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Relations Nord / Sud dans le développement du cinéma documentaire en Afrique : enjeux économiques et esthétiques

15 Jan, 2011

Résumé

Depuis quelques années, la production audiovisuelle, notamment documentaire, connaît une certaine embellie dans les pays de l’Afrique francophone. Cet article analyse la nature du rapport Nord/Sud, en vertu duquel émerge ce nouveau cinéma documentaire africain, défini aussi bien en tant qu’expression artistique qu’en tant que secteur économique : assiste-t-on à une « européisation » des modes de production audiovisuelle, ou bien à l’expérimentation de pratiques de coproduction et plus largement d’échanges économiques inédits ?

In English

Abstract

For several years, the audiovisual production (notably documentary film) has seen a certain development in the French-speaking African countries. This article analyzes the essence of the North-South relationship from which this new African documentary cinema is emerging. This cinema can be considered just as much a means of artistic expression as a part of an economic sector. Are we witnessing a sort of “Europeanization” of the ways of filmmaking, or rather an experimenting with coproduction tactics and more generally, new kinds of economic exchanges?

En Español

Resumen

En los últimos años, la producción audiovisual, específicamente documental, ha conocido cierto desarrollo en los países francófonos de Africa. Este artículo analiza la manera como las relaciones Norte/Sur atraviesan la emergencia de este nuevo cine documental, que se define como expresión artística y como sector económico a la vez. ¿Asistimos a una « europeanización » de los modos de producción y creación audiovisual o a la experimentación de prácticas de coproducción y de intercambios económicos y culturales inéditos?

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Rueda Amanda, « Relations Nord / Sud dans le développement du cinéma documentaire en Afrique : enjeux économiques et esthétiques« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°11/3A, , p. à , consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2010/supplement-a/08-relations-nord-sud-dans-le-developpement-du-cinema-documentaire-en-afrique-enjeux-economiques-et-esthetiques

Introduction

Depuis quelques années, la production audiovisuelle, notamment documentaire, connaît une embellie dans un certain nombre de pays africains. Cet essor trouve son origine dans l’articulation de conditions socioéconomiques et culturelles plus favorables, qui facilitent l’émergence non seulement d’une génération de réalisateurs, mais également de professionnels qui vont assumer un rôle fondamental de médiation. Le renouveau du cinéma documentaire africain doit beaucoup en l’occurrence à la mise en place, sous l’impulsion de l’association française Ardèche Images, du programme Africadoc, lequel se donne pour but de « développer avec les pays d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique Centrale et d’Afrique lusophone un ensemble de dispositifs de formation qui encadrent l’émergence d’une nouvelle génération de cinéastes, et la mise en place d’un tissu de professionnels du documentaire ». L’objectif poursuivi vise la coproduction et la distribution commerciale de films documentaires, un enjeu à la fois économique, culturel, politique et humain(1).
Plusieurs dimensions structurent cet espace d’échanges : linguistique et culturelle d’une part, à travers les représentations de l’Autre, Africain, et de la conception que se font du cinéma aussi bien les acteurs/médiateurs, notamment l’association Ardèche Images, que les réalisateurs africains ; politique d’autre part, à travers le point de vue des acteurs qui font exister ce projet (citoyens et professionnels français du cinéma) et des idées qui les mobilisent (parole partagée, pluralité, diversité…). Nous verrons comment leurs actions empruntent la voie du dialogue interculturel, pour fonder un pacte social profondément rénové qui renouvelle les anciennes formes d’intervention humanitaire et de coopération institutionnelle.
Quelle est la nature du rapport Nord/Sud, en vertu duquel émerge sur le plan artistique, mais aussi économique, ce nouveau cinéma documentaire? Assiste-t-on à une « européisation » des modes de production et de création audiovisuelles, ou bien à l’expérimentation de pratiques de coproduction et plus largement d’échanges économiques et culturels inédits ? Trois processus, étroitement dépendants, découlent de la démarche volontariste adoptée par le programme Africadoc. Premièrement, le déploiement d’une nouvelle économie audiovisuelle, ayant comme enjeux principaux l’indépendance et la coproduction Afrique/Europe et plus largement le territoire de la coopération Nord/Sud. Deuxièmement, l’émergence d’un réseau audiovisuel indépendant associant des acteurs français, et plus généralement européens, et africains, unis par un même sentiment d’appartenance à la communauté du cinéma. Troisièmement, le renouvellement des formes documentaires et de la représentation des réalités sociales et culturelles africaines.

L’indépendance et le développement d’une « nouvelle économie »

Le programme Africadoc s’inscrit à l’intérieur d’un champ social en pleine transformation : à côte d’un contexte local singulier (marqué par la jeunesse des producteurs et des diffuseurs indépendants ; l’absence, dans la plupart des pays concernés, de structures stables et d’instituts publics de soutien à l’audiovisuel comme de sociétés de droits d’auteurs ; la prédominance des télévisions sans programmation propre qui opèrent seulement comme des diffuseurs des chaînes étrangères…, etc.), il existe un contexte de « démocratisation » des outils de production et de diffusion audiovisuelle, notamment du numérique, permettant depuis déjà une décennie à une population, l’accès à la création et à la fabrication de représentations du monde qui lui sont propres, et au public l’accès à ces œuvres. À côté des médias de diffusion « classiques », l’édition DVD, le net, ou la diffusion ambulante dessinent désormais de nouveaux liens avec le public.
L’observation de la place des cinémas d’Afrique dans ce contexte que l’on appelle – parfois de façon très abusive – « mondialisation » -, représente une opportunité certaine, pour poser la complexité d’une situation discursive inédite qui renouvelle les rapports de la France avec le continent « africain »  – réévalués dans un nouveau cadre mondial. La situation de la culture et du cinéma vis-à-vis des politiques néolibérales et de la marchandisation croissante compose la toile de fond des réflexions menées par les acteurs impliqués dans le soutien à ce type de cinématographies. « Ils se retrouvent tous dans l’utopie contemporaine de la diversité culturelle face à la mondialisation » (Creton, 1997 : 13). Le programme Africadoc profite ainsi d’un contexte propice à la mise en place de structures et d’alliances favorables au développement du cinéma documentaire. « … à y regarder de plus près, ce n’était déjà que la suite logique d’un phénomène propre au 21e siècle, le métissage des peuples et l’avènement des civilisations de l’image », souligne Africadoc dans l’un de ses textes.
La description des acteurs du programme Africadoc mérite que l’on s’y arrête un moment. À l’origine du programme se trouve l’association française Ardèche Images, fondée en 1979 à Lussas, petit village de la région Rhône-Alpes, avec le but affiché de valoriser les initiatives du cinéma en région. Créée par une équipe de jeunes dont un « enfant du pays », Jean-Marie Barbe, cette association s’emploiera au fil des années à promouvoir la réalisation et la diffusion de films documentaires, l’organisation d’un festival de cinéma et la formation aux techniques cinématographiques.
Dans les années 2000, Ardèche Images se tourne vers l’Afrique avec la volonté clairement affichée de favoriser l’acte d’énonciation « africain ». Faire exister une cinématographie demeure le principal mobile d’Africadoc. Africadoc joue donc le rôle de médiateur dans l’appropriation des outils techniques et dans l’apprentissage d’un mode de production des films documentaires, fruit d’une longue expérience marquée par une exigence d’indépendance. Le programme appuie en conséquence la mise en place de dispositifs de formation à l’écriture de films documentaires(2), la création de sociétés d’auteurs, l’organisation du prélèvement et de la redistribution financière, ainsi que la rédaction d’une charte de « coopération équitable » afin de rehausser le niveau de compétence des professionnels africains.
C’est dans cette perspective que sont organisées en 2009 les Rencontres internationales du documentaire africain LOUMA à Saint-Louis du Sénégal autour de deux axes forts : la vidéothèque d’acquisition de films documentaires africains et les Rencontresde coproduction Tënk.  La vidéothèque propose à des acheteurs un catalogue d’une centaine de films africains ou ayant l’Afrique pour thème, produits entre 2007 et 2009. Près de 25 responsables, chefs de programmes et acheteurs de chaînes de télévisions et de structures institutionnelles de diffusion cinématographique, médiathèques africaines et européennes, ont pu visionner pendant trois jours les films du catalogue(3).
Dans le cadre des Tënk, qui en sont en 2009 à leur septième édition, une trentained’auteurs-réalisateurs défendent pendant quatre jours devant une assemblée d’une quarantaine de diffuseurs et de producteurs africains (Burkina, Cameroun, Congo, Mali, Mauritanie, Sénégal, Togo) et européens (France, Portugal, Belgique) des projets de films documentaires développés lors des résidences d’écriture Africadoc ou au sein du Master 2 Réalisation documentaire de création. 28 projets ont été présentés en 2008 (6 lusophones et 22 francophones) et 27 en 2009 (6 lusophones et 21 francophones).
Africadoc assume à travers ces deux dispositifs un rôle de médiateur dans l’échange et le marché culturels. Comment expliquer l’émergence et la légitimité au sein du secteur audiovisuel africain de ces types de dispositif ? Deux hypothèses peuvent être avancées : premièrement, le besoin de développer des marchés cinématographiques « indépendants » ou parallèles au marché dominant de l’audiovisuel ; deuxièmement, le besoin de témoigner d’une affirmation identitaire pour laquelle le cinéma servirait de révélateur. Cette dernière proposition accréditerait l’idée d’une revalorisation des particularismes géographiques ou culturels, dans la carte du monde contemporain dont le cinéma, segmenté entre différentes catégories définitoires (lieu d’origine, expression de minorités…), ne serait que l’une des expressions. Il n’est en effet pas rare que ce type de manifestations accueille la défense des spécificités culturelles et linguistiques, la rhétorique empruntant alors les traits de l’engagement politique. Dans cette perspective, les rencontres de Saint-Louis jouent à l’évidence un rôle sensible dans la réduction des déséquilibres culturels et de la marge.
L’insertion des pratiques sur le marché culturel et cinématographique a par ailleurs des implications sur le plan du discours de la solidarité. Une nouvelle catégorie émerge à l’intérieur de l’industrie audiovisuelle, celle de « coopération équitable » ; très connotée dans le discours de l’alter-mondialisation, elle renvoie dans ce cas précis à la production d’un récit collectif large. Cette notion va bien au-delà des enjeux économiques et culturels pour promouvoir un espace de rencontre et de « découverte » de l’Autre, tissé de complicité et d’humanité.
Mais ce nouveau modèle économique est traversé par un projet plus large, celui de la création d’alliances Sud/Sud, la construction en l’occurrence d’un réseau « panafricain » de jeunes professionnels (réalisateurs et producteurs) : « Ma conviction, c’est le Panafricanisme, c’est-à-dire qu’il convient de mettre au centre du souci de développement de l’audiovisuel des liens entre le nord et le sud de l’Afrique, en tout cas au sud du Sahara jusqu’à Johannesburg », affirme Jean-Marie Barbe, à l’origine du projet. Dans le but avoué d’ancrer localement et durablement l’action du programme Africadoc, des associations Africadoc sont en train de se créer dans différents pays de l’Afrique francophone : « L’Afrique des Africadocs ».
Le territoire de la langue – la francophonie commune à la plupart des pays sollicités – recoupe ici le terrain du politique, dans le cadre d’un véritable combat sémantique pour se démarquer d’une terminologie trop entachée par l’univers du marché et de l’industrie « dominants ». D’appropriations en détournements linguistiques, l’emprunt à la langue ouolof de deux mots : Tënk, qui signifie « dis-moi de façon simple, compréhensible, le fond de ta pensée » (à contre-pied du mot Pitch, dominant dans le champ de l’industrie de l’audiovisuel), et Louma, qui désigne « le marché hebdomadaire ou mensuel où l’on vend un produit spécifique et pour lequel se déplacent les gros ou petits producteurs, et les acheteurs, grossistes ou particuliers ».
Le programme Africadoc endosse ainsi un rôle important dans le développement de nouveaux modèles de production et accompagne la mutation de la physionomie des anciennes relations cinématographiques entre l’Afrique et la France. « Le Louma (à Saint-Louis du Sénégal), à vocation internationale, destiné à créer sur le versant économique un appel de fonds pour coproduire les projets de documentaires et trouver des diffuseurs ; sur le versant culturel un rendez-vous pour découvrir les œuvres documentaires et dynamiser les désirs et les réseaux des professionnels africains ». L’univers de référence, qui sous-tend les discours des acteurs est celui de la coopération pour le développement cinématographique, les échanges commerciaux et la diversité culturelle.
Si les cinémas d’Afrique de l’Ouest ont toujours bénéficié en France d’un solide soutien – depuis les années 1960, la production cinématographique en Afrique dépend des aides et des investissements des organismes français de coopération -, la coopération Nord/Sud a pris un tournant significatif en faveur de la production documentaire. L’assistance ne se limite plus tout d’abord au soutien ponctuel à des projets individuels, puisque Africadoc inscrit son action sur le long terme à travers le parrainage des producteurs émergents par des coproducteurs européens. S’opposant ensuite à la logique politique courante de l’aide au développement, basée souvent sur un retour au donateur et se souciant peu par conséquent du développement des infrastructures locales, ces alliances insistent sur le développement des industries audiovisuelles africaines. Enfin, le programme Africadoc ne souscrit pas au modèle traditionnel de la coopération culturelle, mais lui préfère l’angle du partenariat professionnel et institutionnel. Comme l’affirme Creton pour le cinéma européen, la coopération « se traduit notamment par des coproductions qui permettent de mettre en commun les ressources, et d’ouvrir plus aisément les divers marchés nationaux » (1997 : 116).
Il s’agit le plus souvent de coproductions, avec des sociétés qui occupent une position marginale sur le marché. On pourrait avancer toutefois que l’attention que la France porte à ces cinémas est étroitement liée à ses propres stratégies, concernant la survie et l’expansion de son industrie cinématographique (Hoefert de Turégano, 2003 : 60), même s’il s’agit, dans le cas du documentaire, d’une industrie qui s’avère aujourd’hui précaire et en pleine reconfiguration.
Cet arrière-plan révèle par ailleurs l’importance des enjeux économiques et politiques, à l’œuvre dans les processus de construction du secteur du documentaire « africain ».

L’émergence d’un réseau audiovisuel

Dans le processus actuel de recomposition du paysage culturel, le cinéma occupe une place d’honneur à travers des espaces de rencontres mis en place par des acteurs issus du « Nord » pour aider au développement des cinémas du « Sud ». Le cinéma y est perçu comme un vecteur d’identité, de lien social et interculturel. Du point de vue de l’imaginaire politique, la défense du documentaire de création s’intègre à un projet plus vaste de construction sociale, qui dépasse les frontières du national pour se tourner vers les « Suds », modifiant les formes anciennes de solidarité (l’aide humanitaire, par exemple) et visant la construction de liens sociaux transnationaux – même si la catégorie de « Sud » conserve la trace d’une asymétrie « géopolitique ». Il s’agit pour l’essentiel de réseaux en construction, émanant de personnes privées (citoyens et associations), rêvant d’une place pour les cultures et les productions cinématographiques plus ou moins en marge du système de production industriel.
La participation des professionnels du Nord au sein de cet espace symbolique procède de leur engagement en faveur d’un cinéma qui se définit, de façon très générale, par son opposition au « cinéma commercial ». Ils y partagent un sentiment d’« appartenance » à un milieu culturel plus ou moins distingué, condition nécessaire sinon suffisante au développement de projets communs. Avant que la gouvernance internationale n’adopte à son tour la rhétorique du dialogue des langues et des cultures – l’Union européenne a déclaré 2008, l’année internationale du dialogue culturel -, des initiatives venues d’acteurs non étatiques avaient déjà donné lieu à des manifestations culturelles à caractère international. Le cinéma opère dans ce contexte comme un terrain d’initiatives citoyennes, bien souvent pionnières dans ce type de processus.
Réaffirmé clairement dans ses textes, l’objectif du programme d’Africadoc demeure militant, un militantisme « cinématographique » compris comme un soutien aux cinématographies minoritaires : « La mise en scène des représentations du réel par le cinéma documentaire est plus que jamais un enjeu esthétique, politique et économique majeur. À l’échelle du monde, permettre aux jeunes générations de cinéastes du Sud de nous donner des nouvelles documentaires de leurs réels est une impérieuse nécessité ». Le programme Africadoc soulève des enjeux artistiques, économiques et politiques complexes, aussi bien sur le plan de son organisation interne que des pratiques mises en œuvre, et c’est en vertu de cette complexité qu’il représente une forme renouvelée du « socio-culturel ». Le terme de médiateur semble davantage en mesure de définir l’éventail des fonctions sociales et culturelles des acteurs du programme. Comme le montre Lefèbvre, le réseau socioculturel repose dans une large mesure sur l’engagement des intermédiaires culturels dans une stratégie directement politique (Lefèbvre, 1988 : 11). Si la notion de « médiation culturelle » est souvent utilisée dans les processus de diffusion des œuvres, elle doit également pouvoir tenir compte des processus de production, notamment dans un contexte de rapports Nord/Sud : médiation dans le développement – création, légitimation et  internationalisation – du secteur audiovisuel, médiation à l’intérieur du marché audiovisuel entre les films et les différents acteurs de la filière.
C’est en grande partie la convergence du projet d’Africadoc et des politiques culturelles diligentées par certains organismes aussi bien africains qu’européens qui assure la viabilité du programme. Les institutions, quoique impliquées de manière moins directe, assument quant à elles un rôle fondamental, en agissant aussi bien sur l’aspect budgétaire que sur la dimension sociale et d’une certaine manière symbolique du programme. Mise à part l’association Ardèche Images, trois acteurs du « Nord » participent à la mise en place de ce programme : une collectivité territoriale (la Région Rhône-Alpes, partenaire de la Région de Saint-Louis dans le cadre du projet de développement culturel inter-régional), l’Europe (la Commission Européenne à travers le programme ACP-Films), et la chaîne de télévision ARTE. D’autres acteurs sont également concernés comme l’Organisation Internationale de la francophonie, dans le cadre de son programme « Image » et de l’activité de mise en réseau des industries culturelles. Cette dimension francophone du programme a son importance, puisqu’elle rassemble huit pays autour d’une même langue.
Du côté africain, plusieurs acteurs sont concernés avec divers niveaux d’implication : la Région et la mairie de Saint-Louis, des télévisions comme l’ORTM (Office de la radiodiffusion Télévision du Mali) et la RTB (Radio Télévision du Burkina Faso) et des associations comme Dakar Images.
À côté de ces acteurs-médiateurs, les professionnels du cinéma venus d’Europe et d’Afrique représentent la cheville ouvrière du programme. Une toile d’araignée se tisse au gré des relations d’amitié et de confiance, jetant des ponts entre la France et le continent africain(4). La diversité des parcours individuels et les expériences de voyage fondent ici les bases du dialogue culturel. Le croisement des influences et la multiplicité des acteurs de la médiation révèlent en outre la complexité de la dynamique propre aux faits de communication, ainsi que la convergence des enjeux institutionnels, financiers et politiques (négociation et tensions de pouvoir, visibilité et reconnaissance, légitimité…). Les éléments identitaires et le sens même du programme ressortent désormais de plusieurs logiques : d’une part, l’identité politique et sociale de l’équipe responsable, l’investissement des institutions et des professionnels ; d’autre part, le fonctionnement général du secteur audiovisuel et la problématique des relations internationales.
Ce processus de communication Nord/Sud a la capacité de générer une sorte d’imaginaire commun et un sentiment d’appartenance à une communauté de cinéma : « il y a un mouvement d’aller vers l’autre, quelque chose de l’ordre de l’expérience, dont nos amis, collègues des autres territoires mais du même monde cinématographique, peuvent profiter, peuvent se nourrir… D’emblée on n’est pas du tout dans une relation de transfert de compétences, ou de transmission d’un savoir-faire, on est dans la pratique documentaire, le partage d’un territoire commun avec l’autre et la circulation du regard de lui à moi et de moi à lui » analyse François Fronty, réalisateur français impliqué dans le programme de formation proposé dans le cadre des résidences d’écriture. « Quelque chose qui se passe entre les humains et leur rapport au monde, et qui est de l’ordre du bien commun », répond Jean-Marie Barbe.
Dans la « transnationalisation de la tribu du cinéma indépendant », comme l’appelle Reilhac, survivent des traces de l’organisation géopolitique qui structure les échanges internationaux. Dans ce répertoire officiel, l’Afrique endosse la figure tolérante de l’Autre. Comme l’affirme Said, « … la pratique universelle qui consiste à désigner dans son esprit un espace familier comme le « nôtre » et un espace qui ne l’est pas comme le « leur », est une manière de faire des distinctions géographiques qui peuvent être totalement arbitraires… ainsi « ils » deviennent « eux », et leur territoire comme leur mentalité sont désignés comme différant des « nôtres »(2004 : 70).
Appliquée au champ de la production audiovisuelle dit « indépendant », la construction de relations interculturelles selon le schéma « nous et eux » s’apparenterait à une tentative contemporaine d’élaboration d’un sens partagé. « En soutenant par la formation et par l’organisation de ce rendez-vous qu’est le Tënk de Saint-Louis des coproduction équitables, nous affinons cette impression que finalement le territoire qui nous est commun est celui des images qui pensent et qu’il s’étend aujourd’hui encore plus qu’hier : De Brazza à Bruxelles, de Yaounde à Lisbonne, de Niamey à Lussas, de Bamako à Montréal… », écrit Jean-Marie Barbe dans l’éditorial des Tënks 2008.  Au fur et à mesure que les films circulent et que les réalisateurs et les producteurs se rencontrent, un embryon de communauté s’est constitué, « générateur d’échanges en tous sens et de tous ordres ». Le fait que le lieu d’énonciation de cette communauté soit la France n’est pas négligeable. On peut se demander de quelle manière les Africains reçoivent cette affiliation communautaire.
Africadoc est emblématique, nous semble-t-il, de l’émergence de nouvelles solidarités dans le contexte contemporain de mondialisation de la communication. La création de ce type de dispositif s’insère certainement dans l’émergence de nouvelles formes de « regroupements transfrontaliers »(5), fondés généralement sur des modalités de coopération non institutionnelles et donnant lieu à de multiples échanges culturels. Ce sont des rapports en pleine « réorganisation », constituant des réseaux en train de se faire : « Des réseaux de personnes qui agissent ensemble » (Hennion, 1993 : 138). Si, à l’heure actuelle, le système transnational de communication tend à perturber les formes existantes d’identification nationale, il suscite également, d’après Ang, « des solidarités nouvelles, de nouvelles façons de forger des communautés culturelles »  (Ang, 1993 : 87).
L’origine et la nature même du programme Africadoc participent, selon nous, de l’édification de cette « internationalité », que Mattelart juge « plus actuelle que jamais sous le couvert de la mondialité » (1996 : 120). Les Rencontres internationales du documentaire africain se font le théâtre de cette communication internationale, en mettant en scène de nouvelles formes d’intégration à travers lesquelles se manifeste la complexité des processus de médiation et de négociation, à l’œuvre entre le singulier et l’universel, le local, le national et le transnational, le « Centre » et la « Périphérie », le Nord et le Sud.
Coproduire et dialoguer avec les pays européens peut signifier, pour les pays africains, s’adapter à des facilités et des contraintes inconnues auparavant, inventer et maîtriser un langage commun. Ces espaces d’échanges, même s’ils permettent effectivement le développement de la production de films dans un certain nombre de pays, constituent pourtant des répertoires administrés par le « Centre ». Les réalisateurs africains rentrent par leur intermédiaire dans un circuit de création et de légitimation internationale. S’il y a incontestablement renouveau esthétique, celui-ci se déploie en revanche selon un modèle de production et de diffusion en construction.
Il n’est pas possible de passer sous silence la question de l’opportunisme qui pourrait motiver la propension des pays du « Nord » à mettre en place des programmes d’aide aux documentaires du « Sud ». Existe-t-il un besoin d’exotisme de la part des Français qui serait satisfait par ces cinémas ? Ces films offriraient-ils une sorte d’« effet-vitrine exotisant à usage occidental », comme le suspecte Millet ? (2001 : 142). Pour cet auteur, l’indépendance demanderait à être traitée avec relativisme puisque, à l’égard notamment de l’intervention publique française,« elle s’inscrit ici dans le cadre d’une véritable marchéisation politique des cinémas du Sud » (160). Il s’agirait selon lui, concernant notamment le cinéma africain, d’une occidentalisation de l’ordre cinématographique mondial. L’approche, qui consiste à replacer la question de l’indépendance des cinémas dans le champ du (néo/post) colonialisme, apporte un éclairage qui n’est pas sans intérêt pour le sujet qui nous occupe.
Quels enseignements tirer dans cette perspective des formulations discursives des acteurs du programme Africadoc et de la pratique du cinéma qui s’y trouve promue ? Trois types de discours s’efforcent à l’heure actuelle de contrer le soupçon d’une visée néo ou post-coloniale, une suspicion que rejettent catégoriquement les responsables du programme. Premièrement, celui de la « coopération équitable », décrit ci-dessus ; deuxièmement, celui qui attribue une place essentielle dans le développement culturel à la transmission de la mémoire et de l’expérience humaines. Enfin, troisièmement, celui qui envisage l’Autre africain, à travers le prisme d’une spécificité culturelle « à apprendre » et qui cherche à détourner la relation d’altérité au profit d’une fructueuse expérience de la différence. On a affaire ici à un double mouvement : d’une part, le façonnement d’une « communauté transnationale indépendante », impliquant, dans une même dynamique, acteurs locaux (africains) et internationaux (européens) ; de l’autre, la mise en œuvre d’un liant socioculturel fort, à l’intérieur des frontières comme au niveau transnational.

Renouvellement des formes documentaires et de la représentation des réalités sociales et culturelles africaines

Quel type de cinéma peut bien naître de cette collaboration ? La question de l’indépendance se pose au niveau du processus de création, c’est-à-dire, dans la pratique même de l’écriture filmique, nécessairement contrainte par le dispositif de formation et d’accompagnement qui encadre la fabrication des films. L’espace des rencontres devient le lieu d’assimilation de savoirs et de pratiques, mais aussi d’esthétiques singulières qui ne sont pas sans incidences sur le mouvement du cinéma et des idées –(6).
Quelle place pour l’indépendance dans ce contexte d’échanges ? Si la recherche de l’indépendance, notamment concernant les « cinémas du Sud », répond davantage à une recherche de pluralisme à l’échelle internationale, elle n’est pas pour autant dénuée d’ambivalences. L’indépendance des cinémas du Sud passe alors par une inévitable dépendance technique, laquelle peut suggérer que le Nord intervient aussi, indirectement, inconsciemment, involontairement, comme dirait Millet, dans les représentations iconiques fabriquées par les réalisateurs. Comment les auteurs–réalisateurs africains s’approprient-ils ou négocient-ils avec cet héritage technique, économique et esthétique « exogène » ? Sous quelles formes – imitation,  résistance, appropriation, transgression, subversion – s’exprime la relation post-coloniale dans la création documentaire contemporaine ?
L’enjeu réside dans la refondation locale de la fonction sociale du documentaire, et c’est en tant que pratique culturelle et artistique que le documentaire de création se prête à cette réinterprétation. Le contexte africain, où la création documentaire s’inscrit dans une situation d’urgence sociale et esthétique, dénie l’ancienne opposition entre art et communication, revendiquée par les tenants du « documentaire de création ». En tant qu’objet de médiation dans le champ social, le documentaire de création devient documentaire d’intervention et d’action.
S’il est vrai que les questions qui sous-tendent l’écriture d’un film documentaire ne se posent pas de la même manière dans tous les territoires – en l’occurrence en France et en Afrique-, c’est la dimension artistique du documentaire de création qui permettrait de dépasser le strict transfert de savoirs-faire techniques pour ouvrir un espace de dialogue et une communauté de sens. Quant aux documentaires produits, ils amalgament des approches du local et du non local sous une forme métissée, et ils mettent en œuvre des formes hybrides, tout en interrogeant les séparations propres à la modernité occidentale entre tradition et modernité, individu et communauté, ordre et chaos, réel et imaginaire, fiction et documentaire.
Loin de nous l’idée de défendre une prétendue unité du documentaire africain ou de verser dans un essentialisme qui assimilerait les films à des produits normatifs déterminés par un principe esthétique ou par un ordre social transcendants, mais il se dégage en revanche des films issus du programme Africadoc des problématiques et des approches communes : d’une part, le questionnement de certaines pratiques traditionnelles et de leur difficulté d’adaptation à la modernité, l’effort de compréhension de la vie sociale ou culturelle avec les thèmes récurrents de la féminité, de la foi, de l’émigration ou bien de l’histoire politique la plus récente; d’autre part, la volonté de provoquer des situations qui bouleversent ou actualisent un ordre auparavant immuable et, parfois, l’intervention du réalisateur dans le film à travers un « je » assumé (par la voix off ou par sa présence physique dans le champ) sans qu’il s’agisse pour autant d’un repli sur soi autobiographique. D’un point de vue plus général, ces films cherchent souvent à penser le lien entre cinéma, communauté, tradition et ordre social.
Ainsi, Waliden, l’enfant d’autrui (2009), d’Awa Traoré, questionne l’adoption traditionnelle au Mali, tout en mettant en lumière ce qui apparaît encore comme un non-dit : le sort des walidens, les enfants adoptés victimes de maltraitance. Dans Itchombi (2009), la réalisatrice Gentille Menguizani Assih revient au pays pour filmer la cérémonie traditionnelle de la circoncision. Pointant le défaut de prise en charge sanitaire, la réalisatrice dénonce le risque de contamination notamment par le virus du sida, tout en questionnant les villageois qui, à la fin du film, finissent par adopter des pratiques d’hygiène qu’ils appliquent à leur rituel traditionnel. Dans Pour le meilleur et pour l’oignon (2008), qui retrace l’histoire du mariage attendu et reporté de son cousin Amadou avec une fille du village, Sani Magori met en avant l’interdépendance des relations sociales et familiales avec l’économie du violet de Galmi, l’oignon nigérien, dont la récolte de l’année permet de couvrir l’ensemble des dépenses du mariage.
Si l’on en juge par ces films, la création documentaire opère aujourd’hui en Afrique comme un lieu de négociation, une transaction, et une passerelle « pour entrer et sortir de la modernité » : regard distancié de la réalité qui, tout en revisitant la tradition, l’interroge et la détourne ; lieu d’appropriation et non pas d’imitation ; lieu de contestation et non pas de contemplation ; espace de déploiement d’une modernité hybride, hétérogène, au sens que lui donne García Canclini (García Canclini, 1989). Nous empruntons, avec une certaine prudence, le concept d’« hybride » avancé par Canclini à propos de l’expérience de la modernité en Amérique latine pour mieux comprendre la démarche dans laquelle s’inscrivent ces objets documentaires. Cette notion restaure, d’après lui, l’appropriation/réappropriation comme un processus permanent, en train de se faire, et permet de dépasser les oppositions binaires global versus local, tradition versus modernité, authenticité versus altérité. Elle envisage des formes d’interpénétration réciproques.
La perspective des « dialogues hétérogènes » proposée par Appadurai (2005) est peut-être à même d’éclairer cette expérimentation du dialogue interculturel. Les modalités de ces dialogues relèvent d’une dimension clairement politique, celle de l’engagement des acteurs dans la défense du documentaire de création et, plus généralement, d’une expression artistique, mais dans un esprit ouvertement mutualiste. Ainsi, l’expression artistique et culturelle singulière trouve d’autant plus aisément sa place sur le marché européen et local qu’elle se façonne à partir de processus politiques qui favorisent les catégories de la différence, du respect, du mutualisme et de la coopération.
Nous proposons, dans cette optique, d’appréhender les cinémas d’Afrique à partir d’une dialectisation des dimensions artistique et économique. Si les espaces de promotion de ce cinéma posent la question de la création ou du projet artistique, c’est bien en raison de la place originale qu’ils occupent dans le système de la production culturelle. Il serait intéressant de tenter une analyse plus approfondie de ces objets cinématographiques, mais c’est un chantier de réflexion qui dépasse malheureusement le cadre de cette communication.

Notes

(1) Le principe de base du programme Africadoc consiste à développer simultanément l’ensemble des filières du secteur documentaire : la formation (à travers les résidences d’écriture – une quinzaine de résidences d’écriture documentaire ont été réalisées depuis 2002, dans des pays comme le Sénégal, le Mali, le Burkina – et le Master 2 documentaire de création de l’Université de Saint-Louis du Sénégal – né en 2007, en partenariat entre Africadoc, l’Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal et l’Université Stendhal Grenoble-), la production et la diffusion (à travers l’organisation des rencontres internationales LOUMA des producteurs indépendants, diffuseurs, institutions, potentiels financeurs des projets de films, aussi bien européens qu’africains), l’édition en DVD de la collection Lumière d’Afrique et l’ouverture d’un site Internet, DocnetAfrique, pour assurer la diffusion de ces films.

(2) Six résidences d’écriture de films documentaires sont organisées en moyenne chaque année, quatre dans les pays francophones et deux ou trois pour la partie lusophone. Saint-Louis du Sénégal a été traditionnellement le lieu d’accueil de la première session, les autres étant organisées de façon « nomade », à Yaounde, Conakry ou ailleurs. Chaque résidence accueille deux groupes de six stagiaires. Les projets issus des résidences sont présentés lors des rencontres professionnelles Tënk.

(3) En ce qui concerne l’Afrique, les télévisions qui participent sont les suivantes : l’ORTM (Office de la radiodiffusion Télévision du Mali) et la RTB (Radio Télévision du Burkina Faso), RTS (Radio Télévision Sénégalaise), ou alors Radio et Télévision Dounia (Niger).

(4) 9 producteurs et 5 diffuseurs européens ainsi que 14 producteurs et 5 diffuseurs africains composent ce réseau lors des Rencontres Tënk 2008.

(5) Transfrontalier, car il garde le sens poreux et flexible de la frontière : cette dernière « se déplace et peut être déplacée […], elle apparaît à la fois réelle et imaginaire », Gruzinski (1999 : 43).

(6) Des questions d’ordre esthétique émergent lorsque, dans la fabrication du film, interviennent des techniciens européens (qu’il s’agisse de chefs opérateurs ou de monteurs).

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Auteur

Amanda Rueda

.: Maître conférences, GRESEC (Groupe de Recherches sur les Enjeux de la Communication), ERA-608, Université Stendhal, Grenoble3.