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Territoires et savoirs des universités du Cameroun : discours, objets, médiations. Sciences économiques et de gestion dans les Universités de Yaoundé II-SOA et de Douala

30 Juin, 2015

Résumé

Cet article a pour objet d’interroger le triptyque politique scientifique / politique territoriale / production universitaire dans un territoire global au sens géographique et politique. Dans le cas de l’université camerounaise, nous nous intéressons à la construction des savoirs disciplinaires d’une part et à la relation que ces savoirs entretiennent avec les territoires géographiques à partir desquels ils sont produits, d’autre part. Cette approche permet d’apprécier les modalités de prise en compte des réalités sociales locales dans l’activité de recherche au sein des universités publiques camerounaises.

Mots clés

Territoire cognitif, territoire géographique attribué, politique publique, espace vécu, espace perçu, espace conçu

In English

Title

Cameroon Universities’ Knowledge and Territories: Discourse, Subject, Mediation. Economic and Management Sciences at the Yaoundé II-SOA and Douala Universities

Abstract

The object of the present article is to question the tryptic scientific politics/territorial politics/knowledge production in Universities, in a global territory concerning the geographical and political aspects. In the case of Cameroonian university, we are interested in the construction of knowledge on the one hand and the relationship that they have with geographic territories from which knowledge is produced on the second hand. This approach allows determining the procedure for taking into account local social realities in the production of academic knowledge by researchers within the Cameroonian public Universities.

Keywords

Cognitive area, geographic area assigned, public policy, lived space, perceived space, space designed

En Español

Resumen

Este artículo tiene como objetivo de examinar el tríptico político científico –político territorial – producción universitaria en un territorio global en el sentido geográfico y político. En el caso de la universidad Camerunesa, por una parte nos interesamos en la construcción de los territorios cognitivos, y en la relación que estos territorios cognitivos tienen con los territorios geográficos a partir de los cuales los saberes son productos por otra parte. Este enfoque permite valorar las modalidades no tomadas en cuenta en las realidades sociales locales en la producción del saber universitario por los docentes investigadores de las universidades públicas camerunesas

Palabras clave

Territorio cognitivo, territorio geográfico asignado, política pública, espacio vivido, espacio percibido, espacio diseñado

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Olembe Esther, Mbédé Emmanuel, « Territoires et savoirs des universités du Cameroun : discours, objets, médiations. Sciences économiques et de gestion dans les Universités de Yaoundé II-SOA et de Douala« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°16/3A,, , p.39 à 55, consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2015/supplement-a/04-territoires-et-savoirs-des-universites-du-cameroun-discours-objets-mediations-sciences-economiques-et-de-gestion-dans-les-universites-de-yaounde-ii-soa-et-de-douala/

Introduction

Une réflexion sur le lien entre l’université – en tant que territoire et espace de production des savoirs- et son espace géographique d’implantation, même si elle n’est pas neuve dans le fond (Gingras, 2013, p. 3-10), mérite d’être étudiée dans le contexte des universités publiques camerounaises. C’est l’objectif de cet article : il se propose de mettre en regard, au prisme de la communication scientifique, le territoire universitaire comme espace d’organisation et de production des savoirs, implanté et connecté à un territoire géographique donné. Dans le cas de l’université camerounaise, nous nous intéressons à la production des savoirs à l’intérieur d’un territoire disciplinaire d’une part, et à la relation que ces savoirs entretiennent avec leurs lieux d’implantation. Nous voulons apprécier la prise en compte des réalités sociales locales dans la production du savoir universitaire des enseignants-chercheurs des universités publiques camerounaises. Notre propos vise ainsi à identifier les formes de savoirs qui émergent de l’activité de recherche au sein des universités camerounaises.

Cette préoccupation centrale permet sur un tout autre plan de savoir comment les problèmes sociaux qui se posent au territoire géographique (local, national, sous régional, international) sont pris en charge par des chercheurs eux-mêmes territorialement situés tant sur le plan institutionnel (université), géographique (lieu physique d’exercice de l’activité universitaire) que cognitif (discipline universitaire) et comment, par conséquent, ils réorganisent l’appréhension de ces questions sociales au niveau de leur propre discours. Notre hypothèse est la suivante : la relation entre politiques scientifiques, politiques territoriales et émergence des questions sociétales, est une situation informationnelle et communicationnelle particulière, rendue manifeste par les formats et les contenus des publications universitaires. Elle se traduit par une co-construction complexe et temporelle des champs disciplinaires de l’université, qui ne prend pas nécessairement en compte l’horizon d’attente des politiques publiques en la matière, mais qui intègre les questions sociétales émergentes dans le cadre de dynamiques individuelles et pragmatiques.

Notre étude s’inscrit dans la lignée des travaux en SIC relatifs à la publicisation des activités de production scientifique (Pailliart, 2005 ; Véron, 1997 ; Jacobi, 1999 ; Caune, 2008), qui eux-mêmes s’inspirent des divers courants de la sociologie des sciences ou de la sociologie de la communication scientifique (Merton, 1942 ; Gingras, 2013 ; Martin, 2001 ; Latour, 2005 ; Vinck, 2007, Kaufmann, 1997 ; Bourdieu, 2001).

Nous présenterons le terrain et le corpus de cette étude ainsi que la méthodologie retenue pour son analyse (I). La description des territoires d’insertion des universités et l’organisation des régions de savoir telles qu’elles sont conçues par les politiques publiques d’enseignement supérieur et de recherche (II) retiendront notre attention par la suite. Nous amorcerons enfin, en la discutant, la question des modalités informationnelles et communicationnelles et des médiations qui émergent du rapport de la science à la société dans le contexte des universités camerounaises(III).

Terrain d’étude, corpus et approche méthodologique

Le terrain d’étude

Les universités publiques camerounaises(1), constituent le terrain empirique de notre étude. Elles couvrent sept des dix régions du Cameroun(2). Dans les limites de cet article, notre étude porte sur les savoirs universitaires produits par les enseignants-chercheurs des facultés des sciences économiques et de gestion dans les universités de Yaoundé II-SOA et Douala. Selon les dispositions de la loi d’orientation de l’enseignement supérieur du Cameroun de 2001, la création des facultés au sein des universités relève de la compétence des pouvoirs publics. Aussi sommes-nous fondés, a priori, de considérer que les disciplines facultaires sont la traduction dans les faits des politiques publiques d’enseignement supérieur en matière de formation, de recherche et d’appui au développement. Le diagramme ci-dessous permet de visualiser les champs couverts par l’enseignement supérieur au Cameroun.


Figure 1 : organisation des espaces de savoirs au sein des universités camerounaises. Source : les auteurs

Les deux universités camerounaises étudiées ici sont implantées dans deux espaces géographiques stratégiques du territoire. L’organisation académique conçue par les politiques publiques camerounaises d’enseignement supérieur rend compte des modalités d’organisation disciplinaire. Il est attendu des productions universitaires et de recherche qu’elles s’orientent prioritairement vers des problématiques situées et contextualisées.

Sur un plan strictement descriptif, l’université de Douala est située dans la Région du Littoral dont Douala, la principale ville est par ailleurs considérée comme la capitale économique du Cameroun grâce à son port qui donne sur l’Atlantique et autour duquel s’est organisée une très importante activité économique. L’université de Douala compte trois établissements qui traitent des questions économiques et de gestion. L’École normale supérieure de l’enseignement technique (ENSET) comprend deux divisions dont la division des techniques de gestion couvre les domaines des techniques administratives ; de l’économie sociale et familiale ; des sciences de l’éducation et des sciences et techniques économiques et de gestion. L’École supérieure des sciences économiques et commerciales (ESSEC), spécialisée dans le domaine de la gestion, couvre les domaines de gestion de ressources humaines, des systèmes d’information et d’aide à la décision, la gestion internationale et le commerce extérieur, les finances et la comptabilité. La Faculté des sciences économiques et de gestion appliquées (FSEGA) couvre l’économie internationale et le développement, l’analyse des politiques économiques, les techniques quantitatives, le marketing et l’organisation, les finances, la comptabilité et l’économie publique.

Située à la périphérie de la capitale camerounaise, l’Université de Yaoundé II-Soa quant à elle, née de la réforme universitaire de 1993 au même titre que l’université de Douala, a hérité d’une part importante des productionsscientifiques de l’ex université (unique) de Yaoundé.  Elle comprend notamment la Faculté des sciences économiques et de gestion, l’Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC) où les questions économiques sont abordées du point de vue des relations diplomatiques et des interactions internationales, et l’Institut de formation en recherche démographique (IFORD) qui s’intéresse particulièrement aux problématiques  démographiques en matière de développement économique.

Dans la logique des politiques publiques camerounaises d’enseignement supérieur et de recherche, il y a lieu de relever la spécificité des facultés et des départements dans les deux universités. L’université de Yaoundé II-SOA, proche des instances décisionnelles, est organisée dans la logique de la construction d’un savoir utile à l’élaboration et à l’analyse des politiques économiques. L’université de Douala, quant à elle, est organisée pour prendre en charge les questions du développement du secteur de production (entreprises, industries, commerce, etc.) La figure ci-dessous en dresse la liste.


Figure 2. Spécialités couvertes en sciences économiques et de gestion  dans les universités de Douala et Yaoundé II-SOA. Source : les auteurs.

Le corpus

Deux principales raisons nous amènent à nous intéresser aux « sciences économiques et de gestion » dans les universités de Yaoundé II-SOA et de Douala.

Premièrement, la disponibilité d’un ensemble de 532 textes produits dans cinq des six universités (universités de Yaoundé II, Douala, Dschang, Buea et N’Gaoundéré) issues de la réforme de 1993, par les enseignants-chercheurs de ce champ. Ce corpus a été collecté dans le cadre d’une thèse de doctorat (Olembe, 2010) qui portait sur la production des savoirs universitaires en situation d’évaluation des enseignant-chercheurs en sciences économiques,  en science de gestion et en philosophie. Etudié en son temps dans une perspective foucaldienne d’analyse du discours, ce corpus couvre une période de plus de trente ans (1977- 2008). Nous considérons, pour cet article, les textes produits uniquement dans les universités de Douala (région du Littoral et capitale économique du Cameroun) et de Yaoundé II (région du Centre et capitale politique du Cameroun). Nous avons ainsi prélevé 398 textes sur l’ensemble des 455 textes produits par les cinq universités camerounaises disposant des facultés, écoles ou départements de sciences économiques et de gestion au moment de l’enquête (voir figure ci-dessous). Inscrits dans sept genres documentaires ou supports de communication (monographies, chapitres d’ouvrage collectif, rapports d’étude ou de recherche, revues scientifiques, mémoires et thèses, notes de recherche, communications dans des manifestations scientifiques). 311 textes, tous genres confondus, ont été produits par 59 enseignants-chercheurs à l’université de Yaoundé II-SOA pendant la période d’étude, tandis que 87 textes ont été produits par 27 enseignants-chercheurs de l’université de Douala.


Figure 3 : répartition des travaux de recherche en sciences économiques et de gestion dans les universités camerounaises. Source : les auteurs.

Le choix porté sur les universités des deux principales villes du Cameroun, est représentatif  de l’ensemble des productions universitaires camerounaises en sciences économiques et de gestion pour la période considérée. Quantitativement, les universités de Yaoundé II-SOA et de Douala sont des universités « leaders » en matière de production des savoirs. Sur les 98 enseignants-chercheurs spécialisés en économie et gestion dans l’ensemble des universités, 76 enseignants-chercheurs affectés dans les universités de Yaoundé II-SOA et de Douala ont produit 87% des textes en étude. Qualitativement, les objets et les thématiques des publications des deux universités sont majoritairement repris dans les productions des universités « périphériques », moyennant des différences résiduelles dans les perspectives d’analyse.

Deuxièmement, et comme on peut le voir sur la figure 1 ci-dessus, les facultés des sciences économiques et de gestion sont à côté des facultés des sciences, celles qui couvrent la totalité du territoire géographique des institutions universitaires publiques du Cameroun. À cet égard, plus que les autres disciplines universitaires, les sciences économiques et de gestion sont la discipline qui se trouvent aux avant-postes de la compréhension, de l’explicitation et de la production de savoirs relatifs au développement du territoire et donc au développement des États. Malgré le constat d’échec, dans les faits, d’une internalisation de la science occidentale en Afrique (Mvé Ndo, 2004, p.210-215), la production des savoirs pour le développement est un enjeu discursif central et essentiel s’il en est, depuis l’accession des États africains à l’indépendance. Cette question de développement, comme axe central du discours politique d’aménagement du territoire, s’est par ailleurs trouvée confrontée dès la fin des années 80 au Cameroun comme dans la plupart des pays africain, à la crise économique. Cette crise est à considérer comme un tournant paradigmatique tant au niveau de l’organisation sociale, des réalités économiques que des mutations socioculturelles. Elle a entraîné une profonde remise en cause de l’État providence en même temps qu’elle a coïncidé avec l’imposition du modèle libéral et l’émergence de la mondialisation comme nouvelle réalité structurante de la relation aux territoires et aux savoirs.

La méthodologie

En nous situant dans le prolongement des situations de communication modélisées par Eliséo Véron(3), (Véron, 1997, p. 29-31) dans le secteur des institutions scientifiques à l’instar des universités, nous proposons, dans le cadre de notre terrain, d’observer à travers les textes en présence, le modèle de la coproduction ou de la co-construction des savoirs (Shin & Ragouet, 2010, p. 98). En effet, les dimensions institutionnelle, territoriale et rhétorique de notre réflexion portent sur l’inscription sociale de l’activité de production des savoirs universitaires. Celle-ci est objectivée par le prélèvement des problématiques sociales telles que présentées dans les travaux en sciences économiques et de gestion dans les universités camerounaises.

Modalités informationnelles et communicationnelles et médiations observées dans la production universitaire

Le modèle de la coproduction des savoirs observé dans le cadre de notre étude considère la production universitaire comme étant le résultat d’une interaction entre le discours des politiques publiques d’enseignement supérieur et de recherche, les problématiques émergentes du territoire dans lequel ces universités sont implantées et retravaillées selon l’éthos de l’enseignant-chercheur. La description des unités documentaires en présence et l’identification sociale de leurs producteurs montrent que les thématiques couvertes en sciences économiques et de gestion suivant le découpage institutionnel, diffèrent d’un site universitaire à un autre, d’un établissement à un autre. Mais ces différences ne procèdent pas toujours d’une influence du territoire géographique, encore moins de l’assignation institutionnelle des établissements.

Les formes de médiation observées dans les travaux de recherche

Comme le définissent Lamizet et Silem, (Lamizet & Silem, 1997, p. 364-365), la médiation est cette instance qui, dans la communication et la vie sociale, assure l’articulation entre la dimension individuelle du sujet et de sa singularité, et la dimension collective de la sociabilité et du lien social. En rapportant ce concept au contexte de notre réflexion, on peut identifier des formes de « socialisation » de l’activité de production des savoirs dans un territoire donné. Plusieurs formes de médiation vont ainsi apparaître dans le contexte de production des savoirs en sciences économiques et de gestion dans les universités de Yaoundé II-SOA et de Douala.

Médiation et fonctions de médiation par le support

Dans une perspective formelle, la publication scientifique est une modalité de communication qui met en relation un émetteur (producteur, destinateur) et un récepteur (destinataire). Celle-ci est rendue manifeste à travers divers dispositifs de médiation que sont les types d’écrits qui remplissent des fonctions différentes. Ainsi, un mémoire ou une thèse sera destiné en premier à un jury en vue d’une reconnaissance des acquis académiques lorsqu’un article de diffusion des connaissances, destiné à un public « éclairé » du domaine couvert a pour fonction de diffuser les résultats de recherche, etc.

En observant le corpus d’étude, la médiation par le support rend compte des espaces d’exposition des outputs de la recherche adressées à des publics/récepteurs variés. Elle est modélisée dans le tableau ci-après.

Type de document

Nb. de travaux en Sc. éco. & de gestion

Destinataire

Fonction de médiation

Contributions dans des ouvrages collectifs (chapitre d’ouvrages)

62

Grand public éclairé sur les questions économiques du Cameroun, de l’Afrique et du Monde

Informer
Vulgariser

Communication à des manifestations scientifiques avec ou sans actes

67

Public universitaire du champ de l’économie ou de la gestion

Transmettre les résultats de recherche

Articles dans des revues scientifiques à comité de lecture ou non

148

Pairs de la discipline

diffuser des connaissances sur  l’évaluation et ou la critique des choix de politiques économique ou de modèle de gestion

Rapports techniques d’expertise

36

Commanditaire (Ministères, entreprises, ONG, et diverses organisations nationales ou internationales, systèmes des nations unies, etc.)

Informer le commanditaire, éclairer la prise de décision
Légitimer les choix des politiques publiques

Travaux académiques (thèses, mémoire etc.)

39

Jury

Reconnaître les acquis académiques du champ disciplinaire

Ouvrages et manuels

34

Grand public

Informer, vulgariser

Autres types (non-publié, notes de recherche, etc.,)

12

Collègues engagés dans un même projet de recherche

Informer les collègues des résultats partiels de la recherche

Total

398

 

 

Tableau 1 : Les médiations par le genre documentaire. Source : les auteurs

Médiations par le contenu : descripteurs géographiques, objets, thématiques

Université de Yaoundé II-SOA

A l’université de Yaoundé II-SOA, les objets d’études sont prélevés au Cameroun, en Afrique Subsaharienne, dans le bloc régional CEMAC ou en Afrique centrale, etc. Ces territoires géographiques sont diversement investis dans les travaux des enseignants-chercheurs. A titre d’illustration, dans les sous-domaines d’analyse des politiques économiques et d’économie publique l’essentiel des travaux ont pour descripteurs géographiques prioritairement le Cameroun et secondement l’Afrique. En économie monétaire et bancaire, les descripteurs géographiques sont principalement des territoires économiques institutionnels tels que la Communauté économique de l’Afrique centrale (CEMAC), l’Union économique et monétaire de l’Afrique de l’Ouest (UEMOA), l’Union européenne (UE) la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC). 

Il convient en outre de signaler parmi les descripteurs géographiques, l’apparition systématique dans les travaux de descripteurs idéologico-géographiques dans la hiérarchie des niveaux de développement. L’on trouvera « pays du Nord » pour désigner les pays dits « riches », et « pays du Sud », « pays sous-développés », « pays en voie de développement », etc. pour désigner les pays dits « pauvres ». Mais aussi, d’autres descripteurs qui relèvent des modalités de catégorisation surplombant complètement l’identification à un lieu. C’est le cas du descripteur « pays émergents » employé dans des textes relativement récents.

Cependant, le descripteur géographique ne garantit pas nécessairement la prise en compte des réalités locales dans les savoirs produits. Les discours sont en conversation ou interrelation avec d’autres espaces. Les médiations en œuvre ici mettent en concurrence plusieurs territoires de discours. Observons pour cela la dizaine de titres sur la thématique agricole publiés entre 1989 et 2006 et rassemblés dans le tableau ci-après.

Année de publication

Titre de l’unité documentaire

1989

La commercialisation des vivres à Yaoundé : à qui profite la rente de situation ?

1992

The price scissors and free rider problem in Cameroon’s agricultural policy

1996

The effects of exchange rates policy on Cameroon’s agricultural competitiveness

1998

Crises, réformes économiques et performance de la filière cacaoyère.

1999

Determinants of traditional and non-traditional agricultural exports: The case of Cameroon.

1999

Mondialisation Agriculture et Sécurité Alimentaire au Cameroun : une approche en équilibre général calculable.

2001

Training for rural development: The case of agricultural family schools in Cameroon

2002

Promoting Export Diversification in Cameroon: Toward which Products?

2003

Agriculture and the DOHA Agenda : Interests and options for Cameroon

2005

Réformes alimentaires et sécurité alimentaire au Cameroun.

2006

Impact Assessment of the Multilateral Agricultural Trade Negotiations on CEMAC Countries.

2006

Trade Reforms and Food Security: Country case Studies and Synthesis. Cameroun.

Tableau 2 : un exemple de thématiques étudiées en agriculture.
Source : Auteurs. Extrait de la base de données bibliographique du corpus.

Tous les articles ou presque ont pour descripteur géographique « Cameroun », pourtant les titres informent sur l’orientation des recherches. Elles sont pour une bonne part orientées vers les cultures d’exportation, c’est-à-dire celles qui sont à même de converser avec le marché et le système économique mondial dominant. La focale est ainsi concentrée sur la tenue (en termes de compétitivité) de ces produits face aux différents événements et fluctuations économiques mondiaux (crises économiques, mondialisation, libéralisation des marchés…). Les cultures agricoles non indexées dans le champ des exportations sont marginalement étudiées. Un seul article publié en 1989 pose la problématique de la commercialisation des cultures vivrières dans un marché local du Cameroun.

Généralisés aux productions de la FSEG -UYII, les thématiques et les objets d’étude dans leur majorité, sont stratégiquement choisis comme conformes à l’air du temps. Mais encore et surtout les perspectives de recherche viennent rappeler que nous ne sommes pas bien loin du cercle décisionnel, l’université de Yaoundé II étant géographiquement située dans la capitale politique du Cameroun. D’où ce grand nombre de travaux sur l’analyse des politiques économiques qui prennent la forme de conseil, d’aide à la décision ou de choix d’outils, etc.

Pour ce qui est du contenu, on observera une quantité impressionnante de productions sur des thématiques telles que la mondialisation, la crise économique, les programmes d’ajustement structurel, la pauvreté, l’intégration économique, la dévaluation de la monnaie, etc.

Université de Douala

A la différence des travaux de Yaoundé II-SOA, ceux menés à l’université de Douala portent davantage sur les problématiques de l’entrepreneuriat, du secteur productif à capitaux privé (entreprises d’intermédiation bancaire, PME, PMI), du management des organisations ou encore de l’économie dite informelle.

Quelques titres de cette production sont rassemblés dans le tableau suivant pour illustrer notre propos.

Année de
publication

Intitulé

1990

Comportement financier et stratégie de financement à long terme des PME industrielles camerounaises.

1993

Le comportement financier des PMI en Afrique sub-saharienne.

1993

système d’évaluation de la performance des entreprises du secteur public et para public : essai d’adaptation au Cameroun

1995

Les interrelations de crédit entre la banque commerciale et les entreprises

1996

Financement bancaire et gestion des PME camerounaises

1997

Économie publique normative et aménagement des entreprises publiques des PVD

1997

Les enjeux de la promotion du secteur privé et de l’auto-emploi en Afrique subsaharienne.

1999

La dynamique spatiale des PME camerounaises : une approche par les méthodes factorielles et de classification

2000

Distorsions fiscales et solvabilité de la petite entreprise : évaluation à partir d’un échantillon des PME camerounaises

2000

La fiscalisation du secteur informel urbain au Cameroun : Une étude menée auprès des communes d’arrondissement de la ville de Douala

2001

Pour une approche contingente des PME au Cameroun. Contribution à la connaissance de l’identité des dirigeants et des modes de gestion du potentiel.

2001

L’informatisation des PME au Cameroun

2001

Émergence des PME de classe mondiale au Cameroun

2002

L’État marketing pour faire face à la mondialisation au Cameroun et en Afrique.

2002

Comportement d’intermédiation bancaire et financement de la PME camerounaise

2002

Corruption et crise de l’intermédiation bancaire au Cameroun : une analyse par la théorie des contrats et de l’agence.

2004

Gouvernance de la petite entreprise industrielle imposée de l’extérieur au Cameroun : cas de l’opinion organisée

2005

L’entrepreneuriat immigré nécessite-t-il un accompagnement spécifique : Interactions et accommodations dans l’accompagnement d’entrepreneurs immigrés par une Boutique de Gestion

2005

Distorsions fiscales et solvabilité de la petite entreprise : évaluation à partir d’un échantillon des PME camerounaises

2005

La singularité de l’entrepreneuriat des migrants africains en France.

2006

Banques, entreprises et développement au Cameroun

2006

Différences culturelles et relations d’affaires entre pays d’Afrique et pays émergents d’Asie

Tableau 3 : un exemple de thématiques étudiées en sciences économiques et de gestion dans les établissements de l’université de Douala. Source : les auteurs. Extrait de la base de données bibliographique du corpus.

En ce qui concerne par exemple l’objet PME-PMI, on observera que les travaux convergent vers des études relatives au mode de financement, à la compétitivité, à l’analyse sociologique et psychologique des dirigeants, etc. L’indexation des travaux montre ainsi que les productions sont imprégnées de l’environnement de l’Université de Douala, environnement à haute activité économique avec prédominance du secteur privé (et donc des PME) sur le secteur public (majoritairement présent à Yaoundé). Une lecture partielle des textes (titres et résumés) indique qu’au-delà de l’intérêt pour l’univers de l’entreprise, la problématique du financement de l’économie et le développement de la recherche sur le secteur informel  semble traduire la prise en compte par le territoire universitaire des questions sociétales du territoire géographique de Douala. Toutefois, il y a lieu de relever qu’à Douala, les outputs de recherche ont tendance à appliquer des modèles et paradigmes qui ont fait leurs preuves dans d’autres contextes mais dont on peut valablement interroger l’efficacité dans un territoire dont l’économie est à forte dominante informelle.

Bilan des savoirs universitaires locaux en sciences économiques et de gestion

La problématique du développement est au cœur de la production cognitive des universités de Yaoundé II et Douala, ce qui semble être conforme au cahier des charges institutionnel et aux politiques publiques. Toutefois, un regard critique permet de dégager à partir des périodes discursives du corpus, les formes de savoirs qui ont émergé en sciences économiques et de gestion entre 1977 et 2008, et de présenter les modalités d’ajustement des problématiques sociales en œuvre dans ce corpus.   

Périodes discursives du corpus et savoirs émergents

Trois périodes majeures émergent du corpus d’étude : la stabilité économique post-indépendance des pays Africains, la crise économique et la pauvreté.

Les productions cognitives pendant la stabilité économique post – indépendance mobilisent les objets ou thématiques suivants :

  • le développement par la prise en compte du capital humain (fuite de cerveaux, éducation) et l’amélioration du bien-être social (politique de logement social),
  • le développement à travers l’industrialisation et le renforcement du commerce extérieur,
  • le développement du secteur rural notamment par l’identification et la mise en œuvre d’outils méthodologiques applicables au monde rural africain (camerounais).

La deuxième période rompt avec le discours optimiste précédent. Bien que perdure la thématique du développement, il y a une émergence de nouveaux objets. Le contexte de la crise économique et celui de la mondialisation des économies sous sa forme contemporaine ouvre sur une série d’objets rapportés à la mise en exergue des solutions de sortie de crise. Le savoir émergent au cours de cette période est d’une part nourri par les objets du discours prescrit par les principaux bailleurs de fonds à l’ensemble des pays africains en vue d’un rééquilibrage des principaux agrégats économiques et une possible sortie de crise. Deux principaux objets vont être étudiés : la monnaie et le désengagement de l’État dans les secteurs clés de l’économie (agriculture, transports, finances…). D’une part, la monnaie dont la dévaluation apparaît comme l’une des premières mesures pour lutter contre une situation économique jugée catastrophique. En effet, le diagnostic du faible niveau du taux de croissance, du niveau de vie précaire des populations, de la fuite massive des capitaux ou de la stagnation des importations justifierait une telle mesure. D’autre part, la libéralisation économique avec principalement la critique de l’interventionnisme de l’État dans les secteurs productifs.

La troisième période sur la pauvreté est imbriquée dans la période précédente. Cependant, elle s’autonomise du fait même qu’elle a sa propre architecture conceptuelle et qu’elle fait émerger des objets nouveaux. Ces objets sont en quelque sorte des figures de pauvreté et donnent lieu à de nouvelles catégories (pauvreté urbaine, pauvreté rurale, pays pauvres très endettés, économie solidaires etc.).

Tout au long de ces trois périodes discursives, on observera un glissement conceptuel où l’on passe d’une économie en développement à une économie en crise  puis à une économie pauvre très endettée.

Modalité d’ajustement des problématiques sociales dans les produits de la recherche : l’exemple de la « pauvreté »

Une approche consolidée de la description des objets ou des thématiques du savoir produit dans les universités de Yaoundé II-Soa et Douala nous permet de repérer des logiques de production communes. Il y a d’abord l’entité géographique auquel se rapportent les objets. Ce dont on parle dans le discours est localisé et situé (Afrique, Cameroun…). Le vocabulaire du discours du corpus se structure à partir d’un découpage géographique :

  • régressif (pays en développement, pays du tiers-monde, pays sous-développés, pays pauvres très endettés…),
  • de rassemblement ou d’unification (Communauté économique et monétaires des Etats de l’Afrique centrale (Cemac), Union économique et monétaire Ouest Africain (Uemoa), blocs régionaux, intégration nationale…),
  • de comparaison (Afrique subsaharienne vs Europe, économie du tiers-monde vs économie industrialisées, Union européenne vs Cemac…).

Ce vocabulaire émane d’un agenda conjoncturel qui alimente les enjeux économiques et politiques à des échelles et des dispositifs institutionnels supranationaux. Cet ensemble ouvre à de nouveaux champs d’objets dont se nourrissent les produits de l’activité de recherche étudiés. À titre d’illustration, nous pouvons observer dans le tableau suivant, quelques productions universitaires qui correspondent à la période discursive sur la pauvreté.

Année

Intitulé

Observations

1997

Dépenses de l’éducation et pauvreté dans les pays en développement de l’Afrique sub-saharienne.

Gestion macro-économique et lutte contre la pauvreté

1997

Urban poverty in Cameroon: The survivability of women in the informal sector.

 

1998

Libéralisation commerciale et pauvreté en Afrique sub-saharienne : L’examen du cas du Cameroun.

 

1999

Social Dimension of Environmental Management in the Forestry Sector

 

1999

Étude comparative du seuil de pauvreté et identification des populations déshéritées au Cameroun et en Côte d’Ivoire

 

2000

Mondialisation et contraintes de développement : Cas du Cameroun

 

2001

Constraints to managing urban poverty in Cameroon

 

2001

Evolution of poverty in rural Cameroon in the era of globalization.

 

2003

Globalization, Institutional Arrangements and Poverty in Rural Cameroon.

 

2003

Relations internationales et solidarités transnationales : idées pour une autre philosophie de la mondialisation.

Gouvernance partagée : la lutte contre la pauvreté et les exclusions.

2003

Manuel de formation aux politiques agricoles en Afrique

Instrument de lutte contre la pauvreté

2003

Analyse de la pauvreté au Cameroun : Une approche multidimensionnelle. 

 

2003

Micro finance et réduction de la pauvreté, le cas du Crédit du Sahel au Cameroun

 

2003

Rural Institutions, Access to Primary Assets and Poverty in two villages in Cameroon

 

2005

Alternative Methods for Setting Poverty Lines: Measuring Poverty in Cameroon.

 

2006

Growth, Redistribution and Poverty Changes in Cameroon : A Shapley Decomposition Analysis

 

2006

Structure of Sectorial Decomposition of Aggregate Poverty Changes in Cameroon

 

2006

Le décrochage scolaire au Cameroun et ses causes : examen des centres de rééducation de la ville de Douala.

Conséquence de la pauvreté

2006

Analysing Poverty Impact of the HIPC Initiative in Cameroon.

 

Tableau 4 : Discours sur la pauvreté.
Source : les auteurs. Extrait de la base de données du corpus.

Les titres présentés dans le tableau montrent le trajet thématique de la pauvreté dans le discours du corpus d’étude. Ici précisément, nous aurons comme caractère d’énonciation :

  • l’identification, la description, la classification…des formes de pauvreté ;
  • l’analyse des conséquences et de l’impact de la pauvreté sur les secteurs socio-économiques ;
  • l’élaboration et la prescription des instruments de lutte contre la pauvreté, etc.

Les discours sur la pauvreté font ressortir une communication à trois composantes au moins : 1) les instances économiques internationales structurent et émettent un discours social sur la pauvreté à partir d’un diagnostic global hors site (définition, caractéristiques, modèles à appliquer contre la pauvreté…) mais susceptible d’être appliqué sur un ensemble de pays homogénéisés de tous points de vue. 2) Ce discours est repris en l’état par les politiques publiques, des choix de politiques économiques sont conçus et mis en œuvre à l’intérieur du territoire national. 3) Les universitaires sont sollicités pour légitimer ce discours ou s’en saisissent de manière conjoncturelle et opportune comme objet de recherche.

Les productions observées présentent un discours d’expertise, de validation et de légitimation des choix politiques. La prise en compte du territoire à travers le terrain d’application n’est qu’un prétexte pour prolonger le discours politique et celui des instances internationales. La médiation se fait non pas du point de vue d’une relation directe entre les produits de la recherche et les préoccupations sociales locales, mais davantage entre des institutions qui ont leur propre agenda et leurs propres préoccupations. On pourrait donc interroger la capacité de ces outputs à pouvoir construire un savoir autonome sur la pauvreté, non plus comme objet social ou politique mais comme objet d’étude et de recherche scientifique. La communication scientifique en œuvre ici est une communication verticale pour laquelle les institutions internationales et les politiques publiques locales définissent l’agenda et les objets de recherche. Travaillés de manière pragmatique par l’activité de recherche, les produits qui en découlent ont pour cible principale ces institutions.

Ce commentaire nous suggère de considérer à la suite de Caune (Caune, 2008, p. 38) que les médiations dans les sphères scientifiques et de recherche, par le dispositif ou le discours « interdisent de concevoir les sciences et les techniques comme lieux de discours autonomes, dont le lien avec le social, le politique, l’économie serait contingent (…) ». Mais, au-delà du discours des politiques publiques d’enseignement supérieur et d’aménagement du territoire, au-delà d’une volonté d’insertion du savoir au contexte local, il s’agit bien plus de s’intéresser aux récepteurs multiformes qui se donnent à voir dans les trajectoires des contenus. Les pratiques scientifiques dans ce cas précis ne sauraient s’analyser sous le prisme de divers horizons d’attente (politiques publiques, institution universitaire, discipline universitaire, société camerounaise) mais à partir d’un travail de traduction, d’appropriation, de co-construction, à l’écoute et en interrelations avec des destinataires multi-localisés.

Conclusion

Que nous apprend donc finalement le territoire universitaire dans sa dimension cognitive sur le territoire géographique, à la fois « espace à métrique topographique, espace de pouvoirs et de transcription de ces pouvoirs, lieu d’appartenance, d’altérité, d’hétérogénéité, de paradoxes et de contradictions » (Nasima, 2007, p.9) ? Notre interrogation s’est appuyée sur un corpus qui rend compte de la pratique de production des savoirs en sciences économiques et de gestion dans les universités de Yaoundé II – Soa et de Douala. Finalement la réponse n’est pas simple. Même si les données empiriques nous renseignent partiellement sur les dynamiques d’ancrage des territoires cognitifs dans les territoires géographiques de ces deux institutions universitaires, leur analyse montre que cet ancrage est le prétexte d’expérimentations ou d’applications de modèles et de paradigmes qui sont en décalage avec les problématiques locales. Du point de vue des sciences de l’information et de la communication, il importe de considérer davantage ces outputs comme l’expression des médiations qui mettent en relation une pluralité de récepteurs à partir des genres documentaires et des contenus. Ces contenus doivent être examinés non pas en fonction d’une finalité assignée mais en fonction des subjectivités qui se donnent à voir à travers leurs modalités d’expression. La construction des trajectoires cognitives à travers la production scientifique des chercheurs s’inscrit dans une dynamique complexe et ambiguë. En effet, l’université insérée dans un espace géographique est d’abord et avant tout un territoire tiraillé entre le local et l’universel, entre une « construction par le haut » selon diverses échelles et une « construction par le bas », et dont l’identité cognitive est rapidement repérable à travers le processus de normalisation disciplinaire. C’est ce qui explique un ensemble de contradictions qui traversent le territoire géographique et le territoire des savoirs universitaires, en ce qu’ils se donnent à voir à la fois comme des espaces de luttes, de négociations, de pouvoir, etc.  En considérant le terrain des sciences économiques et de gestion au Cameroun, il apparaît qu’entre discours et vécu de la politique scientifique ; entre production scientifique et appréhension du territoire, se nouent des interactions complexes qui aboutissent à un savant bricolage où émerge une reconfiguration du champ scientifique dans les divers territoires géographiques et cognitifs.

Notes

(1) Université de Yaoundé I (UYI) & Université de Yaoundé II (UYII) (région du Centre), Université de Buea (UB)(Région du Sud-Ouest), Université de Bamenda (UBA) (Région du Nord-Ouest), Université de Dschang (UDS) (région de l’Ouest), Université de Douala (UD) (Région du Littoral), Université de Maroua (UM) (Région de l’extrême-Nord), Université de N’Gaoundéré (Région de l’Adamaoua)

(2) Toutefois, les régions du Sud et de l’Est sont couvertes par deux antennes de l’université de Dschang (Ouest), tandis que la région du Nord située entre les régions de l’Extrême Nord et de l’Adamaoua ne dispose d’aucune institution universitaire.

(3) Dans son article « Entre l’épistémologie et la communication » publié en 2007 dans le n°21 de la Revue Hermès, Eliséo Véron étudie « la spécificité de l’activité scientifique en tant que production de connaissances du point de vue des processus de communication qui y sont impliqués ». Il présente quatre situations de communication scientifique qui mettent en relation l’énonciateur (différent de l’émetteur)  et le destinataire (différent du récepteur). Il parle de la (1) communication endogène intra-disciplinaire pour des scientifiques qui travaillent dans une même discipline ; (2) la communication endogène interdisciplinaire ou la mise en commun de différents champs disciplinaires ; (3) la communication endogène trans-scientifique, forme de vulgarisation scientifique où l’énonciateur  scientifique s’adresse à un destinataire non scientifique ; (4) la communication exogène sur la science, celle qui se fait en dehors des institutions scientifiques.

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Auteurs

Esther Olembe

.: Esther Olembe est enseignant-chercheur, chargée de cours à l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et communication (ESSTIC) – université de Yaoundé II – SOA. Elle effectue ses recherches au sein du laboratoire YMIS (Yaoundé Mediation & Information Studies) de l’ESSTIC. Ses thématiques de recherche concernent l’organisation des savoirs en science de l’information et de la communication, l’épistémologie historique et la sociologie des connaissances.

Emmanuel Mbédé

.: Emmanuel Mbédé est enseignant-chercheur, Chargé de cours à l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (ESSTIC) de l’université de Yaoundé II Soa. Il est membre du laboratoire YMIS (Yaoundé Mediation& Information Studies) de l’ESSTIC et du Cercle d’études et de recherche en information communication et savoirs (CERISE) de Yaoundé. Ses domaines d’intérêt portent sur la communication des organisations, la communication médiatique et le management des connaissances.