Hybridisme en communication électorale. Médias, technologies et formes traditionnelles de campagnes
Résumé
Cet article analyse l’hybridisme de techniques de communication politique dans le processus électoral contemporain : l’utilisation de stratégies de médias d’impact élevé, centrées sur le marketing politique et sur les recours technologiques, et l’utilisation des médias traditionnels, de faible impact. Le référentiel théorique s’appuie sur les réflexions du domaine de la communication politique et de sa professionnalisation, prenant comme référence les résultats d’une étude globale sur le processus électoral dans plusieurs pays du monde, une coupure de presse sur les élections présidentielles en France, et des exemples brésiliens de campagnes avec des médias traditionnels et avancés.
Mots clés
Communication politique ; processus électoral ; médias de fort et faible impact en campagnes ; hybridisme.
Em português
Resumo
Este artigo se propõe a analisar a hibridização de técnicas de comunicação política no processo eleitoral contemporâneo : o uso de estratégias de mídias de alto impacto, centradas no marketing político e nos recursos tecnológicos para aproximar o eleitor do candidato, e a utilização da mídia tradicional, de baixo impacto, como forma de permanência da aproximação entre eleitor e candidato. O referencial teórico se apóia nas reflexões sobre o campo da comunicação política e sua profissionalização, tomando como referência os resultados de uma pesquisa global sobre o processo eleitoral em vários países do mundo, um recorte sobre as eleições presidenciais na França, e exemplos brasileiros de campanhas com mídias tradicionais e avançadas.
Palavras-chaves
Comunicação política ; processo eleitoral ; mídias de alto e baixo impacto em campanhas ; hibridização.
Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :
Matos Heloiza, « Hybridisme en communication électorale. Médias, technologies et formes traditionnelles de campagnes« , Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°07/2, 2006, p. à , consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2006/supplement-a/23-hybridisme-en-communication-electorale-medias-technologies-et-formes-traditionnelles-de-campagnes
Introduction
Le phénomène de médiatisation de la politique et son reflet dans la professionnalisation des campagnes électorales ont tendance à se répéter dans les études brésiliennes et internationales.
Les chercheurs de la communication politique ont réfléchi et accompagné la reconnaissance de l’importance des médias dans le processus électoral, en privilégiant l’analyse des médias d’impact élevé (l’horaire politique électoral à la télévision, la couverture des débats et du processus électoral dans les médias papiers, et, plus récemment, l’utilisation des technologies dans l’étude et l’interaction candidat-électeur dans les campagnes électorales), et laissant au second plan les processus communicatifs interpersonnels et les médias de faible impact (en campagnes locales ou régionales) – où la culture politique et/ou le développement technologique n’ont pas encore permis l’adoption de techniques plus avancées de communication électorale.
Cet article analyse la cohabitation entre les deux réalités : l’utilisation de techniques avancées de marketing politique, où la télévision est le support privilégié ; et la permanence des médias traditionnels, de faible impact, comme manutention de la stratégie de rapprochement physique et émotionnel entre électeur et candidat.
Il ne s’agit pas d’ignorer l’importance du support télévisif et d’autres techniques dans le processus électoral, mais de suggérer que les chercheurs et professionnels de la communication politique doivent aussi porter leur attention sur les régions et les nations où persistent les abordages traditionnels, ou sur la cohabitation entre ceux-ci et les modalités médiatiques dans les campagnes électorales. Ou ils reconnaissent l’hégémonie télévisive et agissent dans le sens d’augmenter leur influence dans le processus électoral, ou ils recherchent des alternatives pour penser la communication électorale dans les petites et moyennes localités.
Au Brésil, quelques études sur les élections municipales ont eu comme sujet principal le colonelisme, le clientélisme et le populisme. Certains autres abordent la permanence de stratégies traditionnelles, même dans les capitales, et, plus récemment, analysent l’importance de la télévision comme support régional, aussi bien que l’utilisation de stratégies de faible impact dans le processus électoral de petites et moyennes villes de l’intérieur de São Paulo.
L’article propose de mélanger une vision globale du phénomène dans plusieurs pays du monde, basée sur des études internationales sur la professionnalisation de la politique, et une vision plus limitée, selon les caractéristiques soulignées par deux études sur des élections locales dans deux municipalités de l’État de São Paulo.
La perspective du processus électoral français a été inclue a posteriori, par le fait que Plasser et Plasser (2002) n’aient pas particularisé le cas français. L’analyse inclut, aussi, quelques observations sur les élections présidentielles de 1995, et sur la professionnalisation de la politique.
Le référentiel théorique s’appuie sur les réflexions touchant à la professionnalisation de la politique et sur les résultats d’une étude globale sur le degré d’influence américaine et les particularités des stratégies de marketing-communication, politiques utilisées dans quarante trois pays de diverses régions d’Europe, d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine.
L’analyse de données d’études internationales (France inclue), plus que comparative entre ce qu’il se passe au Brésil et dans d’autres régions aux caractéristiques semblables, a pour objectif de repenser le concept et les stratégies de communication politique (au delá de ce que propose généralement le marketing) et leur possible application dans les élections municipales du Brésil -qui compte 5.651 municipalités et où la TV et les médias de fort impact ne sont pas toujours utilisés dans les élections locales.
Communication politique et médias
Canel (1999) définit la communication politique comme « une activité par laquelle s’adoptent et s’appliquent des décisions pour et dans la communauté ». La communication politique est fondamentale pour l’organisation de la communauté : dans le sens d’orienter les membres vers la définition d’objectifs et l’identification des problèmes, vers la recherche de consensus et la perception des valeurs et traditions, permettant le choix entre les différentes options qui lui sont offertes.
Selon Blumler (1990), « les médias sont considérés dans et non au-dessus des forces du pouvoir, assujettis à d’autres pouvoirs. Pour déterminer quelles versions de la réalité sont acceptables dans une base plus ample, pour modeler les valeurs de la société ». L’auteur conclut que le processus de communication politique moderne pourrait être comparé à la force presque irrésistible d’un aimant, obligeant tous ceux qui entrent dans son champ d’action à s’adapter. C’est à dire, le processus n’altère pas seulement la réception des messages, les thèmes et les termes utilisés dans le choc politique, mais est capable d’influencer et de modifier les perspectives et choix des citoyens.
Blumler cartographie les implications du nouveau modèle pour l’étude de la communication politique, et suggère quelques domaines d’étude à examiner : processus de génération d’informations et ses résultats politiques ; théories qui guident les actions des professionnels de la communication politique ; analyse comparée de campagnes suivant la logique du parti et la logique des médias ; et, encore, une recommandation qui touche à la préoccupation de cet article, la croissante importance de la politique locale (suggérant que, au côté d’études de campagnes nationales et majoritaires, s’étendent radios et télévisions régionales-locales comme canaux de communication politique).
J’évoque Gosselin (1995) pour proposer un abordage où la communication politique locale-régionale trouve un espace, au côté des études du support télévisif et d’impact élevé, des études électorales et des technologies de l’information-communication en campagnes électorales contemporaines.
Gosselin propose deux axes bipolaires pour construire la cartographie théorique et empirique de la communication politique : un axe horizontal, qui va de l’action à la réception ; et un axe vertical, allant des arènes aux territoires.
Le territoire se rapporte à l’espace géographique ou sectoriel où se réalise la communication politique : de caractère local-régional, national ou international, ou des institutions, des organisations paritaires et groupes de pression. L’arène concerne les formes spécifiques qui caractérisent les messages de communication politique : signaux, règles et stratégies que définissent les situations d’interaction entre les acteurs politiques et les médias.
L’axe d’action et de réception s’appuie sur les typologies proposées par Weber, Goffmann et Mead. La Communication politique peut être représentée comme un domaine où se croisent cinq manières d’agir : le téléologique (intentions et stratégies visant un objectif, comme un vote) ; une action axiologique (composée de valeurs, normes et éthique de conviction ; l’acte émotionnel (visant à persuader pour altérer la conduite du récepteur) ; actions routinières (pour optimiser la perception des messages planifiés) ; une action dramatique. Ainsi, l’action politique combine des éléments rationnels avec des appels émotionnels ; et aussi l’action communicative, qui a pour objectif le rapprochement d’univers communs avec la finalité d’agir politiquement.
Par delà, je considère que la communication politique a aussi besoin d’être mise en relief selon ses dimensions.
La dimension dialogique défend la transparence des mécanismes politiques de demande et de décision, guidée par une vision rationnelle de l’argumentation, visant à la participation politique. La tendance peut être observée dans les partis où est remarquée la présence marquante de leaders hiérarchiques et de militants. Au Brésil, le Parti des Travailleurs (PT) a maintenu cette proposition, avec un caractère idéologique jusqu’aux élections municipales de 2002.
La dimension propagande politique a pour objectif la persuasion et l’adhésion au parti, au leader, par le biais de la recherche de l’unité et du culte au chef. Le parti nazi-fasciste, à partir de son ministre de l’information et de ses leaders politiques charismatiques, ont utilisé et perfectionné de telles techniques pour la conquête et la manutention du pouvoir. Les techniques de propagande politique (spécialement la négative, en franche progression ces dernières années) se maintiennent encore comme des éléments de base dans les campagnes électorales.
La dimension marketing politique, qui se divise en électorale et permanente, est l’instrument privilégié des marchés politiques dans le monde entier, et certainement à tous les niveaux et sphères du pouvoir.
La dimension communication politique a pour objectif d’influencer et de contrôler les perceptions de l’opinion publique sur des thèmes et des évènements politiques devenus publiques dans les médias. La persuasion est présente indépendamment du processus électoral, ce qui justifie l’utilisation permanente du marketing et la manutention de professionnels de la communication pour suivre, via études d’opinion, la performance des gouvernants exerçant le pouvoir ou des candidats qui veulent l’atteindre.
Cette dernière dimension prétend réunir les antérieures, dans une synthèse de toutes les techniques et stratégies pour l’atteinte et la manutention du pouvoir, agissant avec les acteurs du processus politique : les médias, les journalistes, les électeurs, les leaders, les institutions de nature politique ou non, enfin, tous les segments qui décident et influent dans les décisions politiques du pays.
Hybridisme dans la communication électorale
Une étude réalisée dans 43 pays de tous les continents, avec des consultants politiques des nations respectives, a donné quelques résultats sur les caractéristiques valorisées dans les stratégies et les techniques de campagne, et, aussi, des indicateurs d’hybridisme dans les actions de communication électorale (Plasser, 2002).
Les considérations qui nous intéressent sont : la reconnaissance de l’hybridisme dans les pratiques de campagne électorale, où les stratégies sont centralisées dans les médias, spécialement la télévision. Je présente les tendances constatées chez Plasser.
La première est la concentration des campagnes dans les médias électroniques : « Non seulement 72% des américains citent la télévision comme source principale d’informations de campagne, comme aussi 75% des russes et 82% des brésiliens » (Plasser, 2002, p. 263).
Une seconde tendance a pour sujet la participation croissante d’agences de publicité, où des spécialistes externes et internes de marketing politique s’engagent dans les stratégies de planification de la campagne.
Autre caractéristique est l’utilisation intensive d’études électorales pour les décisions stratégiques de la campagne ; fait observé dans des pays distincts, comme Brésil, États-Unis, Russie, Italie et Afrique du Sud.
La personnalisation des campagnes gagne des aspects différenciés dans chaque région. Mughan (2000) met en évidence un éloignement des campagnes basées sur des partis et un rapprochement vers des compétitions entre des personnalités fabriquées par les médias.
Les débats électoraux télévisifs se présentent comme étant le sommet de la campagne. Si d’un côté beaucoup de disputes sont décidées durant le débat, quelques évidences dans l’étude montrent que la défaite de beaucoup de candidats se doit exactement au fait d’être comparu au débat (comme Kohl en 1998 ; Major en 1997) ; ou encore le refus d’accepter le débat (comme Berlusconi en 2001 ; Putin en 2000). Au Brésil, le candidat Lula en 2002, craignant de perdre les électeurs déjà conquis, a aussi refusé de comparaître au débat télévisif du deuxième tour. De nouveau, en 2006, Lula s’est abstenu de participer au débat.
Une autre tendance est le surgissement de partis virtuels, comme l’Unité, parti pro-Kremlin, planifié par des politiciens du gouvernement russe et des consultants politiques. La même chose avec le parti Forza Itália, créé par Berlusconi, en 1993, trois mois avant l’élection. Au Brésil, le PRN, parti de Collor de Mello.
L’étude met en évidence l’augmentation de la négativité dans les campagnes. Les campagnes ne se limitent pas au ton de la publicité politique et l’intensité des ataques ne se limite pas au niveau personnel des rivaux politiques, sont aussi créés de fausses études et des sites de candidats -qui exposent les candidats à tous types d’offenses et accusations anonymes.
Ces tendances ne doivent pas être interprétées, selon l’auteur, comme une standardisation des campagnes électorales. N’admettant pas l’insinuation d’un style global de campagne, basé sur des tendances similaires, Plasser opte pour la description d’un standard global comme hybridisme de pratiques de campagne politique, centrés dans les médias.
Norris (apud Plasser, 2002) définit hybridisme commeun complément spécifique, dans un pays déterminé, de pratiques de campagne traditionnelles. Les styles hybrides mélangent des aspects spéciaux de pratiques électorales centrées sur les médias avec des styles de la culture politique et de la région observée (Blumler et Gurevitch, 2001).
Des exemples d’hybridisme sont rencontrés en Corée, à Taiwan, au Japon, au Sud de l’Afrique et en Inde, combinant pratiques modernes centrées sur les médias et stratégies de mobilisation basées sur les réseaux de sympathisants et activistes, appelés à l’intérieur du Brésil de « caporaux électoraux », ayant pour objectif de maintenir le parti et le candidat en contact direct avec les électeurs.
En Amérique Latine survivent encore des formes traditionnelles de mobilisation, avec des réseaux de sympathisants et des contacts directs avec l’électorat, et l’utilisation de médias de faible impact. Au Brésil, les restrictions imposées par la législation électorale qui empêchent l’utilisation d’enregistrements externes et d’images graphiques, poussent les candidats aux élections présidentielles de 2006 au contact direct avec les électeurs.
Une variété de styles hybrides, cohabitant avec des formes modernes de campagne, ont aussi été identifiés en Angleterre, Allemagne, France, Suède, Grèce, Italie et Afrique du Sud, ainsi qu’en Inde -qui oriente ses préférences électorales autour des castes.
Il s’agit encore d’une hypothèse à être confirmée, mais l’hybridisme peut être la conséquence de la débilité des marchés électoraux, de la fragilité des rapports entre candidats et électeurs, de la présence de styles plus incisifs dans les colonnes politiques (campagnes négatives), et aussi de la progressive fragmentation de la sphère publique politique.
Les avec et les sans TV : deux exemples brésiliens
Élections à Guarulhos
Dans l’étude de Guarulhos, l’auteur rappelle que la télévision n’est pas seulement absente dans les campagnes électorales des municipalités de moins de 10 milles habitants.
Dans la propre région de São Paulo, des 39 villes qui la composent, seulement la Capitale a de la propagande électorale à la TV dirigée à la municipalité. Les autres 38 villes reçoivent la programmation de TV de la Capitale. C’est à dire que des 12 millions d’électeurs de la région économiquement la plus développée du pays, 40% reçoivent, dans les télévisions de leurs maisons, de la propagande électorale qui ne les regardent pas (Pereira, 2002, p. 21).
L’auteur se rapporte spécifiquement à la situation de la capitale de l’état, qui compte sur un pupitre électronique pour élire le préfet et les « vereadores » depuis l’élection municipale de 1985, alors que plusieurs municipalités de la région métropolitaine ne disposent pas du même recours. Ainsi, les électeurs du ABCD (Santo André, São Bernardo, São Caetano et Diadema), Guarulhos et Osasco regardent à la TV la propagande électorale de la Capitale, mais n’utilisent pas le réseau dans le processus politique local.
Dans le cas de Guarulhos, l’absence de TV provoque une série de défis pour les candidats et partis qui disputent les élections dans l’environnement des « sans-TV » : la ville est localisée à proximité de l’aéroport international de Cumbica, avec près de 1 millions d’habitants et 600 milles électeurs, et une extension territoriale de 341 km carré. Le plus grande défi est de trouver une forme d’atteindre l’électorat dans une surface aussi étendue et diversifiée, sans disposer de moyens électroniques de plus fort impact.
Les professionnels de marketing adoptent l’expression de non-médias ou médias de faible impact pour les actions de communication qui nous assaillissent se mélangeant aux canaux de masse institués : TV, radio, outdoor et grande presse.
Sans TV, la proposition pour atteindre l’électeur passe par des supports graphiques (affiches, bulletins de vote, santinhos (1), brochures et journaux), et par des carreatas (2) et des visites en personne. Cette dernière, encore utilisée, même si à une plus petite échelle, dans les campagnes majoritaires brésiliennes.
Dans l’évaluation des formes de communication traditionnelles et efficaces utilisées durant la campagne de Guarulhos, l’auteur met en évidence, entre autres : les journaux imprimés, les publications thématiques distribuées dans différentes communautés, les réunions avec les formateurs d’opinion dans les quartiers de la ville.
Pour la campagne électorale négative, les professionnels de la campagne ont utilisé les pamphlets apocryphes, les comices et les programmes de radio comme principales formes d’attaques aux adversaires.
Malgré l’omniprésence des médias électroniques et de l’apparente substitution des discours écrits par le discours imagétique, le texte écrit est encore un outil puissant et peut couvrir des nécessités de communication.
L’étude a aussi constaté qu’un candidat peut devenir connu dans une ville de plus d’un million d’habitants en utilisant des médias non-électroniques. Utilisant un ensemble de médias, la campagne du PT à Guarulhos a réussi à vaincre les lacunes d’information qu’il y avait sur son candidat au début de la campagne. Les détails sur la biographie, le profil et les propositions du candidat ont été transmis principalement à travers du journal imprimé « Guarulhos Decide! ».
La victoire du candidat du PT à Guarulhos, Eloi Pietá, a représenté la fin d’un cycle inicié en 1976, et le résultat obtenu sur l’adversaire a indiqué, malgré le fait que les électeurs et les professionnels regrettent l’absence de la TV durant la campagne, qu’il a été possible de sensibiliser et de convaincre les électeurs de la nécessité de changement politique dans la ville, avec des actions de communication constituées par le contact direct et informel.
Élections à Batatais
Ce qui attire l’attention dans les élections de 2000, à Batatais, est l’utilisation de la télévision dans la campagne électorale de la municipalité et les indices d’hybridisme, avec la permanence d’éléments de la culture régionale dans les contenus du HGPE (Horaire Gratuit Politique Électoral), se différenciant des caractéristiques du processus électoral de Guarulhos.
Jardim (2002) a cherché à vérifier si le processus de modernisation des campagnes électorales était en train de se passer dans des municipalités de l’État de São Paulo.
Le choix de la ville de Batatais, avec 50 milles habitants et 33.751 électeurs, a été guidé par trois critères qui garantissent la représentativité de l’échantillon : premièrement, le fait que la municipalité ait eu accès au HGPE durant les élections municipales de 2002 ; deuxièmement, le fait que la municipalité est siège d’un réémetteur éducatif mixte, ce qui possibilité la transmission du programme électoral ; troisièmement, après la comparaison avec d’autres localités de l’état de São Paulo, le fait que Batatais est l’unique municipalité (entre 11 qui ont des émetteurs locaux) qui a véhiculé la propagande électorale à la TV de manière continue aux 3 dernières élections municipales : 1992, 1996 et 2000. Ce dernier aspect indiquait que l’électeur de la ville était déjà passé par un processus d’apprentissage en ce qui concerne l’utilisation de la TV.
Les résultats de l’étude soulignent quelques tendances. Si la centralité télévisive est considérée comme un des principaux indicateurs du processus de modernisation des campagnes dans le processus électoral, il a été constaté un indice de 90% de centralité dans la programmation locale. Le débat à la télévision entre les deux candidats a aussi mobilisé 40% des personnes questionnées, et 80% affirment l’importance du débat pour la prise de décision du vote. Durant l’évaluation du débat, le candidat donné comme vainqueur par 63% des personnes interrogées a effectivement été victorieux des élections (Jardim, 2002, p. 234).
L’auteur a aussi montré d’autres facteurs traditionnels qui ont été important pour la décision du vote : les opinions sur le programme de gouvernement présenté par le candidat, l’importance donnée au vice-préfet, le passé du candidat. La fréquence des discussions avec amis et membres de famille suggère aussi, selon l’auteur, que les rapports interpersonnels ont de l’influence dans la prise de décision politique.
Conclusion
Les résultats des deux études dans les municipalités de São Paulo montrent des caractéristiques d’hybridisme dans les campagnes électorales municipales, c’est à dire, la cohabitation d’aspects de la campagne moderne avec des facteurs traditionnels – rapprochant cette tendance avec ce qui a été observé dans l’étude internationale réalisée dans 43 pays.
Du point de vue théorique, il est observé dans les deux processus électoraux des signaux des dimensions mises en évidence dans l’article, mettant en relief la propagande et le marketing politique, et la pertinence du croisement entre arènes et territoires et les différentes modalités d’actions qui configurent la prise de décision de l’électeur contemporain.
L’hybridisme constatée dans l’étude internationale et dans les études des deux municipalités de São Paulo suggère, encore, la validité des rapports informels dans le processus de décision du vote désignés par Lazarsfeld, Berelson et Gaudet.
Des évidences d’un retour de la communication plus directe et informelle peuvent être perçues en France et au Brésil durant les derniers processus électoraux, d’une manière intéressante comme faisant partie de la professionnalisation de la politique.
Si, en 2002, en France, le choix de Chirac de contact avec le public semble avoir été décisif, le soin attribué à la professionnalisation de la campagne (allié à d’autres facteurs, comme la désillusion de l’électeur et l’occupation de l’espace par l’extrême droite, avec Le Pen) indique qu’il a manqué, de la part de Jospin, une plus grande malléabilité pour le contact direct avec l’électeur, et la capacité de réfléchir et, même, de refuser des stratégies de campagne plus tournées vers le marketing que vers la politique.
En ce qui concerne le Brésil, la campagne de 2006 pour la Présidence de la République est en train de souffrir des changements sensibles dans différents aspects : du point de vue légal, les restrictions en ce qui concerne l’exposition durant l’horaire politique électoral ont augmenté, obligeant les candidats à intensifier le contact direct avec l’électeur – ce qui est amplement couvert par les médias.
Le candidat avec l’indice le plus élevé d’intentions de votes, Lula da Silva, a parié sur ses contacts personnels avec les électeurs dans de fréquents voyages au travers du pays, et, surtout, a utilisé la stratégie de se montrer un homme simple et proche des classes populaires. Le langage que le candidat utilise, indépendamment du support médiatique utilisé, est toujours marqué par un raisonnement simple, émotionnel et incisif.
La connaissance plus approfondie des processus électoraux des 5.561 municipalités brésiliennes, dans lesquelles sont prévues des élections en 2008, pourra, certainement, enrichir l’étude de la communication politique. Ceci sera possible par le biais d’une étude plus ample du rayonnement des médias et des technologies dans les campagnes, et par l’observation de l’hybridisme des styles des campagnes.
Finalement, l’article me pousse à analyser, dans de futures études, la compréhension des tendances du processus électoral et de la démocratie dans les collectivités locales en France.
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Auteur
Heloiza Matos
.: Professeur du programme de master de la Cásper Líbero