir l’expérience tout en la transmettant au corps du spectateur. Il relie ainsi le destin individuel du scientifique, aux peurs collectives. Dans ces films, l’aspect contemplateur prend le dessus alors que « les sciences ne semblent avoir rien d’autre à nous dire sur le corps que ce qui peut être mis en chiffres, en équations et en diagrammes » (Caune, 2013, p. 21). L’image récurrente du cinéma de Tazieff est celle de la silhouette d’un homme sur un fond d’éruption volcanique. Tout est ramené à l’échelle humaine et la vie du volcan à celle de Tazieff. Le volcan n’existe (pour nous) que parce que Tazieff y va. C’est une perte de repères physiques et temporels face à une tension, à une angoisse qui nous rend vulnérable. Dans ses travaux sur le processus d’interprétation des œuvres, le philosophe Hans-Georg Gadamer définit le spectacle comme un mode authentique de participation qui engage le corps du spectateur et que nous pouvons reconnaître ici à travers le corps, l’imaginaire et les sensations du scientifique dans des principes de mise en scène et de jouissance esthétique, tel que l’a formulé Hans-Robert Jauss. En mettant en scène son propre corps, le scientifique-cinéaste incorpore, de manière très efficace, le spectateur et « extériorise une intention visant à produire une relation » (Caune, 2002). Aller au plus près de la lave avait un sens à la fin des années 1950 : Tazieff a mis en place les premiers prélèvements de gaz, mais aujourd’hui, la « mesure » du volcan se fait à distance. S’approcher jusqu’à toucher le feu, se trouver sous une pluie de pierres volcaniques…, tout cela ne répond pas à un objectif scientifique mais cette approche spectacularisante fonctionne émotionnellement. Dans Les rendez-vous du diable Tazieff porte un costume de cinéma : il est habillé d’un short, d’un casque et chaussé de pataugas alors que dans le film produit parallèlement par le centre de volcanologie, les savants sont  déjà équipés de combinaisons. Tazieff pour ce film tourné a remis l’équipement qui correspond à la première fois qu’il a découvert le phénomène en 1948 : c’est un corps qui découvre, révèle, initie qu’il met en scène. Baudouin Jurdant explique que la relation au corps est la plus archaïque qui soit et que le corps « est un lieu privilégié pour symboliser cet échec de la symbolisation, ou un non-savoir absolument universel. » (Jurdant, 2009, p.121). Il est non seulement un lien entre le cinéaste et le spectateur, mais aussi entre le savoir et le non-savoir : « Le corps est un lieu universel de non-savoir, une zone d’ombre qui conjoint l’universalité la plus complète et l’intimité la plus secrète. » (Jurdant, 2019, p.121). Cette mise en scène du corps du cinéaste-scientifique comme médiateur est à la fois efficace cinématographiquement mais aussi en termes de vulgarisation.

Le scientifique et le cinéaste fonctionnent par horizons d’attente

Pour Tazieff, la science doit faire la conquête du public dans une expérience esthétique forte. En filmant le danger, en créant du mystère, Haroun Tazieff a su captiver. Si nous reprenons l’exemple du graphique qui représente le centre de la Terre comme liquide, dans un même temps, l’animation graphique  montre des mouvements de la croûte terrestre et préfigure la théorie de la tectonique des plaques. Tazieff organisa des expéditions dans l’Afar à partir de 1965 dans l’idée de confronter cette intuition émise dès 1912 par le climatologue allemand Alfred Wegener à l’observation sur le terrain d’un lac de lave. Mais la théorie ne sera démontrée qu’en 1968 avec le modèle établi par le géodynamicien français, Xavier Le Pichon. C’est-à-dire que ce même graphique anticipe à la fois une image vraie (la tectonique des plaques) et présente une image fausse (le centre de la Terre est rouge). Toutes deux sont issues des horizons d’attente du scientifique qui ont bien entendu à voir avec l’imaginaire, les rêves, les récits, le spectacle, mais aussi la vulgarisation scientifique elle-même : « L’horizon d’attente est également dessiné par la distinction mouvante entre réel et imaginaire, et, pour mon propos cet élément est fondamental. En effet, comment ignorer que les fictions littéraires et artistiques, aujourd’hui audiovisuelles, se sont largement inspirées des rêves des scientifiques qu’elles ont nourris à leur tour ? Cette expérience commune est partagée par les savants, les décideurs politiques et les citoyens ordinaires. » (Caune, 2013, p. 82) Ces images « scientifiques » présentées sous forme de graphique nous montrent des intuitions du volcanologue qui sont construites sur la base de ses représentations culturelles. Qu’est-ce qu’il y a au centre de la Terre ? « Comment la pensée peut-elle se donner une image de la nature ? » (Caune, 2013, p.3) ? Le scientifique, dans son travail, crée pour lui-même des images qui sont aussi construites avec ses représentations culturelles ? En recontextualisant les films, à la fois sur le plan esthétique et scientifique, nous pouvons constater que le chercheur travaille avec ses propres horizons d’attente et à quel point ces images sont inscrites dans une sensibilité collective et les horizons d’attente de nos représentations symboliques et culturelles. Le centre de la Terre en tant que milieu infernal est un fantasme qui permet l’identification de l’individu à des valeurs collectives considérant que la peur a toujours été mise en récits pour être un tant soit peu maîtrisée.

Conclusion

En s’éloignant du fait scientifique, Les rendez-vous du diable documente de manière assez précise les questions que se posent le chercheur et qui se trouvent occultées par la rationalité du discours : « La problématique des scientifiques est de décrire ce qu’est l’univers, il n’en demeure pas moins qu’à l’arrière-plan de leur problématique se projette, en ombre portée, la question, Pourquoi ? » (Caune, 2013, p. 161). En mettant en scène la petitesse de l’homme face aux événements naturels, le film exprime la croyance de Tazieff : l’homme restera toujours peu de choses face à la force de ces phénomènes. Sa fascination, mais aussi sa religiosité expriment quelque chose de plus juste que la simple vision positiviste : il reste toujours très difficile, indéfini et socialement sensible pour les scientifiques de prédire les éruptions. Est-ce que les choses se passeront comme elles se sont déjà passées ou est-ce qu’il ne faut pas accepter que la Terre recèle des puissances incontrôlables ?

La question de la prédiction est celle récurrente du journaliste au volcanologue, mais elle semble résolue pour Tazieff : les éléments seront toujours plus forts. Tazieff à force d’observation financée d’abord par les films puis par les expéditions scientifiques, est devenu un expert. Comme l’identifie Michel de Certeau à propos de l’expert, le scientifique se déplace alors dans son rôle social « mais lorsqu’il continue à faire croire qu’il agit en scientifique, il confond la place sociale et le discours technique. Il prend l’un pour l’autre : c’est un quiproquo. Il méconnait l’ordre qu’il représente. Il ne sait plus ce qu’il dit. Certains seulement, après avoir longtemps cru parler comme experts un langage scientifique, se réveillent de leur sommeil et s’aperçoivent soudain que, depuis un moment, tel Félix le chat dans le film d’antan, ils marchent en l’air, loin du sol scientifique. Accrédité par une science, leur discours n’était que le langage ordinaire des jeux tactiques entre pouvoir économique et autorités symboliques. » (Certeau, 1980, p. 22).

À partir de ses films, Tazieff est devenu un expert médiatique avant d’assumer pleinement ses intérêts politiques. Si nous revenons sur la question de la caméra, son travail d’observation et les onze expertises qui lui ont été demandées, il a toujours fait la bonne prédiction sauf une fois où il n’est pas descendu de l’avion : il s’est contenté de survoler le volcan le Mt St Helens, aux USA, et cette fois-là, il s’est trompé. Est-ce que l’on peut ramener cette lecture empirique des choses à la question du corps ? Pour expertiser, comme pour le filmer, Tazieff devait ausculter le volcan. Il avait besoin de le parcourir, de le humer, de le sentir. Simondon définit l’expertise comme « un subconscient technique non formulable en termes clairs par l’activité réflexive » (Simondon, 1989, p. 89). L’expertise ne prendrait pas seulement appui sur la raison et la connaissance scientifique, Simondon considère cette modalité d’expérience technique comme « rigide, initiatique, et exclusive ».

Encore aujourd’hui, l’expert n’a que son corps et ses expériences sensibles pour prédire les éruptions, nous ont confirmé Christophe Voisin et le physicien du globe Jean-Robert Grasso (directeur de l’Observatoire du Piton de la Fournaise entre 1992 et 1994). Nous pouvons nous demander dans quelle mesure le côté contemplateur de Tazieff, amplifié par l’outil caméra, n’a pas précisé son expertise. L’expertise est un terme que les neurologues utilisent également pour définir les compétences manuelles qu’un homme développe en travaillant avec un outil. L’expertise est amplifiée par un instrument qui devient un prolongement du corps (Laurent Vercueil, entretien, novembre 2013). En tant qu’outil, dans quelle mesure la caméra n’a-t-elle pas été un amplificateur des sens du volcanologue-cinéaste ? Dès l‘origine avec le physiologiste E. J. Marey, la caméra permet de relier le visible au sensible entre perception sensible et perception objectivée. Etienne-Jules Marey (1830-1904) plaçait sur ses sujets des capteurs reliés à des instruments pour mesurer ce que l’on ne pouvait pas voir à l’œil nu : les mouvements sanguins, les battements du pouls, les secousses d’un muscle afin d’étudier le corps et les mouvements. Inventer la caméra en 1882 lui a permis d’observer ses sujets en les libérant des capteurs. Avec Haroun Tazieff, contempler toujours plus près, chercher à intégrer sensiblement le spectateur dans un sentiment de présent face au spectacle naturel ne lui aurait-il pas permis de mieux observer, connaître et reconnaître les secousses et la vie des volcans pour prédire les éruptions ? Le versant scientifique et le versant cinéaste d’Haroun Tazieff se rejoignent plutôt qu’ils ne s’opposent.

Notes

(1) Le travail de l’auteur et celui du scientifique présupposent certaines attentes dans la valeur d’observation. Selon Karl Popper (1902 -1994), la démarche de la science, de même que toute observation, présuppose certaines promesses : « celles qui constituent l’horizon d’attente sans lequel les observations n’auraient aucun sens et qui leur confère donc précisément la valeur d’observation. » (Jauss, 1978, p. 69). Développée par Hans-Robert Jauss (1921-1997) dans sa théorie de la réception, cette notion d’horizon d’attente concerne le travail scientifique mais aussi le lecteur et le spectateur dans la littérature et le cinéma.

(2) Ce Programme Exploratoire Pluridisciplinaire intitulé « Cogis » a été coordonné par Benoît Lafon. Il a rassemblé des chercheurs en géosciences (LTHE, ISTerre) et en sciences de l’information et de la communication (GRESEC).

(3) Entre le moment où il a été nommé responsable de recherche, puis, maître de recherche et enfin directeur de recherche, Tazieff a été l’auteur d’une quarantaine d’articles dans des publications scientifiques en 6 ans.

(4) « Le centre de la Terre est constitué essentiellement de Fer solide (solide car la pression est très importante). Le manteau terrestre, celui que Tazieff imagine comme un réservoir de magma liquide, rouge, chaud (de 600° à 100 km de profondeur à 3500-4000°c à la limite inférieure – 3900km). Ce manteau est constitué par la partie silicatée de la Terre : ce sont des roches très visqueuses (i.e. elles se déforment très lentement). Ces roches lorsqu’elles sont échantillonnées par les volcans (et ça arrive) apparaissent vertes : elles sont constituées de minéraux tels que l’olivine (le nom vient de la couleur verte du matériau). Replacées dans leur environnement terrestre, plus chaud et plus contraint, elles vont progressivement virer de couleur jusqu’au même blanc jaune. En aucun cas elles ne seront rouges. » Christophe Voisin.

(5) « La science a créé son propre mystère : pour rétablir un lien brisé, le vulgarisateur la démystifie en l’humanisant. » (Jacobi, Schiele : 1988).

Références bibliographiques

Bachelard, Gaston (1965), La formation de l’esprit scientifique, Contribution à une psychanalyse de la connaissance objective, 4° édition, Paris : Vrin.

Caune, Jean (2002), « Tout vient du corps », Les enjeux de l’information et de la communication,  [en ligne] http://lesenjeux.u-grenoble3.fr/2002/Caune/home.html

Caune, Jean (2013), Pour des humanités contemporaines. Sciences techniques, culture : quelles médiations ? Grenoble : PUG.

De Certeau, Michel (1980), L’Invention du quotidien, 1. : Arts de faire et 2. : Habiter, cuisiner, éd. établie et présentée par Luce Giard, Paris : Gallimard.

Févry, Sébastien (2012), « Cinéma et apocalypse. Une mise en perspective », in : Arnaud Join-Lambert, Serge Goriely, Sébastien Fevry (dir.), L’imaginaire de l’apocalypse au cinéma. Paris : L’Harmattan (Structures et pouvoirs des imaginaires).

Godard, Jean-Luc (1959), « Le conquérant solitaire », Les Cahiers du cinéma, N°93, mars 1959.

Jacobi, Daniel, Schiele, Bernard (1988),Vulgariser la science ; le procès de l’ignorance, Seyssel : Champ Vallon.

Jacobi, Daniel, (1999), La communication scientifique. Discours, figures, modèles, Grenoble : PUG.

Jauss, Hans-Robert (1978), Pour une esthétique de la réception, Paris : Gallimard.

Jurdant, Baudoin (2009) Les problèmes théoriques de la vulgarisation scientifique, Archives contemporaines, coll. « Etudes de sciences ».

Gadamer, Hans-Georg  Gadamer(1996), Vérité et méthode, Paris : Seuil.

Szendy, Peter, (2012), L’apocalypse cinéma, Paris : Capricci.

Tazieff, Haroun (1951), Cratères en feu, Grenoble : Arthaud.

Tazieff, Haroun (1961), Les Rendez-vous du Diable, Paris : Hachette [« Bibliothèque Verte »], [1re éd. : 1959].

Filmographie

L’arrivée du train en gare de La Ciotat, Louis et Auguste Lumière, (1895)

L’homme à la caméra, de Dziga Vertov (1929)

Isole di Fuoco de Vittorio De Seta (1954)

Le monde du silence, Jacques-Yves Cousteau, Louis Malle (1956)

Exploration du volcan Nyiaragongo, d’Haroun Tazieff (1959)

A bout de souffle, de Jean-Luc Godard (1959)

Le joli mai, de Pierre Lhomme et Chris Marker, (1963)

Auteur

Vincent Sorel

.: Vincent Sorrel est chercheur au Gresec et maître de conférences associé à l’Université Stendhal Grenoble 3. Responsable pédagogique du master Documentaire de création et réalisateur, ses recherches et ses enseignements concernent la réalisation documentaire et l’imaginaire des techniques du cinéma.