Les techniques d’information et de communication (Tic) et l’évolution de l’économique africaine : vers une hybridation des activités
Résumé
Le traditionnel dualisme de l’économie, se traduisant par la coexistence d’un secteur formel et d’un secteur informel, est la principale caractéristique du système des activités de la plupart des pays africains. On observe presque partout qu’en marge d’une activité formellement reconnue gravite toujours une autre, dans une semi ou totale clandestinité. Pendant longtemps cette caractéristique a plus ou moins épargné le secteur global des télécommunications et des nouvelles techniques d’information et de communication (Tic). Secteur de très haute spécialisation par nature, les Tic ne se prêtent pas a priori à l’informel. Cependant leur omniprésence dans les différentes activités contemporaines semble modifier cette vision, voire l’évolution du modèle même des activités économiques de l’Afrique. L’analyse et les enquêtes de terrain sur lesquelles s’appuie cette étude montrent dans les faits une réelle complexité du problème. En effet les Tic ont résolument introduit, ici, de la formalité dans les activités alors que, là, elles ont induit de façon inattendue des activités informelles. Cette ambivalence laisse présager une évolution vers un système économique hybride.
Mots clés
Tic, modèle économique, évolution, Afrique, Côte d’Ivoire.
In English
Abstract
The traditional dualism of economy, resulting in the coexistence of a formal sector and an informal sector is the principal feature of the system of activities of most African countries. We noTice almost everywhere that on the fringe of a formally recognized activity, another one always exists, in a semi or total clandestine nature. For a long time, this feature has more or less spared the global sector of telecommunications, and the information and communication technologies (ICT). A sector of very high specialization by nature, ICT in principle are not suitable for the informal sector. However their omnipresence in the different contemporary activities seems to change that vision, or even the evolution of the model of African economic activities. The analysis and the field inquiries on which is based this study show a real complexity of the problem in the facts. Here, we actually notice that ICT have firmly introduced formality in activities whereas there they have unexpectedly created some informal activities. This ambivalence is a sign of an evolution toward a mixed economic system.
Keywords
ICT, economic model, evolution, Africa, Côte d’Ivoire.
En Español
Resumen
El tradicional dualismo de la economía, traduciéndose por la existencia de un sector formal y de un sector informal, es la principal característica del sistema de las actividades de la mayoría de los países africanos. Se observa casi por todas partes que una margen de una actividad formalmente reconocida gravita siempre otra, en una mitad o total clandestinidad. Durante mucho tiempo esta característica dejó más o menos el sector global de las telecomunicaciones y las tecnologías de la información y de la comunicación (Tic). Sector de muy alta especialización por naturaleza, las Tic no se prestan a priori al informal. Sin embargo su omnipresencia en las diferentes actividades contemporáneas parece modificar esta visión, incluso la evolución del modelo mismo de las actividades económicas de África. El análisis y las investigaciones de terreno sobre los cuales se apoya este estudio muestran en los hechos una real complejidad del problema. Se constata en efecto que las Tic introdujo decididamente, aquí, de la formalidad en las actividades aunque, allí, indujeron de manera inesperada actividades informales. Esta ambivalencia deja predecir una evolución hacia un sistema económico híbrido.
Palabras clave
TIC, modelo económico, evolución, África, Côte d’Ivoire.
Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :
Loukou Alain François, « Les techniques d’information et de communication (Tic) et l’évolution de l’économique africaine : vers une hybridation des activités« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°14/1, 2013, p.103 à 116, consulté le dimanche 24 novembre 2024, [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2013/varia/08-les-techniques-dinformation-et-de-communication-tic-et-levolution-de-leconomique-africaine-vers-une-hybridation-des-activites/
Introduction
Les économies africaines semblent se distinguer des autres par une caractéristique très particulière : la coexistence quasi systématique dans chaque type d’activités d’une économie formelle et d’une économie informelle. Pratiquement aucun secteur d’activité n’est épargné par ce schéma, à l’exception notable de quelques secteurs comme celui des télécommunications. Ce schéma est toujours en vigueur et évolue même au gré des mutations socio-économiques notamment celles induites par l’avènement des Technologies de l’information et de la communication (Tic) dérivées du secteur global des télécommunications. La prégnance dans les activités a-t-elle une influence quelconque sur le modèle en vigueur ? En d’autres termes, les Tic favorisent-elles plus d’économie formelle dans leur secteur et dans le reste de l’économie ? Sont-elles plutôt devenues, elles aussi, génératrices d’activités informelles ? Dans ce dernier cas de figure, seraient-elles alors en mesure de bouleverser un schéma si solidement établi, c’est-à-dire de modifier l’équilibre d’un modèle légendaire au point d’en faire un modèle hybride ?
En effet la pratique d’activités dans le secteur des télécommunications a été, pendant longtemps, le seul fait de professionnels reconnus. Ce secteur, très pointu, était à l’abri des amateurs et autres bricoleurs qui peinaient à s’y aventurer pour exercer quelque activité annexe. Cette spécificité l’a donc épargné de « l’informalisation » tous azimuts qui a littéralement phagocyté les autres secteurs d’activités des économies africaines. Mais, les Tic sont aujourd’hui le moteur de nombreuses mutations sociales et économiques qui, en Afrique, engendrent parfois des pratiques inventives originales aux implications insoupçonnées. A propos de la relation entre Tic et progrès économique, des travaux anciens (Solow, 1956 ; Swan, 1956) avaient déjà mis en évidence le rôle crucial des progrès techniques dans la croissance économique. Ainsi, dans son article majeur « A contribution to the theory of economic growth », Solow fonde la théorie économique qui deviendra par la suite la base du modèle de croissance dit exogène. Beaucoup plus récemment, d’autres chercheurs tels que Zysman et Newman (2006) ont montré le rôle de la révolution numérique dans le développement des pays riches. Par ailleurs, dans un entretien accordé en 2001 à la revue française Sciences humaines, Cohen et Zysman évoquent l’impact croissant des Tic sur l’économie, l’éducation, la vie quotidienne, etc. De même, les différents rapports annuels de l’Union internationale des télécommunications (UIT) ne manquent pas d’établir le lien croissant entre les usages innovants des Tic et le progrès économique et social. Pour sa part, le Rapport 2011 de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) relatif à l’économie de l’information indique que l’exploitation des Tic, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, peut être un facteur notable de progrès. Ledit rapport précise que « le succès de toute initiative faisant appel aux Tic dans l’optique du développement passe par une prise en compte des besoins des utilisateurs et des contraintes possibles (analphabétisme, pénurie d’énergie, coûts excessifs pour les utilisateurs, etc.)». Cette précision trouve toute sa justification en considération du contexte africain où les contraintes énoncées sont manifestes.
Prenant donc acte de ces constats, nous nous sommes fixé comme objectif d’essayer d’analyser les conséquences socio-économiques de ces mutations, y compris, dans leur déploiement géographique. Nous nous intéressons également aux liens entre les pratiques issues des Tic et l’évolution du dualisme traditionnel de l’économie africaine. Ces différentes préoccupations nous amènent à formuler, dans le cadre spécifique de cette étude, les questions de recherche suivantes : Les Tic ont-elles préservé leur statut traditionnel de secteur formel ? Le domaine des Tic a-t-il lui aussi été gagné par l’informel ? En d’autres termes, les Tic contribuent-elles à générer aussi des activités informelles à l’instar des autres secteurs de l’économie africaine? Si oui, une telle évolution pourrait-elle, par son ampleur éventuelle, modifier le modèle économique existant ? Nous formulons les hypothèses suivantes : Les Tic constituent des outils contribuant à la formalisation des activités. La prégnance des Tic dans les activités humaines a fini par les exposer, de sorte qu’à l’instar des autres secteurs d’activités, elles contribuent à la création d’activités informelles. Cette évolution serait en passe de modifier le modèle économique africain et d’en faire un système économique hybride.
La formulation de ces deux hypothèses apparemment contradictoires n’est pas du tout illogique. Cette contradiction tire sa justification de la complexité de la situation, tant on a du mal à se situer sur la place actuelle des Tic au sein des économies africaines. En tout état de cause, les questions de recherche dont découlent ces deux hypothèses, sont liées. Pour autant, une réponse positive à la première question, donc une validation de la première hypothèse, ne suggère pas nécessairement que les Tic n’induisent pas d’activités informelles. Si les faits sont tels qu’ils nous forcent à rejeter la première hypothèse, nous pourrions accepter que son contraire, donc la seconde, est au moins plausible, c’est-à-dire que les Tic seraient génératrices d’activités informelles.
Les TIC et les nouvelles activites formelles en Afrique
La production scientifique sur l’économie informelle en Afrique et dans le Tiers-monde en général, tant à partir des ressources de l’Internet qu’à partir des bibliothèques physiques, est abondante (citons par exemple Adair P., 1985 ; Touré A., 1985; Hugon P., 1993 ; Lautier B., 1994). En revanche, sur la relation entre Tic et économie informelle, elle l’est beaucoup moins, sinon rare, à l’exception de quelques études menées sur l’économie informelle dans le domaine de la téléphonie mobile cellulaire (Cheneau-Loquay A., 2001 ; Gnamien, 2002 ; Loukou, 2003, 2008 ; etc.). Aussi, hormis un rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD, 2009) relatif aux transferts de fonds des migrants au Maghreb et en Zone franc, ni les consultations en bibliothèque ni celles effectuées via l’Internet ne permettent-elles de trouver de la documentation conséquente sur cette relation qui est pourtant au cœur de notre recherche. De toutes les façons, la recension des informations issues des ouvrages ou de publications en ligne sur l’Internet n’aurait pas été suffisante pour apprécier tous les contours de la problématique posée. Dans ces conditions, il nous revenait de constituer entièrement les données par des enquêtes et par des entretiens, voire par la simple observation directe qui s’avère dans certaines conditions de recherche particulièrement utile. À cet égard, pour valider ou pour infirmer nos hypothèses, nous nous intéresserons aux diverses formes d’entreprises exerçant une activité quelconque en rapport avec le secteur des Tic, qu’il s’agisse des entreprises classiques de télécommunications au sens large (téléphonie, télévision, Internet, etc.) ou de petites entreprises annexes du secteur ou d’autres encore. Au besoin, nous aurons recours à de petites études de cas (exemples détaillés), à des illustrations (photos), qui fourniront aux hypothèses des arguments empiriques et des preuves d’ordre factuel.
L’avènement des Tic a généré en Afrique diverses activités légalement constituées qui étaient jusque-là inconnues dans le secteur global des télécommunications. Il s’agit notamment de la téléphonie mobile cellulaire, de l’Internet, de la télévision à péage, des systèmes de transactions électroniques monétaires, des écoles spécialisées en formation Tic. Ces activités viennent donc renforcer le statut formel du secteur.
La téléphonie mobile cellulaire, championne des activités formelles du secteur des Tic
De toutes les activités générées par le secteur des Tic, celles liées à la téléphonie mobile cellulaire sont de loin les plus répandues et les plus dynamiques en Afrique. Chaque pays du continent est aujourd’hui doté d’au moins un opérateur de réseaux mobiles.
Le secteur du mobile, très concurrentiel en raison de la libéralisation étendue du secteur, est extrêmement ouvert aux investissements étrangers. Ces investissements permettent d’injecter d’importants capitaux dont bénéficie le secteur. Un rapport du cabinet conseil Price Waterhouse Coopers (PWC), cité par le magazine Jeune Afrique(1), estime que l’Afrique comptait en 2011 plus de 200 opérateurs. Selon ce rapport, on trouve aussi bien de grandes multinationales que des entreprises de taille plus modeste parmi ces opérateurs. D’après le Global System for Mobile Communications Association (GSMA), du nom de la norme numérique GSM, qui représente les intérêts de près de 800 opérateurs de 220 pays, on dénombrait 649 millions de cartes SIM en Afrique au 4ème trimestre de 2011. Cela en fait le deuxième marché mondial de la téléphonie mobile derrière l’Asie, et celui qui connaît le plus fort taux de croissance depuis dix ans : soit 30 % par an en moyenne. En 2006, un rapport de l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) indiquait déjà que toutes les prévisions d’expansion de la téléphonie mobile en Afrique avaient été dépassées.
Ce dynamisme déborde du strict cadre du secteur des télécommunications. En effet, adaptée au contexte africain, l’innovation dans le secteur de la téléphonie mobile est presque sans limites. De nouveaux services et usages y sont régulièrement imaginés avec des répercussions socio-économiques directes sur le mode de vie des Africains. Ces innovations leur permettent, par exemple, d’avoir accès aux services de paiements électroniques très sollicités ainsi qu’à l’Internet mobile. En effet, le téléphone mobile cellulaire ne sert plus seulement qu’à téléphoner en Afrique. Il sert aussi à faire des transactions monétaires. Opportunistes, les opérateurs ont eu l’ingéniosité de proposer des offres de services monétaires grâce à ces outils (voir ci-après). Ce sont là autant de services formels qui rendent le secteur particulièrement dynamique avec de nettes répercussions sur la croissance économique du continent tout entier.
À côté de la téléphonie mobile, le secteur de l’Internet est aussi en plein essor.
L’Internet, un secteur en plein essor malgré de nombreux obstacles à sa diffusion
Quoique confrontées à de nombreux obstacles tels que la connectivité, les moyens économiques, l’illettrisme d’une bonne partie de la population, les activités liées à Internet se développent aussi en Afrique. Certes, le secteur de l’Internet ne connaît pas la même effervescence que celui de la téléphonie mobile ; toutefois, il offre des services utiles, crée des richesses et des emplois non négligeables.
Il y a moins de vingt ans à peine, on ignorait l’existence des métiers de fournisseurs d’accès à l’Internet (FAI) et de gérance de cybercafé en Afrique. Aujourd’hui dans tous les pays où l’Internet est disponible, ces métiers existent avec dans certains cas, plusieurs fournisseurs d’accès contribuant au dynamisme du secteur (voir photos ci-dessous). Dans des pays comme l’Afrique du Sud, l’Internet est considéré comme le pôle d’activités le plus dynamique, selon Sky Vision (2). Toutefois, les fournisseurs d’accès sont généralement adossés à des entreprises occidentales en raison du coût des investissements.
Indépendamment du volet financier, le développement de ce secteur est aussi lié à certains déterminants tels que les infrastructures de connectivité ; le coût d’accès aux équipements terminaux ; le pouvoir d’achat des populations, leur niveau d’alphabétisation ; l’environnement concurrentiel ; la réglementation en vigueur ; le degré de qualification des techniciens de réseaux (que les écoles de formation en Tic, très récentes en Afrique, ne sont pas encore parvenues à élever aux standards occidentaux).
De leur côté, les activités de cybercafés qui constituent le pendant des pourvoyeurs d’accès, sont aussi en plein essor, même s’il faut déplorer la cybercriminalité qui y prend généralement sa source. Ces espaces d’accès partagés sont de plus en plus nombreux et constituent même à certains égards le levier de la dynamique des activités du secteur et le principal vecteur de la diffusion de l’Internet en Afrique.
Dans un contexte où l’accès à l’information est devenu capital, les entreprises, quelle que soit leur taille, les services administratifs, les particuliers, etc., se trouvent dans la nécessité d’avoir accès à I’internet. Aussi, des activités formelles seront-elles encore développées dans ce secteur. Le caractère utile de l’Internet (recherche d’information, envoi de messages, vitrine pour les entreprises et services administratifs, participation aux réseaux sociaux, etc.) indique que le secteur possède un fort potentiel de développement en Afrique si les obstacles significatifs à son accès sont levés.
Fig. 1 & 2 : Panneaux publicitaires géants d’offre Internet de deux fournisseurs d’accès, à Abidjan (Clichés de l’auteur, juin 2013)
Le secteur de la télévision : un marché émergent, dominé par les privés occidentaux
Le domaine de la télévision n’est pas en marge de la création d’activités formelles dans le secteur des Tic. Depuis quelques années, de nombreuses chaînes privées de télévision ont vu le jour en Afrique. Les unes appartiennent à des privés africains, les autres (les plus prisées par les téléspectateurs) sont des filiales de puissants distributeurs nord-américains ou européens.
Avec la disparition progressive des monopoles publics de la communication audiovisuelle dans la plupart des pays africains, l’évolution vers une suprématie du secteur privé a ouvert la porte à une offre télévisuelle privée fondée sur des chaînes payantes. Toutefois, il convient de noter que le marché de la télévision en Afrique subsaharienne est peu développé et tourné essentiellement de consommation. Qu’il s’agisse de supports ou d’équipements de transmission et de diffusion ou de réception de télévision, ou même d’industries de production de films, le continent africain dans son ensemble est à la traîne, à l’exception de l’Afrique du Sud, de l’Égypte et dans une certaine mesure du Nigeria. Le problème est que les investissements pour de tels projets coûtent excessivement chers. Cela explique le fait que le développement des activités de télévision (privées ou publiques) reste dans l’ensemble timide sur le continent. Pour le moment, le marché payant de la télévision par satellite en Afrique subsaharienne est dominé par Canal Horizons (français) et Multichoice (sud africain), dont les programmes sont les plus connus et se trouvent particulièrement appréciés des téléspectateurs africains. Les enjeux que constitue le marché africain, relativement vierge et émergent, pourraient toutefois remettre en question la domination de Multichoice et de Canal Horizons, avec la venue potentielle d’autres distributeurs.
Les systèmes de transfert électronique d’argent : un exemple de modélisation des nouveaux types d’activités formelles du secteur des Tic
Naguère, en Afrique, lorsque quelqu’un souhaitait apporter de l’argent à un parent résidant dans une ville plus ou moins éloignée, trois solutions principales s’offraient à lui : soit il sollicitait la bienveillance d’une connaissance qui se rendait opportunément dans la localité concernée, soit il effectuait un mandat-poste, soit encore il recourait aux services d’une société de transport interurbain desservant la localité, moyennant quelques frais de commission. Cette dernière solution, pratiquée par de nombreuses sociétés de transport routier interurbain, constitue en fait une activité informelle car elle n’est pas officiellement déclarée. Elle vient illégalement en appoint de l’activité principale de transport. De ce fait, d’ailleurs, en cas de litige, l’expéditeur n’avait aucun recours légal pour espérer recouvrer ses fonds.
Aujourd’hui, l’avènement des Tic a totalement bouleversé le mode de transfert d’argent. Au demeurant, il convient de noter que le transfert d’argent est une activité très développée en Afrique en raison de la dépendance financière de nombreuses populations des zones rurales vis-à-vis de celles des zones urbaines, et parfois inversement. Dans ces conditions, le transfert dit électronique d’argent est dorénavant la procédure la plus utilisée, parce que très fiable et de surcroît ultra-rapide (résultat quasi instantané). En effet, dans les instants qui suivent le dépôt de l’argent dans une agence, pourvu qu’il soit informé par téléphone (voix ou SMS), le destinataire peut immédiatement retirer l’argent qui lui a été transféré en se rendant dans une agence locale. Muni d’une pièce d’identité, il lui suffit de communiquer le numéro de transfert, le code secret ainsi que le montant de l’argent qui lui ont été préalablement communiqués par l’émetteur.
A côté du géant américain Western Union (pionnier de cette procédure en Afrique)(3), d’autres entreprises internationales ou nationales spécialisées dans le transfert d’argent (Money Gram, Money Express, Express Union, etc.), des banques, des compagnies de transport interurbain se sont fortement investies dans cette activité en implémentant des interfaces clients favorisant la collecte et le paiement d’argent.
Plus récemment, même des entreprises de téléphonie mobile cellulaire ont fait de ce produit (ou service) une forte valeur ajoutée à leurs activités traditionnelles. Le paiement par téléphone mobile, quelle que soit la désignation qu’on lui donne selon les pays et les opérateurs (Mobile paiement ou M-payement, Mobile Banking ou M-Banking, SMS Banking, Orange Money, MTN Mobile Money, Moov Flooz, etc.), permet de transférer (4) et de recevoir en temps réel de l’argent à faible coût. Ayant nous-même expérimenté cette solution, nous pouvons témoigner de sa commodité et de sa grande utilité au service des citoyens. Il donne même la possibilité de régler ses achats ou ses factures. Ce type de service qui profite à la fois de la forte croissance de l’usage du téléphone mobile cellulaire et du faible taux de bancarisation (5) sur le continent africain, rencontre un vif succès. La forte expansion de la banque mobile a obligé le Groupement interbancaire monétique de l’UEMOA (6) (GIM-UEMOA) à mettre en place une plate-forme regroupant plusieurs opérateurs de la sous-région ouest-africaine et quelques 80 banques pour améliorer les services proposés aux clients et surtout pour mieux organiser et sécuriser le secteur. Ce projet se concrétisera par l’installation de bornes faisant office de distributeurs automatiques. Ce faisant, en matière d’usage des Tic, il semble que l’Afrique propose des services innovants dont pourraient bien s’inspirer les autres parties du monde. En effet, selon une étude de l’Association européenne de management et marketing financier, pour 88% des banquiers interrogés et 66% des clients, la gestion de compte se fera via le Mobile Banking dans les années futures en Europe.
Le transfert électronique d’argent est une activité qui connaît un remarquable succès en Afrique pour les diverses raisons évoquées ci-dessus. Jusqu’ici, cette activité demeure encore formelle, dans la mesure où selon les entretiens que nous avons eus avec les acteurs de cette activité, les entreprises qui la pratiquent seraient déclarées.
Fig. 3 & 4 : Photos d’agences de transfert d’argent des entreprises Western Union (à Bouaké) et de l’opérateur de téléphonie mobile Orange-CI (Orange Money) à Yamoussoukro (Clichés de l’auteur, juin 2013)
Une multitude d’écoles de formation en réseaux informatiques et de télécommunications
La généralisation progressive du recours à l’informatique, au téléphone cellulaire et à l’Internet dans presque toutes les entreprises, administrations et activités humaines, souligne que la formation dans le domaine des Tic est manifeste partout sur le continent. Cet état de fait est à l’origine de la création de plusieurs écoles dans le domaine des réseaux informatiques et des télécommunications.
Avec l’avènement des Tic, un grand nombre d’établissements d’enseignement supérieur technique et professionnel proposant des formations dans les domaines des réseaux télécoms et informatiques, de l’électronique et du génie logiciel, ont essaimé dans de nombreux pays africains. Cette floraison de structures de formation contribue ainsi à la dynamique globale de ce secteur qui comprend aussi bien des établissements publics que des établissements privés, ces derniers en plus grand nombre. L’activité de formation de ces grandes écoles se situe dans le contexte de la convergence des télécommunications, de l’informatique et de l’audiovisuel. Elle se situe également dans le cadre général de l’émergence de la société dite de l’information, de la connaissance et de la communication, dominée par la téléphonie mobile cellulaire et l’Internet. Si la création de ces établissements répond à une nécessité de compétences spécialisées, lié au contexte, on peut, néanmoins, noter que les formations se déroulent parfois dans des conditions douteuses ou approximatives, que déplorent les apprenants eux-mêmes. En effet, la plupart de ces structures ne disposent pas d’équipements nécessaires pour une formation adéquate (insuffisance ou obsolescence des équipements). En tout état de cause, ces formations débouchent sur un certain nombre de métiers : ingénieur réseaux, développeur d’applications, ingénieur d’étude, chef de projet, ingénieur commercial, consultant en informatique, etc.
Les techniques d’information et de communication ont connu un essor sans précédent en Afrique au cours des dix dernières années et représentent un des principaux facteurs de création de richesses et d’emplois sur le continent. Le foisonnement des établissements de formation est donc proportionnel à cet essor. D’une façon générale, le secteur de la formation dans le domaine des Tic est lui aussi très dynamique et en perpétuelle évolution.
Comme en témoignent les différents exemples qui précèdent, les Tic ont généré de nouvelles activités formelles. Ce constat laisse, a priori, supposer que les Tic ont conservé leur statut de secteur d’activités formelles. Cependant, parallèlement, de nombreuses activités informelles ont vu le jour dans pratiquement chacun des secteurs ci-dessus analysés, en raison justement de l’avènement des Tic. Un tel constat renforce le sentiment d’ambiguïté quant au pouvoir créateur de celles-ci.
Jeune Afrique, 19 septembre 2012, Rapport : 600 millions d’abonnés mobiles en Afrique en 2016.
SkyVision est l’un des plus grands fournisseurs de services de télécommunications IP à l’échelle mondiale, pour les marchés émergents, avec des solutions par voie satellite et des systèmes de fibre optique.
Selon le site corporatif de la société (http://www.westernunion.com), Western Union est représentée dans plus de 200 pays et territoires, et dispose de plus de 350 000 points de présence (via notamment les partenaires agréés). Par exemple, pour la seule Côte d’Ivoire, il existerait plus de 570 agences à la fin de l’année 2009.
Pour l’instant, les transferts d’argent par téléphone mobile sont essentiellement nationaux. Mais des partenariats avec des banques internationales ou des structures de dimension mondiale comme Western Union pourraient permettre d’étendre à l’international le réseau de ce type de transferts.
La Banque mondiale estime que moins de 20 % des ménages africains ont accès aux services bancaires et ce taux descend jusqu’en dessous de 5% dans certains pays. En vue de combler cette lacune, les opérateurs de téléphonie mobile ont investi le terrain du paiement par mobile et concurrencent les banques et structures classiques de transfert de fonds. Pour ce faire, ils procèdent soit par des solutions « orientées mobile » où l’opérateur contrôle toute la chaîne de valeur (de la création et gestion du compte au paiement), soit par des solutions « orientées banques » à travers des partenariats avec des établissements bancaires où la banque se charge de la création et de la gestion du compte, et l’opérateur télécom du transport des données et de la distribution de l’offre. Source : Afrique Avenir, 29 octobre 2010, http://senegal.conceptforum.net/t2345-lafrique-championne-du-paiement-par-telephone-mobile
L’UEMOA (Union économique et monétaire Ouest Africaine) est la principale institution économique et financière de huit pays d’Afrique occidentale (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo).
L’émergence de nombreuses activités informelles dans le domaine des télécommunications
Le fort développement de l’informel dans le secteur de la téléphonie mobile cellulaire
Le développement des activités informelles dans le secteur de la téléphonie mobile cellulaire semble être proportionnel au dynamisme du secteur formel dont elles émanent. Le domaine de la téléphonie mobile est en effet celui où le taux d’intrusion des activités informelles est vraisemblablement le plus élevé.
La démocratisation du téléphone mobile en Afrique, qui se traduit par son accessibilité partout, sa facilité d’usage et surtout son appropriation par toutes les catégories de la population est incontestablement une grande réussite sociale. Toutefois, cette rapide généralisation a eu pour corollaire la prolifération d’une multitude d’activités informelles jusque-là inconnues (Loukou, 2008). Des populations aux revenus très faibles ont innové en créant de nouveaux services dans le but de répondre aux nouvelles attentes. Il s’agit notamment des cabines dites cellulaires (voir photos ci-après) à partir desquelles des usagers peuvent téléphoner comme on le faisait naguère dans les cabines publiques (7) des opérateurs historiques. Dans un pays telle que la Côte d’Ivoire, ce type particulier de cabines se compte par dizaines de milliers sur toute l’étendue du territoire (dans les zones rurales comme dans les zones urbaines).
À l’activité de gestion de cabines proprement dite, se sont ajoutés des métiers annexes tels que le transfert d’unités de communication, la vente de téléphones portables, de cartes de recharge et d’accessoires de téléphone. Ces usages nouveaux s’expriment généralement dans des cadres informels, puisque ces activités échappent au contrôle des pouvoirs publics davantage soucieux de préserver la paix sociale face au chômage élevé des jeunes. C’est un phénomène si informel et incontrôlé qu’il parvient même à modifier dans certaines villes le paysage urbain initial, avec l’implantation anarchique d’étals, de kiosques et de pancartes à l’aspect inesthétique pour la plupart. C’est notamment le cas à Abidjan, en Côte d’Ivoire, où des milliers de cabines, installées dans un désordre total, ont défiguré le paysage urbain (Loukou, 2003). À certains égards, les nouvelles trames urbaines générées par cette anarchie spatiale sont de nature à perturber nos représentations classiques de la ville moderne. Cette situation invite à renouveler les modes de gouvernance urbaine ainsi que les comportements individuels et collectifs à l’origine de ces modifications et perceptions.
Fig. 5 & 6: Alignement de « cabines téléphoniques cellulaires » dans une rue à Abidjan / Usager téléphonant d’une de ces «cabines» en bordure de rue dans une ville rurale (Clichés de l’auteur, juin 2013)
L’informel a aussi gagné l’Internet, un secteur si pointu et si récent
Le domaine de l’Internet, quoique récemment apparu sur le marché des activités économiques en Afrique, et malgré sa relative complexité technique, n’est pas épargné par l’informel qui a fini par le marquer à son tour, comme en témoigne l’exemple ci-dessous à Abidjan (Côte d’Ivoire).
Conséquence de la pauvreté des populations, l’informel est aussi un indicateur d’une forme de génie inventif. L’internet, secteur de haute technologie par excellence, semble, a priori, inaccessible aux bricoleurs et opportunistes. Pourtant, très vite, ils sont parvenus à investir aussi ce secteur en fournissant de façon détournée la connexion à certains usagers. Le modèle économique de cette nouvelle forme d’activité informelle repose sur une approche simple et ingénieuse : à l’aide de petites affiches ou de prospectus (voir illustration ci-dessous) ou de pancartes très attrayantes, ces nouveaux types de «fournisseurs d’accès» proposent de fournir la connexion au voisinage à des tarifs très bas. En fait, ils partagent leur propre connexion, obtenue légalement auprès d’un fournisseur agréé, moyennant une mensualité qui varie entre 4000F CFA (6,10 €) et 5000F CFA (7,63 €) par souscripteur. Toutefois, à «l’abonnement», une somme forfaitaire d’environ 15000 F CFA (22,9 €) est requise auprès de chaque souscripteur parallèle pour les frais dits d’installation. À tout considérer, comparée aux tarifs excessifs (20000F CFA au minimum, soit 30,53 €) des fournisseurs légaux, cette solution apparaît nettement avantageuse pour les populations aux faibles ressources, en débit des débits extrêmement faibles qu’ils reçoivent.
Circonscrite, à ses débuts, à quelques quartiers très pauvres, cette activité lucrative pour ceux qui l’exercent, s’est rapidement étendue à pratiquement tous les quartiers et communes de la ville d’Abidjan, sans considération de niveau social. Elle est en passe de devenir l’une des principales activités informelles du secteur des Tic.
Fig. 7 : Exemple type de petite affiche publicitaire proposant des services informels de connexion Internet
Plus qu’une économie informelle, le piratage menace le secteur de la télévision à péage
La télévision à péage désigne un mode de distribution d’images de télévision pour laquelle un paiement est nécessaire pour recevoir certains programmes. Précisons que le paiement en question est différent des redevances perçues sur les récepteurs de télévision. En Afrique, des stratégies bien élaborées de contournement ont permis de développer une activité parallèle à celle des distributeurs classiques.
Dans ce domaine, plus qu’une économie informelle, il s’agit parfois d’activités de piratage, à large spectre, qui bénéficient à des milliers de personnes. Le cas de Canal Horizons, filiale africaine de la chaîne française de télévision cryptée Canal Plus, illustre très bien cette situation. Avec probablement la complicité d’agents techniques et commerciaux de la chaîne, un réseau assez élaboré de piratage a été mis en place depuis des années. Moyennant un abonnement mensuel de 3000 f.cfa (4,57 €) et 10000 FCFA (15,24 €) de frais d’installation, un souscripteur légal peut aisément sous-abonner frauduleusement des dizaines voire des centaines d’usagers, selon le nombre de paraboles, de décodeurs et de cartes de connexion qu’il a acquis. L’activité est si lucrative pour les uns (les pirates) et si bénéfique pour les autres (les usagers) que pratiquement tous les foyers des quartiers pauvres des grandes villes ont désormais facilement accès à cette chaîne cryptée bien appréciée des populations des pays africains où elle diffuse des programmes variés (sports, informations, divertissements, documentaires, etc.). De nombreuses personnes ont fait de ce type de piratage une activité principale ou secondaire qui leur rapporte de substantielles ressources financières, suivant les cas. À ce titre, un article du quotidien sénégalais en ligne, «Le Soleil», rapporte le cas insolite d’un habitant de la ville de Saint-Louis du Sénégal, qui aurait pendant longtemps frauduleusement connecté plus de 500 foyers, avant d’être finalement démasqué et traduit en justice (8). Bien entendu, le grand perdant en est la chaîne qui, de ce fait, perd de nombreux abonnés légaux. À ce propos, il convient de dire que les tarifs de Canal Horizons, longtemps jugés prohibitifs par la plupart des foyers des pays africains où la chaîne diffuse ses programmes, sont en grande partie responsables du développement de ce piratage. Quoique la chaîne se soit récemment engagée dans une politique tarifaire plus abordable, le mal semble déjà fait, et le piratage est désormais difficile à endiguer.
En définitive, en Afrique, d’une manière générale, en marge d’une activité formellement reconnue gravite chaque fois une autre, informelle mais tolérée pour diverses raisons. Les différents exemples que nous venons de signaler confortent cette analyse au point de caractériser l’économie africaine comme étant hybride c’est-à-dire mi-formelle mi-informelle.
Dans certains pays africains (la Côte d’Ivoire, par exemple) les cabines publiques ont totalement disparu au profit des «cabines cellulaires» plus accessibles, pratiques et adaptées aux besoins des populations locales.
Le Soleil, « Le pirate avait branché 500 «abonnés» à Canal Plus Horizon », [en ligne] http://www.lesoleil.sn/arTicle.php3?id_arTicle=29110
Conclusion
La pratique des activités informelles est si enracinée dans les routines de l’ordre économique et social des pays africains que même le secteur des techniques de l’information et de la communication n’est plus épargné par le phénomène. Moins encore, ce secteur n’est en mesure d’inverser, seul, la tendance longtemps établie. Loin de freiner le phénomène, les Tic, quoiqu’elles aient induit de nombreuses activités formelles, ont aussi favorisé l’émergence de nouveaux types d’activités informelles. En effet, même là où elles ont induit du formel, il existe en parallèle des circuits informels (9) fort dynamiques et généralement bien appréciés. De ce fait, à partir de nos investigations, de nos observations de terrain et de nos analyses, il n’est guère possible d’affirmer que les Tic génèrent exclusivement des activités formelles. Leur statut de secteur formel a été violé. Au demeurant, l’avènement des Tic a contribué à renforcer le développement du génie inventif des adeptes de l’économie informelle dans des domaines jusqu’ici insoupçonnés. Aussi, constate-t-on que dans le secteur des Tic, le taux d’intrusion des activités informelles dans les activités formelles est de plus en plus élevé. En clair, le secteur a été lui aussi gagné par l’informel.
En fait, de façon plus générale, les activités formelles et informelles sont très imbriquées et d’importance presque égale en Afrique. Aussi, peut-on légitimement imaginer une hybridation du modèle économique du continent à moyen ou long terme, avec de fortes synergies entre les deux formes d’économie, compte tenu de l’étroite interdépendance qui les lie. Par ailleurs, en raison du dynamisme inégalé des activités informelles dans le secteur des Tic et du poids croissant de celui-ci dans les économies africaines, cette hybridation, dans cette hypothèse, pourrait être à dominance Tic. En tout état de cause, ce modèle hybride serait un moyen de concilier deux modes parallèles de développement des activités. Au sein d’un tel modèle, l’informel ne devrait pas être considéré comme un « parasite » du formel mais plutôt comme son indispensable appendice.
Selon le lien http://www.lamicrofinance.org/files/16666_file_BIM_20_09_05.pdf (World Bank Group), à la page 3 de l’article intitulé « Les transferts d’argent », de récentes études montrent que plus de la moitié des transferts d’argent de la France vers le Sénégal et le Mali sont effectués par voie informelle ; 85% dans le cas du Soudan. Ces chiffres montrent que les systèmes informels concurrencent largement les plus gros acteurs du marché formel des transferts. Les systèmes informels nécessitent un minimum de formalités écrites et présentent donc l’avantage de la discrétion. De ce fait, pour les clients en situation de résidence illégale en Occident, ils constituent le recours idéal pour leurs transferts d’argent. Ils sont par ailleurs généralement moins chers que les mécanismes formels soumis à réglementation et taxation.
Notes
(1) Jeune Afrique, 19 septembre 2012, Rapport : 600 millions d’abonnés mobiles en Afrique en 2016.
(2) SkyVision est l’un des plus grands fournisseurs de services de télécommunications IP à l’échelle mondiale, pour les marchés émergents, avec des solutions par voie satellite et des systèmes de fibre optique.
(3) Selon le site corporatif de la société (http://www.westernunion.com), Western Union est représentée dans plus de 200 pays et territoires, et dispose de plus de 350 000 points de présence (via notamment les partenaires agréés). Par exemple, pour la seule Côte d’Ivoire, il existerait plus de 570 agences à la fin de l’année 2009.
(4) Pour l’instant, les transferts d’argent par téléphone mobile sont essentiellement nationaux. Mais des partenariats avec des banques internationales ou des structures de dimension mondiale comme Western Union pourraient permettre d’étendre à l’international le réseau de ce type de transferts.
(5) La Banque mondiale estime que moins de 20 % des ménages africains ont accès aux services bancaires et ce taux descend jusqu’en dessous de 5% dans certains pays. En vue de combler cette lacune, les opérateurs de téléphonie mobile ont investi le terrain du paiement par mobile et concurrencent les banques et structures classiques de transfert de fonds. Pour ce faire, ils procèdent soit par des solutions « orientées mobile » où l’opérateur contrôle toute la chaîne de valeur (de la création et gestion du compte au paiement), soit par des solutions « orientées banques » à travers des partenariats avec des établissements bancaires où la banque se charge de la création et de la gestion du compte, et l’opérateur télécom du transport des données et de la distribution de l’offre. Source : Afrique Avenir, 29 octobre 2010, http://senegal.conceptforum.net/t2345-lafrique-championne-du-paiement-par-telephone-mobile
(6) L’UEMOA (Union économique et monétaire Ouest Africaine) est la principale institution économique et financière de huit pays d’Afrique occidentale (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo).
(7) Dans certains pays africains (la Côte d’Ivoire, par exemple) les cabines publiques ont totalement disparu au profit des «cabines cellulaires» plus accessibles, pratiques et adaptées aux besoins des populations locales.
(8) Le Soleil, « Le pirate avait branché 500 «abonnés» à Canal Plus Horizon », [en ligne] http://www.lesoleil.sn/arTicle.php3?id_arTicle=29110
(9) Selon http://www.lamicrofinance.org/files/16666_file_BIM_20_09_05.pdf (World Bank Group), à la page 3 de l’article intitulé « Les transferts d’argent », de récentes études montrent que plus de la moitié des transferts d’argent de la France vers le Sénégal et le Mali sont effectués par voie informelle ; 85% dans le cas du Soudan. Ces chiffres montrent que les systèmes informels concurrencent largement les plus gros acteurs du marché formel des transferts. Les systèmes informels nécessitent un minimum de formalités écrites et présentent donc l’avantage de la discrétion. De ce fait, pour les clients en situation de résidence illégale en Occident, ils constituent le recours idéal pour leurs transferts d’argent. Ils sont par ailleurs généralement moins chers que les mécanismes formels soumis à réglementation et taxation.
Références bibliographiques
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Auteur
Alain François Loukou
.: Maître-assistant à l’Université Alassane OUATTARA de Bouaké, en Côte d’Ivoire. Géographe de formation, ses recherches portent principalement sur la dimension spatiale des techniques d’information et de communication ainsi que sur l’analyse du rôle de ces outils dans le développement. Elles portent également sur les études prospectives dont l’intérêt est de favoriser la prise en compte de l’avenir dans les décisions du présent.