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Le parcours de la presse congolaise et le rôle de l’oralité comme relais de l’information en Afrique

21 Juin, 2007

Résumé

Dans cet article, il sera question de retracer brièvement l’itinéraire de la presse congolaise depuis la colonisation, de décrire les conditions de travail des journalistes et d’établir les rapports qui existent entre presse et politique. Il s’agit aussi de s’interroger sur le processus de réception des messages de la presse par une population en grande partie analphabète. En d’autres termes, quelle est l’intégration de la presse dans le tissu social des cultures de l’oralité ? Appliquons-nous ici à présenter quatre jalons susceptibles de poser quelques bases pour une analyse critique de la presse en RD Congo.

Pour citer cet article, utiliser la référence suivante :

Mubangi Bet’ukany Gilbert, «Le parcours de la presse congolaise et le rôle de l’oralité comme relais de l’information en Afrique», Les Enjeux de l’Information et de la Communication, n°08/1, , p. à , consulté le , [en ligne] URL : https://lesenjeux.univ-grenoble-alpes.fr/2007/varia/05-parcours-de-presse-congolaise-role-de-loralite-relais-de-linformation-afrique

Quelques mots d’histoire

En RD Congo, le pluralisme et l’indépendance de la presse ont réellement existé pendant la colonisation. Eclipsée avec l’arrivée au pouvoir de Mobutu, c’est seulement vers la fin de son règne que la presse congolaise a amorcé un chemin difficile de reconstruction sur le plan du fonctionnement et de sa réhabilitation auprès du public. Depuis 1990, la presse écrite en RDC est en plein renouveau. En quelques années, le nombre de journaux a explosé. Mais sur les 230 titres recensés, une dizaine seulement paraissent de façon régulière. En effet, la presse écrite rencontre encore de graves problèmes de survie dans un contexte marqué par les pressions politiques, l’analphabétisme, et la crise économique. L’histoire de la presse au Congo, depuis la colonisation est celle d’une information réservée à une petite minorité de la population : les communautés européennes et les évolués pendant la colonisation, puis les intellectuels après l’indépendance du pays. Pour la grande majorité de la population analphabète vivant à la campagne, l’oralité et la radio restent les seuls moyens d’information. La question de l’analphabétisme en appelle une autre, celle de la langue de la presse. Le développement de la presse africaine ne doit-il pas passer par une réappropriation des langues locales ? Ici comme dans d’autres situations touchant l’Afrique, une prospective s’impose. Comme le dirait Hatem, il nous faut apprendre à regarder le monde avec des lunettes à double foyer. Parvenir à saisir d’un seul coup d’œil l’instant et la durée, l’avenir à long terme et l’action présente. Difficile de ne pas troubler ainsi sa vision. Tout l’art du prospectiviste repose dans la pratique de cette double vue (Hatem, 1996, p. 5). Réfléchir sur la presse au Congo aujourd’hui, c’est aussi se pencher sur son itinéraire lié à l’histoire politique en dents de scie du pays.

Au Congo belge (1880-1960) : une presse des communautés

Les débuts de la presse au Congo belge se situent autour des années 1900. En 1936 on répertoriait soixante-douze périodiques, non compris les quotidiens. La colonie accordait une importance capitale à son image et à celle de la Belgique à l’étranger. L’Office de l’information et des relations publiques pour le Congo et le Ruanda-Urundi organisait aux frais de la colonie, des voyages et séjours pour des journalistes recommandés par  les Ambassades et Consulats belges à l’étranger. En échange, des reportages favorables à l’œuvre « civilisatrice » de la Belgique étaient écrits dans de grands journaux et agences de presse étrangers. Cette politique valait aussi pour les journalistes belges.

La presse coloniale est l’œuvre d’hommes et de femmes qui « laissant derrière eux une Europe éventrée par cinq ans de guerre, avaient largué le passé pour se lancer à l’assaut d’une autre vie : repartir à zéro, c’est tonique à trente ans, quand on dispose d’autant de volonté que d’enthousiasme » (Arnold, Marie-Madeleine, 1985, p. 3). Ce n’était pas des fonctionnaires mais des entrepreneurs. Cependant, cette presse est à l’image de la politique coloniale. Dès le départ, elle est née de la volonté de quelques uns de répondre aux nécessités d’information ou de défense des groupes européens et  non pour des raisons de politique indigène (Van Bol, 1959, p. 84). Le public de cette presse étant la communauté blanche, c’est au Katanga, où vivait une population européenne internationale, qu’elle s’est beaucoup développée. Dans cette riche province, certains journaux paraissaient même en anglais.  L’importance qu’a eue la presse au Congo belge, est liée au fait que le Congo devenait au fil des années, une sorte de colonie de peuplement. Les Belges établis au Congo ont fait souche allant jusqu’à afficher une certaine autonomie vis-à-vis de la métropole. C’est dans ce contexte de business et de politique que la presse coloniale a construit sa santé économique et son indépendance.  Mais, malgré une politique éducative coloniale exemplaire, la majorité de la population congolaise est restée analphabète. La parution et la consommation des journaux étaient une affaire des mindele (les Blancs). Seule la presse « missionnaire », publiée en langues africaines, était entièrement destinée à la population locale. Comme le note Charles François (ancien collaborateur à « La Presse Africaine » un hebdomadaire paraissant au Kivu (RDC) dans les années 50), pour les colonisateurs belges, « les Congolais étaient l’objet de ce que feu le Président Nixon appelait benevolent neglect. On les supposait raisonnablement contents de leur sort qui, certainement, s’améliorait peu à peu sur le plan matériel. Pour le reste, les coloniaux, belges et étrangers, s’occupaient de leurs affaires administratives, industrielles ou commerciales et, nouveaux Romains, s’imaginaient disposer de cinq siècles pour transmettre les secrets et bénéfices de la « vraie civilisation » aux nouveaux « Gaulois ». (…) Pendant ce temps, se formait rapidement une nouvelle classe congolaise. Comme n’importe quelle génération de jeunes, livrés à l’inattention de parents très occupés et distraits, ils en étaient réduits à s’éduquer eux-mêmes et entre eux. La presse, en particulier, les a ignorés jusqu’aux premiers grondements de l’explosion anti-coloniale. » (Charles François, 1995, p. 2).

Après la deuxième guerre mondiale, les choses vont changer. On assiste à la naissance de journaux tenus et écrits par des Congolais. La guerre a engendré une prise de conscience sur certaines idées telles que : identité, territoire, lutte, souveraineté, liberté. Ce contexte d’après guerre poussera les autorités politiques coloniales à légiférer sur la presse. Le décret du 6 août 1922 du Gouverneur général du Congo, pris en application de l’ordonnance-loi du 5 mars 1922, relative à la presse, limite très fort la liberté d’expression et fait du Congo un ghetto sur le plan de l’information. Craignant que la presse étrangère n’incite les populations congolaises à se rebeller contre le système colonial, les autorités coloniales belges vont soumettre son introduction dans le pays à une législation contraignante. L’article 4 du décret de 1922 est explicite: seront punies des mêmes peines l’introduction, la mise en vente, la distribution ou l’exposition d’écrits, dessins, gravures, peintures, emblèmes ou images susceptibles de porter atteinte au respect dû à l’autorité belge (Bulletin Officiel du Congo Belge (1922), n° 8, p.788-790). Suite à ce décret, les rapports entre les Africains et les autorités politiques coloniales vont se détériorer. Les journaux tenus par les Congolais n’acceptent plus les règles du jeu dictées par la législation coloniale. La presse des Congolais va se radicaliser en soutenant les revendications des populations indigènes, la prise de conscience  du fait colonial et la nécessité de lutter pour obtenir l’indépendance.

A l’approche de 1960, les événements politiques se bousculent et se précipitent. Les journaux édités par les Congolais deviennent de plus en plus militants, une véritable arme politique qui tire à boulets rouges sur l’administration coloniale et la Belgique. Dans ce contexte, les politiciens congolais vont jouer un rôle important dans la presse. En effet, Lumumba l’a compris très tôt, il devint correspondant de presse de La Croix du Congo et de La Voix du Congolais publiées à Léopoldville, la capitale. Il entreprit d’écrire aussi pour le compte de L’Afrique et Le Monde édité à Bruxelles; en 1955 il devint l’éditeur responsable de L’Echo Postal, organe trimestriel de l’Amicale des Postiers. En 1959-1960, il dota son parti politique de trois organes de combat : Indépendance (Léopoldville), Uhuru (Stanleyville), Tabalayi  (Luluabourg). En 1947, Justin Bomboko créa Mbandaka; Joseph Ileo fonda Conscience africaine en 1953. A son retour d’exil au Ghana, Patrice Lumumba lança Indépendance en 1958. Quant à Mobutu, le colonel Marlière de la Force publique lui confia la rédaction du journal de l’armée. Plus tard, on le retrouvera « à L’Avenir colonial belge, qui deviendra L’Avenir, où il écrit dans les pages consacrées aux actualités africaines » (Mutamba, 1993, p. 141). Pour toutes ces raisons, la presse fera l’objet d’une surveillance toute particulière de la part de l’autorité coloniale. Le climat devint de plus en plus tendu à l’approche de l’indépendance. La majorité des Belges détenteurs de journaux au Congo décidèrent de retourner en Belgique après avoir vendu leurs titres. Ainsi, l’aventure belge au Congo se solda par le sauve-qui-peut généralisé de 1960. Mais certains d’entre eux, comme l’équipe de La Presse africaine, de Max et Marie-Madeleine Arnold, et Georges Hensenne du Stanleyvillois préférèrent rester quelque temps encore après l’indépendance avant de se résoudre à partir eux aussi. Marie-Madeleine Arnold résume bien le sentiment qui les animait : « nous avions choisi notre place au cimetière fleuri qui surplombe le lac. Nous n’y reposerons jamais, mais quelque chose de nous-mêmes est resté là : un battement de cœur, un goût de miel, un goût de sel. » (Arnold, Marie-Madeleine, 1985, p. 3).

Pendant la Ière République (1960-1965) : des lendemains qui déchantent

Les cinq premières années d’indépendance du Congo sont connues pour leur bégaiement généralisé dû à l’impréparation et à l’amateurisme de ses dirigeants. Et comme on pouvait s’y attendre, il en résulta une grande confusion sur le plan politique, économique et social. La presse congolaise militante et nationaliste, née à la suite des événements politiques de 1959, déterminée et unie face à l’autorité coloniale, se retrouva fragilisée, divisée, tribalisée, politisée à outrance. A l’aube de l’indépendance, la jeune presse est ainsi jetée en pâture aux plus offrants. Les politiciens et certains groupes de pression s’en emparèrent pour leur propagande. Chaque groupement politique avait son ou ses titres de presse: Notre Congo pour l’Alliance des Bakongo (Abako), Le Congo Libre pour le Parti de l’Interfédérale, Solidarité Africaine pour le Parti Socialiste Africain (PSA), Emancipation pour le Parti du Peuple-Action-Socialiste et L’Indépendance pour le Mouvement National Congolais (MNC), etc. Cette situation engendra des mesures arbitraires de l’autorité politique : favoritisme pour certains, interdictions et arrestations pour d’autres. Redoutant le pouvoir de la presse, le tout nouveau pouvoir congolais a réagi de la même manière que l’autorité coloniale. L’Arrêté ministériel de Patrice Lumumba du 11 août 1960 relatif aux mesures exceptionnelles, en cas de troubles graves, en matière de liberté de la presse n’est rien d’autre qu’une copie conforme du Décret du Gouverneur Général du Congo du 6 août 1922, qu’il a décrié en son temps. Les Congolais commencèrent à se demander s’ils avaient bien fait de renvoyer Tintin en Belgique.

Au Zaïre de Mobutu (1965-1990): circulez, il n’y a rien à voir …

Pendant une grande partie du règne de Mobutu, toute critique de la personne du président et des barons du régime, des institutions et du parti, fut interdite. L’article 53 du Code pénal prévoyait que les déclarations du Président ne pouvaient donner lieu à aucun débat. Plusieurs dispositions du code pénal limitaient la liberté de la presse. Selon l’article 150, toute personne qui contribuait  en connaissance de cause à la publication ou distribution de matériaux écrits qui n’indiquaient pas le nom et la résidence de l’auteur ou de l’imprimeur, était passible d’une période d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux mois et d’une amende conséquente (The International Centre on Censorship (1990), p. 5).  En vertu donc de ces dispositions du code pénal, le Ministère de l’Information et les Services de Sécurité ont exercé une censure permanente et implacable sur la presse. Celle-ci, entièrement subventionnée par l’Etat, devait refléter la pensée unique de Mobutu. En 1972, dans le souci de mieux censurer la presse l’Etat congolais fusionna certains titres de presse pour les confier arbitrairement à quelques  éditeurs choisis selon leur militantisme et leur fidélité au « Guide de la Révolution ». Pendant toute cette période, les « Une » des journaux  se ressemblent : la photo du Président Mobutu est devenue omniprésente. L’essentiel de l’information dans la presse tournait autour de ses activités, celles de ses ministres et du Parti unique (MPR). L’Azap (Agence Zaïre Presse), la seule agence d’information du pays dépendait à la fois du Ministère de l’Information et de la Présidence de la République. Devenue une véritable caisse de résonance des idées et des opinions du parti et de ses sbires, la presse libre cessa d’exister au Zaïre. Il fallut attendre 1981 pour voir une petite avancée sur le plan de la liberté de la presse. En effet, l’ordonnance loi du 2 avril 1981 introduisait une libéralisation de la presse, une simple déclaration au ministère suffisait désormais pour la publication; le directeur de la publication était civilement et pénalement responsable. Il faut aussi noter qu’à cause de ce climat délétère, le nombre des publications dans le pays diminua sensiblement pendant cette période.  Vingt-cinq ans après, à la faveur de l’écroulement du mur de Berlin, la presse congolaise crut renaître de ses cendres. Cependant les conditions de cette fausse renaissance ne furent pas à son honneur, car ce n’était pas le fruit d’une résistance, ni une victoire acquise à la suite d’un combat, mais une sorte de cadeau du « Guide ». Ironie du sort, celui-là même qui avait mis la presse au pas pendant plus de 25 ans, décréta dans son discours du 24 avril 1990 qu’elle était désormais libre.

Mobutu en sursis (après 1990) : le « sacre » de la caricature

Le début des années 90 souleva un vent de changement et suscita beaucoup d’espoir en RDC et dans le reste de l’Afrique. En effet, avec l’écroulement du bloc de l’Est, les pressions, tant internationales que nationales, se firent pressantes pour obliger les dictatures africaines à faire de sérieuses concessions politiques à défaut de partir. Dans son discours du 24 avril 1990, le Président Mobutu décida de donner une nouvelle orientation à la vie politique du Zaïre dans le sens d’une ouverture démocratique. Il annonça toute une série de mesures pour lancer le pays sur la voie du changement démocratique : pluralisme politique, liberté d’opinion, liberté de port vestimentaire, liberté de la presse et d’expression, etc. Dans la foulée, plusieurs titres de presse sont nés et se sont constitués en deux blocs : la presse dite d’opposition, d’une part, et celle proche du pouvoir, de l’autre. Les uns et les autres adoptèrent un ton polémique, preuve de leur volonté d’indépendance et surtout signe de  différence d’avec la presse de la deuxième République considérée comme propagandiste et servile. L’ambiance de fin de règne des années 90 a donné à la presse congolaise ses lettres de noblesse. C’était le temps du bilan pour le régime et la presse a fait ses choux gras. Profitant du discrédit dont étaient frappées la radio et la télévision nationale, la presse écrite a déployé toute son insolence en réglant ses comptes au monde politique. Une expression journalistique, alliant information et divertissement, caractérise cette période : la caricature. Elle excella dans la mise en scène des acteurs politiques congolais. Ce genre fut plébiscité par un public à majorité analphabète. Cependant, la jeune presse « libre » était confrontée aux mêmes travers. Aussi partisane et dépendante financièrement du monde politique, elle n’était pas si différente de celle de la deuxième République qu’elle décriait.

Le temps des Kabila (Père et Fils) : le retour du Congo

Laurent Désiré Kabila prend le pouvoir en 1997. Le Zaïre redevient la République Démocratique du Congo. Sur le plan des libertés individuelles et d’expression, il n’y eut pas de changement. Au contraire, il y eut même régression car Laurent Désiré Kabila  interdit les partis politiques. En s’arrogeant tous les pouvoirs, il anéantit les quelques acquis démocratiques grappillés à la dictature pendant la longue transition politique congolaise. La presse kinoise dénonça une dérive totalitaire dangereuse et multiplia les  mises en garde contre les velléités de retour au parti unique. La réponse du pouvoir ne se fit pas attendre. Prenant prétexte de la guerre et au nom de la situation d’exception engendrée par celle-ci, le régime de Laurent Désiré Kabila se caractérisa par la restriction des libertés. Les entraves à la libre expression et à la circulation de l’information,  par la censure et les saisies, se multiplièrent. En renouant avec les intimidations, les arrestations et les emprisonnements des journalistes pour atteinte à la sûreté de l’Etat et collusion avec les forces ennemies, on en est revenu aux pires années du mobutisme. Cette période est aussi caractérisée par l’apparition d’une certaine presse de la haine anti-Rwandais. C’est dans ce contexte de persécution et d’atteinte à la liberté d’expression, que Jed (Journalistes en Danger) a vu le jour en 1998.

Après la mort du Père, le Fils lui succéda. Dans son discours d’investiture, Joseph Kabila a promis, entre autres, de garantir toutes les libertés publiques et fondamentales. De façon générale, on peut dire que le contexte politique marqué par une transition co-pilotée par trois composantes différentes et l’implication massive de la communauté internationale, a créé un climat moins restrictif et plus favorable à la liberté d’expression. Cependant, la presse resta encore pendant cette période liée aux grandes personnalités politiques. Elle se caractérisa par une bipolarisation entre une presse pro Kabila et celle pro Bemba. Mais, selon les organisations de défense des droits de la presse et des journalistes comme Jed (Journalistes en danger), Omac (Organisation des médias d’Afrique centrale) et RSF (Reporters sans frontières), le travail des journalistes et leurs personnes n’étaient pas encore totalement sécurisés. Les assassinats, non  élucidés, des journalistes Franck Ngyke Kangundu et Bapuwa Mwamba, ont notamment illustré cette insécurité et démontrent que le délit d’investigation existe.

La situation de la presse congolaise aujourd’hui

Au Congo, comme ailleurs en Afrique, les attentes vis-à-vis de la presse sont énormes et nombreuses. Mais ces attentes ne peuvent être rencontrées que dans la mesure où les considérations économiques sont prises en compte, car le journal est une marchandise qui doit se conformer aux conditions de production et aux lois du marché. La majorité des journaux, nés en 1990, ont disparu, faute de capitaux. Depuis l’époque coloniale, il n’existe dans ce pays aucun système légal de subvention pour la presse. On peut se demander pourquoi la loi 002/96, qui prévoyait une aide directe et indirecte de l’Etat à la presse, n’a jamais été appliquée. Mais la cupidité de certains éditeurs de journaux n’est pas de nature à encourager cette aide comme l’illustre certaines pratiques : le président Laurent-Désiré Kabila, recevant un groupe d’éditeurs, avait promis d’assister la presse, à la suite de l’entretien qu’il avait eu avec eux. Cette promesse se concrétisa quand un chèque d’un million de dollars américains fut mis à la disposition de ce groupe d’éditeurs, pour la presse dans son ensemble. Mais ce geste fut interprété autrement par ces éditeurs qui se partagèrent ce montant (Kayembe, 2004, p. 45). La question du financement des journaux se pose avec acuité. La situation économique du pays et des entreprises est encore sinistrée. Les tirages des journaux, toutes tendances confondues, restent bas. Alors la question est celle de savoir comment fonctionne cette presse ? Comment et par qui est-elle financée ?

La Publicité politique l’emporte sur la publicité commerciale

Dans une étude antérieure (Mubangi, Gilbert, 1995) sur le financement de la presse congolaise, dont les résultats sont encore pertinents aujourd’hui, nous avons montré à travers les enquêtes que la faiblesse de l’économie et du secteur privé était un handicap pour l’émergence d’une presse libre au Congo. Le marché des annonces publicitaires est largement occupé par les entreprises publiques et les partis politiques. Jusqu’aux dernières élections, les journaux proches des partis politiques au pouvoir, bénéficiaient du soutien financier des entreprises publiques gérées par les composantes issues de la formule 1+4 (1 Président et 4 Vice-présidents). La presse écrite doit sa santé à l’équilibre entre les attentes des lecteurs et celles des annonceurs, la publicité procurant aux journaux une part importante de leurs recettes. Au Congo, la publicité est une ressource indispensable puisqu’elle représente le ¾ des recettes des journaux. En effet, les recettes publicitaires permettent de compenser l’inexistence de revenus de ventes des journaux. Le boom médiatique n’a pas apporté une santé financière pour les journaux si bien que publier un journal relève de l’exploit. En effet, l’absence de progrès techniques, le coût de production élevé, lié au manque des matières premières, les difficultés de distribution, ont eu des conséquences dévastatrices sur la gestion des entreprises de presse au Congo. Le manque de financement est à la base des dérives et dysfonctionnements dont souffre la presse congolaise aujourd’hui. Les conditions difficiles dans lesquelles travaillent les journalistes, sont nées de pratiques peu recommandables qui jettent un discrédit sur la profession toute entière.

Le coupage et la responsabilité des « coupeurs »

Comment parler de la presse congolaise sans rendre compte de la situation des journalistes, de leurs manières d’opérer, des contraintes liées à la profession, leurs positions sociale et statutaire. Dans les milieux des médias en RDC, « le coupage » est une pratique journalistique courante qui consiste à recevoir des présents en espèce ou en nature pour écrire avec complaisance un article, réaliser un reportage, geler ou falsifier une information. Frais de transport, cachets, enveloppes ou encore perdiem, le coupage ne connaît pas d’omerta en RDC. Les conséquences du coupage sur l’image de la profession journalistique sont désastreuses. En imposant aux journalistes vulnérables le fond et la forme des sujets traités, les « coupeurs », décideurs politiques et économiques portent un coup fatal à leur liberté et leur indépendance. Les journaux eux-mêmes participent à cette fragilisation de la presse car pour des raisons de « frais techniques », ils n’hésitent pas à rançonner les journalistes avant de publier leurs articles. Pour certains, cette pratique est une forme de motivation pour les journalistes précarisés et mal rémunérés. Pour d’autres, elle n’est rien d’autre qu’une dérive, une forme de corruption déguisée. La question est de savoir comment tordre le cou à cette pratique, comme le souhaiteraient le Ministère congolais de la communication, l’UNPC (Union Nationale de la Presse Congolaise) et la HAM (Haute Autorité des Médias) aussi longtemps que la situation matérielle et salariale des journalistes ne change pas.

Les rapports entre la politique et la presse

A propos du « quatrième pouvoir » conféré aux médias, Montesquieu disait qu’il est avant tout un gage de modération, de sécurité et de liberté. Mais le monde politique a horreur du « neutre » parce que, de son point de vue, tout est perçu à travers les rapports de force. En tout temps et en tout lieu, le politique a toujours cherché à contrôler la presse. Il s’agit ici de souligner le double aspect du pouvoir, celui que les médias peuvent détenir et celui que les hommes et femmes politiques peuvent exercer sur eux. Les rapports entre les politiciens et les journalistes posent la question de la liberté d’expression. Au Congo, cette liberté est doublement bâillonnée par la répression et le financement de la presse par les personnalités et partis politiques. La connivence entre les propriétaires de journaux et les politiciens, avec l’allégeance qui en résulte, donne lieu à une forme de pouvoir qui peut facilement contourner la démocratie classique en instaurant une démocratie d’opinion. On a bien vu, lors des dernières élections présidentielles, que les « personnes » ont été mises en avant au détriment des programmes. Par conséquent, au deuxième tour, les candidats n’ont pas senti la nécessité de battre campagne pour convaincre les citoyens, les médias de leurs tendances respectives ont fait le travail à leur place. Si l’on veut que la démocratie fonctionne au Congo, les dirigeants doivent se résoudre  à considérer la presse autrement qu’ils ne le font actuellement. La presse n’est pas l’ennemie de la démocratie, mais plutôt son garant, car un système démocratique sain a besoin de la liberté d’opinion, de pensée et d’expression de tous. Aujourd’hui, la liberté d’expression et d’information est inscrite dans plusieurs chartes et conventions internationales. Au Congo, la nouvelle constitution, dans ses articles 23 et 24, garantit le droit à la liberté d’expression et d’information à toute personne. Cependant, tous ces dispositifs de lois imposent une déontologie et une grande responsabilité aux journalistes et aux éditeurs,  car ils devront désormais répondre devant les tribunaux en cas de diffamation ou de calomnies.

La réception du message de presse dans le contexte d’une culture de l’oralité

En Occident, l’apparition de nouveaux outils d’information et de communication, a permis le développement de pratiques nouvelles dans la vie courante (éducation, santé, loisirs, transports, etc.). En Afrique, le problème est un peu plus complexe. Les populations, dans leur grande majorité, ne bénéficient pas des avantages des nouvelles technologies de l’information et de la communication. L’oralité demeure encore le moyen de communication le plus répandu et qui a ses techniques et son fonctionnement propres (épopées, contes, mythes, etc.). Dès lors, la nécessité d’une problématique qui prend en compte son rôle dans la transmission mais aussi dans la façon dont elle donne à digérer l’information aux populations à majorité analphabète s’impose. Comme le soulignait Wolton, l’information n’existe pas en soi ; elle est toujours liée à des valeurs, des intérêts et une représentation de la société qui varient dans le temps et dans l’espace (…). L’information est un des concepts les plus polysémiques qui soit. (…) Passer de l’information à la communication, c’est réintroduire la culture, entendue à la fois comme patrimoine au sens large, mais aussi, et peut être surtout, comme l’ensemble des moyens qui, de la langue à la mémoire, aux modes de vie, de consommation, aux valeurs… permettant aux individus, de comprendre le monde dans lequel ils vivent et d’y agir (Wolton (2003) in Libération, 2 mars). En effet, envisager l’analyse de la presse du point de vue de la réception, c’est poser la question de la différence culturelle qui va au-delà des considérations techniques de l’information. Dans une Afrique où la crédibilité de la presse pose problème, les populations ont appris à résister à la désinformation et à la manipulation idéologiques en inventant des mécanismes d’interprétation propres.

Les parlementaires debout ou l’actualité aux cribles de la palabre africaine

Marshall McLuhan disait que la culture d’une société est entièrement déterminée par son système de communication, puisque ce dernier serait capable de modeler les pensées de l’individu. Les sociétés africaines sont caractérisées par une vision collective de la vie. A Kinshasa, autour des kiosques à journaux, on observe toujours des attroupements de gens qui ne peuvent pas s’acheter un journal. Pour leur permettre de s’informer, les vendeurs en étalent des pages entières sur les pavés. A d’autres endroits de la ville, des journaux sont suspendus sur des échelles aménagées à cet effet où les gens viennent lire et surtout discuter. Ces endroits sont des agoras, de vrais « aréopages » où les prises de parole, les discussions et les commentaires sur l’actualité essentiellement politique font rage. Les foules attentives leur prêtent l’oreille et les discours sont tantôt applaudis tantôt conspués. Les personnes qui prennent ainsi la parole et décortiquent le contenu des journaux sont appelées les « parlementaires debout ». Lisent-ils réellement la presse ou se contentent-ils de gros titres à caractère politique ? On est là en présence d’un cas d’école, où la réception, la perception et la mémorisation sélective de l’information par la population sont conditionnées par la culture, l’identité et les conditions sociales des récepteurs conformément à leurs attentes.

Les « parlementaires debout », fossoyeurs ou adjuvants de la presse ?

Ainsi une population (en l’occurrence celle de Kinshasa) sans avoir un accès direct à l’information dans les journaux, peut se la réapproprier grâce au traitement qu’en font les « parlementaires debout ». Cependant, réduire le rôle de ces  derniers à une simple courroie de transmission serait ignorer la maturité politique de ce peuple et son goût pour la dérision qui permet de rendre acceptable une actualité souvent dure à vivre. Dans ce contexte précis, les « parlementaires débout » sont la démonstration de ce que les gens simples peuvent faire du message de la presse. Dans les conversations, des gens décodent et s’approprient l’information, ils construisent d’autres significations. En effet, en commentant les messages des journaux, les gens s’octroient les clés d’interprétation de l’actualité et des événements. Grâce à l’action des « parlementaires debout », le contenu des journaux se transforme en autant de récits qui vont se répandre dans la ville pour gagner les quartiers populaires et alimenter les conversations dans les nganda (bistrots), dans les fula fula (camions couverts servant de bus) et dans tous les lieux de socialisation (chez les couturiers, au marché, au quado (réparateurs des pneus), dans les garages en plein air, les stations service, etc.). Il s’y passe ce que Michel de Certeau appelle une créativité des gens ordinaires s’exprimant dans leurs pratiques de consommation et leurs usages des médias. En termes d’audience, le récit reçu des journaux, enrichi par le vécu populaire, transmis et retransmis, touche les couches populaires pour se transformer finalement en représentation sociale.

Dans ce processus relationnel et interactionnel, l’information devient une communication sociale, car, comme dirait Daniel Dayan, « la réception est le moment où les significations d’un texte sont constituées par les membres d’un public. Ce sont ces significations, et non pas le texte lui-même, et encore moins les intentions des auteurs, qui servent de points de départ aux chaînes causales menant aux différentes sortes d’effets attribués à la presse » (Dayan, 1992, p. 146-162). Pour étayer cette thèse, plusieurs sondages politiques effectués à Kinshasa ont démontré que l’influence des « parlementaires debout » a une incidence réelle sur l’opinion au détriment de la publicité politique médiatique. En contredisant les plans de communication politiques, l’action des « parlementaires debout » dérange. Des intimidations, des menaces et voire  des passages à tabac « téléguidés » ne sont pas rares de la part des hommes politiques qui n’apprécient guère ces pieds de nez à leurs stratégies (in Le Potentiel – un quotidien paraissant à Kinshasa – du 22 mars 2005). Economiquement, on pourrait penser que le travail des « parlementaires débout » est nuisible aux journaux. En réalité, l’onde des commentaires des journaux lancée quotidiennement par les « parlementaires debout » en alimentant les conversations pousse les gens à l’achat de journaux dans le souci de démêler le vrai du faux.

Du point de vue de la logique sociale, il ne s’agit nullement de privilégier la représentation subjective, mais de chercher à contextualiser l’information en l’ancrant dans un processus social et communicationnel dynamique. Pour prévenir les manipulations politiques et devant les incertitudes sur l’avenir, il n’est pas surprenant qu’une population qui en a tant vu, vécu et entendu, réactive sa mémoire. Dans les cités, les gens ont compris que si les médias ne dictent pas ce que l’on doit penser, ils gardent une grande capacité de mise sur agenda c’est-à-dire la prétention d’indiquer ce à quoi on doit penser. Là où les politiciens croyaient se servir de la presse pour manipuler l’opinion, l’action des « parlementaires debout » a construit un filtre et marque l’autonomie relative des lecteurs face au pouvoir des médias. En attendant que la presse donne les preuves de son indépendance, l’information qu’elle produit reste encore « naturellement » suspecte. Ainsi accompagner l’information de la mémoire collective, si récente soit elle, relève de la « vigilance citoyenne » et participe au questionnement critique de l’actualité. Il n’y a pas de réception passive de l’information, mais construction permanente de celle-ci. La meilleure façon de communiquer, c’est de méta-communiquer. Ceci rejoint ce que disait Watzlawick, « nous construisons le monde, alors que nous pensons le percevoir. Ce que nous appelons réalité (individuelle, sociale, idéologique) est une interprétation, construite par et à travers la communication » (Watzlawick, 1978).

Quelles perspectives d’avenir ?

Une chose est vraie : « l’appareil d’information dont une société se dote, ou ne se dote pas, constitue l’indicateur le plus sûr de son degré d’ouverture ou de tolérance » (Bougnoux, 1995, p. 12). Au moment où le Congo cherche par tous les moyens à consolider sa jeune démocratie, la presse doit se poser la question, non pas du nombre, mais de la qualité des journaux, de leur positionnement par rapport aux influences politiques et religieuses. La presse, dans ce pays, connaîtra un vrai changement le jour où les éditeurs et les hommes d’affaires remplaceront les politiciens à la tête des médias, en prenant le risque d’investir massivement dans la création d’entreprises de presse. Seuls, les regroupements techniques et rédactionnels pourront consolider l’indépendance de la presse. Au lieu d’avoir une centaine de torchons à gros titres, mal ficelés et au contenu nul, on aurait une dizaine de journaux nationaux dans lesquels on s’en tiendrait aux faits et où l’information ferait l’objet d’analyses et de commentaires critiques. L’élargissement du lectorat pourra entraîner la diversification de la presse. Les élections viennent d’avoir lieu, les enjeux sont clairs à présent. Dans le cadre des aides de l’Etat à la presse, l’argent du pays et des contribuables devrait désormais financer la profession tout entière sans discrimination. Il faut une vraie politique de soutien à la presse pour lui permettre de jouer pleinement son rôle dans la jeune démocratie. Les nouvelles institutions issues des élections devraient renforcer le pouvoir de la HAM en lui donnant les moyens de faire appliquer les lois et conventions collectives en tant qu’organe de « régulation ». Si jusqu’ici la presse congolaise a largement justifié d’être qualifiée de presse « alimentaire », le combat n’est pas seulement celui des moyens techniques, il est aussi celui de la déontologie journalistique. En effet, certaines pratiques qui trouvent leur origine dans la pauvreté, entachent la profession. La loi n° 96-002 du 22 juin 1996, fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse en République Démocratique du Congo n’est jamais respectée. Les dérives de la presse congolaise posent souvent des problèmes d’ordre moral aux organisations comme Jed et Reporters sans frontières, obligées de défendre des journalistes poursuivis pour des abus et délits de presse (diffamation, outrage, offense ou injure), sanctionnés par la loi. La profession elle-même devrait instaurer un système interne de contrôle. Les journaux et rédactions devraient se doter d’une charte de déontologie qui mettrait les journalistes dans l’obligation d’une double loyauté : vis-à-vis de la profession et vis-à-vis du journal. Cela aurait l’avantage de les obliger à clarifier en permanence leurs règles de conduite. En fait, ce que la population attend, en fin de compte, de la presse, c’est qu’elle évite des courts-circuits, qu’elle ait la patience de l’investigation, qu’elle soit en mesure de dénoncer les situations de blocage et qu’elle informe sur les vrais enjeux du changement attendu. Ce qui est en cause ce n’est pas son engagement politique car le contraire serait un non-lieu mais plutôt son manque de liberté par rapport au politique. Etant donné qu’il n’y a pas d’information universelle, la presse africaine devrait tenir compte des conditions particulières du contexte africain dans lesquelles l’information est construite t pour inventer une communication qui tienne compte du contexte, c’est-à-dire, une cohabitation entre culture africaine et exigences d’une information crédible. Dans cet ordre d’idées, ne pourrait-on pas chercher un ancrage socioculturel africain en imaginant une prise en compte par les journaux du travail des « parlementaires debout » ?  En d’autres termes, comment concevoir un contenu dans lequel la production journalistique intégrerait en retour, dans une boucle qui se ferme, les significations construites dans la cité ?

Références bibliographiques

Arnold, Marie-Madeleine (1985), « Aimer l’Afrique, hier et aujourd’hui », Belgian Economic Journal, n°35, p. 3-6.

Bougnoux, Daniel, (1995), La communication contre l’information, Paris : Hachette

Dayan, Daniel (1992), « Les pouvoirs de la réception », Le Débat, n°71, p. 146-162

du Roy, Albert (1992), Le serment de Théophraste. L’examen de conscience d’un journaliste, Paris : Flammarion

Frère, Marie-Soleil (dir.) (2005), « Afrique centrale – médias et conflits, vecteurs de guerre ou acteurs de paix », Paris : Institut Panos Paris & GRIP

Institut Panos Paris (2004), République démocratique du Congo : les médias sur la voie de la restructuration, Paris : Les cahiers des médias pour la paix n°2

Kayembe, Aimé (2004), Situation des médias en République Démocratique du Congo, Paris : Institut Panos Paris & DFID

Mubangi Bet’ukany, Gilbert (1995), « La presse zaïroise et les structures politiques pendant la période de transition  du 15 août au 7 décembre 1992 », mémoire de Maîtrise, UcL.

Tudesq, André-Jean (1995), Feuilles d’Afrique, étude de la presse de l’Afrique subsaharienne, Paris : Editions de la maison des sciences de l’homme d’Aquitaine

Wolton, Dominique (1997), Penser la communication, Paris : Flammarion

Auteur

Gilbert Mubangi Bet’ukany

Gilbert Mubangi Bet’ukany est Docteur en Sciences de l’Information et de la Communication. Attaché au Ministère belge de l’Intérieur à Bruxelles, il est aussi Professeur au Département de Communication de l’Université de Kinshasa en R.D. Congo. Intérêts et domaines de recherche : Communication des organisations (analyses des logiques d’émergence dans une perspective constructivo-socio-historique) ; Communication et Société (corrélation entre système culturel, identitaire et contexte social) ; Sociologie des médias (problématique de la réception).